Tribunale federale
Tribunal federal
{T 7}
I 915/06
Arrêt du 8 mai 2007
IIe Cour de droit social
Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Moser-Szeless.
Parties
M.________,
recourant,
contre
Office cantonal AI Genève, rue de Lyon 97, 1203 Genève,
intimé.
Objet
Assurance-invalidité (AI),
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 19 septembre 2006.
Faits:
A.
Le 20 septembre 2001, M.________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité à Genève. Après avoir recueilli divers avis médicaux, l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) a rejeté la demande par décision du 21 décembre 2005. S'étant opposé à celle-ci, l'assuré a sollicité le bénéfice de l'assistance judiciaire en février 2006. Le 15 mai 2006, l'office AI a rendu une décision par laquelle il a rejeté la demande d'assistance juridique gratuite, au motif que la procédure entreprise par l'opposant apparaissait dénuée de chances de succès.
B.
L'intéressé a déféré cette décision au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève. Après avoir pris des renseignements auprès de l'Hospice général, institution genevoise d'action sociale, qui soutient financièrement M.________, le Tribunal a rejeté le recours par jugement du 19 septembre 2006.
C.
L'assuré a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en concluant à ce qu'il soit mis au bénéfice de l'assistance juridique.
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
1.1 La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
1.2 Compte tenu de l'objet du jugement entrepris qui porte sur le droit à l'assistance judiciaire dans la procédure administrative d'opposition, le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, si les faits pertinents ont été constatés de manière manifestement inexacte ou incomplète ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 OJ, dans sa teneur selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI, en vigueur depuis le 1er juillet 2006, applicable en l'espèce [let. c du ch. II de la modification du 16 décembre 2005 a contrario], en relation avec les art. 104 let. a et b, ainsi que 105 al. 2 OJ).
2.
2.1 Les décisions qui accordent ou refusent l'assistance gratuite d'un conseil juridique (art. 37 al. 4 LPGA) sont des décisions d'ordonnancement de la procédure au sens de l'art. 52 al. 1 LPGA (ATF 131 V 153 consid. 1 p. 155), de sorte qu'elles sont directement attaquables par la voie du recours devant les tribunaux des assurances institués par les cantons ( art. 56 al. 1 et 57 LPGA ; cf. également l'art. 19 al. 3 du Règlement genevois d'exécution de la loi relative à l'office cantonal des assurances sociales du 23 mars 2005 [RSG J 7 04.01]).
2.2 Le jugement entrepris expose correctement la règle légale (art. 37 al. 4 LPGA) et la jurisprudence sur les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire gratuite dans la procédure administrative en matière d'assurances sociales (conclusions non vouées à l'échec [ATF 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135; arrêt I 557/04 du 29 novembre 2004, publié à la Revue de l'avocat 2005 n° 3 p. 123], nécessité de l'assistance d'un avocat et dénuement [ATF 130 I 180 consid. 2.2 p. 182 et les références]; ATF 125 V 201 consid. 4a p. 202), de sorte qu'on peut y renvoyer.
3.
Les premiers juges ont expliqué de façon convaincante les raisons pour lesquelles la condition de la nécessité de l'assistance d'un avocat et celle exigeant que les conclusions de l'opposition ne paraissent pas vouées à l'échec sont remplies en l'occurrence. Ces considérations - auxquelles on peut renvoyer - ne sont du reste pas sérieusement contestées par l'intimé qui se limite à renvoyer à son écriture du 11 juillet 2006 déposée en instance cantonale. Est seul litigieux le point de savoir si le recourant est dans le besoin.
3.1 Se fondant sur les pièces justificatives versées par l'Hospice général, la juridiction cantonale a retenu que M.________, qui vivait seul et avait une obligation de soutien, avait reçu de l'institution sociale un montant mensuel moyen de 2943 fr. 50 en 2004 et de 3011 fr. en 2005. Il avait par ailleurs reçu la somme de 2464 fr. 50 pour le mois de juin 2006, 3357 fr. 70 pour le mois de juillet 2006 et 3929 fr. 90 pour le mois d'août 2006. Il ne payait pas d'impôts, tandis que ses primes d'assurance-maladie étaient, selon les constatations de la juridiction cantonale, prises en charge par l'Hospice général. Prenant en compte le montant de base mensuel pour le calcul du minimum vital (1250 fr. [débiteur seul avec obligation d'entretien]), augmenté d'un supplément de 30% (375 fr.), ainsi que le loyer du recourant (750 fr.), les premiers juges ont fixé à 2375 fr. les charges mensuelles. Comparant celles-ci aux ressources du recourant, ils en ont déduit que les revenus s'avéraient supérieurs à ses dépenses, de sorte qu'il ne remplissait pas les conditions économiques pour avoir droit à l'assistance judiciaire dans la procédure d'opposition.
3.2 Le recourant conteste les montants retenus par la juridiction cantonale au titre de ressources, en lui reprochant d'avoir ajouté à l'aide qu'il recevrait effectivement de l'Hospice général (960 fr. pour le montant de base, plus 20 fr. par jour en cas de séjour des enfants chez lui), des montants dont l'institution d'aide sociale s'acquitterait directement auprès de tiers (primes d'assurance-maladie et factures de médecin).
4.
4.1 Saisi d'un recours de droit administratif, le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 126 V 254 consid. 1a; cf. également ATF 129 II 199 consid. 3.4, 128 II 60 consid. 2b). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité précédente (art. 114 al. 1 OJ in fine OJ).
4.2 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), en particulier, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 132 V 368 consid. 3.1 p. 370 et les références). Le droit d'être entendu doit également être reconnu et respecté lorsqu'une autorité envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties en présence ne s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence in casu (ATF 128 V 278 consid. 5b/bb et les références).
4.3 L'autorité cantonale de recours a rejeté le recours en se fondant sur une des conditions du droit à l'assistance judiciaire qui n'avait pas été évoquée au cours de la procédure administrative, puisque l'intimé avait refusé l'assistance judiciaire en retenant uniquement que les conclusions au fond étaient dénuées de chances de succès. Au préalable, la juridiction cantonale n'a pas donné l'occasion au recourant de se prononcer sur sa situation financière, ni d'étayer davantage son indigence qu'en se référant aux pièces produites à l'appui de sa requête d'assistance judiciaire, selon lesquelles il bénéficie de l'aide sociale. Dans la mesure cependant où les allocations de l'assistance sociale ne permettent en principe pas à leur bénéficiaire de réaliser des soldes positifs susceptibles de financer d'éventuelles procédures judiciaires (RDAT 1997 I n° 53 p. 161 consid. 4c/bb), les premiers juges étaient tenus, du moment qu'ils envisageaient de se fonder sur le motif tiré de l'absence d'indigence, de donner au recourant l'occasion de se prononcer précisément sur ce point.
En outre, si l'autorité cantonale de recours lui a par la suite fait parvenir les documents recueillis auprès de l'Hospice général, elle n'a toutefois pas invité le recourant à se déterminer sur ceux-ci, ni ne lui a octroyé la possibilité d'alléguer et d'établir les faits y relatifs. A cette occasion, le recourant aurait, par exemple, pu faire valoir en tant que dépenses les frais médicaux dont il affirme qu'ils ont été directement pris en charge par l'institution d'aide sociale et montrer éventuellement qu'ils correspondent aux montants retenus au titre de ressources par l'autorité judiciaire cantonale comme «factures payées directement par l'Hospice général». En plus des primes de l'assurance pour les soins obligatoire, les frais médicaux répétés qui ne sont pas pris en charge par la caisse-maladie doivent en effet être pris en compte comme dépenses (Alfred Bühler, Die Prozessarmut, in: Frais de justice, frais d'avocat, cautions/sûretés, assistance juridique, Berne 2001, p. 168 et 174; du même auteur, Betreibungs- und prozessrechtliches Existenzminimum, PJA 2002 p. 644 ss).
Par conséquent, en n'invitant pas le recourant à s'exprimer sur la condition d'indigence, la juridiction cantonale a violé son droit d'être entendu, sans qu'il soit possible en l'occurrence de réparer cette atteinte compte tenu du pouvoir d'examen restreint de la Cour de céans (cf. ATF 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437, 126 V 130 consid. 2b p. 132 et les références).
4.4 Il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris doit être annulé et la cause renvoyée à la juridiction cantonale, afin qu'elle statue à nouveau après avoir accordé au recourant la faculté d'exercer son droit d'être entendu.
5.
Les litiges portant sur l'assistance judiciaire ne sont en principe pas soumis à des frais de justice (SVR 1994 IV n° 29 p. 76 consid. 4; arrêt I 713/01 du 22 avril 2002, publié dans Plädoyer 2002/3 p. 75), de sorte que la procédure est gratuite.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 19 septembre 2006 est annulé, la cause lui étant renvoyée pour qu'il procède conformément aux considérants.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 8 mai 2007
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: