Tribunale federale
Tribunal federal
2A.69/2004/LGE/elo
{T 0/2}
Arrêt du 9 février 2004
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Wurzburger, Président,
Müller et Merkli.
Greffier: M. Langone.
Parties
X.________, recourant,
représenté par Me Georges Reymond.
contre
Service de la population du canton de Vaud,
avenue Beaulieu 19, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.
Objet
révocation du permis d'établissement,
recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 18 décembre 2003.
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:
1.
1.1 Alors qu'il était sous le coup d'une interdiction d'entrée en Suisse, X.________, ressortissant turc, né le 21 avril 1966, a épousé en Turquie le 20 décembre 1993 une citoyenne suisse, Y.________, née en 1943. Il est entré en Suisse le 21 mai 1994 et a obtenu une autorisation de séjour pour vivre auprès de sa femme.
Les époux se sont séparés en automne 1996. Les autorités de police des étrangers du canton de Vaud ont par la suite refusé, le 19 février 1999, de renouveler l'autorisation de séjour de X.________. Celui-ci a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif du canton de Vaud. Le couple X.Y.________ a repris la vie commune en août 1999 et l'épouse a retiré l'action en divorce.
Le 12 novembre 1999, X.________ a obtenu une autorisation d'établissement. Il a dès lors retiré le recours qu'il avait interjeté devant le Tribunal administratif.
Les époux ont divorcé selon jugement des 28 août/20 septembre 2001.
1.2 Par décision du 12 mai 2003, le Service de la population du canton de Vaud a révoqué l'autorisation d'établissement de X.________, au motif que celui-ci avait caché aux autorités de police des étrangers le fait qu'il avait noué en Turquie, peu après son mariage, une relation forte et durable avec une compatriote, A.________, avec laquelle il avait eu deux enfants, B.________, né en 1995 et C.________, née en 1996. En outre, l'autorité a refusé de délivrer une autorisation d'entrée en Suisse et une autorisation de séjour en faveur de son amie et de ses enfants.
Statuant sur recours le 18 décembre 2003, le Tribunal administratif du canton de Vaud a confirmé cette décision.
1.3 Dans une même écriture, X.________ a formé devant le Tribunal fédéral un recours de droit administratif et un recours de droit public à l'encontre de l'arrêt du 18 décembre 2003, dont il requiert principalement l'annulation.
2.
Le présent pourvoi est recevable en tant que recours de droit administratif en vertu de l'art. 101 lettre d OJ en relation avec l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ. Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 129 II 183 consdi. 3.4 p. 188; 128 II 56 consid. 2b p. 60).
Dès lors, il n'y a pas lieu d'examiner la recevabilité du recours de droit public, qui a un caractère subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ).
3.
3.1 D'après l'art. 7 al. 1 loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour. Après un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit à une autorisation d'établissement, sous réserve notamment d'un abus de droit. Il y a abus de droit lorsque le conjoint étranger invoque un mariage n'existant plus que formellement dans le seul but d'obtenir une autorisation de police des étrangers, car cet objectif n'est pas protégé par l'art. 7 al. 1 LSEE (ATF 121 II 97 consid. 4a; voir aussi ATF 128 II 145 consid. 2.2; 127 II 49 consid. 5a). A l'échéance du délai de cinq ans, il n'a plus besoin de se référer au mariage. Il est donc déterminant de savoir si l'abus de droit existait déjà avant l'écoulement de ce délai (ATF 121 II 97 consid. 4c).
Par ailleurs, l'art. 9 al. 4 lettre a LSEE dispose que l'autorisation d'établissement est révoquée lorsque l'étranger l'a obtenue, en faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits essentiels. Lorsque ces conditions sont remplies, l'autorité n'est toutefois pas tenue de prononcer la révocation; elle doit examiner les circonstances du cas particulier et dispose d'une certaine marge d'appréciation (ATF 112 Ib 473 consid. 4). Au surplus, une simple négligence ne suffit pas; il faut que le requérant ait intentionnellement donné de fausses indications ou dissimulé des faits essentiels dans l'intention d'obtenir l'autorisation d'établissement (ATF 112 Ib 473 consid. 3 p. 475). Ne sont pas seulement essentiels les faits au sujet desquels l'autorité administrative pose expressément des questions au requérant mais aussi ceux dont il doit savoir qu'ils sont déterminants pour l'octroi de l'autorisation. L'autorité doit dès lors examiner si, en connaissance de cause, elle aurait pris une autre décision au moment de la délivrance de l'autorisation.
3.2 En l'occurrence, le Tribunal administratif retient en bref que, peu de temps après son mariage avec une Suissesse de vingt-trois ans son aînée, le recourant a commencé à entretenir une relation extra-conjugale avec une compatriote avec laquelle il a eu deux enfants adultérins nés en 1995 et 1996 en Turquie et qu'il a intentionnellement dissimulé ces faits essentiels aux autorités compétentes de police des étrangers, afin de pouvoir obtenir une autorisation d'établissement.
Sur la base de ces faits constatés dans la décision attaquée - qui lient le Tribunal fédéral dans la mesure où ils n'apparaissent pas manifestement erronés ni établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ) -, la juridiction cantonale pouvait admettre que les conditions de l'art. 9 al. 4 lettre a LSEE étaient réalisées. En effet, le recourant savait qu'il ne pouvait prétendre à l'octroi d'une autorisation d'établissement qu'en raison de son mariage avec une citoyenne suisse et que ce droit pouvait être compromis par l'existence d'une relation extra-conjugale parallèle et la naissance de deux enfants hors mariage. Dès lors, si elles avaient appris à temps l'existence de ces faits - déterminants pour l'examen de la situation du recourant du point de vue de la police des étrangers - les autorités compétentes auraient refusé de lui octroyer une autorisation d'établissement. Par ailleurs, force est de constater qu'au moment où les époux se sont séparés en automne 1996, le recourant entretenait déjà depuis quelque trois ans une relation stable avec son amie et qu'il ne pouvait déjà plus se référer à son mariage - célébré en décembre 1993 - pour obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour sans commettre un abus de droit manifeste. Après une longue séparation, les époux ont certes repris la vie commune en août 1999. Mais le recourant s'est remis en ménage avec son épouse dans le seul but d'obtenir une autorisation d'établissement. Preuve en est que l'intéressé n'a pas rompu avec son amie qu'il a d'ailleurs l'intention d'épouser et que les époux X.Y.________ se sont séparés et ont divorcé peu de temps après que le recourant a obtenu l'autorisation d'établissement. Autrement dit, la communauté conjugale était irrémédiablement vidée de sa substance bien avant l'échéance du délai de cinq ans de l'art. 7 al. 1 LSEE, qui expirait le 20 décembre 1998. A cet égard, le Tribunal administratif a retenu en fait que les dispositions prises par le recourant l'avaient été dans le but de créer une apparence de communauté conjugale à des fins de police des étrangers.
Comme l'abus de droit existait donc avant l'écoulement du délai de cinq ans, c'est à juste titre que le Tribunal administratif a confirmé la révocation de l'autorisation d'établissement du recourant. Point n'est donc besoin de trancher encore la question de savoir si le recourant avait ou non conclu un mariage fictif au sens de l'art. 7 al. 2 LSEE.
4.
Vu ce qui précède, le présent pourvoi doit être rejeté en tant que recours de droit administratif selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ, sans qu'il soit nécessaire d'ouvrir un échange d'écritures. Comme les conclusions du recours apparaissaient d'emblée vouées à l'échec, la demande d'assistance judiciaire (art. 152 OJ) doit être rejetée. Succombant, le recourant doit supporter une émolument judiciaire (art. 156 al. 1 OJ).
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recou- rant, au Service de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'à l'Office fédéral de l'immigration, de l'intégration et de l'émigration.
Lausanne, le 9 février 2004
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: