Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6S.575/2006 /rod
Arrêt du 30 janvier 2007
Cour de cassation pénale
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Ferrari et Favre
Greffière: Mme Bendani.
Parties
B.________,
C.________,
D.________,
recourants,
tous les trois représentés par Me Elie Elkaim, avocat,
contre
X.________,
intimé, représenté par Me Vincent Spira, avocat,
Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3.
Objet
Ordonnance de refus d'inculper (mise en danger de la vie d'autrui, délit manqué d'assassinat),
pourvoi en nullité contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du canton de Genève du 28 novembre 2006.
Faits :
A.
Le 14 août 2004, A.________, accompagnée de ses deux enfants, C.________ et D.________, est entrée dans la villa de ses parents, tandis que son mari, B.________, l'attendait à l'extérieur. Elle a eu une altercation avec son père, X.________. A un certain moment, ce dernier est monté à l'étage; sa fille l'a suivi. Lorsqu'elle est entrée dans la chambre où son père s'était retiré, celui-ci a pointé son revolver sur elle. A.________ a alors reculé, s'est rendue dans une chambre attenante et en est ressortie avec une longue-vue. Alors que le père et sa fille se trouvaient sur la coursive, X.________ a tiré sur elle à cinq reprises. Cette dernière est devenue hémiplégique à la suite de ses blessures.
Après ces coups de feu, B.________ est entré dans la maison, a gravi les escaliers et s'est trouvé face à son beau-père, qui a encore à deux reprises actionné son revolver déchargé contre son beau-fils.
B.
Le 16 août 2004, X.________ a été inculpé de délit manqué de meurtre à l'encontre de sa fille et de son beau-fils fils pour les faits décrits ci-dessus.
Le 22 février 2005, les parties civiles ont notamment demandé l'inculpation de X.________ pour délit manqué d'assassinat. Par décision du 25 février 2005, le juge d'instruction a rejeté cette requête, précisant que l'auteur se trouvait dans un état d'esprit exacerbé par une situation conflictuelle ayant empiré au fil du temps, ce qui correspondait à la fois aux caractéristiques de l'homicide et aux faits de la cause. Les parties n'ont pas recouru contre cette décision.
Le 19 octobre 2005, le juge d'instruction a communiqué le dossier au Procureur général. Les parties civiles ont interjeté un recours contre ce soit-communiqué, demandant entre autre une instruction complémentaire en vue d'une inculpation pour délit manqué d'assassinat. Ce recours a été rejeté.
C.
Le 15 août 2006, le Procureur général a requis le renvoi de X.________ devant la Cour d'Assises pour y être jugé pour délit manqué de meurtre au sens des art. 22 al. 1 et 111 CP s'agissant des actes commis à l'encontre de A.________. Les parties civiles ont alors sollicité des modifications de ces réquisitions. Elles ont notamment demandé le renvoi de l'auteur pour délit manqué d'assassinat, en lieu et place de délit manqué de meurtre, et des inculpations complémentaires pour délit impossible d'homicide et mise en danger de la vie d'autrui.
Par ordonnance de renvoi non datée, la Chambre d'accusation genevoise a complété les réquisitions du Ministère public, en ce sens qu'elle a également renvoyé X.________ pour délit impossible d'homicide au sens des art. 23 et 111 CP s'agissant des actes commis contre le beau-fils.
D.
Invoquant une violation des art. 28, 68, 112 et 129 CP, B.________, C.________ et D.________ déposent un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral, demandant l'annulation de l'ordonnance de renvoi.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
La décision attaquée a été rendue avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007, de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110). Or, conformément à l'art. 132 al. 1 LTF, cette loi ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur. C'est donc sur la base de l'ancien droit de procédure, soit les art. 268 ss PPF, que doit être tranchée la présente cause.
1.1 Le pourvoi en nullité est recevable contre les ordonnances de non-lieu rendues en dernière instance (art. 268 ch. 2 PPF). La jurisprudence a assimilé à une ordonnance de non-lieu au sens de l'art. 268 ch. 2 PPF la décision de la Chambre d'accusation genevoise confirmant le refus d'inculper pour des raisons de droit fédéral, au motif qu'elle tranchait définitivement, sur le plan cantonal, la question de droit fédéral décisive et scellait ainsi le sort de la procédure sur ce point (ATF 122 IV 45).
1.2 Le pourvoi en nullité n'est recevable que pour violation du droit fédéral (art. 269 al. 1 PPF). Il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits, exceptions, dénégations et preuves nouveaux, ni d'observations sur la violation du droit cantonal (art. 273 al. 1 let. b PPF). Lorsque la décision attaquée est fondée sur deux motivations indépendantes, le recourant doit démontrer pour chacune d'elles en quoi consiste, à son avis, la violation du droit fédéral. A défaut, l'une des deux motivations subsisterait de toute façon et continuerait à fonder la décision attaquée (ATF 121 IV 94 consid. 1b p. 95).
2.
Les recourants estiment que le refus de la qualification de l'infraction en délit manqué d'assassinat viole l'art. 112 CP.
La Chambre d'accusation a constaté que les parties civiles avaient déjà, à deux reprises, contesté la qualification retenue par le Parquet et requis l'assassinat à la place de l'homicide. La première fois, le juge d'instruction avait rendu une décision motivée de refus, qui n'avait fait l'objet d'aucun recours. La seconde fois, la Chambre d'accusation avait écarté cette requête (cf. supra consid. B). L'autorité cantonale a dès lors considéré que les recourants étaient forclos à invoquer l'art. 112 CP, ce pour des motifs tirés du droit de procédure genevois, lequel échappe à l'examen de la Cour de cassation, saisie d'un pourvoi (cf. supra consid. 1.2). Le grief est dès lors irrecevable.
3.
D'après les recourants, le refus de prendre en compte le chef d'inculpation de mise en danger de la vie d'autrui viole les art. 28 et 129 CP .
3.1 La Chambre d'accusation a refusé cette inculpation en se fondant sur une double motivation. D'une part, elle a estimé qu'il n'existait pas d'indices suffisants pour retenir que les éléments constitutifs de cette infraction étaient réalisés. Elle a en effet considéré que la mise en danger ne ressortait pas de manière évidente du dossier, notamment en tant que l'auteur aurait bien identifié la présence de son petit-fils, qui se trouvait dans les escaliers au moment des coups de feu, et aurait agi sans scrupule à cet égard. D'autre part, l'autorité a jugé que la requête des parties civiles était tardive au regard du droit cantonal de procédure. Elle a relevé que l'instruction n'avait jamais porté sur la réalisation des éléments constitutifs de cette infraction et que les parties n'avaient jamais sollicité d'inculpation, voire simplement d'actes d'instruction à ce sujet.
3.2 Dans leur mémoire, les recourants affirment que le tireur avait en tout état de cause accepté le résultat dommageable au cas où il surviendrait, qu'il ne pouvait ignorer la présence de son petit-fils dans les escaliers et qu'il a agi sans scrupules. Ce faisant, ils se contentent de critiquer les constatations cantonales relatives aux conditions subjectives de l'infraction, ce qu'ils sont irrecevables à faire dans un pourvoi (cf. supra consid. 1.2). De plus, contrairement à ce qu'ils semblent penser, la mise en danger de la vie d'autrui ne saurait être réalisée par simple dol éventuel (cf. 6S.426/2003; 6S.3/2006).
Les critiques dirigées contre la première motivation de la Chambre d'accusation étant irrecevables, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur les autres arguments des recourants et en particulier d'examiner si le droit cantonal de procédure violerait l'art. 28 CP et entraverait la correcte application du droit fédéral (cf. supra consid. 1.2).
4.
Selon les recourants, le refus d'appliquer les art. 112 et 129 CP entraîne une violation de l'art. 68 CP. Ce grief est vain, le pourvoi sur la question des art. 112 et 129 CP étant irrecevable.
5.
En conclusion, le pourvoi en nullité est irrecevable. Succombant, les recourants supportent les frais judiciaires (art. 278 al. 1 PPF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le pourvoi en nullité est irrecevable.
2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge des recourants.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Procureur général du canton de Genève et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.
Lausanne, le 30 janvier 2007
Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: