Tribunale federale
Tribunal federal
{T 7}
B 9/07
Arrêt du 27 novembre 2007
IIe Cour de droit social
Composition
MM. les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Kernen.
Greffière: Mme Fretz.
Parties
M.________,
recourante, représentée par Me Minh Son Nguyen, avocat, rue du Simplon 13, 1800 Vevey 1,
contre
Fondation veveysanne de prévoyance, p.a. Banque cantonale vaudoise, case postale 300, 1001 Lausanne,
intimée, représentée par Me Corinne Monnard Séchaud, avocate, avenue Juste-olivier 17, 1001 Lausanne.
Objet
Prévoyance professionnelle,
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 7 septembre 2006.
Faits:
A.
M.________ (née en 1951) a été engagée par la société X.________ en qualité de secrétaire-réceptionniste à partir du 1er mars 1998. A ce titre, elle a été affiliée en prévoyance professionnelle auprès de la Fondation veveysanne de prévoyance (ci-après: la fondation). La société X.________ a résilié le contrat de travail de M.________ avec effet au 31 mai 1998. Celle-ci a toutefois continué de travailler auprès de son ancien employeur sous contrat de mission avec la société de placement en personnel Y.________. Au terme de ce contrat, M.________ était engagée en qualité de secrétaire-réceptionniste à partir du 1er juin 1998 pour une durée indéterminée et un salaire horaire de 23 fr. 80. Les rapports de travail avec Y.________ ont pris fin le 11 juin suivant.
Le 15 juin 1998, M.________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente en raison de troubles psychiatriques et de somatisations multiples - existant depuis plusieurs années - ayant nécessité un traitement médical pour dépression ainsi qu'un séjour en hôpital psychiatrique du 5 novembre 1992 au 1er février 1993. Après avoir constaté que M.________ présentait une incapacité de travail de longue durée depuis le 29 mai 1998, l'Office de l'assurance-invalidité Z.________ (ci-après: l'OAI) a, par décision du 9 juillet 1999, mis M.________ au bénéfice d'une demi-rente d'invalidité à partir du 1er mai 1999.
Le 20 décembre 1999, M.________ a annoncé à la fondation une incapacité de gain. Le 18 février 2000, la Banque cantonale vaudoise, en sa qualité de gestionnaire institutionnel de la fondation, a écrit notamment ce qui suit à l'assurée: « Comme vous avez été en traitement médical du 3 novembre 1993 au 19 août 1998, nous dénonçons avec effet rétroactif le contrat de prévoyance portant sur les prestations complémentaires dépassant la part obligatoire, en raison de renseignements inexacts donnés dans la demande d'admission du 3 mars 1998. D'autre part, il ressort du dossier de l'Assurance-invalidité (AI) que vous avez été en incapacité de gain en 1997 déjà. Nous vous saurions donc gré de nous transmettre un certificat médical qui mentionne le début et la fin de chaque incapacité de gain durant cette année-là et s'il s'agissait de la même cause qui a conduit à l'invalidité ».
B.
Le 11 mai 2005, M.________ a ouvert action devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud contre la fondation, en concluant à l'octroi d'un montant de 50'773 fr. puis, en cours de procédure, à l'allocation de prestations d'invalidité sous la forme d'une rente.
Le Président du Tribunal des assurances a tenu une audience le 13 janvier 2006, au cours de laquelle M.________ a indiqué qu'en juin 1998, elle avait travaillé une dizaine de jours chez X.________ mais en étant sous contrat de travail avec l'agence de placement de personnel Y.________. Le 29 mai 1998, elle avait consulté le docteur A.________, son médecin traitant, qui lui avait prescrit un arrêt de travail à 50 % depuis ce même jour. Elle avait néanmoins essayé de continuer à travailler à 100 % pendant une dizaine de jours car elle tenait à conserver son emploi.
Par jugement du 7 septembre 2006, le Tribunal cantonal a rejeté la demande.
C.
M.________ a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'une rente par la Fondation veveysanne de prévoyance.
L'institution de prévoyance intimée a conclu au rejet du recours tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à formuler des conclusions.
Considérant en droit:
1.
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
2.
Ont droit à des prestations d'invalidité les invalides qui étaient assurés lors de la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité (art. 23, 2e partie de la phrase, LPP). Selon la jurisprudence, l'événement assuré au sens de l'art. 23 LPP est uniquement la survenance d'une incapacité de travail d'une certaine importance, indépendamment du point de savoir à partir de quel moment et dans quelle mesure un droit à une prestation d'invalidité est né (ATF 123 V 263 consid. 1a, 118 V 45 consid. 5).
L'assurance obligatoire commence en même temps que les rapports de travail et cesse en cas de dissolution de ceux-ci. Durant un mois après la fin des rapports avec l'institution de prévoyance, le salarié demeure assuré auprès de l'ancienne institution de prévoyance pour le risque d'invalidité. Si un rapport de prévoyance existait auparavant, c'est la nouvelle institution de prévoyance qui est compétente (art. 10 al. 1 à 3 LPP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004). L'art. 7 du règlement de prévoyance de la fondation prévoit une réglementation analogue.
3.
3.1 Les premiers juges ont constaté que si la recourante avait déclaré avoir consulté le docteur A.________ le 29 mai 1998, aucun certificat médical permettant de l'attester n'avait été produit en procédure. Par ailleurs, il était établi que le vendredi 29 mai 1998, la recourante avait travaillé toute la journée au sein de l'entreprise X.________. A cet égard, l'employeur précité avait indiqué, dans un questionnaire ad hoc rempli le 7 juillet 1998 à l'intention de l'OAI, ne pas avoir eu connaissance d'une quelconque atteinte à la santé de l'assurée, ce qui était confirmé par le fait qu'elle avait continué à travailler à 100 % pendant une dizaine de jours, comme elle l'avait d'ailleurs elle-même rappelé en audience. On pouvait donc en conclure, selon les premiers juges, que pendant la durée de son engagement auprès de la société X.________, la demanderesse n'avait pas présenté d'incapacité de travail, de sorte que l'institution de prévoyance à laquelle était affilié cet employeur n'était pas tenue d'intervenir.
3.2 Pour sa part, la recourante se fonde sur les rapports de ses médecins traitants, les docteurs B.________ (spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie) et A.________ (interniste). Dans leurs rapports du 2, respectivement du 7 septembre 1998, ces derniers ont constaté une incapacité de travail de 50 % à partir du 29 mai 1998. Par ailleurs, elle justifie son activité du 1er au 11 juin 1998 par le fait qu'elle voulait à tout prix conserver son emploi. Elle aurait cependant effectué des heures irrégulières, comme cela ressortirait du décompte hebdomadaire de ses heures de travail pour la période en question.
De son côté, l'intimée fait valoir que l'incapacité de travail présentée par M.________ n'a pas été annoncée durant son activité au sein de l'entreprise X.________, ce qui aurait dû avoir pour effet de reporter le délai de congé. L'intimée conteste par ailleurs que le début de l'incapacité de travail de la recourante fût le 29 mai 1998 car cette dernière a travaillé jusqu'au 11 juin 1998, de sorte qu'une incapacité de travail permanente n'a pu commencer au plus tôt que le 11 juin 1998. Or, à cette date, l'employeur de la recourante était l'entreprise Y.________.
4.
4.1 Le litige porte sur le point de savoir si l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité est survenue pendant la période au cours de laquelle la recourante était assurée auprès de l'intimée. Il n'est pas contesté en l'espèce que la recourante a été assurée auprès de l'intimée à partir du 1er mars 1998, lorsque ses rapports de travail avec la société X.________ ont commencé. En revanche, les premiers juges n'ont pas déterminé le moment auquel cette couverture d'assurance avait pris fin. Il ressort des pièces au dossier qu'après la cessation de ses rapports de service avec l'entreprise X.________, la recourante a été engagée pour une durée indéterminée par la société Y.________ à partir du 1er juin 1998. Dès lors qu'à ce moment-là, la recourante était assurée auprès de l'institution de prévoyance de son nouvel employeur, sa couverture d'assurance auprès de l'intimée a pris fin au 31 mai 1998.
4.2 En l'espèce, dans la mesure où l'office AI n'a pas notifié la décision de rente à la fondation, ce qui n'est du reste pas contesté, l'intimée n'était pas liée par l'évaluation de l'invalidité de la recourante effectuée par les organes de l'assurance-invalidité, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges (ATF 129 V 73).
5.
5.1 Selon la jurisprudence, la notion d'incapacité de travail est définie comme étant la « diminution de l'aptitude fonctionnelle dans sa profession ou son domaine d'activité » (ATF 130 V 97 consid. 3.2 p. 99 et les références). Il y a lieu d'office d'examiner avec le plus grand soin si, bien que touchant son salaire, une personne se trouve effectivement frappée dans une mesure importante dans sa capacité de travail, si donc dans le cadre des rapports de travail - compte tenu de son domaine normal d'activité - elle fournit sa prestation habituelle ou n'en fournit plus qu'une réduite du fait de l'atteinte à la santé (Meyer-Blaser, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum IVG, Zürich 1997, p. 289). Selon la jurisprudence, une baisse de rendement doit se manifester au regard du droit du travail et avoir été remarquée par l'employeur. Une incapacité de travail médico-théorique qui n'a été constatée que des années après ne suffit pas (arrêt B 75/01 du 6 février 2003 consid. 2.2).
5.2 Le début de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité au sens de l'art. 23 LPP est d'une importance capitale pour l'institution de prévoyance dès lors qu'une incapacité de travail survenue pendant les rapports de travail ou avant l'expiration du délai de couverture prolongée peut impliquer le versement de prestations de la prévoyance sur une très longue durée. Ce moment doit par conséquent être établi de manière précise. Si en droit du travail, un certificat médical ou toute autre pièce suffit à attester une incapacité de travail (Jürg Brühwiler, Kommentar zum Einzelarbeitsvertrag, 2è éd., Bern/ Stuttgart/Wien 1996, no 9 ad art. 324a CO; Christian Favre/Charles Munoz/Rolf A. Tobler, Le contrat de travail, Lausanne 2001, no 1.13 ad art. 324a CO; Manfred Rehbinder, Schweizerisches Arbeitsrecht, 14è éd., Berne 1999, ch.m. 81), dans le domaine de la prévoyance professionnelle, on ne saurait renoncer à fixer de manière très précise le début de l'incapacité de travail déterminante pour ouvrir droit à des prestations. Le moment de la survenance de l'incapacité de travail ne saurait faire l'objet d'hypothèses ou de déductions purement spéculatives, mais doit être établi, selon le droit des assurances sociales, avec le degré de preuve habituel de vraisemblance prépondérante (ATF 126 V 360 consid. 5b et les références).
6.
Au vu des principes énoncés ci-dessus, on constate que la recourante n'a produit aucune attestation médicale pendant toute la période au cours de laquelle elle a travaillé au sein de l'entreprise X.________ en tant qu'employeur affilié à l'intimée, soit du 1er mars au 31 mai 1998. Les seuls rapports médicaux au dossier attestant une incapacité de travail de 50 % à partir du 29 mai 1998 ont été établis à l'intention de l'OAI sur la base de renseignements anamnestiques subjectifs donnés par la recourante pour fixer, a posteriori, le début de l'incapacité de travail. En effet, le rapport du docteur B.________, du 2 septembre 1998, mentionne que l'examen médical a eu lieu le 19 août 1998, soit bien après la fin des rapports de travail de la recourante. Dans son rapport du 7 septembre 1998, le docteur A.________ omet de mentionner la date de son examen. Dans sa demande de prestations de l'AI du 15 juin 1998, la recourante n'a du reste pas indiqué avoir subi une quelconque incapacité de travail en raison de ses troubles psychiques, laissant ainsi vide l'espace réservé à ce type de précisions dans le questionnaire. Au vu de l'ensemble de ces circonstances, on doit retenir qu'il n'est pas établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l'incapacité de travail de la recourante est survenue avant la fin de sa couverture d'assurance auprès de l'intimée, soit avant le 1er juin 1998.
7.
De nouvelles mesures d'instruction ne permettraient pas d'aboutir à la conclusion qu'une incapacité de travail était survenue avant le 1er juin 1998. En effet, on ne voit pas comment et avec quelle force probante un médecin pourrait l'attester près de dix ans plus tard. Par conséquent, il y a lieu de renoncer à compléter l'instruction de la cause ou de renvoyer le dossier aux premiers juges.
L'absence de preuve de la survenance de l'incapacité de travail à l'origine de l'invalidité avant l'expiration du délai de couverture d'assurance auprès de l'intimée est interprétée en défaveur de l'assurée qui entendait déduire un droit d'un état de fait non établi. Le recours est par conséquent mal fondé.
8.
La recourante, qui succombe, ne saurait prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).
S'agissant d'un litige qui porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, la procédure est gratuite (art. 134 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours de droit administratif est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 27 novembre 2007
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Meyer Fretz