BGer 6B_353/2008 |
BGer 6B_353/2008 vom 30.05.2008 |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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6B_353/2008 /rod
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Arrêt du 30 mai 2008
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Cour de droit pénal
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Composition
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MM. les Juges Schneider, Président,
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Ferrari et Mathys.
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Greffier: M. Vallat.
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Parties
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X.________,
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recourant, représenté par Me Florian Rochat, avocat,
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contre
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Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1005 Lausanne,
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intimé.
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Objet
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Sursis partiel à l'exécution de la peine (art. 43 CP), fixation de la peine (art. 47 CP),
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 14 novembre 2007.
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Faits:
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A.
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Par jugement du 20 septembre 2007, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a notamment condamné X.________ pour tentative d'instigation à faux témoignage, infraction à la LSEE, infraction à la LAVS, infraction à la LPP, infraction à la LAPG, infraction à la LAI, violations simples et graves des règles de la circulation routière, conduite en état d'ébriété qualifiée et conduite malgré un retrait de permis de conduire à une peine privative de liberté de quinze mois et à une amende de 1500 francs. En ce qui concerne le pronostic relatif au sursis, le Tribunal correctionnel a relevé que l'intéressé n'avait pas réparé le dommage causé à la caisse de compensation concernée, mais avait au contraire augmenté celui-ci au fil des ans nonobstant l'ouverture d'enquêtes pénales. Il avait par ailleurs fait preuve d'un déni total face aux précédentes décisions judiciaires et administratives rendues à son encontre en matière de circulation routière, non seulement en persistant à conduire malgré un retrait de permis durant plusieurs années, mais encore en adoptant des comportements objectivement dangereux sur la route à plusieurs reprises. Aucun pronostic favorable ne pouvait être posé dans ces conditions.
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B.
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Saisie d'un recours du condamné, la cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté, par arrêt du 14 novembre 2007, considérant en substance que le pronostic défavorable posé par le tribunal correctionnel, qui ne constituait ni un abus ni un excès de son pouvoir d'appréciation, s'opposait à l'octroi du sursis aussi bien total que partiel.
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C.
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X.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt. Il conclut à l'octroi du sursis partiel à concurrence de neuf mois sur les quinze de privation de liberté. Il requiert en outre l'effet suspensif et le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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D.
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Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
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Considérant en droit:
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1.
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Le recours en matière pénale peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est circonscrit par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral l'applique d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours ni par la motivation retenue par l'autorité précédente. Il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 p. 140). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Il ne peut pas entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF).
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2.
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Le recourant ne soutient pas que les autorités cantonales auraient excédé ou abusé de leur pouvoir d'appréciation en lui refusant le sursis au motif que le pronostic de ses perspectives d'amendement est défavorable. Il conteste exclusivement le refus du sursis partiel et ne remet, partant, en cause ce pronostic dans son principe que dans la mesure où les autorités cantonales ont également considéré que l'exécution d'une partie de la peine ne permettait pas non plus d'exclure un pronostic défavorable.
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2.1 Selon le nouvel art. 42 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (al. 1). Si, durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, l'auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de six mois au moins ou à une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins, il ne peut y avoir de sursis à l'exécution de la peine qu'en cas de circonstances particulièrement favorables (al. 2). L'octroi du sursis peut également être refusé lorsque l'auteur a omis de réparer le dommage comme on pouvait raisonnement l'attendre de lui (al. 3). Le juge peut prononcer, en plus du sursis, une peine pécuniaire sans sursis ou une amende selon l'art. 106 CP (al. 4).
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Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents. Le juge doit par ailleurs motiver sa décision de manière suffisante (cf. art. 50 CP). Sa motivation doit permettre de vérifier s'il a été tenu compte de tous les éléments pertinents et comment ils ont été appréciés (cf. ATF 134 IV 5 consid. 4.2.1; ATF 128 IV 193 consid. 3a; 118 IV 97 consid. 2b). Le nouveau droit pose des exigences moins élevées quant au pronostic pour l'octroi du sursis. Auparavant, il fallait que le pronostic soit favorable. Désormais, il suffit qu'il n'y ait pas de pronostic défavorable. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (cf. 134 IV 5 consid. 4.2.2).
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2.2 L'art. 43 CP prévoit que le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine pécuniaire d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur (al. 1). La partie à exécuter ne peut excéder la moitié de la peine (al. 2). En cas de sursis partiel à l'exécution d'une peine privative de liberté, la partie suspendue, de même que la partie à exécuter, doivent être de six mois au moins. Les règles d'octroi de la libération conditionnelle ne lui sont pas applicables (al. 3).
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2.3 Les conditions subjectives permettant l'octroi du sursis (art. 42 CP), à savoir les perspectives d'amendement, valent également pour le sursis prévu à l'art. 43 CP dès lors que la référence au pronostic ressort implicitement du but et du sens de cette dernière disposition. Ainsi, lorsque le pronostic quant au comportement futur de l'auteur n'est pas défavorable, la loi exige que l'exécution de la peine soit au moins partiellement suspendue. Mais un pronostic défavorable exclut également le sursis. En effet, s'il n'existe aucune perspective que l'auteur puisse être influencé de quelque manière par un sursis complet ou partiel, la peine doit être entièrement exécutée (ATF 134 IV 1 consid. 5.3.1, p. 10).
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En revanche, les conditions objectives des art. 42 et 43 CP ne correspondent pas: les peines privatives de liberté jusqu'à une année ne peuvent être assorties du sursis partiel; une peine de 12 à 24 mois peut être assortie du sursis ou du sursis partiel; le sursis complet à l'exécution d'une peine privative de liberté est exclu, dès que celle-ci dépasse 24 mois alors que jusqu'à 36 mois, le sursis partiel peut être octroyé (ATF 134 IV 1 consid. 5.3.2, p. 11).
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2.4 Lorsque la peine privative de liberté est d'une durée telle qu'elle permette le choix entre le sursis complet (art. 42 CP) et le sursis partiel (art. 43 CP), soit entre un et deux ans au plus, l'octroi du sursis au sens de l'art. 42 est la règle et le sursis partiel l'exception. Cette dernière ne doit être admise que si, sous l'angle de la prévention spéciale, l'octroi du sursis pour une partie de la peine ne peut se concevoir que moyennant exécution de l'autre partie. La situation est comparable à celle où il s'agit d'évaluer les perspectives d'amendement en cas de révocation du sursis (ATF 116 IV 97). Lorsqu'il existe - notamment en raison de condamnations antérieures - de sérieux doutes sur les perspectives d'amendement de l'auteur, qui ne permettent cependant pas encore, à l'issue de l'appréciation de l'ensemble des circonstances, de motiver un pronostic concrètement défavorable, le tribunal peut accorder un sursis partiel au lieu du sursis total. On évite de la sorte, dans les cas de pronostics très incertains le dilemme du « tout ou rien ». L'art. 43 CP permet alors que l'effet d'avertissement du sursis partiel autorise, compte tenu de l'exécution partielle ordonnée simultanément, un pronostic largement plus favorable pour l'avenir. Encore faut-il que l'exécution partielle de la peine apparaisse incontournable pour améliorer les perspectives d'amendement. Tel n'est pas le cas, lorsque la combinaison d'une amende au sens de l'art. 42 al. 4 CP avec le sursis apparaît suffisante sous l'angle de la prévention spéciale. Le tribunal doit examiner préalablement cette possibilité (ATF 134 IV 1 consid. 5.5.2, p. 14).
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3.
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3.1 En l'espèce, l'arrêt cantonal relève que le recourant a réitéré ses comportements délictueux à de nombreuses reprises, sans se soucier des diverses sanctions prises à son égard, dont il n'a manifestement tiré aucun enseignement. La cour cantonale s'est également référée à ses multiples condamnations à des peines fermes ou avec sursis, restées sans effet sur son comportement délictueux (arrêt cantonal, consid. 3.2, p. 8). Il ressort en outre du jugement de première instance, auquel renvoie l'arrêt cantonal en ce qui concerne les questions de fait (arrêt cantonal. consid. B, p. 2), que le casier judiciaire du recourant mentionne les condamnations suivantes:
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- 6 décembre 1999, 45 jours d'emprisonnement sous déduction de 2 jours de détention préventive (délit LSEE, violation des règles de la LCR, conduite en étant pris de boisson);
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- 26 avril 2000, 10 jours d'arrêts et 250 francs d'amende (circulation malgré un retrait ou un refus du permis de conduire);
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- 1er mai 2002, 4 mois d'emprisonnement avec sursis pendant 4 ans (prolongé puis révoqué), sous déduction de 4 jours de détention préventive (lésions corporelles graves, violation des règles de la circulation routière, conducteur pris de boisson);
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- 22 octobre 2002, 30 jours d'arrêts et 750 francs d'amende (violation des règles de la circulation routière, circulation malgré un retrait ou un refus du permis de conduire, infractions à la LCR);
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- 16 décembre 2002, 30 jours d'arrêts et 750 francs d'amende (circulation malgré un retrait ou un refus du permis de conduire);
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- 17 janvier 2003, 10 jours d'arrêts avec sursis pendant un an (révoqué) et 500 francs d'amende (circulation malgré un retrait ou refus du permis de conduire);
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- 5 novembre 2003, 30 jours d'emprisonnement et 600 francs d'amende (violation des règles de la circulation routière, opposition à une prise de sang);
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- 8 juillet 2004, 2 mois d'emprisonnement et 100 francs d'amende (conducteur pris de boisson, circulation malgré un retrait ou refus du permis de conduire);
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- 12 octobre 2004, 800 francs d'amende (violation grave des règles de la circulation routière);
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- 26 septembre 2005, un mois d'emprisonnement et 1000 francs d'amende (conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait);
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- 30 novembre 2006, 40 jours d'emprisonnement et 1000 francs d'amende (violation des règles de la circulation routière, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait).
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3.2 Au vu de ces antécédents, on ne peut que constater que ni l'exécution de courtes peines privatives de liberté, ni la révocation du sursis à l'exécution de peines plus conséquentes (jusqu'à 4 mois d'emprisonnement) n'ont dissuadé le recourant de persévérer dans ses comportements répréhensibles, ce qui peut être pris en considération non seulement en ce qui concerne le domaine de la circulation routière, dans lequel le recourant a été condamné à de très nombreuses reprises, mais fournit également un élément pertinent pour le pronostic relatif à d'autres types de délits (ATF 100 IV 133, consid. 1d, p. 137; 98 IV 76 consid. 2, p. 82; v. également Roland Schneider/Roy Garré, Basler Kommentar, Strafrecht I, 2e éd., art. 42 n. 59). Par leur nombre et leur fréquence, ces antécédents ne permettent pas seulement de susciter de sérieux doutes sur les perspectives d'amendement du recourant, ils permettent, sans abus du pouvoir d'appréciation, de conclure, comme l'a fait la cour cantonale, que l'effet d'avertissement produit par l'exécution d'une partie de la peine ne serait pas de nature à le détourner de la commission de nouvelles infractions. On se trouve ainsi en-dehors du champ d'application du sursis partiel.
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3.3 Le recourant reproche également à la cour cantonale d'avoir méconnu la notion de faute mentionnée par l'art. 43 CP. Il se méprend cependant sur la portée de cet élément, qui est sans pertinence lorsque le pronostic est défavorable.
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Pour statuer sur la suspension partielle de l'exécution d'une peine, le juge doit tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur. Or, cette notion de faute, définie à l'art. 47 al. 2 CP, constitue avant tout un critère d'appréciation de la peine. Pour savoir si un sursis partiel paraît nécessaire en raison de la faute de l'auteur et de ses perspectives d'amendement, on ne peut faire référence de la même manière au critère de la culpabilité tel que prévu à l'art. 47 al. 2 CP. En effet, lorsque le juge statue sur la question du sursis, il a déjà fixé la quotité de la peine et il ne s'agit plus que de définir sa forme d'exécution appropriée. Reste que la loi lie la question de la peine, qui doit être mesurée à la faute commise, à celle du sursis en ce sens que ce dernier est exclu pour les peines supérieures à deux ans. La nécessité d'une peine privative de liberté assortie d'un sursis partiel résulte alors de la gravité de la faute, lorsque cette peine se situe entre deux et trois ans. C'est en ce sens qu'il faut comprendre l'exigence légale de la prise en considération de la faute dans ce contexte (cf. ATF 134 IV 1 consid. 5.3.3, p. 11).
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3.4 Le recourant invoque encore sa situation professionnelle. Il souligne sa position de gérant d'une société à responsabilité limitée active dans le domaine de la construction et employant 18 personnes. Il invoque les effets d'une peine de quinze mois ferme sur son avenir professionnel, respectivement sur celui de ses 18 collaborateurs.
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L'arrêt cantonal constate cependant, en fait, que le recourant, qui a été condamné pour n'avoir pas payé les retenues AVS de ses employés, accusait à nouveau du retard dans ces paiements, malgré la situation financière de l'entreprise qualifiée de favorable. De nouvelles poursuites étaient en cours jusqu'en août 2007 (arrêt cantonal, consid. 2.2 p. 6 s.). Le jugement de première instance souligne également l'amateurisme avec lequel l'intéressé gère son entreprise, notamment sur le plan comptable (jugement, consid. II, p. 12). Dans ces conditions, la situation professionnelle du recourant ne permet pas de contrebalancer ses antécédents très défavorables. Pour le surplus, les conséquences néfastes sur son activité professionnelle décrites par le recourant sont inhérentes à l'exécution de toute peine privative de liberté. Il lui incombera de prendre les dispositions nécessaires au sein de son entreprise de manière à ce que sa pérennité soit assurée en son absence.
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4.
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Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté. Il était d'emblée dénué de chances de succès, si bien que l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supporte les frais de la procédure, qui peuvent être réduits pour tenir compte de sa situation économique (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF), qui n'apparaît pas favorable. La requête d'effet suspensif est sans objet.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté.
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2.
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L'assistance judiciaire est refusée.
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3.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 800 francs, sont à la charge du recourant.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale.
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Lausanne, le 30 mai 2008
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Schneider Vallat
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