Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4C.296/2005 /ech
Arrêt du 13 février 2006
Ire Cour civile
Composition
MM. et Mmes les Juges Corboz, Président, Klett, Nyffeler, Favre et Kiss.
Greffier: M. Ramelet.
Parties
X.________,
Y.________,
demandeurs et recourants,
tous deux représentés par Me Albert J. Graf,
contre
Z.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Philippe A. Grumbach.
Objet
contrat de vente, renonciation à la prescription décennale de l'art. 127 CO,
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 24 juin 2005.
Faits:
A.
A.a Z.________ SA (ci-après: Z.________) est une société de droit suisse active notamment dans le domaine de l'achat et de la vente d'avions.
A.________ Company Limited (ci-après: A.________) est une société de droit maltais active en matière de négoce de céréales. Désigné au début des années 1990 administrateur-délégué de cette société, Y.________ est demeuré à cette fonction jusqu'au 28 avril 1994. X.________ est administratrice de A.________ depuis le 8 septembre 1995.
A.b Après avoir passé le 18 décembre 1992 un "accord d'achat", Z.________ et A.________ ont conclu le 29 décembre 1992 un "contrat de vente d'aéronef", rédigé par la première sur son papier à en-tête, portant sur l'acquisition par la seconde d'un avion de type Canadair Challenger 601-3A-ER, n° de série 5125, dont la livraison était prévue le 31 mai 1993 à Montréal (Canada), aéroport de Dorval.
A teneur de l'art. 2 de l'accord, le prix et les conditions de paiement étaient arrêtés de la manière suivante:
"Prix de l'avion en configuration "Green" US$ 15'150'000.- payables comme suit:
Acompte US$ 500'000.- le 21 décembre 1992
2ème Acompte US$ 2'500'000.- le 4 janvier 1993
Solde US$ 12'150'000.- le 31 mai 1993
Le paiement du solde de US$ 12'150'000.- est garanti par une lettre de crédit irrévocable, ouverte par l'acheteur en faveur de Z.________ SA au plus tard le 15 janvier 1993 et transférable uniquement en faveur du constructeur C.________ INC, Canadair Division à Montréal.
Prix de l'installation de l'aménagement intérieur et des équipements optionnels: US$ 2'445'000.- payables comme suit .
US$ 244'500.- le 4 janvier 1993
US$ 489'000.- le 15 mars 1993
US$ 489'000.- le 30 avril 1993
US$ 1'222'500.- le 31 mai 1993
Prix total de l'avion complètement aménagé et équipé: US$ 17'595'000.-".
L'art. 3 du contrat prévoyait ce qui suit:
"Les sommes versées par l'acheteur à titre d'acompte correspondent à des arrhes qui seront considérées comme un acompte en cas de bonne et fidèle exécution du contrat. En revanche, en cas d'inexécution par l'acheteur de l'une ou l'autre clause du contrat, les arrhes versées resteront irrévocablement acquises au vendeur".
Quant à l'art. 4 du contrat, il avait la teneur suivante:
"Tout retard de plus de 10 jours dans le paiement par l'acheteur d'un acompte ou du solde du prix sera considéré comme une inexécution du contrat et le vendeur sera en droit de s'en départir immédiatement sans avis ni mise en demeure, et de conserver les arrhes versées conformément à l'article 3 du présent contrat".
L'article 13 du contrat instaurait la compétence exclusive des tribunaux du canton de Genève et soumettait l'accord au droit suisse.
A.c Par amendement du 15 janvier 1993 proposé par Z.________, les parties contractantes ont repoussé la date de livraison de l'avion au 11 juin 1993 et modifié en conséquence l'art. 2 du contrat de la manière suivante:
"Prix de l'avion en configuration "Green": US$ 15'150'000.- payables comme suit:
Acompte US$ 500'000.- le 21 décembre 1992
2ème Acompte US$ 2'500'000.- le 4 janvier 1993
Solde US$12'150'000.- le 11 juin 1993
Prix de l'installation de l'aménagement intérieur et des équipements optionnels: US$ 2'445'000.- payables comme suit:
US$ 244'500.- le 4 janvier 1993
US$ 489'000.- le 15 mars 1993
US$ 489'000.- le 30 avril 1993
US$ 1'222'500.- le 11 juin1993".
A.d Par l'intermédiaire de sa société soeur A.________ BV, titulaire d'un compte auprès de la banque D.________, A.________ a fait émettre le 18 janvier 1993 un accréditif irrévocable de 12'150'000 US$ en faveur de Z.________ avec date d'échéance au 11 juin 1993. A.________ s'est acquittée, également par le truchement de A.________ BV, des montants dus selon la convention du 29 décembre 1992 en versant à Z.________ des acomptes par 3'733'500 US$, soit 500'000 US$ le 21 décembre 1992, 2'500'000 US$ le 4 janvier 1993, 244'500 US$ le 4 janvier 1993 et 489'000 US$ le 15 mars 1993.
A.e Par télécopie du 20 avril 1993, Z.________ a informé A.________ qu'un délai au 10 mai 1993 pour le règlement de l'acompte de 489'000 US$ payable le 30 avril 1993 avait été accepté par le fournisseur. Tenant compte du délai de grâce de dix jours stipulé à l'art. 4 de l'accord du 29 décembre 1992, cette somme devait être versée au plus tard le 20 mai 1993.
Le 21 avril 1993, Y.________ et X.________ ont été interpellés par les autorités italiennes dans le cadre d'une enquête diligentée à leur encontre pour fraudes fiscales. Ils ont indiqué avoir été détenus à titre préventif sous le régime de l'isolement à la maison d'arrêt de V.________ (Italie) jusqu'au 3 juillet 1993, date à partir de laquelle ils ont été assignés à résidence à leur domicile, avec possibilité de communiquer uniquement avec leur famille. Ils ont allégué que ladite mesure a été révoquée le 24 juillet 1993.
Par télécopie du 19 mai 1993, A.________ a informé Z.________ que le paiement de la somme de 489'000 US$ ne pourrait être effectué à la date convenue, car elle rencontrait des "problèmes généraux en Italie"; elle confirmait toutefois sa volonté d'acquérir l'aéronef. Par retour de fax et courrier recommandé du même jour, Z.________ a refusé toute prolongation du délai, relevant qu'elle s'était elle-même engagée envers son fournisseur canadien. Le même jour, A.________ a encore insisté pour l'obtention d'un report du délai de paiement, précisant que Y.________ était concerné par des enquêtes ouvertes à son encontre en Italie, qui l'empêchaient de donner sa signature.
Par fax et pli recommandé du 25 mai 1993, Z.________ a adressé à A.________ un courrier ayant le contenu suivant:
"En dépit de notre confirmation d'échéance, par lettre recommandée du 19 mai 1993, et qui vous a été transmise par télécopie le jour même, nous devons malheureusement constater que vous ne vous êtes pas acquittés du montant de US$ 489'000.- dû le 10 mai 1993 et donc payable, au plus tard, le 20 mai 1993 conformément à l'article 4 du Contrat du 29 décembre 1992 liant nos deux sociétés.
La date d'échéance étant tombée un jour férié (le 20 mai 1993) le paiement attendu n'a pas non plus été enregistré le 21 mai 1993, premier jour ouvrable consécutif. A ce jour, il n'est toujours pas effectué.
En conséquence, votre retard manifeste dans le paiement de l'acompte susvisé constitue très précisément le cas déterminé d'inexécution prévu par l'article 4 du Contrat, qui nous donne automatiquement le droit de nous en départir immédiatement, sans avis ni mise en demeure préalables.
Par la présente, nous vous notifions notre décision de nous départir du Contrat, avec effet immédiat.
Dès lors, les articles 3 et 4 du Contrat stipulent que les versements partiels effectués par l'acheteur sont irrévocablement acquis au vendeur. A ce jour, vous avez effectué des versements pour un total de US$ 3'733'500.-. Ce montant est donc irrévocablement acquis à notre société.
Tout en déplorant cette situation, nous ne voyons pas la raison de nous écarter des clauses expressément voulues par les parties au Contrat, et ce d'autant plus que nous devons respecter nos propres engagements vis-à-vis de nos partenaires canadiens."
Par courrier de son conseil du 24 août 1993, A.________ a contesté l'avis de résiliation précité. Faisant valoir que Z.________ n'était pas légitimée à conserver les paiements déjà effectués, A.________ a déclaré être toujours intéressée par l'acquisition de l'avion.
Suite à la résiliation du contrat de vente par Z.________, l'aéronef a été acheté par E.________ SA; à cette date, l'avion était grevé d'une hypothèque de premier rang d'un montant de 13'000'000 US$ en faveur du fabricant, soit C.________ Inc. Le 8 novembre 1994, l'avion a été revendu avec l'hypothèque à la société F.________ SA.
A.f Le 7 novembre 2002, A.________, par l'intermédiaire de son conseil, a requis de Z.________ la restitution des acomptes qu'elle lui avait versés entre le 21 décembre 1992 et le 15 mars 1993, au titre de dommages-intérêts entraînés par la résolution du contrat passé le 29 décembre 1992. A.________ a également demandé que lui soit adressée "à titre préalable à toute discussion, d'ici au 15 novembre 2002, une déclaration de renonciation à la prescription en des termes ne souffrant aucune interprétation", ajoutant qu'à défaut elle ferait notifier à Z.________ un commandement de payer pour le capital et les intérêts.
Le 28 novembre 2002, Z.________ a adressé à A.________ une renonciation à invoquer la prescription datée du 20 novembre 2002, laquelle a le contenu qui suit:
"La soussignée, Z.________ SA, Genève, renonce par la présente à soulever une exception de prescription contre toutes les prétentions que A.________ CO. Ltd (sic), à Malte, n° d'enregistrement C ... du 28 août 1987, peut faire valoir, en rapport avec les paiements reçus par Z.________ SA, conformément au contrat du 29 décembre 1992 et de son amendement n° (qui n'est pas signé) pour un montant de US$ 3'733'500, dans la mesure où celles-ci ne sont pas déjà prescrites à la date d'aujourd'hui. Cette renonciation à la prescription intervient sans reconnaissance de responsabilité, avec la réserve expresse que de telles prétentions existent et qu'elles peuvent être opposées à la soussignée. La déclaration intervient simplement pour éviter l'interruption de la prescription par une poursuite ou le dépôt d'une action et elle est valable jusqu'au 31 décembre 2003".
Le 25 juin 2003, A.________ a déposé devant le Tribunal de première instance de Genève une demande en paiement à l'encontre de Z.________, concluant à ce qu'elle soit condamnée au versement de la somme de 3'733'500 US$. Cette demande n'a cependant pas été introduite à l'issue de l'audience de conciliation du 30 juillet 2003.
Par contrat de cession du 11 novembre 2003, A.________ a cédé ses droits à l'encontre de Z.________ à X.________ et Y.________, désormais domiciliés à Genève. L'acte de cession prévoit l'application du droit suisse.
B.
B.a Le 18 novembre 2003, X.________ et Y.________ ont ouvert action contre Z.________ devant les tribunaux genevois et sollicité que la défenderesse soit condamnée à payer à A.________ la somme de 3'733'500 US$ plus intérêts à 5% l'an depuis le 6 août 1993. Exposant être au bénéfice d'une cession de créance de la part de A.________, les demandeurs ont fait valoir que leur arrestation, suivie de leur incarcération et de leur assignation à résidence, constituait une impossibilité subséquente non fautive de s'exécuter. La défenderesse, qui avait résilié sans droit le contrat de vente, s'était placée en demeure qualifiée au sens de l'art. 108 CO, ont soutenu les demandeurs. L'avion commandé ayant été vendu à une société tierce, la défenderesse avait contraint A.________ à renoncer à l'exécution en nature du contrat et à demander des dommages-intérêts négatifs à concurrence du montant réclamé en procédure.
La défenderesse s'est opposée à la demande. Elle a déclaré que la cession de créance du 11 novembre 2003 était nulle pour cause de simulation, de sorte que les demandeurs n'avaient pas qualité pour agir. Elle a prétendu qu'elle était en droit de se départir du contrat de vente et de conserver les arrhes déjà versées, puisque A.________ ne s'était aucunement trouvée dans l'impossibilité subséquente non fautive de s'exécuter. Elle a enfin fait valoir que l'action en répétition des acomptes versés était prescrite.
Par jugement du 18 novembre 2004, le Tribunal de première instance a débouté les demandeurs de leurs conclusions. Il a en particulier nié l'existence d'une quelconque impossibilité de l'exécution au sens de l'art. 119 CO et admis que la défenderesse était bel et bien fondée à résilier le contrat de vente et à conserver le montant des acomptes versés, en application des dispositions de cet accord.
B.b Saisie d'un appel des demandeurs, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, par arrêt du 24 juin 2005, a confirmé le jugement précité. Après avoir écarté l'objection de la défenderesse relative à la validité de l'acte de cession du 11 novembre 2003, la cour cantonale a considéré que le délai de prescription de la créance invoquée par les demandeurs était échu le 26 mai 2003, de sorte que ladite créance était déjà prescrite lors du dépôt, le 25 juin 2003, de la demande non introduite et, a fortiori, au moment de l'ouverture du présent procès le 18 novembre 2003. Les juges cantonaux ont retenu que la renonciation à soulever l'exception de prescription signée par la défenderesse le 20 novembre 2002 était nulle au regard de la jurisprudence. Niant que la défenderesse ait abusé de son droit en invoquant la prescription, l'autorité cantonale a entièrement débouté les demandeurs, sans tenter de déterminer la réelle et commune intention des parties signataires du contrat conclu le 29 décembre 1992 et sans examiner la validité de la résiliation du 25 mai 1993 et l'existence d'une impossibilité subjective subséquente d'exécuter.
C.
X.________ et Y.________ exercent un recours en réforme au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal. Ils concluent principalement à ce que la défenderesse soit condamnée à leur payer la somme de 3'733'500 US$, avec intérêts à 5 % l'an dès le 6 août 1993. Subsidiairement, ils requièrent que la cause soit retournée à l'autorité cantonale en l'invitant à ouvrir une instruction complète et à statuer à nouveau dans le sens des considérants de l'arrêt de la juridiction fédérale.
L'intimée propose le rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement et dirigé contre un arrêt final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse très largement le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).
Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en revanche pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités).
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4). Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvert pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 130 III 102 consid. 2.2 in fine, 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3).
Le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des conclusions des parties, qui ne peuvent en prendre de nouvelles (art. 55 al. 1 let. b OJ), mais il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4; 128 III 22 consid. 2e/cc in fine). Le Tribunal fédéral peut donc admettre un recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant; il peut aussi rejeter un recours en opérant une substitution de motifs, c'est-à-dire en adoptant une autre argumentation juridique que celle retenue par la cour cantonale (ATF 130 III 136 consid. 1.4 in fine).
1.2 Dans la mesure où les recourants, sans invoquer aucune des exceptions prévues par les art. 63 al. 2 et 64 OJ , allèguent que l'intimée a repoussé de manière unilatérale les délais de remise de l'aéronef à l'acheteur et font état des préavis de livraison que devait donner l'intimée à ce dernier, ils présentent une version des faits qui diverge de celle retenue par l'autorité cantonale. Ils y sont irrecevables. Les moyens du recours seront donc examinés compte tenu de l'état de fait constaté dans l'arrêt déféré.
2.
2.1 Dans leur premier grief, les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir examiné sommairement le litige et adopté une argumentation lapidaire tenant en deux pages. Relevant que le contrat du 29 décembre 1992 était déséquilibré en ce sens qu'il n'était réellement contraignant que pour A.________, X.________ et Y.________ soutiennent que c'est en violation du droit fédéral que la Cour de justice a considéré que la prescription était acquise. A leurs yeux, la demande qu'ils ont déposée en conciliation le 25 juin 2003 a interrompu la prescription, laquelle a recommencé à courir pour une période de 10 ans. De toute manière, la déclaration de renonciation à la prescription du 20 novembre 2002 a valablement prolongé le délai au 31 décembre 2003. Ils soutiennent encore que l'avis de résiliation immédiate dudit contrat était absolument nul, faute d'avoir respecté le délai de paiement qui leur avait été accordé. Les recourants déclarent enfin que l'absence de toute instruction dans une affaire aussi complexe commande que le dossier soit renvoyé à l'autorité cantonale pour qu'elle statue sur la prescription en connaissance de cause puis, le cas échéant, sur l'ensemble de la querelle.
2.2 La cour cantonale a retenu que quelle que soit l'interprétation qu'il convient de donner au terme "acompte" figurant dans les art. 2, 3 et 4 de la convention du 29 décembre 1992, la créance invoquée par les demandeurs est fondée sur l'art. 109 CO et, partant, soumise à la prescription décennale de l'art. 127 CO. Elle s'est référée à la jurisprudence (cf. ATF 112 II 231 consid. 3e/bb et 99 II 185 consid. 2) pour admettre que la renonciation anticipée à invoquer la prescription opérée avant l'expiration du délai, lorsqu'il s'agit comme en l'espèce d'un délai fixé dans le titre troisième du code des obligations, est radicalement nulle (art. 20 CO). Elle en a déduit que la renonciation à soulever l'exception de prescription établie par la défenderesse en faveur de A.________ le 20 novembre 2002, à savoir avant l'expiration du délai décennal de prescription venu à échéance le 26 mai 2003, était restée sans influence sur le cours de la prescription, laquelle était déjà acquise au moment du dépôt en conciliation, le 25 juin 2003, de la demande en paiement de A.________.
3.
3.1 Il a été constaté définitivement que, par une télécopie et un courrier recommandé du 25 mai 1993, la défenderesse a averti A.________ qu'elle se départissait avec effet immédiat du contrat qui les liait depuis le 29 décembre 1992, au motif que la seconde n'avait pas versé à la première un acompte de 489'000 US$ le 20 mai 1993, soit dans le délai au 30 avril 1993 prolongé de 10 jours par l'intimée, compte encore tenu du délai de grâce de 10 jours résultant de l'art. 4 de l'accord.
Cette déclaration de résolution a entraîné la caducité du contrat en cause (art. 109 CO). Il a ainsi été créé un rapport de liquidation en vertu duquel les prestations déjà effectuées doivent être restituées en nature ou en argent, si bien que les parties contractantes doivent être dans la mesure du possible replacées dans la situation patrimoniale qui aurait été la leur si le contrat n'avait pas été conclu (ATF 123 III 16 consid. 4b et l'arrêt cité). L'action en restitution - à l'instar de celle formée par les demandeurs, cessionnaires de A.________ - est une action fondée sur la loi (art. 109 al. 1 CO), soumise au délai de prescription de dix ans instauré par l'art. 127 CO (ATF 114 II 152 consid. 2d; Wolfgang Wiegand, Commentaire bâlois, n. 5 ad art. 109 CO; Pierre Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 734 in medio).
3.2 Selon l'état de fait déterminant, l'intimée, accédant à la requête du conseil de A.________ formée le 7 novembre 2002, a indiqué explicitement, dans une déclaration signée le 20 novembre 2002, renoncer à soulever une exception de prescription à l'encontre des prétentions que pourrait avoir A.________ "en rapport avec les paiements reçus par Z.________ SA, conformément au contrat du 29 décembre 2002 et de son amendement (...) pour un montant de US$ 3'733'500 (...)". Il était précisé que cette renonciation, valable jusqu'au 31 décembre 2003, intervenait sans reconnaissance de responsabilité, afin d'éviter l'interruption de la prescription par une poursuite ou le dépôt d'une action.
Il convient d'analyser la portée qu'il convient d'attribuer à cette renonciation d'invoquer le délai décennal de prescription de l'art. 127 CO, lequel est applicable, ainsi qu'on vient de le voir, à l'action des demandeurs.
3.3
3.3.1 En droit suisse des obligations prévaut le principe de l'autonomie de la volonté, d'après lequel l'objet d'un contrat peut être librement déterminé, dans les limites de la loi (art. 19 al. 1 CO). Mais la loi exclut les conventions des parties notamment lorsqu'elle édicte une règle de droit strict (art. 19 al. 2 in initio CO). Dans le droit qui régit la prescription, l'autonomie privée est limitée par des dispositions spécifiques, qui font l'objet des art. 129 et 141 al. 1 CO .
L'art. 129 CO dispose que les délais de prescription fixés dans le présent titre ne peuvent être modifiés conventionnellement. Sont visés les délais du titre troisième de la première partie du code des obligations (cf. art. 114 à 142 CO), lequel traite de l'extinction des obligations et contient trois normes fixant des délais de prescription, à savoir les art. 127, 128 et 137 al. 2 CO .
L'art. 141 al. 1 CO prescrit qu'est nulle toute renonciation anticipée à la prescription.
Il ressort de la systématique de la loi qu'il y a un rapport étroit entre ces deux normes. En effet, si l'art. 129 CO, en ordonnant que les délais de prescription du titre troisième ne soient ni prolongés ni raccourcis (cf. parmi d'autres Stephen V. Berti, Commentaire zurichois, n. 14 ad art. 129/141 al. 1 CO; Engel, op. cit., p. 809), veut assurer une certaine sécurité juridique en protégeant le débiteur, censé ainsi connaître les délais entrant en ligne de compte (Andreas von Tuhr/Arnold Escher, Allgemeiner Teil des Schweizerischen Obligationenrechts, 3e éd., Zurich 1974, vol. II, p. 216), l'art. 141 CO poursuit un but identique dès l'instant où il veut empêcher que les parties, par une renonciation anticipée à la prescription, prolongent de manière détournée les délais de prescription (cf. Pascal Pichonnaz, Commentaire romand, n. 3 ad art. 141 CO) ou rendent plus difficile l'acquisition de la prescription, en substituant d'autres causes de suspension ou d'interruption que celles prévues par la loi (von Tuhr/Escher, op. cit., vol. II, p. 217 in medio; Engel, op. cit., p. 809/810).
3.3.2 Dans l'ATF 99 II 185 consid. 2b, le Tribunal fédéral a reconnu que le débiteur avait dans tous les cas la liberté de renoncer à invoquer la prescription déjà acquise. Il a en revanche considéré que la faculté de s'abstenir à exciper de la prescription tant qu'elle est en cours était limitée par l'art. 129 CO. Il en a déduit que le texte de l'art. 141 al. 1 CO devait recevoir une interprétation restrictive en ce sens qu'il ne visait, à l'instar de l'art. 129 CO, que les délais de prescription arrêtés dans le titre troisième de la première partie du CO. Autrement dit, la renonciation anticipée à invoquer la prescription était nulle (art. 20 al. 1 CO) si elle avait trait à un des trois délais du titre troisième du CO. La juridiction fédérale a admis qu'il était donc parfaitement possible de renoncer à la prescription qui résultait d'une disposition qui ne figurait pas dans le titre troisième, à l'exemple de l'art. 14 al. 1 de la loi fédérale sur la responsabilité civile des entreprises de chemins de fer et de bateaux à vapeur et des postes du 28 mars 1905 (LRespC; RS 221.112.742 dans son état le 8 mars 1973), que ce soit par une renonciation à l'institution même de la prescription ou par une renonciation à soulever l'exception de prescription, présentée dans une convention ou une déclaration unilatérale.
L'ATF 112 II 231 consid. 3e/bb a confirmé ce précédent en posant que les délais de prescription de l'art. 60 CO n'étaient pas visés par les art. 129 et 141 al. 1 CO . Le Tribunal fédéral a justifié l'interprétation restrictive de ces deux normes par le fait que la renonciation à la prescription avait désormais acquis une grande extension dans la pratique, notamment en ce qui concernait les relations avec les compagnies d'assurance.
Cette jurisprudence n'a par la suite plus été remise en cause par le Tribunal fédéral (cf. notamment arrêts 5C.42/2005 du 21 avril 2005 consid. 2.2 et 4C.9/1998 du 14 mai 1998 consid. 4a).
3.3.3 Karl Spiro a sévèrement critiqué la jurisprudence précitée (cf. Der Verzicht auf die laufende Verjährung, in Festschrift für Karl H. Neumayer, Baden-Baden 1985, p. 547 ss). Développant la thèse qu'il avait exposée précédemment (cf. Die Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-, Verwirkungs- und Fatalfristen, vol. I, § 343, Berne 1975, p. 847 ss), il est d'avis que l'interdiction de renoncer de manière anticipée à la prescription doit valoir pour tous les délais de prescription, et non seulement pour ceux du titre troisième du CO. Il se fonde singulièrement sur les différences du libellé des art. 129 et 141 al. 1 CO et affirme que le législateur n'a pas voulu dire deux fois la même chose lorsqu'il a adopté des normes qui sont très proches dans le code des obligations (op. cit., p. 547/548). En revanche, pour cet auteur, qui a repris une conception ancienne esquissée par Hermann Becker (Commentaire bernois, 1917, n. 2 in fine ad art. 141 CO), le débiteur est en droit de renoncer totalement ou partiellement au temps déjà écoulé du délai de prescription, même si le délai figure dans le titre troisième du CO (op. cit., p. 555). Spiro ne voit aucune raison de traiter différemment sous cet angle les délais de prescription du titre troisième des autres délais du code. Il expose ainsi (ibidem) qu'il n'est pas compréhensible que le maître puisse renoncer à invoquer ses droits en raison du défaut d'une construction immobilière, lesquels sont soumis à une prescription quinquennale (art. 371 al. 2 CO), alors que l'entrepreneur ne le pourrait pas pour le travail effectué sur l'immeuble, lequel relève d'un délai de prescription rigoureusement identique (art. 128 ch. 3 in initio CO).
Cette opinion a été accueillie favorablement par la doctrine majoritaire (Robert K. Däppen, Commentaire bâlois, n. 3 ad art. 141 CO; Pichonnaz, op. cit., n. 4 et 5 ad art. 141 CO; Theo Guhl, Das Schweizerische Obligationenrecht, 9e éd., § 39, ch. 16, p. 319; Peter Gauch/Walter R. Schluep/Jörg Schmid/Heinz Rey, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 8e éd., vol. II, ch. 3573, p. 257/258; Ingeborg Schwenzer, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 3e éd., § 84, ch. 83.07, p. 451; Alfred Koller, Die Tragweite eines zeitlich begrenzten Verjährungsverzichts, in SJZ 1996, p. 369 à 371, spéc. note de pied de page 3, p. 369; Franz Joseph Kessler, Der Verjährungsverzicht im Schweizerischen Privatrecht, thèse Zurich 2000, p. 41 ss, spéc. p. 51; opinion isolée Eugen Bucher, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 2e éd., § 25/I ch. 3, p. 447/448; approuvant la jurisprudence actuelle Berti, op. cit., n. 39 à 42 ad art. 129/141 al. 1 CO; Engel, op. cit., p. 808 à 810).
3.3.4 L'ampleur des critiques doctrinales commande de réexaminer la jurisprudence susmentionnée. De fait, comme l'affirme incidemment Bucher (op. cit., p. 448 in medio), aucune solution satisfaisante n'a encore été trouvée en ce qui concerne la renonciation à la prescription pour les délais figurant dans le titre troisième du CO.
3.3.5 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (ATF 131 V 431 consid. 6.1; 130 II 65 consid. 4.2; 130 V 49 consid. 3.2.1; 129 II 353 consid. 3.3). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; en particulier, il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 124 II 193 consid. 5a p. 199, 372 consid. 5 p. 376; 124 III 321 consid. 2 p. 324 et les arrêts cités).
3.3.6 Le libellé très bref de l'art. 141 al. 1 CO ne permet pas de dégager sans hésitation le sens de la norme. Les al. 2 et 3 de la disposition précitée ne sont d'aucun secours à cet égard, du moment qu'ils ne s'appliquent que si la renonciation est valable au regard de l'art. 141 al. 1 CO (Pichonnaz, op. cit., n. 14 ad art. 141 CO).
Afin de bien comprendre ce que le législateur a envisagé par une renonciation "anticipée" à la prescription au sens de l'art. 141 al. 1 CO, il convient de procéder à une interprétation historique.
Le Code fédéral des obligations du 14 juin 1881 (ci-après: aCO), entré en vigueur le 1er janvier 1883, renfermait un art. 159, dont la première phrase avait la teneur suivante: "On peut renoncer à la prescription acquise".
Dans son Message à l'Assemblée fédérale concernant le projet de loi destiné à compléter le projet de Code civil suisse (droit des obligations et titre final), du 3 mars 1905, le Conseil fédéral, après avoir déclaré qu'il renonçait à imiter le législateur français en introduisant un délai général pour la prescription des actions, a exposé que, pour le reste, le régime de la prescription ne subissait "que des changements de pure forme" par rapport à l'aCO (FF 1905 II p. 16, ch. 10). Aussi proposait-il, sous le titre marginal "Renonciation à la prescription", de reprendre sans changement la première phrase de l'art. 159 aCO, lequel deviendrait l'art. 1165 CO (FF 1905 II p. 105).
Dans son Rapport à l'Assemblée fédérale concernant la révision du code des obligations (Supplément au Message du 3 mars 1905), du 1er juin 1909, le Conseil fédéral a présenté aux Chambres le résultat des délibérations de la commission d'experts, comme suite à son message du 3 mars 1905, en conservant les numéros des articles du projet primitif (FF 1909 III p. 749/750). Le Conseil fédéral a proposé, sans apporter de commentaires (cf. FF 1909 III p. 759), de libeller, sous le même titre marginal, l'al. 1er de l'art. 1165 CO de la manière suivante: "Il est loisible de renoncer à la prescription acquise" (FF 1909 III p. 819).
La Commission du Conseil national a suggéré que l'al. 1 de l'art. 1165 CO dispose ce qui suit: "Est nulle toute renonciation anticipée à la prescription" (BO CN 1909 p. 540). Le rapporteur de langue allemande Eugen Huber a déclaré que ce nouveau texte n'était que la confirmation de l'ancienne règle revêtue d'une nouvelle parure. Il a ajouté que la nouvelle formulation se conformait à des dispositions correspondantes du Code civil suisse, telles que l'art. 837 al. 2 CC (BO CN 1909 p. 542). Quant au rapporteur de langue française Virgile Rossel, il a affirmé que les changements par rapport au nouveau projet du Conseil fédéral se réduisaient à des améliorations de pure forme et au travail d'adaptation nécessité par l'unification du droit civil (BO CN 1909 p. 543).
La proposition susrappelée de la Commission du Conseil national a été adoptée telle quelle par les Chambres fédérales le 30 mars 1911, l'art. 1165 al. 1 CO étant devenu depuis lors l'art. 141 al. 1 CO.
3.3.7 Cette recherche historique amène le Tribunal fédéral à poser les considérations suivantes.
Il ressort des travaux préparatoires que le législateur a voulu seulement prohiber que le débiteur renonce par avance à la prescription de sa créance, c'est-à-dire avant qu'elle ne prenne naissance. Cela résulte déjà a contrario de la formulation de l'art. 159 aCO.
Eugen Huber a lui-même donné la clé du problème lorsqu'il a affirmé que le libellé proposé par la Commission du Conseil national, qui est devenu le texte actuel de l'art. 141 al. 1 CO, devait s'harmoniser avec des dispositions du Code civil, à l'exemple de l'art. 837 al. 2 CC. Cette norme dispose que "l'ayant droit ne peut renoncer d'avance à ces hypothèques légales", par quoi il faut entendre l'hypothèque du vendeur d'immeuble (art. 837 al. 1 ch. 1 CC), celle des cohéritiers envers l'attributaire d'un immeuble lors du partage (art. 837 al. 1 ch. 2 CC) et celle des artisans et des entrepreneurs (art. 837 al. 1 ch. 3 CC).
L'art. 837 al. 2 CC n'exclut que la renonciation qui intervient avant que les conditions du droit à l'inscription soient réunies. En d'autres termes, en ce qui concerne l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs, le bénéficiaire du droit à l'inscription ne peut pas renoncer à la garantie à l'occasion de la conclusion du contrat d'entreprise (Hans Leemann, Commentaire bernois, n. 59 ad art. 837 CC; Paul-Henri Steinauer, Les droits réels, tome III, 3e éd., ch. 2846a, p. 263). Il peut toutefois renoncer à son droit lorsque ledit contrat est déjà conclu (Steinauer, op. cit., loc. cit.), et également une fois que la garantie a été constituée (ATF 95 II 31 consid. 3 p. 35).
On doit tirer de ce parallèle que le législateur a seulement voulu proscrire la renonciation à la prescription qui survient au moment précis de la conclusion d'un contrat. Cette interdiction vaut toutefois pour tous les délais de prescription, et non seulement pour ceux du titre troisième du CO. Il s'agit de protéger efficacement les intérêts privés du débiteur lors de la passation d'une convention qui lui impose des obligations. C'est ainsi qu'il faut comprendre les termes "renonciation anticipée".
Par contre, après que le contrat a été conclu, le débiteur peut parfaitement renoncer à se prévaloir de la prescription tant que court ledit délai, ce qui signifie qu'il lui est loisible par exemple de renoncer à soulever l'exception de prescription en cas de procès. Cette faculté doit également valoir pour les délais du titre troisième du CO. On ne voit aucune raison de traiter les délais en cause différemment des autres délais arrêtés dans le code des obligations ou dans des lois spéciales. Ce système n'est pas antinomique avec l'art. 129 CO qui interdit de modifier conventionnellement les délais de prescription du titre troisième du CO. Cette norme signifie que lesdits délais ne peuvent être ni prolongés ni raccourcis (cf. Däppen, op. cit., n. 2 ad art. 129 CO; Pichonnaz, op. cit., n. 5 ad art. 129 CO). Mais elle n'empêche pas que la survenance de la prescription soit repoussée, par l'effet d'une suspension (art. 134 CO) ou d'une interruption (art. 135 à 138 CO) du délai ou encore par l'octroi d'un sursis retardant l'exigibilité de la créance. La renonciation à la prescription n'a pas des conséquences différentes.
Il est enfin admis qu'il est également possible de renoncer à invoquer l'exception de prescription quand le délai est écoulé, quel que soit celui envisagé, dès l'instant où l'art. 142 CO prescrit que le juge ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription (ATF 122 III 10 consid. 7; Pichonnaz, op. cit., n. 6 ad art. 141 CO).
La jurisprudence doit donc être modifiée dans le sens qui précède.
3.3.8 Au sujet de la durée pour laquelle le débiteur déclare renoncer à exciper de la prescription, le Tribunal fédéral a jugé, dans un précédent où le débiteur avait expressément formulé sa renonciation pour la période d'une année et une semaine (ATF 112 II 231 consid. 3e/bb), que la renonciation équivalait à une interruption, de sorte qu'un nouveau délai - en l'occurrence de 10 ans selon l'art. 60 CO - commençait à courir dès la déclaration du débiteur. La juridiction fédérale est arrivée à cette conclusion après avoir interprété ladite renonciation selon la théorie de la confiance.
Cette jurisprudence a été critiquée par Koller (op. cit., p. 370), qui préconise que la durée pour laquelle la renonciation doit valoir se détermine selon la volonté des parties. Gauch/Schluep/Schmid/Rey (op. cit., n. 3573 in fine p. 258) et Pichonnaz (op. cit., n. 4 ad art. 141 CO) ont approuvé cette opinion.
Ces avis doctrinaux, qui privilégient l'autonomie des parties (art. 19 CO), sont convaincants. Il appert en effet que le Tribunal fédéral, dans le précédent susmentionné, a tenu compte des circonstances particulières dans lesquelles la déclaration du débiteur a été effectuée - comme l'atteste clairement l'expression "dans un tel contexte" qu'il a utilisée au consid. 3e/bb p. 233 in fine - et qu'il n'a pas eu l'intention de rendre une décision de principe sur cette question.
Toutefois, la renonciation à la prescription ne saurait être émise pour une durée dépassant le délai ordinaire de 10 ans institué par l'art. 127 CO, peu importe le délai de prescription considéré (ATF 99 II 185 consid. 2a in fine et les références, où le délai de prescription entrant en ligne de compte était le délai biennal de l'art. 14 al. 1 LRespC; Pichonnaz, op. cit., n. 11 ad art. 141 CO, p. 797). Il convient effectivement d'éviter que le créancier ne parvienne indéfiniment à différer sa volonté d'obtenir l'exécution de la prestation qu'il invoque (cf. Christophe Leuenberger, Verjährungsverzicht und Verlängerung der Verjährungsfrist, ZBJV 1998, p. 583 s., qui se réfère à Spiro, Der Verzicht auf die laufende Verjährung, op. cit., p. 549).
3.3.9 En l'espèce, la défenderesse a résolu le 25 mai 1993 avec effet immédiat le contrat du 29 décembre 1992 noué avec A.________. Comme on l'a vu (cf. consid. 3.1 ci-dessus), il en est résulté un rapport de liquidation dans le cadre duquel A.________ disposait d'une action en restitution soumise à la prescription décennale de l'art. 127 CO.
Le 28 novembre 2002, soit peu avant l'expiration du délai de prescription de 10 ans, la défenderesse a adressé à A.________ une déclaration de renonciation à la prescription en rapport avec les prétentions découlant de la caducité du contrat, laquelle était valable jusqu'au 31 décembre 2003.
Au vu de ce qui vient d'être exposé, cette déclaration de renonciation était valide. Partant, la demande déposée le 18 novembre 2003 contre l'intimée par les demandeurs, cessionnaires de A.________, a été formée en temps utile. Pour avoir jugé cette action prescrite, la cour cantonale a violé le droit fédéral.
Le moyen est fondé.
4.
4.1 Ayant jugé - à tort - que la prescription était acquise, la cour cantonale n'a pas posé de constatations qui permettraient au Tribunal fédéral d'examiner les autres griefs des recourants et de vider la querelle.
Il sied ainsi de faire application de l'art. 64 al. 1 OJ, d'admettre le recours dans la mesure de sa recevabilité, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle complète ses constatations et statue à nouveau. Il appartiendra notamment aux juges cantonaux de déterminer, le cas échéant, la volonté réelle et commune des parties ayant conclu l'accord du 29 décembre 1992, sinon la volonté normative de ces dernières, de qualifier cette convention, d'élucider les circonstances relatives à une éventuelle impossibilité subséquente non fautive de prester, de contrôler, sous l'angle de la clause pénale (art. 162 CO), le droit du créancier aux versements partiels en cas de résiliation et de vérifier si la clause pénale stipulée est excessive (art. 163 al. 3 CO).
4.2 L'issue du différend est encore incertaine. Dans ces conditions, il se justifie de mettre l'émolument judiciaire par moitié à la charge des recourants, avec solidarité entre eux, et pour l'autre moitié à la charge de l'intimée (art. 156 al. 3 OJ), les dépens étant compensés (art. 159 al. 3 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
2.
Un émolument judiciaire de 20'000 fr. est mis pour moitié à la charge des recourants, avec solidarité entre eux, et pour l'autre moitié à la charge de l'intimée.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 13 février 2006
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: