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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6P.97/2006
6S.176/2006 /bri
Arrêt du 22 septembre 2006
Cour de cassation pénale
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffière: Mme Kistler.
Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Laurence Casays,
avocate,
contre
Procureur général du canton du Valais, case postale 2282, 1950 Sion 2,
Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour
pénale II, Palais de Justice, 1950 Sion 2.
Objet
Droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.); fixation de la peine (art. 63 CP),
recours de droit public et pourvoi en nullité contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II, du 9 mars 2006.
Faits:
A.
Par jugement du 27 mai 2004, le Tribunal du IIIème arrondissement pour les districts de Martigny et Saint-Maurice a condamné X.________, pour violation grave de la LStup, contravention à cette loi et conduite d'un véhicule sans permis, à trente mois d'emprisonnement, sous déduction de la détention préventive.
Statuant le 9 mars 2006 sur l'appel formé par X.________, la Cour pénale II du Tribunal cantonal valaisan a confirmé le jugement de première instance.
B.
Il ressort, pour l'essentiel, de l'arrêt attaqué que X.________ a participé à un trafic portant sur une quantité de 34,8 g (232 g x 15 %) de speed pur et de 99,2 g (275 g x 36,1 %) de cocaïne pure. Il a aussi trafiqué 240 pilules d'ecstasy (180 + 60).
Pour établir les quantités de drogue sur lesquelles portait le commerce de X.________, la cour cantonale s'est fondée, notamment, sur les déclarations de Y.________. Selon la version de ce dernier, il aurait remis à X.________ 300 boulettes de cocaïne (alors que X.________ déclare avoir acquis, par Y.________, que 100 boulettes). Y.________ a exposé avoir vendu 60 g de speed à X.________ (tandis que celui-ci a nié avoir été en possession de plus de quelques grammes de speed provenant de Y.________). Enfin, Y.________ a déclaré avoir remis à X.________ 200 comprimés d'ecstasy (alors que celui-ci reconnaît en avoir acheté 70 et en avoir reçu gratuitement 16).
Face à ces déclarations contradictoires, la cour cantonale a retenu les déclarations de Y.________, qu'elle a considéré comme plus crédibles que celles de X.________. Elle a relevé que Y.________ ne pouvait retirer aucun avantage de ses dépositions, mais s'exposait au contraire à une peine élevée. Elle a en outre constaté qu'aucun élément du dossier ne révélait qu'il nourrissait de la rancoeur contre X.________. Enfin, elle a justifié les revirements de Y.________ par l'ascendant que X.________ exerçait sur ce dernier dont l'expertise avait mis en évidence la personnalité immature et le caractère influençable.
C.
Contre l'arrêt cantonal, X.________ dépose un recours de droit public et un pourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Dans les deux recours, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. Dans le recours de droit public, il dénonce, pour l'essentiel, la violation du droit d'être entendu. Dans le pourvoi, il critique la sévérité de la peine qui lui a été infligée. En outre, il sollicite l'effet suspensif.
Le Procureur général valaisan a renoncé à présenter une détermination.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1. I. Recours de droit public
1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ; art. 269 al. 2 PPF).
2.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir violé son droit d'être entendu en omettant de traiter l'un de ses griefs.
2.1 Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 120 Ib 379 consid. 3b p. 383; 119 Ia 136 consid. 2b p. 138 et les arrêts cités).
2.2 Le droit d'être entendu impose, en particulier, au juge l'obligation de motiver ses décisions afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Pour satisfaire cette exigence, il suffit que le juge mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision. Il ne doit pas se prononcer sur tous les moyens des parties; il peut se limiter aux questions décisives (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540, 473 consid. 4.1 p. 477; 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 97 consid. 2b p. 102/103; 125 II 369 consid. 2c p. 372; 122 IV 8 consid. 2c p. 14/15; 121 I 54 consid. 2c p. 57).
2.3 En l'espèce, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir arrêté les quantités de stupéfiants dont il a fait le trafic ainsi que le chiffre d'affaires et le bénéfice qu'il en a retiré sur la base des déclarations de Y.________, sans examiner la question de la capacité de ce dernier de déposer de manière fiable en raison de sa consommation de drogue avant son arrestation.
2.3.1 Selon la jurisprudence, le juge ne peut se fonder sur une déposition que s'il est établi que le témoin avait la volonté et la capacité de dire la vérité. Les témoignages à charge doivent être accueillis avec une prudence particulière. Pour apprécier la crédibilité du témoin, il importe de tenir compte de son état psychique et corporel. Des circonstances telles que la fatigue, l'émotion ou des troubles psychiques doivent évidemment être prises en considération. La mémoire des faits et la capacité d'en rendre compte entrent en ligne de compte au nombre des qualités requises. Les personnes souffrant de troubles mentaux ne sont aptes à témoigner que dans la mesure où ces troubles n'affectent pas leur capacité de déposer valablement. Il faut aussi tenir compte, le cas échéant, de l'influence des stupéfiants sur le comportement du témoin. Une réserve particulière s'impose à l'égard des toxicomanes dépendants en état de manque. Dans cette situation, l'intéressé peut présenter des troubles de compréhension, de concentration et d'expression (ATF 118 Ia 28 consid. 1c p. 31).
2.3.2 En procédure cantonale, le recourant a fait valoir que Y.________ était un polytoxicomane et a reproché aux premiers juges de n'avoir pas pris en compte les effets possibles de la drogue sur la capacité de ce témoin de relater les faits tels qu'ils se sont passés (déclaration d'appel p. 16). Il ressort du dossier et du jugement attaqué que Y.________ était dépendant du cannabis et de la cocaïne. L'expertise a retenu que Y.________ souffrait d'un développement mental incomplet qui l'empêchait d'apprécier pleinement le caractère illicite de ses actes ou de se déterminer d'après cette appréciation.
Dans le jugement attaqué, la cour cantonale a expliqué les raisons qui l'ont conduite à retenir le témoignage de Y.________ plutôt que celui du recourant. Elle n'a cependant pas discuté l'argument du recourant, selon lequel la consommation de drogue pouvait altérer la capacité de Y.________ de témoigner. Or, le grief soulevé n'est pas d'emblée dénué de toute pertinence au vu de la jurisprudence précitée, dès lors qu'il est constant que le témoin consommait des stupéfiants de manière importante. Il importait donc à la cour cantonale de se prononcer sur le grief soulevé, quitte à l'écarter. En omettant de traiter ce grief, elle a violé le droit d'être entendu du recourant.
2.4 Il s'ensuit que le recours doit être admis et l'arrêt attaqué doit être annulé.
Comme le recourant a obtenu gain de cause, il ne sera pas perçu de frais et le canton du Valais lui versera une indemnité à titre de dépens.
II. Pourvoi en nullité
3.
L'arrêt attaqué étant annulé, le pourvoi n'a plus d'objet.
4.
Conformément à la pratique, il n'est ni prélevé de frais ni alloué d'indemnité.
La requête d'effet suspensif devient également sans objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
I. Recours de droit public
1.
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé.
2.
Il n'est pas perçu de frais.
3.
Le canton du Valais versera au recourant une indemnité de 3000 francs à titre de dépens.
II. Pourvoi en nullité
4.
Le pourvoi est sans objet et la cause est rayée du rôle.
5.
Il n'est pas perçu de frais, ni alloué d'indemnité.
III. Communication
6.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Procureur général valaisan et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II.
Lausanne, le 22 septembre 2006
Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: