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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4A_533/2009
Arrêt du 8 janvier 2010
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss.
Greffier: M. Piaget.
Parties
X.________ SA, représentée par Me Alexandre Montavon,
recourante,
contre
Y.________ SA, représentée par Me Dominique Burger, avocate,
intimée.
Objet
mandat de gestion; action en répétition de l'indu;
art. 86 LP,
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 24 septembre 2009.
Faits:
A.
Le 22 mai 2001, la société genevoise X.________ SA (ci-après: X.________) et la société marocaine A.________ SA ont conclu une convention portant sur l'exploitation par la première de l'hôtel "..." à Marrakech, appartenant à la seconde.
Le 14 février 2002, la société marocaine Y.________ SA (ci-après: Y.________) s'est substituée dans cet accord à sa filiale A.________ SA.
Le 24 octobre 2003, Y.________ a adressé une requête en injonction de payer au Président du Tribunal de commerce de Marrakech, réclamant à X.________ la somme de 22'000'100 DHS. Cette requête fut admise par ordonnance du 27 octobre 2003. Celle-ci a été confirmée le 6 juillet 2004 par un arrêt de la Cour de commerce de Marrakech, ce dernier étant devenu définitif à la suite du rejet du pourvoi en cassation de X.________ auprès de la Cour suprême du Maroc.
B.
Se fondant sur l'arrêt rendu le 6 juillet 2004 par la Cour de commerce de Marrakech, Y.________ a ouvert une poursuite en Suisse à l'encontre de X.________, lui réclamant la somme de 3'094'247 fr. (contre-valeur de 22'000'100 DHS) avec intérêts. X.________ a formé opposition, mais celle-ci a été levée définitivement sur la base de l'arrêt de la Cour de commerce de Marrakech. Ayant reçu une commination de faillite, X.________ s'est acquittée, le 3 mai 2007, d'un montant de 3'945'068 fr.85.
C.
Le 2 mai 2008, X.________ a ouvert devant le Tribunal de première instance de Genève une action en répétition de l'indu, réclamant à Y.________ la somme de 3'945'068 fr.85 avec intérêts à 5% dès le 2 mai 2007. Selon elle, toutes les décisions rendues jusqu'alors l'ont été dans des procédures de type sommaire, fondées sur le critère de la vraisemblance.
Lors de l'audience d'introduction du 19 juin 2008, Y.________ a soulevé une exception de chose jugée, invoquant l'arrêt rendu le 6 juillet 2004 par la Cour de commerce de Marrakech.
Par jugement du 27 novembre 2008, le Tribunal de première instance a rejeté l'exception de chose jugée, admettant que la Cour de commerce de Marrakech avait statué dans une procédure de type sommaire, se fondant pour cela sur un avis de droit produit par X.________, avis qui avait été contesté par la partie adverse, laquelle avait sollicité sans succès que le tribunal demande une consultation à l'Institut suisse de droit comparé.
Dès cette décision, Y.________ n'a plus participé à la procédure et le Tribunal de première instance, par jugement du 18 février 2009, a admis l'action en répétition de l'indu, condamnant Y.________ à payer à X.________ la somme de 3'945'068 fr.85 avec intérêts à 5% dès le 3 mai 2007.
Par arrêt du 24 septembre 2009, la Cour de justice du canton de Genève a annulé les jugements rendus les 27 novembre 2008 et 18 février 2009 et elle a renvoyé la cause à l'autorité précédente pour instruction dans le sens des considérants. La cour cantonale a considéré que le juge de première instance avait violé l'art. 16 al. 1 LDIP en se contentant d'un avis de droit produit par l'une des parties, qui ne contient aucune référence jurisprudentielle ou doctrinale, et dont les conclusions paraissent en contradiction avec le texte de la loi; la cour cantonale a suggéré que le juge de première instance sollicite un avis de droit auprès de l'Institut suisse de droit comparé. Quant au jugement sur le fond, la cour cantonale a observé que l'art. 126 al. 3 de la Loi genevoise de procédure civile du 10 avril 1987 (LPC/GE; RSG E 3 05) permettait certes au tribunal de tenir pour avérés les allégués de la demanderesse en raison du silence de la défenderesse, mais que cela ne le dispensait pas d'examiner les conditions juridiques d'une action en répétition de l'indu; sous cet angle, la cour cantonale a estimé que le jugement attaqué, dépourvu de toute argumentation juridique, violait le droit d'être entendu de la défenderesse.
D.
X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 24 septembre 2009. Invoquant une violation de l'art. 16 LDIP, une application arbitraire de l'art. 126 al. 3 LPC/GE et une violation des règles déduites du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., elle a conclu, tout en demandant que les dépens de la procédure cantonale soient revus, que l'arrêt attaqué soit annulé, que le jugement de première instance du 18 février 2009 (condamnation à payer) et les points 1 à 3 du dispositif du jugement de première instance du 27 novembre 2008 (rejet de l'exception d'autorité de chose jugée) soient confirmés, tous les frais et dépens de la procédure tant cantonale que fédérale étant à la charge de la partie intimée.
L'intimée a conclu au rejet du recours avec suite de frais et dépens.
Par ordonnance du 1er décembre 2009, la Présidente de la Ire Cour de droit civil a accordé l'effet suspensif au recours.
Considérant en droit:
1.
1.1 Le recours a été interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement (art. 76 al. 1 LTF). Il est dirigé contre une décision rendue par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 et 48 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi.
1.2 Il reste cependant à examiner si la décision attaquée, par sa nature, est susceptible d'un recours en matière civile. Il est évident qu'elle ne met pas fin à la procédure, puisque la cour cantonale s'est bornée à renvoyer la cause au juge de première instance; il ne s'agit donc pas d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF. La décision attaquée n'a pas mis une personne hors de cause ou statué sur une partie de ce qui est demandé, de sorte qu'elle ne constitue pas davantage une décision partielle au sens de l'art. 91 LTF. Elle ne concerne ni la compétence, ni une demande de récusation (art. 92 LTF). Il s'agit donc d'une autre décision incidente au sens de l'art. 93 LTF (selon la jurisprudence constante, la décision de renvoi est une "autre décision incidente": ATF 135 III 329 consid. 1.2 p. 331; 135 V 141 consid. 1.1 p. 143).
La recourante fait valoir que l'admission du recours conduirait immédiatement à une décision finale qui permettrait d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse, de sorte que le recours est recevable sur la base de l'art. 93 al. 1 let. b LTF. Il est vrai que si le Tribunal fédéral admettait le recours et rejetait l'exception de chose jugée, il pourrait peut-être, sur la base des faits qui n'ont pas été valablement contestés, statuer lui-même sur le fond et rendre une décision finale. Il convient cependant d'observer que l'on ne se trouve pas, à la différence d'autres cas déjà jugés (cf. ATF 116 II 738 consid. 1a p. 741; 114 II 383), en présence d'une décision qui rejette l'exception de chose jugée; la cour cantonale s'est bornée à renvoyer la cause au juge de première instance pour qu'il approfondisse une question de droit marocain, essentiellement en sollicitant une consultation de l'Institut suisse de droit comparé. Or, on ne peut pas considérer que demander un avis à l'Institut suisse de droit comparé constitue une procédure probatoire longue et coûteuse. Après avoir recueilli cette consultation, le juge de première instance devra statuer à nouveau sur l'exception de chose jugée et sa décision pourra faire l'objet d'un nouvel appel cantonal, le cas échéant d'un nouveau recours au Tribunal fédéral. Ce n'est donc pas la décision attaquée qui expose la recourante à une procédure probatoire longue et coûteuse, mais seulement la décision future qui rejetterait définitivement l'exception de chose jugée (comme le souhaite la recourante). L'une des conditions de l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'est donc pas remplie en l'espèce et le recours en matière civile est dès lors irrecevable.
2.
Les frais judiciaires et les dépens sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours en matière civile est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 22'000 fr, sont mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 24'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 8 janvier 2010
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:
Klett Piaget