BGer 1A.271/2004
 
BGer 1A.271/2004 vom 26.07.2005
Tribunale federale
{T 0/2}
1A.271/2004
1P.669/2004 /col
Arrêt du 26 juillet 2005
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Féraud, Président,
Aemisegger et Fonjallaz.
Greffière: Mme Revey.
Parties
A.________,
B.________,
C.________,
D.________,,
recourants,
tous représentés par Me Jacques Philippoz, avocat,
contre
Commune de Leytron, 1912 Leytron,
représentée par Me Jacques Allet, avocat,
Conseil d'Etat du canton du Valais,
Palais du Gouvernement, 1950 Sion,
Tribunal cantonal du canton du Valais,
Cour de droit public, Palais de Justice,
avenue Mathieu-Schiner 1, 1950 Sion 2.
Objet
modification du plan d'affectation des zones de la commune de Leytron,
recours de droit administratif et de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais du
7 octobre 2004.
Faits:
A.
Le 18 juillet 2003, l'administration communale de Leytron a mis à l'enquête publique, conformément à l'art. 34 al. 1 de la loi valaisanne du 23 janvier 1987 concernant l'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (ci-après: LcAT/VS), un projet de révision de son plan d'affectation des zones et de son règlement des constructions. Le plan d'affectation prévu comprenait une carte des dangers de glissement.
Le 21 mars 2003, A.________, D.________, C.________ et B.________ se sont opposés au projet de plan d'affectation, contestant le classement en zone de danger moyen de glissement de quatre parcelles leur appartenant, soit les nos 3901, 4111, 4133 et 13341. Le Conseil communal de Leytron les a déboutés par décision du 28 mai 2003 (art. 35 al. 2 LcAT/VS), considérant l'opposition comme dépourvue d'objet au motif que la carte des dangers établie en vertu de l'art. 42 de la loi cantonale forestière du 1er février 1985 (LcFo/VS) figurait uniquement à titre indicatif sur le plan d'affectation et n'était pas soumise à l'approbation des autorités, ni des citoyens. Le 24 juin 2003, l'Assemblée primaire de la commune a adopté le plan d'affectation et le règlement dans leur nouvelle teneur (art. 36 al. 2 LcAT/VS).
B.
Les quatre propriétaires ont déféré ce prononcé devant le Conseil d'Etat du canton du Valais, concluant à la révision de la carte des dangers mentionnée sur le plan d'affectation, à savoir à l'intégration de leurs parcelles en zone de danger faible.
Par décision du 14 juillet 2004, le Conseil d'Etat a déclaré le recours irrecevable.
Statuant le 7 octobre 2004 sur recours des quatre propriétaires, le Tribunal cantonal a confirmé le prononcé d'irrecevabilité du Conseil d'Etat. Selon ses considérants, les propriétaires des biens-fonds rangés dans une zone de danger conservaient la faculté de demander un réexamen du caractère dangereux de la zone en cause, car celle-ci ne revêtait qu'une valeur indicative. La procédure suivie jusque-là n'avait trait qu'à "l'homologation" du plan d'affectation, alors que l'établissement de la carte des dangers ressortissait à "une autre procédure".
C.
Agissant le 16 novembre 2004 par la voie du recours de droit administratif (1A.271/2004), subsidiairement de droit public (1P.669/ 2004), A.________, D.________, C.________ et B.________ concluent à ce que l'arrêt du 7 octobre 2004 du Tribunal cantonal soit annulé et à ce qu'ils puissent faire valoir leur opposition à l'établissement de la carte des dangers dans la procédure de modification du plan d'affectation. A l'appui, ils dénoncent une violation des art. 26 et 29 Cst. Ils requièrent en outre que les frais de procédure, de jugement et de recours devant les différentes instances soient mis à la charge de l'Etat du Valais. Enfin, ils sollicitent l'allocation d'une indemnité à titre de dépens.
Le Conseil d'Etat, le Tribunal cantonal et l'Office fédéral du développement territorial renoncent à se déterminer. La Commune de Leytron conclut au rejet du recours en tant que recevable.
D.
Sur requête du Tribunal fédéral, le mandataire de la commune de Leytron a notamment déposé un document daté du 22 juin 2005, intégrant le nouveau règlement des constructions adopté par l'Assemblée primaire le 24 juin 2003, puis homologué partiellement par le Conseil d'Etat les 25 août 2004 et 8 juin 2005.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
1.1 Les intéressés ont déposé dans une même écriture deux recours, l'un de droit administratif, l'autre de droit public, contre le même arrêt. Par économie de procédure, il convient dès lors de prononcer la jonction des causes et de statuer sur les mérites des deux recours dans un seul et même arrêt (art. 24 PCF et 40 OJ; ATF 127 V 29 consid. 1, 156 consid. 1).
1.2 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 I 57 consid. 1; 130 II 65 consid. 1, 388 consid. 1). Le recours de droit public (art. 84 ss OJ) étant subsidiaire aux autres moyens de droit (art. 84 al. 2 OJ), la recevabilité du recours de droit administratif (art. 97 ss OJ) doit être examinée en premier lieu.
1.3 En l'espèce, il ressort des faits retenus par l'autorité intimée que les recourants agissent dans le cadre d'une contestation dirigée contre le plan d'affectation et le règlement de commune adoptés par l'Assemblée primaire en vertu de l'art. 36 LcAT/VS. La voie dont le Conseil d'Etat puis, successivement, le Tribunal cantonal leur refuse l'accès est ainsi celle du recours dirigé contre une décision d'adoption du plan d'affectation au sens de l'art. 37 LcAT/VS. Le présent litige ne relève donc pas d'une "homologation" au sens de l'art. 38 LcAT/VS.
2.
2.1 Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie du recours de droit administratif est ouverte exclusivement contre les décisions fondées sur le droit public fédéral - ou qui auraient dû l'être - (ATF 129 I 337 consid. 1.1; 129 II 183 consid. 3.1).
D'après la jurisprudence toutefois, le recours de droit administratif est également recevable contre les décisions fondées sur le droit cantonal et sur le droit fédéral, dans la mesure où la violation de dispositions de droit fédéral directement applicables est en jeu (ATF 128 I 46 consid. 1b/aa; 128 II 311 consid. 2.1; 125 II 10 consid. 2a; 123 II 231 consid. 1), contre les décisions prises en application de dispositions cantonales d'exécution du droit fédéral dénuées de portée indépendante et contre les décisions reposant sur des normes cantonales indépendantes présentant toutefois un rapport de connexité suffisamment étroit avec les questions de droit fédéral (cf. art. 104 let. a OJ; ATF 128 II 56 consid. 1a/aa; 126 II 171 consid. 1a).
En revanche, lorsque la décision attaquée repose sur du droit cantonal indépendant dépourvu de lien de connexité suffisant avec le droit fédéral, seule la voie du recours de droit public entre en considération (ATF 128 I 46 consid. 1b/aa; 128 II 56 consid. 1a/aa; 126 V 30 consid. 2; voir aussi arrêt non publié 1A.291/2004 du 13 mai 2005). Ainsi, de simples règles de principe ou des dispositions-cadres de droit public fédéral qui, pour être applicables au cas d'espèce, nécessitent des mesures d'exécution relevant du droit cantonal, ne constituent pas la base de la décision, de sorte que celle-ci ne repose pas sur le droit fédéral. Si le droit cantonal indépendant devait violer une règle de principe ou une disposition-cadre du droit public fédéral, seule serait ouverte la voie du recours de droit public pour violation de la force dérogatoire du droit fédéral (ATF 128 I 46 consid. 1b/aa; 128 II 56 consid. 1a/aa; 122 II 241 consid. 2a).
Par ailleurs, le Tribunal fédéral considère qu'une décision de refus d'entrer en matière peut, même quand elle est fondée sur le droit cantonal de procédure, faire l'objet d'un recours de droit administratif dans les cas où l'autorité, si elle avait statué sur le fond, aurait dû appliquer le droit administratif fédéral (ATF 123 II 231 consid. 1; 121 II 190 consid. 3a et les arrêts cités).
2.2 La décision attaquée confirme l'irrecevabilité des recourants à attaquer la carte des dangers de glissement du territoire de Leytron dans le cadre de la procédure d'adoption d'un nouveau plan d'affectation. Ce prononcé se réfère uniquement au droit cantonal, soit aux art. 42 LcFo/VS, 11 al. 2 et 31 al. 4 LcAT/VS. Il n'est toutefois pas exclu qu'il mette néanmoins en jeu des normes de droit fédéral au point d'ouvrir en ce sens la voie du recours de droit administratif (cf. consid. 2.1 supra). Pour déterminer si tel est le cas, il sied d'examiner les dispositions fédérales susceptibles de régir les cartes de dangers de glissement.
2.2.1 Lesdites normes figurent dans la loi fédérale du 22 juin 1979 sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) et dans la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur les forêts (LFo; RS 921.0).
Ainsi, la loi fédérale sur l'aménagement du territoire oblige les cantons à désigner, dans leurs plans directeurs, les parties du territoire qui sont gravement menacées par des forces naturelles ou par des nuisances (art. 6 al. 2 let. c LAT).
Quant à la loi fédérale sur les forêts, elle expose à son art. 1er avoir pour but de protéger les forêts en tant que milieu naturel (al. 1 let. b), de garantir que les forêts puissent remplir leurs fonctions, notamment leurs fonctions protectrice, sociale et économique (al. 1 let. c) et de contribuer à protéger la population et les biens d'une valeur notable contre les avalanches, les glissements de terrain, l'érosion et les chutes de pierres (catastrophes naturelles) (al. 2). L'art. 19 LFo dispose de la sorte que, là où la protection de la population ou des biens d'une valeur notable l'exige, les cantons doivent assurer la sécurité des zones de rupture d'avalanches ainsi que celle des zones de glissement de terrains notamment. S'agissant du financement, l'art. 36 LFo, intitulé "protection contre les catastrophes naturelles", prévoit que la Confédération alloue des indemnités pour l'exécution des mesures ordonnées contre les catastrophes naturelles, telles que l'établissement de cartes des dangers (let. c). Enfin, l'ordonnance du 30 novembre 1992 sur les forêts (OFo; RS 921.01) édicte à son art. 15 que "les cantons établissent les documents de base pour la protection contre les catastrophes naturelles, en particulier les cadastres et cartes des dangers (al. 1); lors de l'établissement des documents de base, les cantons tiennent compte des travaux exécutés par les services spécialisés de la Confédération et de ses directives techniques (al. 2); ils tiennent compte des documents de base lors de toute activité ayant des effets sur l'organisation du territoire, en particulier dans l'établissement des plans directeurs et d'affectation (al. 3)."
S'agissant de l'art. 15 al. 2 OFo, la Confédération a effectivement élaboré des directives, ainsi que des recommandations. En particulier, les offices fédéraux compétents (soit, conformément aux dénominations actuelles, l'Office fédéral du développement territorial, l'Office fédéral des eaux et de la géologie et l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage) ont édicté en 1997 des Recommandations intitulées "Prise en compte des dangers dus aux mouvements de terrain dans le cadre des activités de l'aménagement du territoire". Celles-ci exposent concrètement la manière d'identifier les dangers en cause, de les évaluer en fonction de leur intensité et probabilité, puis de traduire ces paramètres en trois degrés (soit important, moyen et faible). De plus, elles indiquent comment prendre en compte les dangers ainsi définis dans les mesures d'aménagement du territoire.
2.2.2 Il ressort d'emblée de cet exposé que le droit fédéral ne contient aucune règle sur la procédure d'élaboration ou d'adoption des cartes de dangers de glissement, pas plus, a fortiori, sur les voies de recours. La décision d'irrecevabilité ici attaquée repose ainsi exclusivement sur le droit cantonal de procédure.
2.2.3 Conformément au consid. 2.1 supra, le recours de droit administratif demeure néanmoins ouvert si l'autorité intimée aurait dû, en statuant sur le fond, appliquer le droit fédéral.
Ainsi qu'on l'a vu, le droit fédéral entrant ici en considération ne circonscrit pas la notion de cartes de dangers, mais se borne à indiquer qu'elles constituent l'une des mesures destinées à assurer la sécurité des zones de rupture d'avalanche et des zones de glissement de terrain, les cantons devant en "tenir compte" dans l'établissement de leurs plans directeurs et d'affectation. De plus, il demeure muet sur la manière dont les cantons sont appelés à en "tenir compte"; en particulier, il ne détermine nullement les conséquences à tirer, notamment en matière de constructibilité, de l'inclusion de terrains dans les zones de danger, pas davantage qu'il n'attribue à ces documents d'effets juridiques obligatoires pour les citoyens. Les cantons conservent ainsi toute liberté d'appréciation en la matière. Peu importe à cet égard que les Recommandations précitées traitent précisément de tels sujets, puisqu'elles ne constituent pas, par définition, une loi au sens formel ou matériel. Dans ces conditions, force est de conclure que les normes fédérales régissant les cartes de dangers constituent uniquement des règles de principe ou des dispositions-cadres. Par conséquent, si l'autorité intimée avait dû statuer sur le fond, elle n'aurait de toute façon pas appliqué du droit fédéral, mais du droit cantonal autonome sans lien de connexité suffisant avec le droit fédéral.
Au demeurant, on notera d'une part que l'obligation d'établir de telles cartes de dangers ne ressort ni de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (cf. art. 6 al. 2 let. c a contrario), ni de la loi fédérale sur les forêts (qui se borne à instituer l'allocation d'une indemnité aux cantons qui les établissent, sans pour autant édicter de devoir à cet égard), mais uniquement de l'ordonnance fédérale sur les forêts, ce qui n'est pas sans susciter des doutes sur le respect du principe de la légalité (cf. Rolf Lüthi, Cadre juridique des cartes de dangers, Planat, Bienne 2004, p. 18 s.). D'autre part, dans la mesure où les cartes des dangers de glissement reposent en définitive exclusivement sur la législation sur les forêts, on peut se demander si elles conservent un lien avec le droit fédéral lorsqu'elles intègrent des surfaces sans rapport avec la forêt.
2.2.4 Dans ces conditions, force est de retenir que ni la délimitation des parcelles à inclure dans une carte de dangers ni la procédure à suivre à cet effet ne relèvent du droit fédéral. Le recours de droit administratif est donc irrecevable.
2.3 Le recours de droit administratif demeure du reste fermé même dans l'hypothèse où, à l'instar du présent cas (cf. consid. 4 infra), la carte des dangers est assimilable à un plan d'affectation, partant soumise aux exigences prévues par l'art. 33 LAT en matière de protection juridique. En effet, la violation de l'art. 33 LAT ne peut être dénoncée dans un recours de droit administratif que lorsque cette voie est ouverte sur le fond en vertu de l'art. 34 al. 1 LAT et de la jurisprudence rendue en application de cette disposition, selon laquelle une décision relative à l'adoption d'un plan d'affectation peut faire l'objet d'un recours de droit administratif, lorsque l'application du droit fédéral de la protection de l'environnement, ou d'autres prescriptions fédérales spéciales en matière de protection des biotopes, des forêts, etc., est en jeu (ATF 129 I 337 consid. 1.1; 123 II 231 consid. 2 p. 234; 121 II 72 consid. 1b). Or, le litige ne réunit pas les conditions de l'art. 34 al. 1 LAT, les recourants ne formulant pas de requête d'indemnisation au sens de l'art. 5 LAT, et, conformément à ce qui précède, l'établissement des cartes de dangers de glissement ne met pas en oeuvre du droit fédéral.
3.
Il reste à examiner les conditions de recevabilité du recours de droit public.
3.1 Par décision attaquable au sens des art. 84 al. 1 et 87 OJ, on entend uniquement celle qui fixe de façon contraignante la situation juridique du recourant. Or, les plans d'affectation n'acquièrent force obligatoire qu'après leur approbation par l'autorité cantonale compétente (art. 26 al. 3 LAT). Les opérations de procédure antérieures (mise à l'enquête, procédure d'opposition et de recours, vote) ne sont que des étapes vers l'entrée en force de ces plans. Par conséquent, lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public dirigé contre une décision sur opposition ou sur recours antérieure à l'approbation, le Tribunal fédéral suspend la procédure, voire n'entre pas en matière. Il ne déroge qu'exceptionnellement à ce principe, soit en particulier lorsque l'autorité cantonale compétente a différé l'approbation jusqu'à droit connu sur le recours de droit public et qu'il apparaît d'emblée que l'octroi de celle-ci se résumerait à une simple formalité si le recours devait être rejeté (ATF 120 Ia 19 consid. 2a; 118 Ia 165 consid. 2a p. 169; arrêt 1P.68/1998 consid. 1b/bb reproduit in ZBl 100/1999 p. 70).
En l'espèce, le recours est dirigé contre une décision prise par le Tribunal cantonal à l'issue d'une procédure ouverte contre l'adoption, opérée par l'assemblée primaire de la commune de Leytron, du plan d'affectation et du règlement des constructions (art. 36 al. 2 et 37 LcAT/VS). Ne fait en revanche pas l'objet du recours une quelconque décision d'approbation - soit d'"homologation" selon la terminologie valaisanne - du plan d'affectation (art. 38 LcAT/VS). Il sied toutefois d'entrer en matière. D'abord, il découle du nouveau règlement des constructions que le "dossier d'aménagement" a été partiellement homologué les 25 août 2004 et 8 juin 2005 par l'autorité compétente, soit le Conseil d'Etat, qui a notamment approuvé les art. 113 ss du règlement communal (cf. consid. 4.3 infra); de plus, le Conseil d'Etat s'est déjà prononcé sur les arguments des recourants en sa qualité de première instance de recours, si bien qu'il apparaît que l'homologation du dossier d'aménagement, dans sa partie contestée par les recourants, ne constituerait qu'une formalité.
3.2 Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le recours de droit public est ouvert uniquement à celui qui est atteint par l'acte attaqué dans ses intérêts personnels et juridiquement protégés (ATF 130 I 82 consid. 1.3). Les recourants disposent de la qualité pour recourir par la voie du recours de droit public dans la mesure où ils se plaignent d'une restriction à leur droit de propriété garanti par l'art. 26 Cst.
3.3 Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de droit public est de nature purement cassatoire (ATF 129 I 129 consid. 1.2.1, 173 consid. 1.5; 128 III 50 consid. 1b et la jurisprudence citée). Dans la mesure où les recourants demandent autre chose que l'annulation de l'arrêt attaqué, soit la reconnaissance de leur droit à contester l'établissement de la carte de dangers dans la procédure de modification du plan d'affectation, ou la mise à la charge de l'Etat du Valais des frais de procédure devant les différentes instances, leurs conclusions sont irrecevables.
Le recours satisfaisant aux autres conditions posées par les art. 84 ss OJ, il sied d'entrer en matière.
3.4 Selon l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit - sous peine d'irrecevabilité - contenir "un exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation". Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier, de lui-même, si la décision attaquée est en tout point conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les moyens de nature constitutionnelle invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 129 I 113 consid. 2.1 et la jurisprudence citée).
C'est à la lumière de ces principes que doit être appréciée la motivation des recourants.
4.
Les recourants affirment que l'intégration de leurs parcelles dans la carte des dangers de glissement (soit en danger moyen) diminue singulièrement la valeur de celles-ci, de sorte qu'une telle incorporation constitue une restriction au droit de propriété protégé par l'art. 26 Cst. Dans ces conditions, le canton est tenu de leur donner la faculté de s'y opposer dans le cadre d'une procédure administrative. Or, la voie de droit adéquate est bien celle prévue pour l'adoption des plans d'affectation et des règlements, soit la procédure aménagée par les art. 33 ss LcAT/VS, car la carte des dangers a été publiée simultanément à la révision du plan d'affectation, est indissociable de celui-ci et recouvre une zone à bâtir. Au demeurant, toujours à dires des recourants, aucune autre procédure ne peut entrer en considération.
4.1 En Valais, les dispositions afférentes aux cartes de dangers figurent dans la loi concernant l'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire et dans la loi forestière, ainsi qu'il suit:
LcAT/VS
Art. 11
1. Les communes établissent pour l'ensemble du territoire communal un plan d'affectation des zones définissant au moins les zones à bâtir (art. 15 LAT), les zones agricoles (art. 16 LAT) et les zones à protéger (art. 17 LAT).
2. ...
3. Les communes prévoient à titre indicatif les zones régies par la législation spéciale, notamment l'aire forestière, les zones de danger, de nuisances et de protection des eaux.
Art. 31
1. Les zones de danger comprennent les portions du territoire qui sont d'expérience exposées aux catastrophes naturelles ou qui sont de manière prévisible menacées par de telles catastrophes (avalanches, instabilités de terrain, inondations ou autres dangers naturels).
2. Aucune construction ne peut être autorisée dans ces zones si son implantation est de nature à mettre en danger les personnes, les animaux et d'autres biens importants.
3. Les portions du territoire qui, en raison de leur exposition aux dangers des éléments naturels, ne peuvent être bâties ou qui ne peuvent l'être que dans une mesure réduite, doivent être indiquées dans le plan d'affectation des zones comme zones de danger.
4. Le propriétaire du fonds peut apporter la preuve que les dangers qui menacent le bien-fonds ou son accès ont été écartés par des mesures de sécurité.
-:-
LcFo/VS
Art. 42 Cartes de danger
1. La carte de danger détermine les régions menacées en utilisant les données du cadastre des avalanches et chutes de pierres.
2. Les communes municipales en ordonnent l'établissement sous le contrôle du Service forestier.
3. Les cartes de danger doivent être prises en considération lors de l'aménagement du territoire ainsi que lors de la procédure d'autorisation des constructions et autres installations, à l'échelon municipal et cantonal.
4.2 A bien suivre la législation cantonale, les cartes de dangers (art. 42 LFo) servent directement à établir les zones de danger, elles-mêmes incluses dans le plan d'affectation (art. 11 al. 3 LcAT/VS). Il résulte par ailleurs des art. 31 al. 2 et 3 LcAT/VS que, dans les zones de danger, la constructibilité peut être supprimée ou réduite. Ainsi, lorsque ces zones recouvrent des zones à bâtir, les propriétaires des parcelles concernées perdent, au moins dans une certaine mesure, le droit d'y construire, et cela quand bien même ces terrains demeurent formellement en zone à bâtir.
De surcroît, cet effet n'est guère affaibli par la valeur prétendument "indicative" qu'attache aux cartes de dangers l'art. 31 al. 4 LcAT/VS. En prévoyant que le propriétaire "peut apporter la preuve" que les dangers "ont été écartés", cette disposition érige l'insertion d'une parcelle dans une telle carte en une véritable présomption légale du danger en cause, dès lors qu'elle impose au propriétaire d'apporter la preuve du contraire. Plus encore, le propriétaire n'est pas même habilité à démontrer que le danger n'est pas avéré (l'existence initiale étant définitivement retenue), mais uniquement qu'il a été écarté par des mesures de sécurité. Par conséquent, la carte de dangers intégrée dans un plan d'affectation déploie indéniablement des effets juridiques directs sur les propriétaires; elle implique des restrictions sérieuses à leur droit de propriété, propres, de surcroît, à entraîner une dépréciation notable du terrain. Dans ces conditions, les propriétaires touchés doivent être habilités à la contester par une procédure administrative (voir ATF 126 II 522 consid. 49 p. 596 et 130 II 394 consid. 7.4 p. 406, où le Tribunal fédéral a estimé qu'un cadastre de bruit sans base légale ni enquête publique avec procédure d'opposition ou de recours ne saurait comporter des restrictions à la propriété liant les propriétaires, partant ne peut constituer au plus qu'un inventaire destiné aux autorités).
4.3 Le nouveau règlement des constructions adopté par la commune de Leytron, dont les art. 113 ss concrétisent dûment les art. 11 al. 3 et 31 LcAT/VS en matière de zones d'instabilités de terrain, ne conduit pas à une autre conclusion:
Ainsi, les art. 115 à 117 dudit règlement déterminent, en application de l'art. 31 al. 2 et 3 LcAT/VS, la constructibilité des parcelles sises en zones de danger élevé, moyen et faible. S'agissant en particulier de la zone de danger moyen - à laquelle appartiennent les parcelles des recourants -, l'art. 116 exige que tout nouveau bâtiment ou transformation de bâtiment tendant à augmenter la capacité habitable soit, de façon générale - à défaut ou en complément de mesures de protection collectives -, connecté à un réseau de canalisation d'égouts et d'eaux pluviales, ce dernier point valant aussi pour les accès (al. 1 let. a); doit être jointe à la demande d'autorisation de construire une expertise contenant notamment les mesures de sécurité à prendre (al. 2 let. a); au minimum, le bâtiment doit être construit sur radier général avec le premier niveau rigide en béton armé; les eaux superficielles - collectées par le toit, routes d'accès et autres surfaces imperméables - ainsi que les eaux souterraines (ceinture drainante) doivent être évacuées jusqu'au collecteur communal et, lors de la construction, les travaux doivent être effectués en respectant le plan de sécurité édicté par les normes SIA 160 et 191 (al. 3 let. a). Par conséquent, même si les conditions rattachées à la zone de danger "moyen" restreignent uniquement les modalités techniques de la construction, à l'exclusion, par exemple, du volume du bâtiment projeté, il n'en demeure pas moins qu'elles limitent de manière sensible le droit de construire sur les parcelles concernées, ne serait-ce qu'en termes de coût.
Enfin, si le règlement prévoit à son art. 113 al. 2, en accord avec l'art. 11 al. 3 LcAT/VS, que les zones d'instabilités de terrain figurent sur le plan d'affectation à titre indicatif, il n'accorde pas au citoyen davantage de possibilités de contestation que n'en concède la loi cantonale.
Dans ces circonstances, il sied de confirmer, selon le consid. 4.2 supra, que les recourants doivent être habilités à contester par une procédure administrative l'inclusion de leurs parcelles dans une zone de danger "moyen" de glissement.
4.4 S'agissant d'une telle voie de droit, le Tribunal cantonal renvoie les recourants à une "autre procédure" que celle des art. 33 ss LcAT/VS. Il ne fournit cependant aucune précision à cet effet. Or, aucune autre voie ne semble permettre aux recourants de faire valoir leurs droits à suffisance. En particulier, une éventuelle procédure spécifique fondée sur l'art. 31 al. 4 LcAT/VS ne saurait remplir une telle condition, seuls certains griefs déterminés pouvant y être soulevés. Quant au contrôle incident pouvant être exercé à l'occasion d'une demande d'autorisation de construire, il ne permet pas de pallier à temps la dévaluation de la parcelle incluse dans la carte de dangers lorsque la vente intervient, comme tel est souvent le cas, avant le projet de construction. La procédure prévue en matière d'expropriation ne s'avère pas davantage relevante, puisqu'elle n'a pas pour objet le bien-fondé de l'atteinte à la propriété, mais uniquement le montant de l'indemnisation qui s'en suit.
Dans ces conditions, et dès lors qu'elle doit être assimilée dans les circonstances particulières de l'espèce à un plan d'affectation, la carte des dangers doit pouvoir faire l'objet des mêmes voies de recours que celles réservées au plan d'affectation par les art. 33 ss LcAT/VS. Le grief des recourants est par conséquent bien fondé, ce qui entraîne l'admission du recours.
Encore peut-on ajouter que les restrictions à la propriété impliquées par la carte des dangers touchent les recourants dans leurs droits de caractère civil au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH, partant doivent de toute façon pouvoir être soumises à un contrôle juridictionnel (cf., en matière d'expropriation matérielle, ATF 120 Ib 136 consid. 1, 224 consid. 1b; 119 Ia 88 consid. 3b, 321 consid. 6a/bb).
5.
Vu ce qui précède, le recours de droit administratif est irrecevable, tandis que le recours de droit public est admis dans la mesure de sa recevabilité, ce qui entraîne l'annulation de l'arrêt attaqué. Obtenant gain de cause pour l'essentiel, les recourants ont droit à une indemnité pour les dépens, solidairement entre eux, à charge de la commune de Leytron (art. 159 al. 1 OJ). Celle-ci est en revanche dispensée des frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Les causes 1A.271/2004 et 1P.669/2004 sont jointes.
2.
Le recours de droit administratif est irrecevable.
3.
Le recours de droit public est admis dans la mesure de sa recevabilité; l'arrêt attaqué est annulé.
4.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
5.
La commune de Leytron versera aux recourants une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens, solidairement entre eux.
6.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataire des parties, au Conseil d'Etat et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial.
Lausanne, le 26 juillet 2005
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: