Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
2P.335/2004
2A.751/2004 /dxc
Arrêt du 5 janvier 2005
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Müller et Yersin.
Greffier: M. Addy.
Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Sébastien Piu, avocat,
contre
Service de la population du canton de Vaud, avenue Beaulieu 19, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne
Office fédéral des migrations, Quellenweg 6,
3003 Berne.
Objet
autorisation de séjour,
recours de droit administratif et recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 23 novembre 2004.
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:
1.
Après un premier séjour en 1991 où il avait déposé sans succès une demande d'asile sous une fausse identité, X.________, ressortissant marocain né en 1964, est entré en Suisse pour la seconde fois le 20 février 1992. Le 19 février de l'année suivante, il s'est marié avec une Suissesse qu'il avait rencontrée lors de son premier séjour. De cette union sont issus deux enfants, Y.________ et Z.________, nés respectivement le 21 janvier 1993 et le 5 mars 1996. Après s'être séparés le 30 janvier 1996, les époux ont divorcé le 30 juin 1997.
2.
Le 24 mars 1998, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de X.________. Ce dernier a recouru contre cette décision. Sur proposition du Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif), le Service de la population est revenu sur sa décision en cours de procédure et a prolongé l'autorisation de séjour de l'intéressé, en vue de reconsidérer sa situation après une année, notamment sous l'angle de la relation avec ses enfants; le recours est de ce fait devenu sans objet et la cause a été rayée du rôle.
Les 24 mai 2001, le Service de la population a derechef accepté, à titre exceptionnel, de prolonger l'autorisation de séjour de X.________. Celui-ci a été rendu attentif au fait qu'il pouvait être expulsé s'il tombait de manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique (lettre du 5 octobre 2001 du Service de la population en réponse à une demande de permis d'établissement).
3.
Par décision du 11 mars 2003, notamment fondée sur un rapport de police du 29 janvier 2003, le Service de la population a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de X.________, au motif que l'intéressé n'exerçait plus son droit de visite sur ses enfants depuis le mois de septembre 2002, qu'il ne leur versait pas de pension alimentaire, que ses enfants ne demandaient pas de ses nouvelles, qu'il n'avait pratiquement jamais travaillé depuis qu'il était en Suisse, qu'il avait recouru aux prestations de l'Aide sociale vaudoise pour un montant de 164'625 fr. depuis le 1er juillet 1996 et, enfin, qu'il était connu défavorablement des services de police (condamnations pour vols, ivresse et scandale sur la voie publique, violences diverses et infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants).
Par arrêt du 23 novembre 2004, le Tribunal administratif a rejeté le recours formé par X.________ contre la décision du Service de la population lui refusant une autorisation de séjour.
4.
Agissant simultanément par la voie du recours de droit administratif (cause 2A.751/2004) et par la voie du recours de droit public (cause 2P.335/2004), X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt précité du Tribunal administratif, sous suite de frais et dépens. A titre préalable, il demande que l'effet suspensif soit accordé à ses recours. Il sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciaire.
5.
Les causes 2A.751/2004 et 2P.335/2004 sont jointes (cf. art. 40 OJ et 24 PCF).
6.
6.1 Aux termes de l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours de droit administratif n'est pas recevable contre l'octroi ou le refus d'autorisations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit.
6.1.1 Contrairement à ce que soutient le recourant, il ne peut déduire aucun droit à une autorisation d'établissement de l'art. 11 du règlement d'exécution du 1er mars 1949 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (RSEE; RS 142.201). Il lui échappe en effet que cette disposition ne confère pas un droit, mais ne fait qu'exprimer une pratique selon laquelle, après un séjour régulier et ininterrompu de dix ans en Suisse, une autorisation d'établissement est généralement accordée à un étranger (cf. Peter Uebersax, Einreise und Anwesenheit, in: Ausländerrecht, éd. par Peter Uebersax/Peter Münch/Thomas Geiser/Martin Arnold, Bâle 2002, p. 133 ss, n. 5.73, p. 155). Le Service de la population n'a, du reste, à aucun moment laissé entendre au recourant qu'il disposait d'un véritable droit à une autorisation de séjour après un séjour de dix ans: il lui a en effet seulement indiqué qu'il pourrait "vraisemblablement prétendre au permis C à partir du 12 février 2003", tout en le rendant attentif à la teneur de l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE (cf. lettre du 5 octobre 2001). C'est donc de manière totalement infondée que le recourant invoque le droit à la protection de la bonne foi.
6.1.2 Le recourant invoque également, en relation avec ses enfants, le droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH. Il est vrai qu'un étranger peut, selon les circonstances, se prévaloir de cette disposition conventionnelle pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille et obtenir ainsi une autorisation de séjour, pour autant, toutefois, que la relation avec la personne de sa famille ayant le droit de s'établir en Suisse soit étroite et effective (cf. ATF 129 II 193 consid. 5.3.1 p. 211; 124 II 361 consid. 1b p. 364).
En l'espèce, il ressort des faits constatés par les premiers juges que, selon une décision de la justice de paix, le recourant ne peut voir ses enfants, au mieux, que chaque quinzaine pendant une durée de deux heures dans les locaux d'une association spécialisée et que, de surcroît, il n'a pas montré beaucoup d'intérêt pour exercer ce droit de visite: il n'a plus revu ses enfants de septembre 2002 à septembre 2003, il ne s'est pas présenté, le 6 février 2003, à une audience pourtant destinée à régler les modalités de son droit de visite, et son ex- épouse a déclaré qu'elle devait le prier pour qu'il exerce ce droit. Enfin, il est établi qu'il ne verse pas de pension alimentaire en faveur de ses enfants.
Certes, le recourant allègue que, "depuis la décision prise par la justice de Paix du Cercle de Lausanne en date du 6 février 2003, (il) a tenté par tous les moyens d'exercer son droit aux relations personnelles sur ses enfants". Il apparaît toutefois que ses démarches sont surtout consécutives à la décision du 11 mars 2003 par laquelle le Service de la population a refusé de lui renouveler son autorisation de séjour, puisque c'est seulement le 7 avril 2003 qu'il s'est enquis, par l'intermédiaire de son avocat, des possibilités concrètes d'exercer son droit de visite; on ne saurait donc faire grief aux premiers juges d'avoir considéré que sa conduite était davantage motivée par les besoins de la présente cause que par le soudain désir d'établir des liens effectifs avec ses enfants. Par ailleurs, quelles qu'en sont les raisons, force est d'admettre que le droit de visite de l'intéressé est très limité et qu'il n'a pas été exercé pendant une année entière dès le mois de septembre 2002. Quant au fait, également allégué par le recourant, que la justice de paix lui aurait reconnu un droit de visite plus étendu selon une décision du 23 novembre 2004, c'est une circonstance nouvelle dont la Cour de céans ne doit pas tenir compte, car on ne saurait reprocher au Tribunal administratif d'avoir mal constaté les faits, au sens de l'art. 105 al. 2 OJ, lorsque ceux-ci ont changé après le prononcé de la décision attaquée (cf. ATF 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150 et les références).
6.1.3 Dans ces conditions, il est pour le moins douteux que l'intéressé entretienne des liens suffisamment étroits et effectifs avec ses enfants pour exciper le droit à une autorisation de séjour de l'art. 8 par. 1 CEDH. La question peut néanmoins rester indécise. En effet, serait-il recevable, le recours de droit administratif n'en devrait pas moins être rejeté, car l'ingérence constituée par l'éloignement de l'intéressé s'avère conforme au droit.
6.2 Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale est en effet possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH, lorsqu'elle est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. La question de savoir si, dans un cas d'espèce, les autorités de police des étrangers sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts privés et publics en présence (ATF 125 II 633 consid. 1e; 122 II 1 consid. 2; 120 Ib 1 consid. 3c, 22 consid. 4a).
6.2.1 Selon les faits constatés par le Tribunal administratif, le recourant n'a pas de travail et il émarge depuis plusieurs années à l'assistance sociale, le montant de l'aide versée ascendant au 30 septembre 2002 à 164'625 fr. En outre, ses perspectives de gain sont aléatoires, car il est sans formation et il n'a jamais exercé de manière régulière une activité lucrative. Il réalise donc le motif d'expulsion prévu à l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE. Le fait qu'il ait déposé une demande de prestations d'invalidité n'y change rien: à supposer qu'elle soit seulement fondée et qu'elle donne lieu au versement d'une rente avec effet rétroactif, une telle demande n'est en effet pas de nature à éponger la dette du recourant à l'égard de l'aide sociale; bien plus, il est même douteux que l'éventuelle rente d'invalidité qui pourrait, le cas échéant, lui être servie, soit seulement propre à lui garantir une autonomie financière le mettant à l'abri de l'assistance publique, vu ses lacunes de cotisations (il n'est venu en Suisse qu'à l'âge de 28 ans) et le montant selon toute vraisemblance faible des cotisations qui ont été versées pendant sa présence en Suisse (il n'a jamais exercé d'activité lucrative de manière stable). Pour le surplus, l'instruction de la demande de prestations d'invalidité ne nécessite pas la présence de l'intéressé en Suisse, comme l'ont pertinemment relevé les premiers juges.
6.2.2 Par ailleurs, les mauvais renseignements fournis par la police au sujet du recourant permettent de conclurent que ce dernier ne veut pas ou n'est pas capable de s'adapter à l'ordre établi au sens de l'art. 10 al. 1 lettre b LSEE. Il ne remet du reste pas en cause les reproches qui lui sont adressés à ce titre.
6.2.3 Compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas, l'intérêt privé du recourant à pouvoir demeurer en Suisse ne saurait donc l'emporter sur l'intérêt public à son renvoi: ayant passé de nombreuses années dans son pays d'origine, il s'est montré incapable de s'intégrer en Suisse et tombe aujourd'hui sous le coup de deux motifs d'expulsion malgré les sursis qui lui ont été accordés pour améliorer et stabiliser sa situation. Il n'allègue d'ailleurs pas avoir tissé de liens particulièrement forts avec la Suisse, hormis ses relations avec ses enfants dont on a cependant vu qu'elles n'étaient en réalité guère intenses, du moins pas au point de justifier le renouvellement de son autorisation de séjour. A cet égard, il sied de souligner que le recourant n'est pas expulsé et qu'il lui sera dès lors loisible de visiter ses enfants dans le cadre de séjours touristiques, les modalités du droit de visite pouvant être aménagées quant à sa fréquence et à sa durée.
6.3 En tant qu'il est recevable, le recours de droit administratif est donc manifestement mal fondé; il doit ainsi être rejeté selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner un échange d'écritures.
7.
Quant au recours de droit public formé par le recourant, il est irrecevable, vu la subsidiarité de ce moyen de droit par rapport au recours de droit administratif (cf. art. 84 al. 2 OJ). Le recourant n'invoque au surplus pas d'autres moyens que ceux qui ont été examinés dans le cadre du recours de droit administratif.
8.
Avec ce prononcé, la requête d'effet suspensif devient sans objet. Les conclusions du recours apparaissant d'emblée vouées à l'échec, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée ( art. 152 al. 1 et 2 OJ ). Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires ( art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ ).
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Les causes 2A.751/2004 et 2P.335/2004 sont jointes.
2.
Le recours de droit administratif est rejeté dans la mesure où il est recevable.
3.
Le recours de droit public est irrecevable.
4.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
5.
Un émolument judiciaire de 200 fr. est mis à la charge du recourant.
6.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Service de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 5 janvier 2005
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: