BGer U 434/2004
 
BGer U 434/2004 vom 27.03.2006
Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
U 434/04
Arrêt du 27 mars 2006
IIIe Chambre
Composition
MM. les Juges Ferrari, Président, Meyer et Lustenberger. Greffière : Mme Gehring
Parties
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, recourante,
contre
C.________, intimé, représenté par Me Jean-Claude Morisod, avocat, rue de la Banque 4, 1701 Fribourg
Instance précédente
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
(Jugement du 19 août 2004)
Faits:
A.
A.a C.________, né en 1962, a travaillé en qualité d'aide-monteur en constructions métalliques au service de l'entreprise X.________ Sàrl. A ce titre, il était assuré contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : CNA). A la suite d'un accident survenu le 30 décembre 2000, il a subi une ostéonécrose aseptique du semi-lunaire du poignet droit.
La CNA a pris en charge les soins médicaux et le versement d'indemnités journalières. Par lettre du 12 novembre 2002, elle a informé l'assuré qu'elle entendait mettre fin au versement des prestations avec effet au 31 décembre 2002, au motif qu'un traitement n'était plus à même d'améliorer notablement son état de santé. Par décision du 29 janvier 2003 confirmée sur opposition le 4 juin suivant, la CNA a alloué à C.________ une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 15 % d'un montant de 16'020 fr., ainsi qu'une rente mensuelle fondée sur un taux correspondant à une diminution de la capacité de gain de 12 % à compter du 1er janvier 2003.
A.b Entre-temps, C.________ avait déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Par décision du 28 janvier 2003, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'office AI) a refusé toute rente et toute mesure de reclassement au motif que le taux d'invalidité était de 6 %. L'opposition de l'assuré a été partiellement admise, le dossier étant transmis au service de réadaptation pour examen du droit à des mesures professionnelles (décision du 4 juin 2003).
B.
C.________ a recouru contre la décision sur opposition de la CNA en concluant à ce que le taux d'invalidité soit fixé à 27 % et le montant de sa rente mensuelle - dont il contestait également les bases de calcul - augmenté en conséquence. Par jugement du 19 août 2004, le Président du Tribunal des assurances du canton de Vaud a admis le recours avec suite de dépens, annulé la décision litigieuse et renvoyé la cause à la CNA, en considérant qu'il incombait à celle-ci de poursuivre le paiement des indemnités journalières jusqu'à ce que l'office AI ait mené à terme les mesures de réadaptation.
C.
La CNA interjette recours de droit administratif contre ce jugement en concluant principalement au renvoi du dossier aux premiers juges pour qu'ils statuent à nouveau sur le droit de C.________ à une rente d'invalidité, subsidiairement, à la confirmation de la décision sur opposition.
L'assuré conclut, sous suite de dépens, principalement au rejet du recours, subsidiairement au renvoi de l'affaire à la CNA pour un complément d'instruction. Se prévalant d'une aggravation de son état de santé survenue depuis le 1er janvier 2003, il infère que ce dernier n'était par conséquent pas stabilisé le 12 novembre 2002. De son côté, l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
Le litige porte sur la question de savoir si la recourante était en droit de mettre fin au versement d'indemnités journalières et d'allouer, cas échéant à titre provisoire, une rente.
2.
Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.
Toutefois, aux termes de l'art. 30 al. 1 OLAA (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 1998), édicté par le Conseil fédéral en application de l'art. 19 al. 3 LAA, lorsqu'on ne peut plus attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré, mais que la décision de l'AI concernant la réadaptation professionnelle n'interviendra que plus tard, une rente sera provisoirement allouée dès la fin du traitement médical; cette rente est calculée sur la base de l'incapacité de gain existant à ce moment-là. Le droit s'éteint avec la décision négative de l'AI concernant la réadaptation professionnelle (let. b) ou avec la fixation de la rente définitive (let. c).
Dans son message à l'appui d'un projet de loi fédérale sur l'assurance-accidents du 18 août 1976, le Conseil fédéral n'avait prévu l'allocation de rentes qu'à partir du moment où les mesures de réadaptation auraient été menées à chef (FF 1976 III 193-194, ad art. 19). Lors de la lecture de l'art. 19 al. 3 du projet de loi, le rapporteur de la commission du Conseil national a relevé qu'il fallait souvent attendre plusieurs mois avant que les organes de l'assurance-invalidité fixent le montant des rentes ou statuent sur les mesures de réadaptation. Aussi a-t-il paru nécessaire à la commission de donner mandat au Conseil fédéral d'édicter des prescriptions afin que l'assureur puisse verser les rentes entre le moment où l'on constate qu'on ne peut plus attendre de la poursuite du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré et le moment où la décision est prise par l'assurance-invalidité (BO CN 1979 pp. 180-181).
Selon la jurisprudence (ATF 129 V 284 consid. 4.2), si le législateur n'a pas réglé expressis verbis la question du droit à une rente transitoire de l'assureur-accidents durant une éventuelle procédure de recours concernant les mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité, il a néanmoins manifesté clairement son intention de garantir le versement de telles rentes aussi bien pendant le déroulement desdites mesures de réadaptation que pendant la période qui va de la fin du traitement médical jusqu'au moment où décision est prise quant à d'éventuelles mesures de réadaptation, cas échéant à la mise en oeuvre de celles-ci. Ainsi cette rente transitoire est allouée pendant la durée de la procédure menant à la décision de l'AI; elle concerne la durée totale de cette procédure, y compris lorsqu'il y a recours dès lors que l'obligation de l'assureur-accidents d'allouer ses prestations dépend indubitablement de la décision de l'AI portant sur le droit de l'assuré aux mesures de réadaptation d'ordre professionnel (art. 19 al. 1 LAA; Omlin, Die Invalidität in der obligatorischen Unfallversicherung, thèse Fribourg 1995, p.199).
3.
3.1 Dans le cas particulier et quoiqu'en dise l'intimé, il est médicalement établi qu'au moment où la CNA a pris sa décision, l'état de santé de l'assuré était stabilisé, comme l'a justement retenu le premier juge. D'ailleurs, la réalisation de cette condition n'était pas remise en cause par l'intéressé à l'époque de la décision litigieuse, puis du jugement cantonal. La prétendue aggravation dont il fait état pour la première fois en instance fédérale n'y change rien. D'une part, elle n'est pas établie en l'état au degré de vraisemblance prépondérante requis (ATF 126 V 360 consid. 5b, 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 324 sv. consid. 3.2 et 3.3) dès lors que le docteur H.________ (spécialiste FMH en chirurgie de la main) atteste d'un état stationnaire dans son certificat médical du 2 décembre 2004. D'autre part et surtout, ni le docteur G.________ (médecin généraliste traitant; lettre du 26 mai 2004), ni le docteur H.________ ne proposent de mesures thérapeutiques propres à améliorer sensiblement l'état de santé de l'intimé.
3.2 A l'époque de la décision litigieuse, l'assuré avait sollicité des prestations de l'assurance-invalidité qui lui avaient été refusées dans un premier temps (décision du 28 janvier 2003). A la suite de son opposition et retenant nouvellement un taux d'invalidité de 22,7 %, l'office AI avait transmis le dossier à son service de réadaptation pour examen du droit de l'intimé à des mesures professionnelles (décision du 4 juin 2003). Au vu du dossier en l'état actuel, cette procédure est en cours.
3.3 Dès lors, et faute de décision négative exécutoire de l'AI, il incombait à la recourante de fixer la rente à titre provisoire (ou transitoire) en prenant en considération la situation d'un assuré non encore réadapté (ATF 116 V 246). Il a sans doute échappé au premier juge que tel est précisément le contenu de la décision sur opposition rendue par l'assureur-accidents le 4 juin 2003 et qu'il ne se justifiait pas, selon le système légal exposé ci-dessus, d'attendre que l'office AI ait mené à terme les mesures de réadaptation. Dans cette mesure, son jugement s'avère contraire au droit fédéral. La cause sera ainsi renvoyée à la juridiction cantonale pour qu'elle entre en matière sur le recours de l'assuré en tant qu'il porte sur la quotité de la rente (provisoire) et rende un nouveau jugement.
4.
S'agissant d'un litige qui concerne l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). L'intimé, qui succombe, n'a pas droit à des dépens (art. 159 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est admis et le jugement du Président du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 19 août 2004 est annulé; l'affaire est renvoyée à la juridiction cantonale pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 27 mars 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière: