BGer 5A_277/2009
 
BGer 5A_277/2009 vom 06.07.2009
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
5A_277/2009
Arrêt du 6 juillet 2009
IIe Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. les Juges Hohl, Présidente,
Marazzi et Jacquemoud-Rossari.
Greffière: Mme de Poret.
Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Christine Sordet,
avocate,
contre
dame X.________,
intimée, représentée par Me Catherine de Preux, avocate,
Objet
mesures protectrices de l'union conjugale,
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 20 mars 2009.
Faits:
A.
Les époux X.________, se sont mariés le 18 septembre 1998 à Lancy (GE), sans conclure de contrat de mariage. Le couple a deux enfants: A.________, née en 1998, et B.________, né en 2001.
B.
Le 7 novembre 2007, X.________ a déposé, devant le Tribunal de première instance du canton de Genève, une requête de mesures protectrices de l'union conjugale, concluant notamment à ce que le Tribunal fixe la contribution due à l'entretien de la famille par son épouse. Celle-ci a conclu reconventionnellement à ce que les époux soient autorisés à vivre séparés, à l'attribution en sa faveur de la garde des deux enfants ainsi qu'au paiement d'une contribution à l'entretien de ces derniers.
Statuant le 2 octobre 2008, le Tribunal de première instance a, entre autres, attribué à l'épouse la jouissance exclusive du domicile conjugal et accordé à l'époux un délai de 45 jours dès l'entrée en force du jugement pour quitter les lieux. Il a également attribué la garde des enfants à la mère, réservant un large droit de visite au père, et condamné celui-ci au versement mensuel d'une somme de 4'050 fr., allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de la famille.
X.________ a fait appel de ce jugement. Par arrêt du 20 mars 2009, la Cour de justice a notamment confirmé l'attribution du domicile conjugal à l'épouse ainsi que le délai fixé à l'époux pour le quitter. Elle a également confirmé le montant de la contribution d'entretien à la famille et modifié les modalités du droit de visite.
C.
X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt rendu par la Cour de justice. Le recourant estime que la décision rendue violerait l'interdiction de l'arbitraire, dans la mesure où les juges cantonaux auraient appliqué le droit civil de manière arbitraire, établi les faits de façon manifestement inexacte et violé son droit d'être entendu, tel que garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. Le recourant conclut principalement à ce que soient annulés les chiffres du jugement du Tribunal de première instance concernant l'attribution du logement familial, le délai fixé pour le quitter et le montant de la contribution à l'entretien de la famille. Cela fait, il demande, entre autres, la jouissance exclusive du domicile conjugal et la fixation d'un délai adéquat à son épouse pour quitter ce logement dès l'entrée en force du jugement; il conclut également à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement à verser en mains de son épouse la somme mensuelle de 2'200 fr. à titre de contribution à l'entretien de la famille, allocations familiales non comprises. Si, par impossible, le Tribunal de céans devait toutefois attribuer la jouissance exclusive du logement familial à son épouse, le recourant sollicite l'octroi d'un délai de 4 mois dès l'entrée en force du jugement pour le quitter. Subsidiairement, le recourant conclut à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision.
D.
La requête d'effet suspensif du recourant a été rejetée par ordonnance présidentielle du 14 mai 2009.
Considérant en droit:
1.
La décision de mesures protectrices de l'union conjugale (art. 172 ss CC) est une décision en matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF. Elle est finale selon l'art. 90 LTF, car elle tranche définitivement, dans une procédure séparée, des questions qui ne pourront plus être revues avec l'éventuelle décision sur le divorce et ses effets accessoires (ATF 133 III 393 consid. 4 et les références citées). Le recours a pour objet une décision rendue dans une affaire pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et al. 4, 74 al. 1 let. b LTF). II a par ailleurs été déposé dans le délai (art. 46 al. 2 et 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF). Le recours en matière civile est donc en principe recevable.
2.
2.1 Comme l'acte attaqué porte sur des mesures provisionnelles (ATF 133 III 393 consid. 5, 585 consid. 3.3 et la jurisprudence citée), seule peut être invoquée la violation de droits constitutionnels (art. 98 LTF).
Le Tribunal fédéral ne sanctionne la violation de droits fondamentaux - notion qui englobe les droits constitutionnels en général (ATF 133 III 638 consid. 2) - que si un tel moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), les exigences de motivation de l'acte de recours correspondant à celles de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 133 III 393 consid. 6, 638 consid. 2; 133 II 249 consid. 1.4.2).
Le recourant qui se plaint d'arbitraire ne saurait, dès lors, se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de la juridiction cantonale, mais doit démontrer, par une argumentation précise, que cette décision repose sur une application de la loi ou une appréciation des preuves manifestement insoutenables. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (cf. ATF 133 III 585 consid. 4.1; 130 I 258 consid. 1.3 et les arrêts cités). Il ne suffit pas qu'une solution différente apparaisse concevable, voire préférable; la décision attaquée n'est, de surcroît, annulée que si elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 133 I 149 consid. 3.1; 132 III 209 consid. 2.1 et les arrêts cités).
2.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels par l'autorité cantonale. Les art. 95 et 97, ainsi que l'art. 105 al. 2 LTF ne s'appliquent donc pas directement puisqu'ils ne sont pas des droits constitutionnels (ATF 133 III 393 consid. 7.1; 133 III 585 consid. 4.1). Toutefois, l'application de l'art. 9 Cst. aboutit pratiquement au même résultat: le Tribunal fédéral ne corrige les constatations de fait que si elles sont arbitraires et ont une influence sur le résultat de la décision.
2.3 Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté, à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 LTF; ATF 133 III 393 consid. 3).
3.
Le recourant se plaint avant tout de ce que le logement familial ne lui a pas été attribué et du délai qui lui a été fixé par les juges cantonaux pour le quitter.
3.1 La cour cantonale a considéré que c'était à juste titre que le logement familial avait été attribué à la mère dans la mesure où celle-ci s'était vue confier la garde des enfants. Le maintien de leur cadre de vie constituait en effet un élément stabilisant suite à la séparation de leurs parents, de sorte que le départ du domicile familial pouvait être imposé plus aisément au recourant. Les modalités fixées à celui-ci pour quitter le domicile conjugal, conformes à celles préconisées par la doctrine, n'avaient par ailleurs pas été réellement contestées par le recourant.
3.2 Le recourant prétend que l'attribution du logement familial à son épouse serait "contraire aux faits établis". Le recourant explique qu'il travaillerait à proximité de l'appartement familial et que celui-ci se trouverait en outre proche de l'école des enfants, qui s'y rendent seuls. En tant que ce serait lui qui s'occuperait le plus de ses enfants et, qu'au contraire de son épouse, il assurerait leur stabilité, l'attribution du logement familial à leur mère serait préjudiciable à leur intérêt.
L'attribution du logement familial est une question de droit. En prétendant que cette attribution serait "contraire aux faits établis" - dont il ne démontre pas qu'ils auraient été établis arbitrairement -, le recourant ne s'en prend donc pas à la motivation de l'arrêt attaqué de manière adéquate. Sa critique est en conséquence irrecevable.
S'agissant des modalités fixées par le Tribunal de première instance pour quitter le logement familial - 45 jours dès l'entrée en force du jugement -, le recourant admet qu'il ne les a pas contestées devant la Cour de justice, étant "certain" que celle-ci modifierait le jugement rendu en première instance en sa faveur.
Le recours en matière civile est ouvert contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF). Cela signifie, notamment, que seuls sont recevables devant le Tribunal fédéral les moyens qui, pouvant l'être, ont été présentés à l'autorité cantonale de dernière instance (Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4000 ss, p. 4109). Le grief du recourant ne répond pas à cette exigence: il ressort en effet de l'arrêt attaqué que les modalités de départ de l'appartement n'avaient pas été spécifiquement contestées devant la Cour de justice, ce que le recourant admet d'ailleurs lui-même dans son recours devant le Tribunal de céans. Invoqué pour la première fois dans le recours en matière civile, le grief est dès lors nouveau et, partant, irrecevable au regard de l'art. 75 al. 1 LTF (cf. ATF 133 III 638 consid. 2).
4.
Le recourant soulève ensuite différents griefs en relation avec le montant de la contribution à l'entretien de la famille.
4.1 Le recourant reproche avant tout à la cour cantonale d'avoir appliqué la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent. Il considère ainsi que c'est arbitrairement que la Cour de justice a jugé qu'il était prématuré de considérer la séparation des époux comme définitive et, qu'en conséquence, les règles applicables aux contributions d'entretien après divorce ne seraient pas applicables. Le recourant estime qu'au contraire ces règles devraient s'appliquer et que, son épouse gagnant confortablement sa vie, seuls ses enfants devraient bénéficier des contributions d'entretien.
S'il y a lieu d'apprécier la situation d'un couple séparé totalement désuni en s'inspirant des principes régissant l'hypothèse du divorce et, en particulier, en tenant compte de l'obligation pour l'époux créancier de reprendre une activité professionnelle ou d'en augmenter le taux (ATF 128 III 65 consid. 4a), il n'en demeure pas moins que, tant que dure le mariage, c'est l'art. 163 al. 1 CC qui constitue la cause de l'obligation d'entretien. La méthode dite du minimum vital avec répartition de l'excédent, généralement appliquée par les tribunaux cantonaux pour déterminer les contributions d'entretien, est considérée comme non arbitraire et même comme conforme au droit fédéral, en cas de situation financière moyenne et tant que dure le mariage (art. 176 al. 1 ch. 1 et 137 al. 2 CC en relation avec l'art. 163 al. 1 CC), pour autant qu'elle n'ait pas pour effet de faire bénéficier l'intéressée d'un niveau de vie supérieur à celui mené par le couple durant la vie commune (arrêts 5A_350/2008 du 3 novembre 2008 consid. 3.2; 5P.253/2006 du 8 janvier 2007 consid. 3.2; 5P.52/2005 du 10 mai 2005 consid. 2.3).
En l'occurrence, les époux sont toujours mariés et continuent à partager le même toit. On ne saurait dès lors reprocher à la Cour de justice d'avoir arbitrairement considéré qu'il était prématuré de considérer la séparation des époux comme étant définitive. L'épouse travaille en outre déjà à plein temps, de sorte que la critique de la violation de l'art. 125 CC est sans objet. Enfin, le recourant ne démontre pas non plus que l'application de la méthode appliquée par la cour cantonale permettrait à son épouse de bénéficier d'un niveau de vie supérieur à celui qu'elle menait durant la vie commune. Son grief est dès lors infondé.
4.2 Le recourant affirme ensuite que les juges cantonaux auraient méconnu les charges réelles des époux.
4.2.1 La cour cantonale aurait avant tout fait preuve d'arbitraire en tenant compte d'une surtaxe HLM alors que le logement familial ne serait plus soumis à cette surtaxe depuis le 31 décembre 2006.
A l'appui de son grief, le recourant produit un courrier du service HLM, daté du 21 décembre 2006, et attestant de la libération du paiement de ladite surtaxe. Produite tardivement, cette pièce est toutefois irrecevable (art. 99 LTF; consid. 2.2 supra).
Le recourant affirme également qu'en tant que la Cour de justice ne l'aurait pas sollicité sur ce point, elle aurait violé son droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. Ce grief est infondé. Même lorsque la maxime inquisitoire est applicable, les parties doivent collaborer à la procédure et indiquer leurs moyens de preuve en temps utile (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1).
4.3 Le recourant reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir retenu dans les charges de son épouse un montant de 800 fr. pour les frais de garde des enfants durant la journée de mercredi. Retenir une telle charge serait totalement arbitraire dans la mesure où, jusqu'à présent, personne ne se serait jamais occupé des enfants ce jour-là. La fille aînée du couple rentrerait seule à l'appartement le mercredi après-midi et la mère d'un ami de son fils pourrait s'occuper de ce dernier durant l'après-midi.
Selon la Cour de justice, un montant de 800 fr. pour les frais de garde des enfants durant la journée de mercredi est raisonnable au vu des pièces produites par l'intimée. Le recourant ne s'en prend pas à cette motivation, alléguant au demeurant des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt cantonal. Son grief est donc irrecevable.
4.4 Le recourant estime enfin que le montant que la Cour de justice a retenu au titre de ses impôts est arbitraire.
4.4.1 La cour cantonale a considéré que le montant retenu à titre de charge fiscale par les premiers juges était conforme à la nouvelle situation des époux. Le recourant devait en effet tenir compte du fait qu'il pourrait déduire de son revenu les contributions à l'entretien de la famille, ce qu'il omettait de faire en se prévalant d'une charge fiscale plus élevée que celle retenue par le Tribunal de première instance.
4.4.2 S'agissant des impôts 2006, le recourant prétend avoir produit devant l'instance précédente des documents attestant d'une charge plus importante que celle arrêtée en définitive par la cour cantonale. Le recourant ne fait ainsi que reprendre l'argumentation prise devant la Cour de justice, sans s'en prendre à la motivation tenue par celle-ci. Son grief est en conséquence irrecevable.
Le recourant affirme également que sa charge fiscale pour les années 2007 et 2008 serait plus élevée, dans la mesure où c'est à partir d'avril 2007 que son épouse travaillerait à plein temps. La taxation des époux en serait donc augmentée. Il reconnaît néanmoins que la taxation 2007 - et a fortiori celle de 2008 - n'a pas encore été établie. Dans la mesure où le juge des mesures protectrices de l'union conjugale doit se fonder sur les charges effectives et réellement acquittées par le débirentier au moment où il statue (ATF 121 III 20 consid. 3a et les arrêts cités; arrêt 5A_751/2008 du 31 mars 2009 consid. 3.1), la critique du recourant est infondée. Du reste, en tant que l'éventuelle augmentation ultérieure de la taxation des époux serait due au fait que l'épouse travaille à un taux d'occupation plus élevé, c'est sa part respective d'impôt qui sera augmentée, et non celle du recourant.
4.5 Le recourant soutient enfin qu'en attribuant deux tiers du solde disponible à son épouse, la cour cantonale aurait appliqué de manière arbitraire les art. 163 et 125 CC, aboutissant ainsi à un résultat insoutenable dans la mesure où il ne lui permettrait plus de subvenir à ses propres besoins. Le recourant soutient en effet qu'il prendrait ses enfants en charge à mi-temps et que ce serait lui qui s'en occuperait le plus souvent le week-end. Faute de moyens financiers suffisants, il ne pourra plus assumer cette charge comme il le faisait jusqu'alors.
Il ne ressort pas de l'arrêt cantonal que le recourant s'occuperait de ses enfants au-delà du droit de visite dont il bénéficie. Le recourant dispose certes d'un large droit de visite, mais les juges cantonaux ont attribué la garde des enfants à la mère, point qui n'est pas contesté par leur père. La répartition du solde disponible dans une proportion 2/3 - 1/3 ne paraît ainsi pas insoutenable. Par ailleurs, en tant que le versement d'une contribution d'entretien d'un montant de 4'050 fr. laisse au recourant un disponible de 1'336 fr. par mois (10'500 fr - 5'114 fr. - 4'050 fr.), son minimum vital n'est pas atteint et il peut parfaitement faire face à ses besoins.
5.
Vu ce qui précède, le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée a droit à des dépens pour sa détermination sur la demande d'effet suspensif (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Une indemnité de 200 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 6 juillet 2009
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:
Hohl de Poret