Tribunale federale
Tribunal federal
{T 7}
I 616/06
Arrêt du 24 septembre 2007
IIe Cour de droit social
Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Fretz.
Parties
F.________,
recourant, représenté par Me Isabelle Poncet Carnicé, avocate, rue de Hesse 8-10, 1211 Genève 11,
contre
Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue Edmond-Vaucher 18, 1203 Genève,
intimé.
Objet
Assurance-invalidité,
recours de droit administratif contre le jugement de la Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger du 29 mai 2006.
Faits:
A.
A.a F.________, ressortissant espagnol né en 1951, a travaillé en Suisse jusqu'en 1994 en qualité de machiniste. Le 5 décembre 1994, il a présenté une demande de rente de l'assurance-invalidité auprès de l'office cantonal AI de Genève (ci-après: l'OCAI). Instruisant la cause, l'OCAI a recueilli un rapport du docteur A.________, spécialiste FMH en médecine interne, du 5 janvier 1995, lequel a posé le diagnostic de syndrome obstructif chronique des bronches, ostéoporose généralisée idiopathique et ulcère gastro-duodénal, ainsi qu'un rapport du docteur L.________, spécialiste FMH en médecine interne, du 22 janvier 1997, dont il ressort que l'assuré souffrait d'ostéoporose idiopathique généralisée ainsi que d'un asthme intrinsèque. L'assuré a effectué un stage au centre d'observation professionnelle de l'assurance-invalidité (COPAI), du 18 novembre au 13 décembre 1996. Dans leur rapport subséquent du 28 janvier 1997, les maîtres de stage ont conclu à une inaptitude au travail, même dans des activités légères, seul un emploi en atelier protégé étant envisagé. Par décision du 24 février 1998, l'OCAI a mis l'assuré au bénéfice de la moitié d'une rente ordinaire d'invalidité pour couple (rente entière) à partir du 1er octobre 1994.
Suite au retour de l'assuré dans son pays d'origine, le dossier a été transmis à la Caisse suisse de compensation puis à l'Office AI pour les assurés résidant à l'étranger (ci-après: l'OAI).
A.b En février 2000, l'OAI a entrepris une procédure de révision du droit à la rente. Il a ainsi recueilli un rapport médical détaillé de l'Institut national de la sécurité sociale espagnole (INSS), du 27 octobre 2000, un rapport d'examen pneumatologique, du 19/20 juin 2000, et un rapport d'examen de densitométrie osseuse, du 26 juin 2000. Dans un rapport du 20 février 2001, le docteur E.________, du service médical de l'AI, a estimé que l'état de santé de l'assuré s'était amélioré et qu'une activité adaptée était exigible à plein temps. Procédant à une comparaison des revenus avant et après invalidité, l'administration a établi que l'intéressé subissait une perte de gain de 35 %. Par décision du 13 août 2001, l'OAI a supprimé le droit à la rente d'invalidité à partir du 1er octobre 2001.
Sur recours de F.________, la Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger (aujourd'hui: Tribunal administratif fédéral) a annulé cette décision et renvoyé la cause à l'administration pour complément d'instruction (jugement du 21 octobre 2002). Elle a considéré que les documents recueillis au cours de la procédure de révision ne permettaient pas d'établir si l'état de santé et la capacité de gain de l'assuré s'étaient améliorés ou péjorés.
A.c L'OAI a requis la Clinique X.________ de réaliser une expertise médicale pluridisciplinaire. Dans leur rapport du 3 mai 2004, les médecins ont posé le diagnostic de trouble somatoforme indifférencié (F45.1), BPCO stade I (J44.8), asthme chronique persistant modéré (J45.9), tabagisme (F17.2), ostéoporose idiopathique traitée (M81.5) et troubles statiques rachidiens (M40.2). Selon ces derniers, l'assuré avait conservé une capacité de travail dans toute activité légère et ne comportant pas d'exposition à des irritants respiratoires, ni à des variations de température ambiante importantes. Ils concluaient que dans ce contexte l'évaluation sortait largement du champ médical, les aspects socio-économico-professionnels (invalidité partielle reconnue de l'épouse, désinsertion totale du monde du travail depuis dix ans) semblant largement prépondérants.
Par décision du 7 octobre 2004, confirmée sur opposition le 24 mars 2005, l'OAI a reconsidéré la décision du 24 février 1998, par laquelle l'OCAI avait alloué une rente entière d'invalidité à partir du 1er octobre 1994, au motif qu'elle était manifestement erronée, dans la mesure où elle se fondait sur des facteurs non médicaux relevés par le COPAI. L'OAI a confirmé la suppression de la prestation avec effet au 1er octobre 2001.
B.
Par jugement du 29 mai 2006, la Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les assurés résidant à l'étranger a rejeté le recours de F.________ contre la décision sur opposition du 24 mars 2005.
C.
F.________ a, le 3 juillet 2006, interjeté un recours de droit administratif, en concluant, sous suite de dépens, au maintien de la décision du 24 février 1998 ainsi qu'à l'octroi d'une rente entière, subsidiairement d'une demi-rente d'invalidité, dès le 1er octobre 2001.
L'OAI a conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
2.
Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance-invalidité, de sorte que le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, si les faits pertinents ont été constatés de manière manifestement inexacte ou incomplète ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 al. 2 OJ [dans sa teneur selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI, en vigueur depuis le 1er juillet 2006], en relation avec les art. 104 let. a et b, ainsi que 105 al. 2 OJ).
3.
Le jugement entrepris expose de manière exacte et complète la réglementation légale sur la révision (art. 17 al. 1 LPGA) et la reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA), de sorte qu'il suffit d'y renvoyer sur ces points (cf. consid. 3 et 4 du jugement cantonal).
4.
A l'instar de l'administration, la juridiction cantonale a nié que les conditions d'une révision au sens de l'art. 17 LPGA fussent remplies. Elle a en revanche retenu que les conditions d'une reconsidération de la décision du 24 février 1998 étaient réalisées et confirmé la suppression de la rente à partir du 1er octobre 2001. Seul ce dernier point étant contesté, il convient d'examiner si la décision du 24 février 1998 était manifestement erronée.
4.1 Les premiers juges ont considéré que la décision initiale de l'intimé était manifestement erronée, dès lors que l'administration avait reconnu le recourant totalement incapable de travailler alors qu'aucun rapport médical n'attestait une incapacité de travail complète dans toute activité lucrative - le rapport du COPAI ne pouvant pas remplacer une évaluation médicale -. Par ailleurs, l'OCAI n'avait pas examiné si la mise en oeuvre de mesures de réadaptation était exigible, ni procédé à une comparaison des revenus. La juridiction cantonale a examiné les répercussions de la capacité de travail résiduelle du recourant dans une activité adaptée sur sa situation économique. Elle a déduit de la comparaison des revenus avant et après invalidité, compte tenu d'un abattement de 25 % sur le revenu d'invalide, qu'il présentait un taux d'invalidité de 33 %.
4.2 Comme le relève le recourant, les constatations des premiers juges sont en contradiction manifeste avec les rapports médicaux se trouvant au dossier. En effet, le docteur A.________ a indiqué que toute activité professionnelle nécessitant des efforts physiques ou sollicitant l'appareil ostéoarticulaire de manière répétée était formellement contre-indiquée, de même que l'exposition à des substances ou poussières irritantes pour les voies respiratoires. Le médecin précisait que la capacité de travail ne pouvait être améliorée par des mesures médicales et que des mesures professionnelles n'étaient pas indiquées. Le docteur L.________ était d'avis qu'une activité professionnelle suivie était incompatible avec les douleurs osseuses et musculaires du recourant dès lors qu'elles nécessitaient des changements de position trop fréquents. Quant aux experts du COPAI, ils ont attesté que le rendement de l'assuré n'était pas exploitable, compte tenu de son manque de résistance et de force physique. Par ailleurs, l'examen de ses capacités d'apprentissage et d'adaptation montrait qu'il ne pouvait pas être réadapté dans des tâches plus légères physiquement mais aussi plus exigeantes intellectuellement. Seule une activité en atelier protégé, adaptée aux possibilités restreintes de l'assuré, était envisageable.
Ainsi, il appert des pièces médicales ainsi que du rapport de stage COPAI recueillis à l'époque de la décision initiale de rente, que la capacité de travail du recourant était nulle aussi bien dans son ancienne profession que dans une activité plus légère. Par conséquent, son degré d'invalidité se confondant avec celui de l'incapacité de travail, il était superflu, en pareil cas, de procéder à une comparaison des revenus avec et sans invalidité (cf. ATF 104 V 136 consid. 2b). D'autre part, en retenant que l'OCAI n'a pas examiné la question de la priorité de la réadaptation sur la rente, les premiers juges ont fait une appréciation manifestement inexacte des rapports médicaux et du rapport du COPAI (cf. les passages en italique au point 4.2).
4.3 Au vu de ce qui précède, il n'apparaît pas que la décision initiale de rente du 24 février 1998, par laquelle l'OCAI a alloué au recourant une rente entière d'invalidité, fût manifestement erronée. Par conséquent, en admettant que les conditions de l'art. 53 al. 2 LPGA étaient remplies en l'espèce, la juridiction cantonale a violé le droit fédéral.
Partant, le recours s'avère bien fondé.
5.
La présente procédure, qui a trait à des prestations de l'assurance-invalidité, est onéreuse (art. 134 2ème phrase OJ). L'office AI qui succombe doit en supporter les frais (art. 156 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Par ailleurs, obtenant gain de cause et représenté par un avocat, le recourant a droit à des dépens à la charge de l'intimé (art. 156 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours de droit administratif est admis et le jugement de la Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les personnes résidant à l'étranger, du 29 mai 2006, ainsi que la décision sur opposition de l'OAI, du 24 mars 2005, sont annulés. Le recourant a droit à une rente entière d'invalidité à partir du 1er octobre 2001.
2.
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
3.
L'avance de frais effectuée par le recourant, d'un montant de 500 fr., lui est restituée.
4.
L'intimé versera au recourant la somme de 2500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.
5.
Le Tribunal administratif fédéral statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière instance.
6.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal administratif fédéral et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 24 septembre 2007
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière: