Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6F_1/2007 /viz
Arrêt du 9 mai 2007
Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger, Ferrari, Zünd et Mathys.
Greffier: M. Vallat.
Parties
A.________,
requérant, représenté par Me Christian Favre, avocat,
contre
Ministère public du canton du Valais,
Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2,
Tribunal cantonal valaisan, IIe Cour pénale,
Palais de Justice, 1950 Sion 2.
Objet
Révision de l'arrêt du Tribunal fédéral du
29 décembre 2006 (6P.168/2006 et 6S.351/2006).
Faits :
A.
Par arrêt du 29 décembre 2006, la cour de céans a rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours de droit public et admis partiellement en application de l'art. 277 PPF le pourvoi en nullité formés tous deux par A.________ contre un arrêt du 21 juin 2006 émanant de la Cour pénale II du Tribunal cantonal valaisan. En ce qui concerne les frais de procédure, un émolument judiciaire de 2000 francs a été mis à la charge du recourant pour le recours de droit public, cependant qu'il n'a pas été perçu de frais, ni alloué d'indemnité pour le pourvoi en nullité.
B.
A.________ forme une demande de révision de cet arrêt en application de l'art. 136 let. c OJ, invoquant qu'il n'a pas été statué sur sa conclusion tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire. Il conclut à la modification de l'arrêt entrepris en ce sens que la demande d'assistance judiciaire jointe aux deux recours précités soit admise, que Me Christian Favre, avocat, soit désigné en qualité de conseil d'office, qu'une indemnité soit allouée à ce dernier à titre d'honoraires pour chacun des deux recours et qu'il ne soit pas perçu de frais. Il sollicite par ailleurs à nouveau l'assistance judiciaire pour la procédure de révision.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
L'acte attaqué a été rendu avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le 1er janvier 2007, cependant que la requête de révision a été formée après cette date. Il convient donc d'examiner si la procédure est soumise à la nouvelle loi en application de l'art. 132 al. 1 première phrase LTF ou si la demande de révision doit être assimilée à un recours au sens de la deuxième phrase de cette disposition.
1.1 La révision, qui constitue une voie de droit extraordinaire, présente certes des similitudes avec les recours au Tribunal fédéral. Pour ces derniers, la justification de la règle dérogatoire de l'art. 132 al. 1 deuxième phrase LTF repose notamment sur le risque qu'un délai qui a commencé à courir sous l'ancien droit soit écourté par l'entrée en vigueur du nouveau droit. Or, la durée des délais pour demander la révision n'a pas été modifiée dans le nouveau droit (cf. art. 141 OJ et 124 LTF) et seule la computation de ces délais a été modifiée, sur des points mineurs (prise en considération du premier jour suivant la fin des féries dans le calcul d'un délai de recours contre un acte notifié durant les féries [art. 32 al. 1 OJ; art. 44 al. 1 LTF; ATF 132 II 153]; nouveau point de départ du délai pour déposer une demande de révision en cas de violation de la CEDH [art. 141 al. 1 let. c OJ: 90 jours à compter de la notification aux parties par l'Office fédéral de la justice de la décision des autorités européennes; art. 124 al. 1 let. c LTF: 90 jours après que l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme est devenu définitif au sens de l'art. 44 CEDH]). En droit transitoire, singulièrement dans le domaine de la procédure, la soumission au nouveau droit, dès son entrée en vigueur, de la computation d'un délai qui a commencé à courir sous l'ancien droit n'est cependant pas exceptionnelle. Elle résulte, par exemple, de l'art. 2 al. 1 et 2 des dispositions finales de la modification du 16 décembre 1994 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (Message du Conseil fédéral concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 8 mai 1991, FF 1991 III 1 ss, spéc. 224).
1.2 Il y a lieu de considérer également que la règle dérogatoire de la seconde phrase de l'art. 132 al. 1 LTF n'implique qu'une dérogation minime au principe posé par la première phrase de cette même disposition en ce sens que la brièveté des délais de recours n'entraîne qu'une période transitoire de courte durée durant laquelle l'ancienne loi d'organisation judiciaire demeure applicable parallèlement à la novelle du 17 juin 2005. Il n'en irait, en revanche, pas de même en ce qui concerne la révision si elle devait demeurer régie par les règles de l'OJ dans tous les cas où l'arrêt soumis à révision aurait été rendu sous l'empire de cette loi. La révision peut en effet être demandée jusqu'à dix ans, voire plus longtemps encore dans les cas visés par les art. 124 al. 2 OJ et 141 al. 2 LTF, après l'entrée en force de l'arrêt fédéral.
Il s'ensuit qu'il n'y a pas de raison, en matière de révision, de déroger au principe selon lequel la LTF s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur (art. 132 al. 1 première phrase LTF). Elle est applicable en l'espèce.
2.
Le recourant invoque le motif de révision tiré de l'art. 136 let. c OJ, aux termes duquel la demande de révision d'un arrêt du Tribunal fédéral est recevable lorsqu'il n'a pas été statué sur certaines conclusions. Ce motif de révision a été repris sans changement par l'art. 121 let. c LTF.
2.1 Selon une jurisprudence déjà ancienne, le fait que le Tribunal fédéral n'a pas statué sur une conclusion ne constitue un motif de révision qu'en ce qui concerne les conclusions de fond, à l'exclusion, notamment de celles tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire (ATF 101 Ib 220 consid. 2 p. 222 s.), parce qu'il peut être statué implicitement sur ces conclusions, comme sur celles de procédure.
2.2 En doctrine, la plupart des auteurs énoncent ce principe en se référant à l'arrêt publié précité sans plus amples commentaires (à propos de l'art. 136 let. c OJ: Ursina Beerli-Bonorand, Die ausserordentlichen Rechtsmittel in der Verwaltungsrechtspflege des Bundes und der Kantone, thèse, Zurich 1985, p. 135; Jean-François Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, Berne 1992, vol. V, art. 136, n. 4; Karl Spühler/ominik Vock, Rechtsmittel in Zivilsachen im Kanton Zürich und im Bund, Zurich 1999, p. 159; en relation avec le nouvel art. 121 let. c LTF: Karl Spühler/Annette Dolge/Dominik Vock, Kurzkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Zurich/St-Gall 2006, art. 121 LTF, n. 3; moins affirmatif cependant en ce qui concerne les conclusions de procédure en général: Nicolas von Werdt, in Bundesgerichtsgesetz [BGG], Berne 2007, art. 121 LTF, n. 23).
2.3 La justification de l'arrêt publié aux ATF 101 Ib 220 repose exclusivement sur le fait qu'il peut être statué implicitement sur les conclusions de procédure et celles tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire. Dans sa formulation absolue, le principe à la base de cet arrêt suppose l'existence d'une présomption irréfragable que le silence du tribunal exprime un jugement implicite des conclusions de procédure ou tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire. Comme l'a jugé le Tribunal fédéral dans l'arrêt publié aux ATF 114 Ia 332, consid. 2b p. 334, cette présomption n'est pourtant pas absolue, même en matière de dépens, si bien que la motivation de l'arrêt publié aux ATF 101 Ib 220 n'explique pas ce qui justifierait le rejet de la demande de révision lorsqu'il y a des raisons sérieuses d'admettre que le tribunal a effectivement omis de statuer sur une conclusion de procédure ou tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire. Par ailleurs, l'allocation ou le refus de dépens visés par l'ATF 114 Ia 332 sont étroitement liés au sort de la cause au fond. Souvent, on peut ainsi déduire du dispositif sur les points principaux quel sort a implicitement été donné à la question des dépens. Il n'en va, en revanche, pas de même de l'assistance judiciaire, dont l'octroi ou le refus ne dépend pas exclusivement du sort de la cause au fond, mais procède d'une appréciation plus complexe d'autres facteurs, dont la situation économique de la partie requérante (qui ne ressort pas nécessairement des considérants de l'arrêt), la difficulté des questions soulevées (pour la désignation d'un conseil d'office) et surtout le pronostic sur les chances de succès (art. 152 OJ; art. 64 LTF), qui ne peut, en règle générale, pas être non plus déduit du seul dispositif de l'arrêt sur les points principaux. Il se justifie ainsi moins encore pour les conclusions tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire que pour celles tendant à l'octroi de dépens de présumer de manière absolue que le silence du dispositif de l'arrêt exprime un jugement implicite. Une telle présomption ne peut donc fonder, à elle seule et de prime abord, le rejet de la demande de révision motivée par l'absence de décision sur une conclusion tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire.
2.4 Il y a ainsi lieu d'examiner, au préalable, s'il existe des raisons sérieuses d'admettre que le tribunal a effectivement omis de statuer sur les conclusions tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire.
2.5 A cet égard, il convient de relever que l'arrêt du 29 décembre 2006 ne mentionne les conclusions du recourant tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire ni dans ses considérants en fait, ni dans ses considérants en droit. Il s'agit d'un premier indice permettant de penser que ces conclusions ont purement et simplement été omises. Cet arrêt n'a, par ailleurs, pas été rendu dans la procédure de l'art. 36a OJ, si bien que la procédure suivie ne permet pas non plus, à elle seule, de retenir que le recours était manifestement irrecevable ou infondé et donc d'emblée privé de chances de succès. La motivation de l'arrêt ne fournit non plus aucune indication que la situation financière du recourant était telle qu'elle aurait de toute évidence justifié le refus de l'assistance judiciaire. Dans ces conditions, le seul fait que des frais ont été mis à la charge du recourant pour le recours de droit public et qu'il a été statué sans frais ni dépens pour le pourvoi en nullité admis partiellement, ne permet pas d'interpréter le silence du dispositif sur la question de l'assistance judiciaire comme un refus implicite de cette dernière. Il convient dès lors de trancher la question du droit du demandeur en révision à l'assistance judiciaire pour la procédure précédente.
3.
3.1 Conformément à l'art. 152 OJ, qui était applicable au moment où le Tribunal fédéral a statué, le tribunal dispense, sur demande, une partie qui est dans le besoin et dont les conclusions ne paraissent pas vouées à l'échec de payer les frais judiciaires, ainsi que de fournir des sûretés pour les dépens. Exception est faite pour les cas de prorogation de juridiction (al. 1). Au besoin, le tribunal peut faire assister cette partie d'un avocat; si elle n'obtient pas gain de cause ou que les dépens ne puissent être recouvrés, les honoraires de l'avocat sont fixés par le tribunal conformément au tarif prévu à l'art. 160 et supportés par la caisse du tribunal (al. 2). Si la partie peut rembourser ultérieurement la caisse, elle est tenue de le faire.
3.2 A l'appui de sa requête d'assistance judiciaire, le recourant invoquait, d'une part, la décision lui accordant l'assistance judiciaire en procédure cantonale (du 10 mars 2004) et, d'autre part, les constatations de fait ressortant de l'arrêt du 21 juin 2006, relatives à sa situation économique. Il ressort de cet arrêt cantonal qu'ensuite des faits pour lesquels il a été renvoyé en jugement, le requérant en révision a travaillé quelques temps dans une entreprise de plomberie pour un revenu de 3800 francs par mois. Après avoir perdu cet emploi, il a été hébergé par sa mère à Bruxelles. Faute de revenus fixes, il ne peut assumer régulièrement l'entretien de ses trois enfants. Sa situation financière était jugée mauvaise. Ces éléments permettent d'admettre qu'il est dans le besoin au sens de l'art. 152 al. 1 OJ. Le recours de droit public, qui posait des questions relativement délicates d'interprétation du droit cantonal de procédure et le pourvoi en nullité, qui a été partiellement admis, n'apparaissaient, par ailleurs, pas d'emblée dénués de toute chance de succès. Enfin, le dossier de la cause, qui portait sur la responsabilité pénale du demandeur en révision dans le cadre de la débâcle d'un groupe de sociétés avait trait à des questions juridiques et financières suffisamment complexes pour justifier l'assistance d'un conseil d'office. Les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire sont ainsi remplies.
Il s'ensuit que le demandeur en révision aurait dû être dispensé des frais mis à sa charge pour le recours de droit public. Son conseil aurait dû être désigné en qualité de conseil d'office. Une indemnité aurait dû lui être allouée aussi bien pour le recours de droit public que pour le pourvoi.
4.
Le demandeur en révision obtient gain de cause et ne supporte donc pas de frais de procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il peut prétendre une indemnité de dépens qui, faute de partie succombant, lui sera versée par la caisse du Tribunal fédéral. La demande d'assistance judiciaire pour la procédure de révision est sans objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
La demande en révision est admise.
2.
Le chiffre 2 de l'arrêt du 29 décembre 2006 est annulé et remplacé par un nouveau chiffre 2 ainsi libellé:
"2. Il n'est pas perçu de frais."
3.
Le dispositif de l'arrêt du 29 décembre 2006 est complété par les chiffres 6 et 7 suivants:
"6. La requête d'assistance judiciaire est admise pour le recours de droit public et le pourvoi en nullité.
7. Me Christian Favre est désigné en qualité de conseil d'office du recourant et une indemnité de 2000 fr. pour le recours de droit public et 2000 francs pour le pourvoi en nullité lui sera versée à titre d'honoraires par la Caisse du Tribunal fédéral."
4.
Il n'est pas perçu de frais pour la procédure de révision.
5.
La Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 1000 francs au mandataire du requérant à titre de dépens pour la procédure de révision.
6.
La requête d'assistance judiciaire pour la procédure de révision est sans objet.
7.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du requérant, au Ministère public du canton du Valais et au Tribunal cantonal valaisan, IIe Cour pénale.
Lausanne, le 9 mai 2007
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: