Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
P 40/03
Arrêt du 9 février 2005
Ire Chambre
Composition
MM. et Mmes les Juges Borella, Président, Leuzinger, Ferrari, Widmer et Ursprung. Greffier : M. Wagner
Parties
Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du Lac 37, 1815 Clarens, recourante,
contre
T._________, intimé
Instance précédente
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
(Jugement du 12 mars 2003)
Faits:
A.
T._________, né le 21 mars 1956, est au bénéfice d'une rente d'invalidité et de prestations complémentaires. Le 9 juin 2001, il a épousé S.________, née le 20 mars 1956. Suite à la diminution de sa rente d'invalidité, la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS a fixé à 748 fr. la prestation complémentaire mensuelle due à partir du 1er juillet 2001.
S.________ est arrivée en Suisse le 26 octobre 2001. Le 20 novembre 2001, la caisse l'a invitée à fournir des renseignements sur sa formation professionnelle et sur sa situation personnelle et financière. Le 25 novembre 2001, les époux T.________ ont répondu que S.________ était infirmière diplômée de formation, qu'elle n'avait entrepris aucune recherche de travail vu qu'elle ne parlait pas le français, et qu'elle n'avait actuellement aucune possibilité de gain.
Dans une communication du 14 décembre 2001, la caisse a avisé T._________ que son épouse pourrait réaliser dans l'exercice d'une activité lucrative non qualifiée (heures de ménage par exemple) un revenu de 1'500 fr par mois ou de 18'000 fr. par année et qu'elle en tiendrait compte dans le calcul de la prestation complémentaire, dont la réduction n'interviendrait qu'après un préavis de six mois, soit à partir du 1er juillet 2002.
Dès le 1er janvier 2002, la caisse a versé à T._________ une prestation complémentaire mensuelle de 748 fr., tout en retenant dans le calcul du revenu déterminant un revenu hypothétique de l'épouse de 10'695 fr. par année. Par décision du 10 juin 2002, elle a réduit la prestation complémentaire à 343 fr. par mois à partir du 1er juillet 2002, compte tenu dans le calcul du revenu déterminant d'un revenu hypothétique de l'épouse de 18'000 fr.
B.
Par jugement du 12 mars 2003, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a admis le recours formé par T._________ contre cette décision et réformé celle-ci dans le sens des considérants. Retenant que l'épouse de l'assuré ne parlait pas le français et que la caisse aurait dû tenir compte de cette circonstance en lui accordant un délai supplémentaire pour lui permettre d'acquérir des connaissances linguistiques élémentaires, puis trouver un emploi, la juridiction cantonale a considéré qu'un délai supplémentaire de six mois paraissait adéquat et que ce n'est qu'à compter du 1er janvier 2003 qu'un salaire hypothétique de l'épouse devait être pris en compte dans le calcul de la prestation complémentaire.
C.
La Caisse cantonale vaudoise de compensation interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle demande l'annulation.
T._________ conclut au maintien du jugement attaqué. L'Office fédéral des assurances sociales n'a pas déposé d'observations.
D.
Le 9 février 2005, la Ière Chambre du Tribunal fédéral des assurances a tenu audience.
Considérant en droit:
1.
Le litige porte uniquement sur le montant de la prestation complémentaire pour la période allant du 1er juillet 2002 au 31 décembre 2002, plus particulièrement sur l'octroi d'un délai de six mois par l'administration - porté à douze mois par la juridiction cantonale - pour la prise en compte du revenu hypothétique de l'épouse (art. 3c al. 1 let. g LPC).
2.
Selon l'art. 3c al. 1 let. g LPC, les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi. Cette disposition est directement applicable lorsque l'épouse d'un assuré s'abstient de mettre en valeur sa capacité de gain, alors qu'elle pourrait se voir obligée d'exercer une activité lucrative en vertu de l'art. 163 CC (ATF 117 V 291 s. consid. 3b; VSI 2001 p. 127 s. consid. 1b). Il appartient à l'administration ou, en cas de recours, au juge des assurances sociales d'examiner si l'on peut exiger de l'intéressée qu'elle exerce une activité lucrative et, le cas échéant, de fixer le salaire qu'elle pourrait en retirer en faisant preuve de bonne volonté. Pour ce faire, il y a lieu d'appliquer à titre préalable les principes du droit de la famille, compte tenu des circonstances du cas d'espèce (ATF 117 V 292 consid. 3c). Les critères décisifs auront notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusqu'ici, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 117 V 290 consid. 3a; VSI 2001 p. 128 consid. 1b).
3.
La recourante indique qu'elle a appliqué le ch. 2084.6 des directives de l'OFAS concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (DPC), selon lequel la réduction d'une prestation complémentaire en cours, due à la prise en compte d'un revenu minimum conformément aux ch. 2084.2 et 2084.4, ne prend effet que six mois après la notification de la décision correspondante.
Le ch. 2084.6 DPC auquel se réfère la recourante s'applique en cas de réduction d'une prestation complémentaire en cours, due à la prise en compte d'un revenu minimum conformément aux ch. 2084.2 et 2084.4 DPC. Le ch. 2084.2 DPC concerne la prise en compte d'un revenu de l'activité lucrative des assurés partiellement invalides - réglée à l'art. 14a OPC-AVS/AI -, et le ch. 2084.4 DPC la prise en compte du revenu des veuves non invalides - réglée à l'art. 14b OPC-AVS/AI.
Selon la jurisprudence, il ne se justifie pas pour fixer le revenu hypothétique de l'épouse de faire appel, même par analogie, aux normes schématiques des art. 14a et 14b OPC-AVS/AI , du moment que ces dispositions réglementaires visent des situations bien particulières et que leur application ne saurait être étendue à d'autres cas non expressément envisagés par le Conseil fédéral (ATF 117 V 292 consid. 3c; arrêt non publié G. du 25 février 2002 [P 13/01]).
Il n'y a donc pas lieu de faire application du ch. 2084.6 des directives précitées, même par analogie.
4.
Reste à examiner si le délai de six mois octroyé par la recourante était adéquat. Les premiers juges ont porté ce délai à douze mois pour le seul motif que l'épouse doit pouvoir améliorer ses connaissances linguistiques.
4.1 En fait, l'épouse est âgée de 45 ans à la date déterminante. Elle est venue en Suisse le 26 octobre 2001 après s'être mariée en juin 2001, épousant alors un homme au bénéfice d'une rente d'invalidité.
L'épouse a une formation d'infirmière, mais on ne sait jusqu'à quelle date elle a exercé son activité. Elle allègue, ce qui est vraisemblable, ne pas avoir de connaissances de français. Le couple n'a pas d'enfant et il n'est pas soutenu que l'état de santé du mari nécessite des soins.
Pour des motifs personnels, l'époux s'oppose à ce qu'elle exerce une activité autre que la tenue du ménage.
4.2 Le consid. 2b de l'arrêt VSI 2001 p. 130 rappelle l'obligation faite à la femme d'exercer une activité lucrative. Cette obligation s'impose en particulier lorsque l'époux n'est pas en mesure de le faire à raison de son invalidité parce qu'il incombe à chacun de contribuer à l'entretien et aux charges du ménage. Dès lors que l'épouse y renonce, il y a lieu de prendre en compte un revenu hypothétique après une période dite d'adaptation.
Dans le cas particulier, où il s'agit d'appliquer simplement ces règles, l'administration a retenu un revenu mensuel hypothétique de 1'500 fr. (dont elle a porté en compte les 2/3) ce qui correspond à une activité non qualifiée, exercée à temps partiel.
Pour ce genre d'activité, et au regard d'un arrêt S.-M. du 27 février 2004 [P 64/03] où le délai d'adaptation retenu était de quatre mois, un délai de six mois apparaît déjà large pour le cas d'espèce (activité à temps partiel, non qualifiée, pas de charge de ménage) et la prolongation de six mois décidée par les premiers juges pour des raisons linguistiques ne se justifie en aucune manière pour ce genre d'activité, non qualifiée, retenue à titre de revenu hypothétique.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud, du 12 mars 2003, est annulé.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 9 février 2005
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ire Chambre: Le Greffier: