BGer 6B_114/2009
 
BGer 6B_114/2009 vom 20.04.2009
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
6B_114/2009
Arrêt du 20 avril 2009
Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges Favre, Président,
Schneider et Wiprächtiger.
Greffière: Mme Angéloz.
Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Vincent Spira, avocat,
contre
Procureur général du canton de Genève,
case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
Objet
Décision de classement (contrainte sexuelle, actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance),
recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du canton de Genève du 7 janvier 2009.
Faits:
A.
Par décision du 22 octobre 2008, le Procureur général du canton de Genève a classé la procédure ouverte contre X.________ pour contrainte sexuelle et actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance.
Saisie d'un recours de X.________, qui concluait au prononcé d'un non-lieu, la Chambre d'accusation genevoise l'a rejeté par ordonnance du 7 janvier 2009, confirmant le classement.
B.
Cette ordonnance retient, en résumé, ce qui suit.
B.a X.________, médecin, a été mis en cause pour avoir commis sur une de ses patientes, A.________, des attouchements à l'occasion d'une intervention pratiquée sur elle le 6 février 2007. Plus précisément, lors d'une gastroscopie effectuée sur A.________, à laquelle une injection de Dormicum avait été préalablement administrée à cette fin, il lui aurait caressé les jambes, aurait baissé son string, aurait tâté son clitoris et aurait enfoncé un ou deux doigts dans son vagin, puis lui aurait embrassé le ventre.
B.b Le lendemain 7 février 2007, A.________ a déposé plainte pénale. Entendu par la police puis par le juge d'instruction, X.________ a contesté les faits. De son côté, la plaignante a maintenu ses déclarations. Deux assistantes médicales ont par ailleurs été entendues. Une analyse d'ADN et de traces biologiques a fait apparaître qu'un prélèvement effectué sur le bas ventre de A.________ mettait en évidence un mélange d'ADN appartenant à cette dernière et à X.________. Le juge d'instruction a par ailleurs recueilli l'avis d'experts sur les effets potentiels des médicaments administrés à la patiente lors de l'intervention. Appelés, notamment, à se déterminer sur la question de savoir si les allégations de la plaignante pouvaient résulter ou non d'hallucinations dues à la médication qui lui avait été administrée, les experts ont affirmé qu'aucune de ces deux hypothèses n'était exclue avec certitude.
B.c Le prononcé d'un classement, plutôt que d'un non-lieu, a été justifié par le fait que, si l'opinion des experts laissait planer un doute, il existait néanmoins des indices suffisants de culpabilité.
C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, pour violation des art. 32 al. 1 et 8 al. 1 Cst. Il conclut à l'annulation de l'ordonnance attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle prononce un non-lieu.
Des déterminations n'ont pas été requises.
Considérant en droit:
1.
Le recourant se plaint d'une violation de la présomption d'innocence garantie par l'art. 32 al. 1 Cst. Il admet que la décision attaquée est conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la compatibilité d'un classement avec la garantie dont il se prévaut, mais soutient que cette jurisprudence est trop stricte. Selon lui, elle réduirait la portée de la présomption d'innocence au point de la vider en grande partie de sa substance. Elle devrait être assouplie en ce sens que celui dont la culpabilité a été exclue au terme d'une instruction complète aurait le droit d'obtenir un non-lieu.
1.1 La jurisprudence du Tribunal fédéral, que le recourant voudrait voir modifier, considère qu'une décision refusant de substituer un non-lieu à un classement n'est pas en soi incompatible avec la présomption d'innocence. Une telle décision peut cependant s'avérer problématique sous l'angle de cette garantie lorsqu'elle contient des motifs, indissociables de son dispositif, qui équivalent en substance à un constat de culpabilité, sans que cette dernière ait été préalablement établie, notamment sans que l'intéressé ait eu l'occasion d'exercer les droits de la défense. Si ces derniers ont été respectés, une décision qui ne renferme pas de constat de culpabilité, mais, sur la base des éléments du dossier, se borne à faire état de soupçons, en laissant ouverte la possibilité d'investigations complémentaires, ne viole pas la présomption d'innocence (cf. arrêts 6B_1036/2008 consid. 3.1, 6B_568/2007 consid. 5.2, 1P.880/2005 consid. 4.1 et 1P.341/2004 consid. 2).
1.2 Il n'y a pas de raison de revenir sur cette jurisprudence, qui correspond à celle de la Cour européenne des droits de l'homme (cf. arrêt de la Cour européenne Georg c. la Suisse du 8 février 2001, publié in JAAC 2001 n° 133 p. 1379). Le recourant, qui reconnaît que la décision attaquée ne contient aucun propos susceptible de traduire un constat de culpabilité, ne peut d'ailleurs avancer d'arguments propres à faire admettre le contraire. Le fait qu'il a été mis en cause comme suspecté d'avoir commis des infractions graves ne suffit manifestement pas à justifier le prononcé d'un non-lieu plutôt que d'un classement, pas plus que la durée et la pénibilité pour lui de la procédure.
1.3 En réalité, bien qu'il argue d'une trop grande rigidité de la jurisprudence précitée, le recourant tente de faire admettre que l'une des conditions auxquelles le droit cantonal de procédure exclut le prononcé d'un non-lieu, à savoir l'existence d'indices suffisants d'une infraction punissable, ne serait pas réalisée. A l'appui, il se borne toutefois à alléguer que les charges retenues contre lui se sont avérées insuffisantes, sans démontrer, conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287), que la constatation contraire de l'autorité cantonale aurait été déduite d'une appréciation arbitraire des éléments de preuve recueillis au cours de l'instruction.
1.4 En définitive, le recourant n'établit aucune violation de la garantie qu'il invoque. Le grief doit dès lors être rejeté, autant qu'il est recevable.
2.
Le recourant prétend que le refus de lui accorder un non-lieu viole le principe de l'égalité de traitement, consacré par l'art. 8 al. 1 Cst.
2.1 L'égalité de traitement implique que le juge traite de la même manière des situations semblables et de manière différente des situations dissemblables (ATF 131 V 107 consid. 3.4.2 p. 114 et la jurisprudence citée).
2.2 Le recourant fait valoir que sa condamnation pour les infractions dont il avait été inculpé a été exclue en vertu du principe in dubio pro reo. S'il avait été renvoyé en jugement, il aurait bénéficié, pour ce motif, d'un acquittement, alors que, compte tenu de ce que certains indices à charge subsistent, il n'a pas la possibilité d'obtenir une conversion du classement en un non-lieu. Or, dans les deux cas, il se trouverait dans une situation analogue, le seul élément distinctif étant une décision de renvoi en jugement ou de classement.
Ce grief est dénué de fondement. La situation de l'inculpé mis au bénéfice d'un classement n'est évidemment pas la même que celle l'inculpé renvoyé en jugement. Dans le premier cas, celui-ci échappe à une procédure de jugement, donc à une condamnation, à laquelle il demeure exposé dans le second. La comparaison que tente d'établir le recourant repose sur la simple hypothèse qu'il aurait été acquitté s'il avait été renvoyé en jugement. Au reste, et c'est ce qui eût été déterminant, il n'est nullement établi dans le recours que, dans le cas d'espèce, le prononcé d'un classement plutôt que d'un non-lieu violerait le principe invoqué.
3.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant, qui succombe dans ses conclusions (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre d'accusation du canton de Genève.
Lausanne, le 20 avril 2009
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Favre Angéloz