Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
I 4/03
Arrêt du 1er mars 2004
IVe Chambre
Composition
MM. et Mme les Juges Ferrari, Président, Widmer et Ursprung. Greffière : Mme Berset
Parties
G.________, recourant, représenté par Me Ivan Zender, avocat, avenue Léopold-Robert 88, 2301 La Chaux-de-Fonds,
contre
Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion, intimé
Instance précédente
Tribunal cantonal des assurances, Sion
(Jugement du 2 décembre 2002)
Faits:
A.
G.________, né en 1941, s'est luxé à de nombreuses reprises l'épaule gauche à la suite de plusieurs accidents, dont il a été victime entre 1983 et 1998. Il a été mis au bénéfice d'une rente d'invalidité de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) de 33,33 % depuis le 1er octobre 1993, portée à 40 % depuis le 1er janvier 2001 (décisions des 28 décembre 1993 et 13 juin 2001).
Le 12 novembre 1992, G.________ a présenté une demande de prestations auprès de l'Office cantonal AI du Valais (ci-après: l'OAI).
Par décision du 26 octobre 1993, l'OAI l'a mis au bénéfice d'une rente entière d'invalidité depuis le 1er mai 1993, qu'il a supprimée avec effet au 28 février 1995, au motif que le taux d'invalidité du prénommé n'atteignait que 32 % (décision du 13 janvier 1995).
Suite à une demande de révision qui lui a été présentée en 1998, l'OAI a, une nouvelle fois, octroyé à G.________ une rente entière d'invalidité depuis le 1er septembre 1997 (décision du 8 juin 1999).
Dans le cadre d'une révision de la rente, entreprise de sa propre initiative, l'OAI a soumis à l'assuré le 13 août 2001 un projet de décision selon lequel il envisageait de réduire son droit à un quart de rente, compte tenu d'une incapacité de gain de 40 %, identique à celle fixée par l'assurance-accidents. Suite aux objections de G.________, l'OAI a signifié à l'intéressé, le 21 janvier 2002, un second projet de décision, annulant et remplaçant celui du 13 août 2001, l'avisant qu'il allait supprimer la rente entière d'invalidité, au motif qu'elle avait jadis été allouée à tort, le taux d'invalidité résultant de la comparaison des revenus (64'625 fr. et 43'586 fr.) n'étant que de 32,74 %. Après avoir requis une expertise du docteur M.________, spécialiste en chirurgie orthopédique (rapport du 3 mai 2002), l'OAI a confirmé la teneur du projet de révision du 21 janvier 2002 et supprimé, par voie de reconsidération, la rente à partir du 1er juillet 2002 (décision du 23 mai 2002).
B.
G.________ a formé recours contre cette décision devant le Tribunal cantonal des assurances du Valais qui l'a débouté par jugement du 2 décembre 2002.
C.
G.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation, en concluant, sous suite de frais et dépens, principalement à l'allocation d'une rente entière d'invalidité au-delà du 30 juin 2002, subsidiairement à l'octroi d'une demi-rente d'invalidité, très subsidiairement, à l'octroi d'un quart de rente d'invalidité. Il allègue, notamment, que les conditions d'une révision/reconsidération de la décision du 8 juin 1999 n'étaient pas réunies.
L'OAI conclut au rejet du recours à l'appui d'observations circonstanciées. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
Est litigieuse la suppression du droit du recourant à une rente d'invalidité. Singulièrement il y a lieu de déterminer si l'octroi au recourant d'une rente entière d'invalidité, en 1999 (avec effet rétroactif au 1er septembre 1997), était manifestement erroné, comme le soutient l'intimé et comme l'a confirmé l'autorité inférieure de recours.
2.
D'après la jurisprudence, la législation applicable en cas de changement de règles de droit reste celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques (ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 166 consid. 4b), les faits sur lesquels le Tribunal fédéral des assurances peut être amené à se prononcer dans le cadre d'une procédure de recours de droit administratif étant par ailleurs ceux qui se sont produits jusqu'au moment de la décision administrative litigieuse (ATF 121 V 366 consid. 1b). Partant, la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA), du 6 octobre 2000, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2003 et qui a entraîné des modifications des dispositions dans le domaine de l'AI notamment, n'est pas applicable en l'espèce. Ratione temporis, les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4e révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3852), ne sont pas non plus applicables.
3.
C'est en vain que le recourant fait en premier lieu grief à l'intimé d'avoir remplacé le projet initial de décision du 13 août 2001 par un second projet, du 21 janvier 2002 en se prévalant d'une violation des règles de la bonne foi. Ce moyen, déjà soulevé en première instance, a été écarté à l'appui de motifs pertinents par les premiers juges. Il suffit à cet égard de renvoyer au consid. 4 c) du jugement entrepris (ainsi qu'aux développements de l'intimé dans sa réponse au recours; voir également arrêt O. du 16 décembre 2003, consid. 3.1, I 524/03 et les références).
4.
4.1 Pour juger s'il est admissible de reconsidérer une décision pour le motif qu'elle est sans nul doute erronée, il faut se fonder sur la situation juridique existant au moment où cette décision a été rendue, compte tenu de la pratique en vigueur à l'époque (ATF 119 V 479 consid. 1b/cc et les références). Par le biais de la reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit, de même qu'une constatation erronée résultant de l'appréciation des faits (ATF 117 V 17 consid. 2c, 115 V 314 consid. 4a/cc). Une décision est sans nul doute erronée non seulement lorsqu'elle a été prise sur la base de règles de droit non correctes ou inappropriées, mais aussi lorsque des dispositions importantes n'ont pas été appliquées ou l'ont été de manière inappropriée (DTA 1996/97 n° 28 p. 158 consid. 3c).
4.2 La décision de l'office intimé du 8 juin 1999, fixant le taux d'invalidité du recourant à 100 %, prend essentiellement appui sur les données médicales communiquées par la CNA à la suite des luxations de l'épaule gauche survenues en avril 1997, mai et août 1998 et fait fi de l'obligation de procéder à la comparaison des revenus prévue à l'art. 28 al 2 LAI (ancienne teneur). Si l'office intimé avait procédé correctement, il aurait été amené à constater que l'assuré a travaillé de février à août 1996 pour la maison L.________(réalisant un salaire de 31'309 fr.) et que, du 1er septembre 1996 au 31 mars 1998, il a oeuvré, à mi-temps, en qualité de gérant du Pressing X.________ au centre commercial Y.________ pour un salaire mensuel de 3'806 fr. par mois jusqu'en juillet 1997 et de 5'000 fr. par la suite, selon les informations données par l'employeur à la CNA en janvier 2001. Il en aurait conclu que le recourant était apte à exercer de telles activités, sous réserve des (divers) épisodes de luxation de son épaule gauche. Compte tenu de ce qui précède et nonobstant les périodes d'incapacité de travail subies par l'assuré au cours de l'année qui a précédé le début du droit à la rente (septembre 1997) et celles qui ont suivi, on doit admettre que le recourant ne présentait de toute évidence pas le taux d'invalidité de 100 % fixé par l'office intimé dans sa décision du 8 juin 1999.
Plus spécifiquement, les éléments au dossier réunis par l'office ne permettaient pas de fixer à 100 % le degré d'invalidité du recourant, la capacité de travail dans une activité adaptée exigible n'ayant tout simplement pas été examinée; il s'ensuit que la décision du 8 juin 1999 est manifestement erronée.
5.
Dans un autre moyen, le recourant met en doute la valeur probante des conclusions de l'expertise du docteur M.________ qui se prononce précisément sur cette question. Il lui oppose, notamment, le rapport de la Clinique romande de réadaptation du 1er octobre 2000 faisant état d'une incapacité de travail totale de sa part. Il considère que l'expertise du docteur M.________ ne représente qu'une nouvelle appréciation de la situation médicale qui ne s'est pas améliorée.
Ce grief n'est pas pertinent. Ainsi que le fait remarquer l'office intimé, la mise en oeuvre d'une expertise a été motivée par la divergence des appréciations médicales versées au dossier. Il ressort, notamment, du rapport du 26 février 2002 du docteur T.________ que les renseignements médicaux étaient insuffisants et contradictoires en ce qui concerne la capacité de travail. En particulier, les médecins qui faisaient état d'une incapacité totale de travail (comme ceux de la Clinique romande de réadaptation) ne précisaient pas si cette évaluation concerne l'activité habituelle du recourant ou une autre activité, même adaptée, de sorte que l'on ne saurait rien inférer de telles appréciations. De toute manière, le mandataire du recourant - qui a été dûment informé de la mise en oeuvre de l'expertise et du nom de l'expert - n'a formulé aucune objection à cette désignation. De surcroît, il ne produit aucun nouvel avis médical susceptible de faire douter de la crédibilité des conclusions du docteur M.________.
Il ressort de l'expertise - à laquelle il convient d'attacher pleine valeur probante au sens de l'arrêt ATF 125 V 352 ss consid. 3 - que le recourant présente un conflit sous-acromial gauche avec séquelles d'épaule gelée et de lésion de la coiffe des rotateurs après multiples interventions chirurgicales, un status post-fracture de l'index gauche avec ankylose partielle et une gonarthrose interne droite discrète. L'incapacité de travail de l'assuré est de 100 % dans son ancienne activité de conducteur de clark et dans les autres métiers manuels qu'il a exercés auparavant, cela depuis 1993. En revanche, elle est totale, sans diminution de rendement, dans une activité adaptée excluant les travaux lourds et répétitifs au niveau du membre supérieur gauche, les gestes au-dessus de l'horizontale, et les tâches manuelles très fines, qui nécessitent l'usage simultané de deux mains, de même que les travaux lourds sur des chantiers ou nécessitant de long déplacements quotidiens.
6.
Il reste à déterminer le taux d'invalidité présenté par le recourant.
6.1 Selon l'art. 28 al. 2 LAI (en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002), pour l'évaluation de l'invalidité, le revenu du travail que l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide.
Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus, susceptibles d'influencer le droit à la rente et survenues jusqu'au moment où la décision est rendue, doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et 128 V 174). En l'espèce, l'office intimé ayant supprimé la rente avec effet au 30 juin 2002, il convient d'examiner si le recourant a droit à une rente d'invalidité pour la période subséquente et de se fonder à cet effet sur la situation économique valable en 2002 pour effectuer la comparaison des revenus.
6.2 Pour ce qui est du revenu sans invalidité, l'administration a retenu le montant annuel de 64'635 fr. (pratiquement identique à celui fixé par la CNA). Ce montant, non contesté, correspond au salaire que le recourant aurait réalisé s'il avait continué à travailler pour A.________ en 2001. Après adaptation à l'évolution des salaires de 2001 à 2002 de +.1,8 % (La Vie économique 7/2003, Données économiques actuelles, p. 91, tableau B.10.02), le revenu sans invalidité atteint 65'798 fr.
6.3 Quant au revenu d'invalide, compte tenu de l'activité légère de substitution que pourrait exercer le recourant, le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives dans le secteur privé, soit en 2000, 4'437 fr. par mois, part au 13ème salaire comprise (Enquête suisse sur la structure des salaires 2000, p 31, TA1; niveau de qualification 4). Comme les salaires bruts standardisés tiennent compte d'un horaire de travail de quarante heures, soit une durée hebdomadaire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises en 2000 (41,8 heures; La Vie économique, 7/2003, p. 90, tableau B 9.2), ce montant doit être porté à 4'636 fr. (4'437 fr. x 41,8 : 40), ce qui donne un salaire annuel de 55'632 fr. Après adaptation à l'évolution des salaires de + 2,5 % en 2001 et + 1, 8 % en 2002 (La Vie économique, op. cit. tableau B.10.02), le revenu d'invalide atteint 4'837 fr. ou 58'044 fr. Après abattement de 25 % - le maximum admissible selon la jurisprudence (ATF 126 V 79 s consid. 5b/aa-cc; VSI 2002 p. 70 s consid. 4b) - pour tenir compte de certains facteurs susceptibles d'influencer le revenu d'invalidité, celui-ci atteint 3'628 fr. par mois ou 43'536 fr. par an.
6.4 La comparaison du revenu sans invalidité de 65'798 fr. et du revenu d'invalide de 43'536 fr. conduit à un taux d'invalidité de 33,83 % qu'il convient d'arrondir à 34 % (arrêt R. du 19 décembre 2003, destiné à la publication, U 27/02), insuffisant pour ouvrir le droit à une rente (art. 28 al. 1 LAI dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002).
6.5 Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le fait que la CNA a arrondi à 40 % le taux de 38,88 % auquel elle est parvenue n'a aucune incidence sur la détermination du taux d'invalidité par l'assurance-invalidité (cf. consid. 4d) du jugement entrepris et l'arrêt R. dès le 11 juin 1999, précité).
7.
Sur le vu de ce qui précède, on doit admettre que disposant d'une capacité de travail entière dans une activité adaptée, le recourant ne présentait pas et ne présente toujours pas un taux d'invalidité ouvrant droit à une rente. Il s'ensuit que la décision du 8 juin 1999 mettant le recourant au bénéfice d'une rente entière d'invalidité et qui n'avait pas fait l'objet d'un jugement d'une autorité judiciaire sur le plan matériel, était manifestement erronée et que sa rectification revêtait une importance notable, compte tenu des montants en jeu. Les conditions d'une reconsidération étaient donc réunies.
C'est dès lors à juste titre que les premiers juges ont confirmé la décision du 23 mai 2002.
Il s'ensuit que le recours est mal fondé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances du canton du Valais et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 1er mars 2004
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IVe Chambre: La Greffière: