BGer 6B_833/2009
 
BGer 6B_833/2009 vom 17.11.2009
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
6B_833/2009
Arrêt du 17 novembre 2009
Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges Favre, Président,
Schneider et Wiprächtiger.
Greffière: Mme Bendani.
Parties
X.________,
recourant,
contre
Y.________,
intimé.
Objet
Diffamation et injure,
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 31 août 2009.
Faits:
A.
Par jugement du 28 avril 2009, le Juge de police de l'arrondissement de la Sarine a condamné X.________, pour diffamation et injure, à une peine pécuniaire ferme de 45 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 70 fr.
Par arrêt du 31 août 2009, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours déposé par X.________ et confirmé le jugement de première instance.
B.
X.________ dépose un recours en matière pénale au Tribunal fédéral.
Considérant en droit:
1.
D'après l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours doivent être rédigés dans une langue officielle. Selon l'art. 54 al. 1 LTF, la procédure devant le Tribunal fédéral est conduite dans l'une des langues officielles (allemand, français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Le recourant peut rédiger le mémoire de recours dans la langue (officielle) de son choix, qui ne doit pas nécessairement correspondre à celle de la procédure devant le Tribunal de céans.
En l'occurrence, le recourant a entrepris l'arrêt du 31 août 2009, rendu en langue française, à l'aide d'un mémoire rédigé en allemand. Ainsi qu'il vient d'être dit, ce procédé est admissible. La langue de la procédure est toutefois le français et la présente décision sera rendue dans cette langue.
2.
Le recourant conteste la compétence des autorités fribourgeoises et le lieu de la procédure.
Sur ce point, la Cour d'appel pénal a déclaré le recours de l'intéressé irrecevable, celui-ci ne motivant pas ses conclusions tendant à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause devant les autorités judiciaires thurgoviennes. Elle a également constaté que la réquisition tendant à faire renvoyer la cause devant les autorités précitées était, d'une part, tardive et, d'autre part, mal fondée compte tenu de l'arrêt rendu le 25 février 2008 par le Tribunal pénal fédéral qui avait confirmé la compétence des autorités judiciaires fribourgeoises pour statuer sur cette affaire en application de l'art. 345 CP.
Le recourant ne s'en prend aucunement à cette argumentation cantonale. Son grief, insuffisamment motivé, est dès lors irrecevable (cf. art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF; cf. ATF 129 I 185 consid. 1.6 p. 189).
3.
Invoquant l'art. 6 par. 3 CEDH et son droit à une défense efficace, le recourant se plaint de la langue de la procédure, du refus d'un interprète et de l'absence de traduction.
3.1 Les art. 29 al. 2 Cst. et 6 par. 3 let. e CEDH garantissent à l'accusé le droit d'obtenir gratuitement la traduction de toutes les pièces et déclarations qu'il lui faut comprendre pour assurer efficacement sa défense et bénéficier d'un procès équitable. L'étendue de l'assistance qu'il convient d'accorder à un accusé dont la langue maternelle n'est pas celle de la procédure doit être appréciée non pas de manière abstraite, mais en fonction des besoins effectifs de l'accusé et des circonstances concrètes du cas (ATF 118 Ia 462 consid. 2a p. 464 s.; arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Kamasinski c. Autriche, du 19 décembre 1989, Série A, vol. 168, par. 74). Le juge n'a pas à faire traduire d'office les principaux actes de procédure à l'intention du prévenu, mais ce dernier doit en faire la requête en temps utile (ATF 118 Ia 462 consid. 465).
Concernant en particulier la traduction des jugements, l'autorité n'a pas l'obligation de correspondre dans la langue du justiciable qui ne maîtriserait pas celle du canton concerné. C'est à l'intéressé qu'il appartient, en principe, de faire traduire dans sa langue maternelle ou dans une langue qu'il connait les écrits que lui adresse l'autorité judiciaire (ATF 118 Ia 462 consid. 3 p. 467 s.).
3.2 Selon l'arrêt attaqué, le recourant a obtenu, à sa requête, la traduction écrite de l'ordonnance de renvoi, alors que, selon le droit cantonal de procédure, l'autorité judiciaire aurait pu se contenter d'une traduction orale succincte. Il avait dès lors parfaitement connaissance des faits qui lui étaient reprochés et de la plainte pénale. Il a également obtenu, dans sa langue, une citation à comparaître aux débats. Un interprète était présent durant toute l'audience du Juge de police du 28 avril 2009 et la traduction orale a été assurée de manière à ce que le prévenu puisse bénéficier d'une procédure équitable au sens de l'art. 6 CEDH. Le prévenu a par contre volontairement renoncé à assister à l'ouverture du jugement, malgré les explications données en langue allemande par le Juge de police quant à l'utilité de sa présence et de ce qui est dit à l'ouverture du jugement. De plus, ce magistrat a fourni des explications au prévenu avant son départ, en particulier concernant les voies de droit. Il a également vérifié que le prévenu sache ce qu'on lui reprochait et puisse se défendre, notamment en livrant sa propre version des faits et en étant informé de ses droits après la clôture de la procédure probatoire.
Il est douteux que le recours soit recevable au regard de l'art. 106 al. 2 LTF, l'intéressé se contentant d'invoquer son droit à obtenir des traductions, sans critiquer d'une quelconque manière les arguments qui lui ont été opposés par la Cour d'appel pénal. Quoi qu'il en soit, la motivation cantonale ne prête pas le flanc à la critique. En effet, d'une part, le recourant a été en mesure de se défendre compte tenu des éléments qui lui ont été traduits, de la présence d'un interprète lors des débats et des explications en langue allemande qui lui ont été fournies par le Juge de police. D'autre part, les autorités n'avaient pas à traduire leur jugement, le justiciable ayant eu, dans le délai de recours, le temps nécessaire pour procéder à cette démarche. Dans ces conditions, on ne discerne aucune violation des droits constitutionnels du recourant.
4.
Invoquant le principe de la publicité des débats, le recourant reproche au Tribunal cantonal de ne pas avoir tenu une audience avant jugement.
4.1 Selon l'art. 6 par. 1 CEDH, "toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...)".
La publicité des débats constitue un principe fondamental, qui est important non seulement pour les individus, mais surtout comme condition à la confiance dans le fonctionnement de la justice (ATF 121 I 30 consid. 5d p. 35). En première instance, la notion de procès équitable implique en principe la faculté pour l'accusé d'assister aux débats. Cependant, la présence de celui-ci ne revêt pas nécessairement la même importance au niveau de l'appel. Même dans l'hypothèse d'une cour d'appel ayant plénitude de juridiction, l'art. 6 par. 1 CEDH n'implique pas toujours le droit à une audience publique ni celui de comparaître en personne. En la matière, il faut prendre en compte, entre autres, les particularités de la procédure en cause et la manière dont les intérêts de la défense ont été exposés et protégés devant la juridiction d'appel, eu égard notamment aux questions qu'elle avait à trancher et à leur importance pour l'appelant (ACEDH dans l'affaire Belziuk c. Pologne du 25 mars 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998, p. 558, par. 37/ii).
En particulier, la procédure d'appel qui porte exclusivement sur des points de droit et non de fait peut remplir les conditions de l'art. 6 par. 1 CEDH même si la cour d'appel n'a pas donné à l'accusé la faculté de s'exprimer en personne devant elle (ACEDH dans les affaires Helmers c. Suède du 29 octobre 1991, Série A, vol. 212 A, par. 36 et Ekbatani c. Suède du 26 mai 1988, Série A, vol. 134, par. 31). En revanche, lorsque la juridiction d'appel doit examiner une affaire en fait et en droit et procéder à une appréciation globale de la culpabilité ou de l'innocence, elle ne peut statuer à ce sujet sans évaluer directement les éléments de preuve présentés en personne par l'inculpé qui souhaite prouver qu'il n'a pas commis l'acte constituant prétendument une infraction pénale (Dondarini c. Saint-Marin, no 50545/99, § 27, 6 juillet 2004).
4.2 En l'espèce, le Juge de police a tenu une audience le 28 avril 2009. La Cour d'appel a par la suite statué sans débats. Toutefois, cette dernière autorité n'avait pas à se déterminer sur la culpabilité ou l'innocence du recourant, ce dernier ne contestant plus, au regard de l'arrêt entrepris, le principe de sa condamnation, ni même la quotité de la peine qui lui avait été infligée par le premier juge ou l'absence de sursis. Elle n'avait donc plus à examiner les faits de la cause. Il lui incombait exclusivement de se prononcer, d'une part, sur une éventuelle atteinte aux droits de la personnalité du recourant en raison d'un vice de procédure et, d'autre part, sur des droits de la défense et plus particulièrement sur la langue du procès et le droit à la traduction du jugement. La Cour d'appel ne devait ainsi examiner que des règles de forme et de procédure, sans devoir se pencher sur la cause au fond. Elle pouvait statuer sur la base du dossier. Par ailleurs, le recourant ne prétend pas, dans son mémoire, qu'il existait des éléments importants à prendre en compte dont la Cour d'appel ne disposait déjà. Autrement dit, l'affaire ne soulevait aucune question qui ne pût être résolue sur la base du dossier. Vu la procédure suivie et les questions finalement soumises à la Cour d'appel, le défaut d'audience publique n'a pas lésé les droits constitutionnels du recourant. Le grief est donc rejeté.
5.
Le recourant conteste sa condamnation; à ce sujet, il explique que la critique émise à l'encontre du plaignant était fondée et invoque une violation de son droit à la liberté d'expression et de la presse. Il se plaint également du fait que le sursis lui a été refusé. Il s'agit d'arguments nouveaux.
5.1 Selon la jurisprudence, une argumentation juridique nouvelle est admissible dans la mesure où elle porte sur un point qui constitue encore l'objet du litige en instance fédérale (art. 99 al. 2 et 107 al. 1 LTF) et pour autant qu'elle repose sur des constatations de fait de la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_28/2007 du 30 mai 2007 consid. 1.3 in fine, non publié in ATF 133 III 421).
5.2 En l'espèce, l'argumentation du recourant sort du cadre de l'état de fait ressortant de l'arrêt attaqué. En effet, l'intéressé n'a pas invoqué ces griefs devant l'autorité d'appel. Par ailleurs, cette dernière n'a ni examiné le bien-fondé de la condamnation du recourant, ni même d'ailleurs énoncé les faits à la base de celle-ci. Dans ces conditions, les nouveaux griefs soulevés ci-dessus sont irrecevables.
6.
Le recourant semble également contester sa condamnation aux frais judiciaires par la Cour d'appel. Il estime que ce procédé relève des méthodes russes envers les condamnés politiques.
Cette critique est toutefois insuffisante au regard des exigences posées par l'art. 106 al. 2 LTF. En effet, pareille argumentation ne permet en aucun cas de démontrer une éventuelle application arbitraire du droit de procédure cantonal.
7.
En conclusion, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de justice (cf. art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg.
Lausanne, le 17 novembre 2009
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Favre Bendani