BGer I_81/2007 |
BGer I_81/2007 vom 08.01.2008 |
Tribunale federale
|
{T 7}
|
I 81/07
|
Arrêt du 8 janvier 2008
|
IIe Cour de droit social
|
Composition
|
MM. les Juges U. Meyer, Président,
|
Borella et Kernen.
|
Greffier: M. Piguet.
|
Parties
|
I.________,
|
recourant, représenté par Me Philippe Nordmann, avocat, place Pépinet 4, 1003 Lausanne,
|
contre
|
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey,
|
intimé.
|
Objet
|
Assurance-invalidité,
|
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 13 octobre 2006.
|
Faits:
|
A.
|
I.________, citoyen turc d'origine kurde né en 1965, est arrivé en Suisse en 1995 pour y demander l'asile politique. Alors qu'il travaillait en qualité d'ouvrier paysagiste, il a été victime le 21 juin 2000 d'un accident professionnel qui a entraîné une contusion dorso-scapulaire gauche. Dans les jours qui ont suivi, l'assuré a développé un syndrome douloureux dorsal gauche avec importante contracture musculaire, dont le tableau clinique évoquait, en l'absence de constatations objectives, un trouble somatoforme douloureux (rapports des docteurs H.________ du 18 août 2000 et C.________ du 19 septembre 2000, de l'Université V.________ du 9 octobre 2000 et du Service de rhumatologie, médecine physique et réhabilitation de l'Hôpital X.________ du 16 mars 2001).
|
Par demande du 18 avril 2001 (renouvelée le 19 mai 2004), I.________ a sollicité l'octroi de prestations de l'assurance-invalidité. Procédant à l'instruction de la cause, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a recueilli les rapports médicaux des docteurs B.________, médecin traitant (rapport du 18 août 2001), et D.________, médecin travaillant pour le compte de l'association Z.________ (rapport du 4 mars 2003). L'assuré a pour sa part versé en cours de procédure une expertise psychiatrique réalisée par le docteur N.________ pour le compte de la Suisse Assurances, assureur-accidents de l'employeur (rapport du 20 septembre 2001), ainsi qu'un rapport de sortie consécutif à une hospitalisation du 22 juillet au 9 août 2002 au sein de l'Université V.________ (rapport du 26 septembre 2002). Retenant le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme persistant, les médecins précités ont estimé nulle la capacité de travail de l'assuré. L'office AI a alors confié à son service médical régional (SMR) la réalisation d'un examen psychiatrique. Retenant le diagnostic de trouble somatoforme douloureux chez une personnalité émotionnellement labile à traits caractériels-passifs et interprétatifs, les médecins du SMR ont considéré que la capacité de travail exigible de l'assuré était conditionnée par les effets secondaires de la médication prise par l'assuré; l'adaptation du traitement psychotrope permettrait d'exiger de l'assuré une capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée sur le plan biomécanique (rapport du 26 août 2003). Se fondant sur les conclusions de ce dernier rapport, l'office AI a, par décision du 7 octobre 2003, rejeté la demande de prestations de l'assuré.
|
I.________ a formé opposition contre cette décision. De nouvelles pièces médicales ont été versées au dossier, dont notamment deux rapports établis à la suite des hospitalisations en milieu psychiatrique que l'assuré a subi du 18 février au 11 mars 2004 et du 23 mars au 27 mai 2004 à l'Hôpital Y.________ (rapports des 4 août et 1er novembre 2004). Après avoir soumis ces nouveaux documents au SMR (avis médical du 18 novembre 2004), l'office AI a, le 19 janvier 2005, rejeté l'opposition formée par l'assuré.
|
B.
|
I.________ a déféré la décision sur opposition au Tribunal des assurances du canton de Vaud. Il a produit en cours de procédure une prise de position de la doctoresse E.________, médecin officiant auprès de l'EMS W.________, où l'assuré a séjourné du 27 mai au 23 octobre 2004 (rapport du 28 octobre 2004) ainsi qu'une prise de position de l'Hôpital Y.________ suggérant la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique (lettre du 20 avril 2005). Après avoir annulé une décision du juge instructeur de faire procéder à une expertise judiciaire sur le plan psychiatrique (jugement incident du 31 janvier 2006), le Tribunal cantonal des assurances a, par jugement du 13 octobre 2006, rejeté le recours formé par l'assuré.
|
C.
|
I.________ a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement, dont il a demandé l'annulation. Sous suite de dépens il a conclu à l'octroi d'une rente entière d'invalidité. Il a sollicité en outre l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
|
L'office AI a conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
|
Considérant en droit:
|
1.
|
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
|
2.
|
2.1 La procédure ayant pour objet l'octroi ou le refus de prestations de l'assurance-invalidité, le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Il revoit d'office l'application du droit fédéral sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). Lorsque le recours est dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision attaquée, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure. Au surplus, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 132 al. 2 OJ, dans sa teneur selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI, en vigueur depuis le 1er juillet 2006, applicable en l'espèce [let. c du ch. II de la modification du 16 décembre 2005 a contrario], en corrélation avec les art. 104 let. a et b, ainsi que 105 al. 2 OJ).
|
2.2 Dans un arrêt récent (ATF 132 V 393), le Tribunal fédéral a posé les principes relatifs à son pouvoir d'examen en matière d'évaluation de l'invalidité, consécutivement à l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI. Conformément à ces principes, les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent de questions de fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint. Dans la mesure cependant où il en va de l'évaluation de l'exigibilité d'une activité professionnelle au regard de l'expérience générale de la vie, il s'agit en revanche d'une question de droit qui peut être examinée librement en instance fédérale; il en va ainsi des conclusions tirées de l'expérience médicale, comme par exemple, la présomption que les troubles somatoformes douloureux ou un autre syndrome semblable dont l'étiologie est incertaine et leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65 consid. 4.2.1 p. 70 et les arrêts cités, 393 consid. 3.2 p. 398 et les arrêts cités).
|
3.
|
3.1 La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA), entrée en vigueur le 1er janvier 2003, de même que les modifications de la LAI du 21 mars 2003 (4ème révision), entrées en vigueur le 1er janvier 2004, ont entraîné la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l'assurance-invalidité. Conformément au principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 445), les circonstances commandent d'examiner le bien-fondé de la décision du 19 janvier 2005 à l'aune des dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, pour la période courant jusqu'à cette date, puis à celle de la nouvelle réglementation pour la période postérieure au 1er janvier 2003, respectivement au 1er janvier 2004, étant précisé que le juge n'a pas à prendre en considération les modifications de droit ou de l'état de fait postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 129 V 1 consid. 1.2 p. 4). Les premiers juges ont fait application du nouveau droit, ce qui reste toutefois sans incidence sur le sort de la procédure car les normes de la LPGA sur l'incapacité de gain (art. 7), l'invalidité (art. 8) et l'évaluation de l'invalidité (art. 16) correspondent aux notions précédentes de l'assurance-invalidité telles que développées jusqu'à ce jour par la jurisprudence (ATF 130 V 343). On peut donc renvoyer au jugement entrepris sur ces différents points. On peut en faire de même en ce qui concerne les principes jurisprudentiels relatifs à la valeur probante des rapports et expertises médicaux.
|
3.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine).
|
La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique, soit aussi de troubles somatoformes douloureux persistants, suppose d'abord la présence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant lege artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 398 ss consid. 5.3 et consid. 6). Comme pour toutes les autres atteintes à la santé psychique, le diagnostic de troubles somatoformes douloureux persistants ne constitue pas encore une base suffisante pour conclure à une invalidité. Au contraire, il existe une présomption que les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible. Le caractère non exigible de la réintégration dans le processus de travail peut résulter de facteurs déterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendent la personne incapable de fournir cet effort de volonté. Dans un tel cas, en effet, l'assuré ne dispose pas des ressources nécessaires pour vaincre ses douleurs. La question de savoir si ces circonstances exceptionnelles sont réunies doit être tranchée de cas en cas à la lumière de différents critères. Au premier plan figure la présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée. D'autres critères peuvent être déterminants. Ce sera le cas des affections corporelles chroniques, d'un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémission durable (symptomatologie inchangée ou progressive), d'une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, d'un état psychique cristallisé, sans évolution possible au plan thérapeutique, résultant d'un processus défectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagement du point de vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie), de l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art (même avec différents types de traitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée (ATF 130 V 352). Plus ces critères se manifestent et imprègnent les constatations médicales, moins on admettra l'exigibilité d'un effort de volonté (Meyer-Blaser, Der Rechtsbegriff der Arbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, in: Schmerz und Arbeitsunfähigkeit, St. Gall 2003, p. 77).
|
Si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (voir Kopp/Willi/Klipstein, Im Graubereich zwischen Körper, Psyche und sozialen Schwierigkeiten, in: Schweizerische Medizinische Wochenschrift 1997, p. 1434, avec référence à une étude approfondie de Winckler et Foerster; voir sur l'ensemble du sujet ATF 131 V 49).
|
4.
|
4.1 Se fondant essentiellement sur le contenu des prises de position du SMR (rapport du 26 août 2003 et avis médical du 18 novembre 2004), le Tribunal cantonal des assurances a considéré que le recourant ne présentait aucune incapacité de travail d'origine somatique et que le trouble somatoforme douloureux dont il souffrait n'était pas invalidant au sens de la jurisprudence. D'une part, il n'y avait pas de comorbidité psychiatrique déterminante: le trouble dépressif mentionné par certains médecins était en effet réactionnel au trouble somatoforme. D'autre part, les premiers juges ont relevé à propos des autres critères mis en évidence par la jurisprudence que: « le recourant ne présente pas, en sus du trouble somatoforme douloureux persistant, une affection corporelle chronique ou un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémission. Il n'y a pas de perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, le recourant vivant maintenant avec sa famille. En revanche, il apparaît que l'on peut admettre la réalisation du critère de l'état psychique cristallisé, la fuite dans la maladie palliant le déracinement, l'absence d'intégration et l'insatisfaction quant au statut socio-professionnel du recourant ». Au vu de l'ensemble des éléments ressortant du dossier, il convenait de nier qu'une mise en valeur de la capacité de travail du recourant, jugée complète au plan somatique, ne puisse pratiquement plus être raisonnablement exigée de lui ou qu'elle serait même insupportable pour la société.
|
4.2 En substance, le recourant reproche implicitement aux premiers juges d'avoir procédé à une constatation manifestement inexacte ou incomplète des faits, qui ne tiendrait nullement compte de l'ensemble des pièces médicales versées au dossier. Le raisonnement des premiers juges ferait ainsi l'impasse totale sur la dépression dont souffre le recourant et sur les éléments qui auraient motivé plusieurs hospitalisations psychiatriques. De même, à aucun moment les premiers juges n'examineraient les documents médicaux pour savoir si le recourant pourrait ou non, par un effort de volonté, surmonter son trouble somatoforme douloureux.
|
5.
|
5.1 Selon le principe de la libre appréciation des preuves, qui s'applique aussi bien en procédure administrative qu'en procédure de recours de droit administratif (pour la procédure administrative: art. 40 PCF en corrélation avec les art. 19 PA et 55 al. 1 LPGA; pour la procédure devant le tribunal cantonal des assurances: art. 61 let. c LPGA), l'administration ou le juge apprécient librement les preuves, sans être liés par des règles formelles, en procédant à une appréciation complète et rigoureuse des preuves. Le juge doit examiner de manière objective tous les documents à disposition, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si ceux-ci permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. A cet égard, l'élément déterminant n'est dans le domaine médical ni l'origine, ni la désignation du moyen de preuve comme rapport ou expertise, mais son contenu. Si les rapports médicaux sont contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale plutôt qu'une autre (ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352).
|
5.2 L'appréciation de la situation médicale d'un assuré ne se résume pas à trancher, sur la base de critères formels, la question de savoir quel est parmi les rapports médicaux versés au dossier celui qui remplit au mieux les critères jurisprudentiels en matière de valeur probante, puis à s'en approprier les conclusions. Si la provenance et la qualité formelle sont des facteurs permettant de pondérer la portée de différents rapports médicaux, seul leur contenu matériel permet de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Un rapport médical ne saurait être écarté pour la simple et unique raison qu'il émane du médecin traitant. De même, le simple fait qu'un certificat médical est établi à la demande d'une partie et produit pendant la procédure ne justifie pas, en soi, des doutes quant à sa valeur probante. Ainsi, une expertise présentée par une partie peut également valoir comme moyen de preuve. En conséquence, l'administration ou le juge est tenu d'examiner dans le détail chaque pièce médicale versée au dossier et d'indiquer, même succinctement, les raisons qui le conduisent à retenir tel avis médical plutôt que tel autre.
|
5.3 Le Tribunal fédéral peut examiner librement, parce qu'il s'agit d'une question de droit, le grief tiré d'une violation du principe de la libre appréciation des preuves (ATF 132 V 393 consid. 4.1 p. 400).
|
6.
|
En l'espèce, l'ensemble des médecins consultés s'accordent à retenir que le recourant souffre, en l'absence de tout substrat organique avéré, d'un trouble somatoforme douloureux. Il convient dès lors d'examiner si, à la lumière notamment des critères dégagés par la jurisprudence, le recourant est en mesure de fournir l'effort de volonté raisonnablement exigible en vue de surmonter les effets de sa symptomatologie douloureuse.
|
6.1
|
6.1.1 Ainsi qu'il ressort de la motivation du jugement entrepris, la majeure partie des médecins consultés par le recourant ont diagnostiqué la présence de troubles de l'humeur revêtant un degré plus ou moins important de gravité: état anxiodépressif (rapport du docteur C.________ du 19 septembre 2000); réaction dépressive prolongée (rapport d'expertise du docteur N.________ du 20 septembre 2001); état dépressif avec idéation suicidaire (rapport du 26 septembre 2002 de l'Université V.________); trouble dépressif récurrent, épisode actuel sévère, sans symptômes psychotiques (rapport de la doctoresse D.________ du 4 mars 2003); trouble dépressif, épisode actuel moyen (rapports de l'Hôpital Y.________ des 4 août et 1er novembre 2004). Le SMR a pour sa part nié l'existence d'une comorbidité psychiatrique déterminante au trouble somatoforme douloureux, dans la mesure où l'assuré ne présentait plus de troubles dépressifs ou anxieux lors de l'examen réalisé le 27 juin 2003; à son avis, la symptomatologie régressive (important ralentissement psychomoteur, troubles de l'attention et de la concentration, fatigabilité importante) résultait des effets secondaires sédatifs de la lourde médication psychotrope administrée (Tofranil, Deanxit, Réméron, Saroten, Zyprexa). Moyennant l'adaptation du traitement, le recourant était en mesure de recouvrer une capacité de travail de 100 %.
|
6.1.2 Sans trancher la question de la qualification des troubles de l'humeur affectant le recourant, les premiers juges ont nié l'existence d'une comorbidité psychiatrique, au motif que le trouble dépressif observé par les médecins précités devait tout au plus être considéré comme réactionnel au trouble somatoforme douloureux. Certes, il est exact que selon la doctrine médicale, sur laquelle se fonde le Tribunal fédéral, les états dépressifs constituent des manifestations (réactives) d'accompagnement des troubles somatoformes douloureux, de sorte qu'ils ne sauraient, en principe, faire l'objet d'un diagnostic séparé. Cela ne saurait être le cas lorsque l'état dépressif présente les caractères de sévérité susceptibles de le distinguer sans conteste d'un tel trouble (ATF 130 V 352 consid. 3.3.1 in fine p. 358). Or, il ne ressort pas du jugement entrepris les raisons pour lesquelles il y avait lieu de conclure, dans le cas d'espèce, au caractère purement réactionnel de la symptomatologie dépressive. Ce nonobstant, il convient d'admettre qu'en l'absence d'un diagnostic précis, consensuel et convaincant quant à la gravité réelle des troubles de l'humeur du recourant, il était particulièrement prématuré de prendre des conclusions quant à l'existence ou non d'une comorbidité psychiatrique relevante.
|
6.2 Le Tribunal fédéral n'est pas non plus en mesure d'examiner si la juridiction cantonale a apprécié de manière conforme au droit les critères - positifs et négatifs - dégagés par la jurisprudence pour admettre à titre exceptionnel le caractère non exigible d'un effort de volonté en vue de surmonter la douleur et de la réintégration dans un processus de travail, dès lors que l'on ignore totalement sur quels éléments concrets du dossier elle se fonde pour estimer que tel critère est réalisé et que tel autre ne l'est pas.
|
6.3 De manière plus générale, le point de vue défendu par le SMR et repris par le Tribunal cantonal des assurances est le seul qui nie l'impact sur la capacité de travail de la symptomatologie douloureuse et reconnaisse le caractère exigible de la reprise par le recourant d'une activité lucrative. Pour leur part, les médecins consultés par le recourant, qui sont tous, pour la plupart, des spécialistes en psychiatrie et psychothérapie, ont conclu dans leur grande majorité à l'absence de capacité résiduelle de travail chez le recourant. Or, qu'il s'agisse des prises de position du docteur B.________, médecin traitant, ou de la doctoresse E.________, de l'expertise psychiatrique réalisée par le docteur N.________, des rapports de l'Université V.________, de l'Hôpital Y.________ ou encore de l'association Z.________, le tribunal cantonal des assurances n'a pas discuté la portée de ces documents pour l'appréciation du droit litigieux. Dans la mesure où ils en rejetaient - implicitement - le bien-fondé, les premiers juges étaient tenus d'indiquer les raisons pour lesquelles ils estimaient que ces pièces - dont la valeur probante n'a pas été mise en doute - permettaient de considérer, contrairement à leur contenu explicite, que le recourant était encore capable, par un effort de volonté raisonnablement exigible, de mobiliser ses ressources en vue de surmonter les effets de sa symptomatologie douloureuse. En ne tenant pas compte dans leur appréciation de tous les documents à disposition, les premiers juges ont par conséquent violé le principe de la libre appréciation des preuves. A cet égard, il importe peu que la juridiction cantonale ait estimé que les rapports du SMR étaient convaincants et procédaient d'une étude complète du cas, et qu'il convenait par conséquent de leur attribuer une pleine valeur probante au sens de la jurisprudence fédérale. Une telle affirmation, détachée de tout contexte, n'a, en soi, aucune portée juridique particulière (cf. supra consid. 5).
|
6.4 De ce qui précède, il ressort que la motivation proposée par le Tribunal des assurances du canton de Vaud est nettement insuffisante par rapport à la complexité de la cause à juger. Ce défaut de motivation est constitutif d'une violation du droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. ATF 133 III 439 consid. 3.3 p. 445, 130 II 530 consid. 4.3 p. 540). Cette violation ne saurait être réparée devant la Cour de céans en raison de son pouvoir d'examen limité, d'autant plus qu'une instruction complémentaire est de toute évidence nécessaire.
|
7.
|
Au regard de la situation médicale particulièrement complexe présentée par le recourant, caractérisée notamment par de nombreuses hospitalisations en milieu spécialisé, par la prise d'une importante médication (antalgique et antidépressive) et par une situation psycho-sociale difficile (déracinement, intégration défaillante, situation familiale complexe, problèmes financiers), une expertise psychiatrique exhaustive apparaissait indispensable, comme le suggérait d'ailleurs l'Hôpital Y.________ dans un rapport du 20 avril 2005. Compte tenu en outre des querelles diagnostiques (cf. supra consid. 6.1) et des avis médicaux contradictoires, les premiers juges ne pouvaient raisonnablement faire l'économie d'une mesure d'instruction complémentaire intégrant et analysant l'ensemble des facteurs déterminants. Pour ce motif également, le dossier doit être renvoyé aux premiers juges, pour qu'ils procèdent à un complément d'instruction sous la forme d'une expertise psychiatrique, voire pluridisciplinaire, portant sur le caractère invalidant du trouble somatoforme douloureux présenté par le recourant. A la suite de cela, les premiers juges rendront un nouveau jugement satisfaisant aux exigences élémentaires en matière de motivation des décisions.
|
8.
|
8.1 La procédure est onéreuse (art. 132 OJ, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er juillet 2006). Représenté par un avocat, le recourant, qui obtient gain de cause, a droit à une indemnité de dépens pour la procédure fédérale (art. 159 al. 1 en relation avec l'art. 135). Sa requête d'assistance judiciaire est dès lors sans objet.
|
8.2 En principe, des frais judiciaires et des dépens ne peuvent être mis à la charge d'un canton qui n'est pas partie au procès et dont les intérêts pécuniaires ne sont pas en cause (art. 156 al. 2 en corrélation avec l'art. 135 OJ). Toutefois, il y a lieu de déroger à ce principe lorsque la décision attaquée viole de manière qualifiée les règles d'application de la justice et cause de ce fait des frais aux parties (RAMA 1999 n° U 331 p. 128, consid. 4; cf. également arrêt K 8/97 du 7 avril 1998, consid. 5a et b). Au regard de sa motivation nettement insuffisante (cf. supra consid. 6.4), le jugement entrepris ne se prêtait à aucun contrôle sérieux de la part du Tribunal fédéral, ce qui justifie de mettre les frais de justice et les dépens à la charge du canton de Vaud.
|
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
|
1.
|
Le recours de droit administratif est admis en ce sens que la décision du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 13 octobre 2006 est annulée, la cause étant renvoyée à la juridiction de première instance pour complément d'instruction au sens des considérants et nouveau jugement.
|
2.
|
Les frais de justice, d'un montant de 500 fr., sont mis à la charge du canton de Vaud.
|
3.
|
Le canton de Vaud versera au recourant la somme de 2'500 fr. à titre de dépens pour la dernière instance.
|
4.
|
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
|
Lucerne, le 8 janvier 2008
|
Au nom de la IIe Cour de droit social
|
du Tribunal fédéral suisse
|
Le Président: Le Greffier:
|
Meyer Piguet
|