BGer 6S.488/2004 |
BGer 6S.488/2004 vom 12.05.2005 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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6S.488/2004 /fzc
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Séance du 12 mai 2005
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Cour de cassation pénale
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Composition
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MM. les Juges Schneider, Président,
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Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.
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Greffière: Mme Kistler.
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Parties
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X.________,
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recourante,
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représentée par Me François Membrez, avocat,
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contre
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Procureur général du canton de Genève,
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case postale 3565, 1211 Genève 3,
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Juge d'instruction du canton de Genève,
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case postale 3344, 1211 Genève 3.
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Objet
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Contrôles techniques rétroactifs; violation de l'art. 3 al. 2 et 3 LSCPT,
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pourvoi en nullité contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du canton de Genève, du 22 septembre 2004.
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Faits:
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A.
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Y.________, ressortissante française, est arrivée en Suisse le 7 février 2002 avec ses deux enfants, nés en 1993 et en 1996. Le 27 mars 2002, elle a déposé une demande d'asile, affirmant vouloir se soustraire à une décision judiciaire française, rendue dans le cadre de son divorce, qui lui retirait la garde des enfants et ordonnait leur placement pour un an dans un foyer d'accueil. La famille Y.________ a été placée dans un appartement du foyer de l'Hospice général à Genève.
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Aux termes d'une ordonnance immédiatement exécutoire rendue le 23 octobre 2002, le Tribunal tutélaire du canton de Genève a nommé aux fonctions de curateur des enfants de Y.________ Z.________, tuteur adjoint auprès du Service du Tuteur général. Il l'a invité à assurer leur prise en charge immédiate et à organiser leur éventuel rapatriement en France pour le cas où leur mère ferait l'objet d'une mesure d'expulsion de Suisse.
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Par décision du 28 octobre 2002, la Commission suisse de recours en matière d'asile a confirmé la décision de l'Office fédéral des réfugiés qui ordonnait le renvoi de Y.________ et de ses enfants de Suisse d'ici au 12 septembre 2002. Le curateur, le chef de section au service du Tuteur général et deux inspecteurs de la brigade des mineurs se sont rendus le 5 novembre 2002, vers 18h00, au foyer de l'Hospice général pour prendre en charge les enfants de Y.________. Celle-ci se trouvait alors seule dans l'appartement. Elle a indiqué avoir mis à l'abri ses enfants après avoir été prévenue par téléphone d'une intervention imminente de la police. Elle a refusé de dévoiler la source de ces informations.
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B.
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Le 27 novembre 2002, le Procureur général du canton de Genève a ouvert une information pénale contre X.________, assistante sociale auprès du Service de protection de la jeunesse, des chefs de violation du secret de fonction (art. 320 CP), voire de complicité de séquestration et d'enlèvement d'une personne âgée de moins de seize ans (art. 183 CP). Elle était soupçonnée d'avoir avisé Y.________ des décisions prises par le Tribunal tutélaire du canton de Genève et par la Commission suisse de recours en matière d'asile ainsi que de l'intervention du 5 novembre 2002 de la police et des organes de tutelle.
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Par décision du 17 avril 2003, le Juge d'instruction genevois a ordonné, en application de la loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication (LSCPT, RS 780.1), qu'il soit procédé à un contrôle technique visant à obtenir la liste rétroactive des appels entrants et sortants effectués sur les raccordements téléphoniques de X.________ et de Y.________ pour la période du 5 au 29 novembre 2002. Le Président de la Chambre d'accusation du canton de Genève a donné son approbation le 22 avril 2003. Les entreprises Swisscom SA et Orange Communications SA ont remis le 23 avril 2003 au Juge d'instruction genevois les informations requises sous la forme de disquettes.
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Le 7 juillet 2003, le Juge d'instruction genevois a rendu, sans inculpation, une ordonnance de soit-communiqué de la procédure pénale dirigée contre X.________. Il a considéré que les infractions pour lesquelles cette dernière était susceptible d'être inculpée, à savoir la violation du secret de fonction (art. 320 CP) et l'enlèvement de mineur (art. 220 CP) ne faisaient pas partie des infractions pouvant faire l'objet de contrôles téléphoniques rétroactifs (art. 3 al. 2 LSCPT), de sorte que les éléments de preuve recueillis par ce biais ne pouvaient pas être utilisés pour fonder une inculpation de ces chefs d'infractions.
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Statuant le 5 novembre 2003 sur recours du Ministère public genevois, la Chambre d'accusation du canton de Genève a annulé cette décision et renvoyé la cause au Juge d'instruction genevois pour qu'il prononce l'inculpation de X.________ des chefs de violation du secret de fonction et de complicité d'enlèvement de mineur et, le cas échéant, qu'il poursuive ses investigations. Elle a estimé que la prévention de violation du secret de fonction et de complicité d'enlèvement de mineur à l'endroit de X.________ apparaissait suffisamment étayée par les éléments de l'enquête recueillis avant que le juge d'instruction n'ordonne les contrôles techniques incriminés.
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Le 25 février 2004, le Juge d'instruction genevois a inculpé X.________ de complicité d'enlèvement de mineur et de violation du secret de fonction.
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C.
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A la demande de la prévenue, le Juge d'instruction genevois a informé le 26 mai 2004 X.________ de la mesure de surveillance dont elle avait fait l'objet. X.________ a recouru contre cette décision auprès de la Chambre d'accusation en faisant valoir le caractère illicite de la surveillance.
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Par ordonnance du 22 septembre 2004, cette autorité a rejeté le recours. Elle a estimé que les renseignements recueillis grâce aux mesures techniques ordonnées n'avaient pas été obtenus illégalement puisque celles-ci avaient été ordonnées dans le cadre d'une information pénale ouverte du chef de complicité de séquestration et d'enlèvement (art. 183 CP), infraction expressément visée à l'art. 3 al. 2 LSCPT.
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D.
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Agissant par la voie du pourvoi en nullité, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cette décision, qui violerait les art. 3 et 7 LSCPT.
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La Chambre d'accusation et le Juge d'instruction du canton de Genève ont renoncé à déposer des observations. Le Procureur général genevois conclut principalement à l'irrecevabilité du pourvoi et, à titre subsidiaire, à son rejet.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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La recourante a fait l'objet d'un contrôle technique visant à obtenir la liste rétroactive des appels entrants et sortants effectués sur son raccordement. Afin de garantir que l'atteinte à la vie et à la sphère privées découlant d'une mesure de surveillance s'avère réellement nécessaire, la LSCPT, entrée en vigueur le 1er janvier 2002, subordonne la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication à des conditions restrictives.
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1.1 Cette loi établit d'abord un catalogue limitatif des infractions au code pénal et au droit pénal fédéral accessoire susceptibles de motiver une mesure de surveillance (art. 3 al. 2 et 3 LSCPT). Parmi ces infractions figurent l'infraction de séquestration et d'enlèvement simple (art. 183 CP), à l'exclusion de celle d'enlèvement de mineur (art. 220 CP) et de celle de violation du secret de fonction (art. 320 CP). En outre, une mesure de surveillance ne pourra être ordonnée que si la personne surveillée voit peser sur elle de graves soupçons, reposant sur des faits déterminés, d'avoir commis l'une des infractions énumérées dans le catalogue (art. 3 al. 1 let. a LSCPT). La gravité de l'acte doit, dans le cas concret, justifier la surveillance (art. 3 al. 1 let. b LSCPT). Enfin, la mesure de surveillance doit constituer l'ultima ratio; les mesures prises jusqu'alors dans le cadre de l'instruction doivent être restées sans succès ou les recherches n'auraient aucune chance d'aboutir ou seraient excessivement difficiles en l'absence de surveillance (art. 3 al. 1 let. c LSCPT).
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La surveillance peut - comme en l'espèce - être rétroactive; dans ce cas, les autorités de poursuite et d'instruction demandent aux fournisseurs de services de télécommunication de leur remettre certaines données recueillies et conservées à l'occasion d'interconnections établies dans le passé, c'est-à-dire avant qu'un ordre de surveillance n'ait été délivré (art. 5 al. 2 LSCPT). L'auteur présumé d'une infraction n'est pas le seul à pouvoir faire l'objet d'une mesure de surveillance. A certaines conditions complémentaires, d'autres personnes pourront être surveillées (art. 4 LSCPT).
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1.2 La LSCPT limite l'utilisation des informations récoltées, notamment en cas de découvertes fortuites (art. 8 et 9 LSCPT). Si d'autres actes punissables (que ceux qui ont fait l'objet de l'autorisation de surveillance) sont découverts, les informations recueillies peuvent être utilisées à l'encontre de la personne soupçonnée seulement si ces actes ont été commis en plus des actes punissables soupçonnés ou s'ils remplissent les conditions requises pour une surveillance au sens de la loi (art. 9 al. 1 let. a et b LSCPT). Si l'on ne se trouve pas dans l'une de ces deux hypothèses, les informations ne peuvent pas être utilisées; les supports de données et les documents en question doivent être détruits immédiatement (art. 9 al. 3 LSCPT).
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1.3 L'autorité qui a ordonné la surveillance doit en règle générale informer, à un stade ultérieur de la procédure, les personnes intéressées de la surveillance (art. 10 al. 1 à 3 LSCPT). Dans les trente jours suivant la communication, celles-ci peuvent former un recours devant l'autorité compétente en vertu du droit cantonal, en invoquant le caractère illicite et l'absence de proportionnalité de la surveillance (art. 10 al. 5 let. c LSCPT). N'ayant, par la force des choses, pas reçu notification de la mesure lorsqu'elle a été ordonnée, puis autorisée par l'autorité de surveillance, et n'ayant ainsi pas été en mesure de la contester immédiatement, les personnes surveillées peuvent ainsi le faire a posteriori, quand elles ont été informées de la surveillance (cf. Thomas Hansjakob, Kommentar zum Bundesgesetz und zur Verordnung über die Überwachung des Post- und Fernmeldeverkehrs, St-Gall 2002, art. 10 LSCPT, n. 40). La loi ne précise toutefois pas si la décision de l'autorité cantonale est elle-même susceptible de recours au Tribunal fédéral. Le message est aussi muet à ce sujet (cf. FF 1998 3689 p. 3723, ch. 212.26), et la question n'a pas été abordée lors des débats parlementaires (cf. BO 1999 CN 2601 ss, 2000 CE 400 ss).
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2.
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La décision attaquée porte sur une mesure d'instruction de nature incidente, ce qui pose le problème de la recevabilité du pourvoi, question que le Tribunal fédéral examine d'office (ATF 129 IV 216 consid. 1 p. 217).
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2.1
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2.1.1 Selon l'art. 268 PPF, le pourvoi en nullité est recevable contre les jugements qui ne peuvent pas donner lieu à un recours de droit cantonal. D'après la jurisprudence, le jugement est une décision qui statue sur le sort même de la cause (acquittement ou verdict de culpabilité, prononcé d'une peine ou d'une mesure, révocation du sursis) et non sur la marche ou le déroulement de la procédure (admissibilité d'un moyen de preuve par exemple). Il n'est pas indispensable en revanche que le jugement mette fin à la procédure. Il peut s'agir d'un jugement incident concernant une question préjudicielle, à condition toutefois que la décision prise soit définitive et qu'il ne soit pas possible d'y revenir ultérieurement. De plus, le jugement incident doit lui aussi porter sur des questions intéressant le sort même de la cause, telle que la validité de la plainte, la prescription de l'action pénale ou la responsabilité de l'accusé (ATF 128 IV 34 consid. 1a p. 35 s.; 119 IV 168 consid. 2a p. 170; 103 IV 59 consid. 2 p. 59 s.; 84 IV consid. 2 p. 85 s.).
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Dérogeant à ces principes, la jurisprudence a étendu, dans deux cas, le pourvoi à des décisions incidentes portant sur des questions de procédure. Ainsi, dans un premier arrêt, s'inspirant des règles applicables en matière de recevabilité du recours de droit public contre des décisions incidentes sur la composition et la compétence d'un tribunal, le Tribunal fédéral a déclaré recevable un pourvoi en nullité contre une décision incidente relative à la participation des victimes au procès pénal à venir (ATF 119 IV 168 consid. 2b p. 170 s.). Dans un second arrêt, il est entré en matière sur un pourvoi en nullité déposé contre une décision qui ordonnait, en cours d'instruction, une expertise de crédibilité d'un enfant victime qui avait déjà été soumis à deux auditions (cf. art. 10c al. 1 LAVI), considérant que cette décision était irrémédiable et que les éventuels effets néfastes sur l'enfant ne pouvaient pas être annulés plus tard rétroactivement (ATF 129 IV 179 consid. 1.1 p. 181 s.). Au demeurant, il était conforme à l'esprit de la loi de garantir les intérêts de l'enfant victime au plan fédéral en ouvrant le pourvoi en nullité, puisque la loi prévoit que l'autorité pénale peut classer une procédure pénale si l'intérêt de l'enfant l'exige impérativement (art. 10d al. 1 LAVI) et que la décision de cette autorité de ne pas classer peut faire l'objet d'un pourvoi (art. 10d al. 4 LAVI); il s'agit là aussi d'une décision incidente des autorités d'instruction en matière de protection des enfants victimes qui ne met pas fin à la procédure.
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2.1.2 On peut se demander s'il convient de généraliser cette jurisprudence et d'ouvrir le pourvoi en nullité contre les décisions incidentes qui tranchent définitivement des questions préalables de procédure fédérale dont il résulte un dommage irréparable. Une telle solution présenterait l'avantage de permettre au Ministère public de s'opposer à la destruction des preuves recueillies grâce aux écoutes téléphoniques, lequel n'a pas la qualité pour déposer un recours de droit public (ATF 48 I 106; arrêt non publié du Tribunal fédéral du 22 janvier 2004, 6S.186/2003). L'extension du pourvoi aux décisions incidentes de procédure irait en revanche au-delà de l'énoncé légal de l'art. 268 PPF, puisque le terme de "jugement" désigne de manière générale des décisions rendues sur des questions de droit matériel et non de pure procédure. En outre, on peut douter de la nécessité d'ouvrir une nouvelle voie de recours, alors que le recours de droit public permet déjà de contester les décisions incidentes de procédure des autorités cantonales pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 OJ), et cela indépendamment du fait que les autorités cantonales ont appliqué le droit cantonal ou le droit fédéral (Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen Beschwerde, 2e éd., Berne 1994, p. 109).
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Il n'est pas nécessaire de trancher cette question en l'occurrence et de choisir la voie de droit à suivre pour attaquer les décisions incidentes de procédure fédérale. En effet, que l'on opte pour le pourvoi en nullité ou le recours de droit public, la décision incidente attaquée ne pourra être contestée que si elle entraîne un dommage irréparable. Cette exigence découle de l'art. 87 al. 2 OJ pour le recours de droit public. Elle se justifie pour des raisons d'économie de la procédure; en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif (ATF 116 Ia 197 consid. 1b p. 199). Pour les mêmes raisons, le pourvoi en nullité devrait aussi se limiter aux décisions incidentes de procédure dont il résulte un dommage irréparable. Du reste, le projet de nouvelle loi sur le Tribunal fédéral ouvre le futur recours en matière pénale uniquement contre les décisions préjudicielles et incidentes qui causent un préjudice irréparable ainsi que dans certains cas où une décision finale peut être immédiatement provoquée (art. 88 projet-LTF, FF 2001 4304; message du 4 septembre 2001, FF 2001 4131 ch. 4.1.4.1; cf. BO 2003 CE 909, 2004 CN 1598 s. et 1607).
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2.2
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2.2.1 Un préjudice irréparable (visé par l'art. 87 al. 2 OJ) n'est réalisé que lorsque l'intéressé subit un dommage de nature juridique qu'une décision favorable sur le fond ne ferait pas disparaître complètement (ATF 122 I 39 consid. 1a/bb p. 42 et les arrêts cités). Un dommage de pur fait, comme la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n'est pas tenu pour irréparable de ce point de vue (ATF 123 I 325 consid. 3c p. 328, 116 II 80 consid. 2c p. 83).
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En principe, les décisions relatives à l'administration des preuves ne sont pas de nature à causer aux intéressés un dommage irréparable, tel qu'il vient d'être défini. En effet, la partie qui conteste une décision rendue en ce domaine dans un procès qui la concerne pourra attaquer, le cas échéant, cette décision incidente en même temps que la décision finale (ATF 99 Ia 437 consid. 1 p. 438 et les arrêts cités; pour plus de détails, cf. Ludwig, Endentscheid, Zwischenentscheid und Letztinstanzlichkeit im staatsrechtlichen Beschwerdeverfahren, in RJB 110/1974, p. 181 ch. 4.4). La règle comporte toutefois des exceptions. Il en va ainsi, notamment, lorsque l'existence d'un moyen de preuve est mise en péril ou quand la sauvegarde de secrets est en jeu (Ludwig, op.cit., p. 183 in fine; Kälin, op.cit., p. 343 n. 135). On conçoit aisément, par exemple, que le report de l'audition d'un témoin capital très âgé ou gravement malade, de même que la divulgation forcée de secrets d'affaires sont susceptibles de léser irrémédiablement les intérêts juridiques de la partie concernée, en tant qu'ils impliquent, respectivement, le risque de perte d'un moyen de preuve décisif ou une atteinte définitive à la sphère privée de ladite partie.
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2.2.2 En matière de surveillance téléphonique, la jurisprudence, antérieure à la LSCPT, a admis que l'interlocuteur d'une personne mise sous écoute pouvait recourir déjà en cours de procédure contre cette mesure pour en contester la licéité; elle a jugé que l'intéressé avait intérêt à ce que les procès-verbaux des conversations enregistrées soient immédiatement écartés du dossier, afin d'éviter que des personnes tierces puissent en prendre connaissance et que ceux-ci puissent être utilisés à d'autres fins. Il n'était pas seulement question de l'utilisation d'un moyen de preuve; la protection de la sphère privée était en outre en jeu (ATF 123 IV 236 consid. 4 p. 244, 122 I 182 consid. 4c p. 191). Cette jurisprudence, qui se rapporte à la surveillance d'un tiers, ne saurait cependant être généralisée. On ne saurait notamment admettre que la conservation, dans le dossier, des preuves recueillies par une surveillance de la correspondance par poste ou télécommunication porte atteinte, de manière générale, à la sphère privée de l'accusé. Mais il faudra examiner les circonstances concrètes de chaque cas particulier pour déterminer si le maintien au dossier des preuves obtenues viole les droits de la personnalité de l'intéressé et si, partant, la décision refusant leur destruction conformément à l'art. 9 al. 3 LSCPT entraîne un dommage irréparable.
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2.2.3 En l'espèce, les renseignements recueillis consistent en une liste des appels entrants et sortants effectués sur les raccordements téléphoniques de la recourante. Cette liste de numéros et de dates n'est pas propre à léser de manière irrémédiable les intérêts juridiques de la recourante. Celle-ci n'allègue du reste pas être menacée d'un préjudice irréparable. La situation n'est pas différente de celle qui peut se présenter pour un autre moyen de preuve, tel qu'une expertise. La question de l'illicéité du moyen de preuve pourra être discutée par le juge du fond. En l'état, la recourante n'est pas habilitée à contester la décision attaquée refusant de détruire la liste des appels téléphoniques devant le Tribunal fédéral faute de dommage irréparable.
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3.
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Au vu de ce qui précède, le pourvoi est irrecevable.
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Succombant, la recourante doit être condamnée aux frais (art. 278 al. 1 PPF). Il n'est pas alloué d'indemnité au Ministère public genevois (art. 278 al. 2 PPF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le pourvoi est irrecevable.
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2.
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Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge de la recourante.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué en copie à la recourante, au Procureur général du canton de Genève, au Juge d'instruction du canton de Genève et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.
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Lausanne, le 12 mai 2005
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Au nom de la Cour de cassation pénale
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: La greffière:
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La loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication s'applique à la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication ordonnée à des fins de poursuite pénale. Elle subordonne la surveillance à trois conditions. En premier lieu, de graves soupçons doivent peser sur la personne concernée en tant qu'auteur ou participant d'une des infractions limitativement énumérées à l'art. 3 de la loi. En outre, la gravité de l'infraction doit justifier la surveillance. Enfin, les mesures prises jusqu'alors dans le cadre de l'instruction doivent être restées sans succès ou les recherches n'auraient aucune chance de succès d'aboutir ou seraient excessivement difficiles en l'absence de surveillance.
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Un recours irrecevable peut, dans certains cas, être traité comme un recours d'un autre type, s'il en remplit les conditions. Cependant, lorsqu'un recourant, assisté d'un mandataire professionnel, choisit expressément une voie de droit, alors qu'il ne peut ignorer que celle-ci n'est pas ouverte, une conversion d'office du recours est impossible (ATF 120 II 270 consid. 2).
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