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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
8C_356/2009
Arrêt du 20 février 2010
Ire Cour de droit social
Composition
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président,
Leuzinger et Frésard.
Greffière: Mme von Zwehl.
Parties
B.________,
représenté par Maîtres Charles Guerry, Marie-Laure Paschoud Page et Sandra Wohlhauser,
recourant,
contre
Foyer X.________,
représenté par Me Dominique Morard, avocat,
intimé.
Objet
Droit de la fonction publique; temps d'essai; résiliation abusive,
recours contre le jugement de la Ie Cour administrative du Tribunal cantonal fribourgeois du 6 mars 2009.
Faits:
A.
Par contrat de travail du 22 novembre 2007, B.________ a été engagé à partir du 18 décembre 2007 en qualité d'infirmier responsable d'une unité de soins par le Foyer X.________ (ci-après : le foyer), qui est un établissement médico-social pour personnes âgées constitué par la Commune Y.________. Le salaire mensuel convenu s'élevait à 7'000 fr. 20 payé treize fois l'an. En ce qui concerne les autres conditions d'engagement, le contrat de travail renvoyait au Règlement du personnel du foyer du 30 novembre 1988 (ci-après : le règlement). L'art. 3 de ce règlement prévoit un temps d'essai de trois mois durant lequel le délai de résiliation applicable est d'une semaine pour la fin d'une semaine; l'art. 43 précise que les dispositions du statut des fonctionnaires de l'Etat font règle pour tout ce qui n'est pas prévu dans ledit règlement.
Du 4 mars au 7 avril 2008, B.________ s'est trouvé en incapacité de travail à un degré variable en raison d'un accident. Le 6 mars 2008, il a été invité à un entretien d'évaluation avec l'infirmière-cheffe et la directrice du foyer sur la période probatoire échéant au 18 mars 2008. Cet entretien a été reporté sur demande de l'intéressé compte tenu de son état de santé.
Par décision du 13 mars 2008, la directrice du foyer a informé B.________ que son temps d'essai était prolongé jusqu'au 31 mai 2008 dès lors que le bilan de ses compétences n'avait pas encore pu être établi. Dans cette décision, il était indiqué que le délai de résiliation était maintenu à sept jours.
Le 19 mars 2008, un entretien d'évaluation a eu lieu au cours duquel la directrice du foyer a annoncé à B.________ la résiliation de son contrat de travail, motivée par le fait qu'il n'avait pas donné satisfaction durant la période probatoire. Par décision du même jour (mais datée par erreur du 18 mars), la Commission de direction du foyer a résilié les rapports de service avec effet au 28 mars 2008. L'intéressé a contesté son licenciement et fait savoir qu'il le tenait pour abusif.
Le 10 avril 2008, B.________ a déposé un recours administratif contre les décisions du foyer des 13 et 18 mars 2008 auprès du Préfet du district Z.________ (ci-après : le Préfet). Statuant le 17 septembre 2008, celui-ci a partiellement admis le recours. Il a confirmé la décision du 13 mars 2008 et déclaré celle du 18 mars 2008 nulle et abusive, condamnant le foyer à verser à B.________ une indemnité de licenciement d'un montant brut de 21'000 fr. 60. En substance, le Préfet a considéré que la prolongation du temps d'essai n'était pas critiquable à l'aune de l'art. 32 al. 2 de la loi fribourgeoise sur le personnel de l'Etat du 17 octobre 2001 (LPers/FR; RS/FR 122.70.1) applicable par renvoi de l'art. 43 du règlement; en revanche, le foyer n'avait pas respecté l'art. 32 al. 3 LPers/FR qui prévoyait un délai de congé de deux mois en cas de résiliation durant la prolongation du temps d'essai; en définitive, le congé avait été communiqué hors délai et alors que l'intéressé se trouvait en incapacité de travail, de sorte qu'il était abusif au sens de l'art. 46 al. 1 let. f LPers/FR; comme B.________ n'avait pas conclu au maintien des rapports de travail, il se justifiait de lui allouer une indemnité fixée à trois mois de salaire au titre de l'art. 41 LPers/FR.
B.
Le foyer a recouru au Tribunal cantonal fribourgeois. Il a conclu à la réforme de la décision du 17 septembre 2008 du Préfet en ce sens que le recours administratif de B.________ est rejeté; subsidiairement, à la réforme de cette décision en ce sens que le prénommé a droit au salaire et aux prestations sociales, part du 13ième salaire en sus, du mois d'avril 2008, les autres conclusions étant rejetées.
Par arrêt du 6 mars 2009, le tribunal cantonal a partiellement admis le recours. Il a constaté que le délai de congé était d'un mois en vertu de l'art. 31 al. 3 LPers/FR et condamné le foyer à verser à B.________ le salaire jusqu'à fin avril 2008 (charges sociales et part du 13ième salaire compris). Il a annulé la décision du Préfet en tant qu'elle concernait le licenciement et ses conséquences financières. A cet égard, il n'a retenu aucun motif de licenciement abusif au sens de l'art. 46 LPers/FR; il a considéré que se tromper dans l'échéance du contrat n'était pas constitutif d'un congé abusif et que la loi n'accordait au cours de la période probatoire aucune protection contre les congés en temps inopportun sauf en cas de grossesse.
C.
B.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement cantonal, dont il requiert l'annulation sous suite de frais et dépens. Il invite le Tribunal fédéral à dire que ses rapports de travail avaient pris fin le 31 mai 2008 et que son licenciement était abusif; par conséquent, à condamner le foyer à lui verser le salaire (part du 13ième salaire compris) jusqu'à fin mai 2008 ainsi qu'une indemnité de 21'000 fr. 60 avec intérêts à 5% l'an dès le 18 mars 2008.
Le foyer conclut au rejet du recours.
Considérant en droit:
1.
Il n'est pas contesté que les rapports de travail qui liaient les parties sont fondés sur le droit public (art. 82 let. a LTF). Dans la mesure où les conclusions du recours tendent au versement d'une somme d'argent, il s'agit d'une contestation pécuniaire et le motif d'exclusion de l'art. 83 let. g LTF en matière de rapports de travail de droit public n'entre pas en considération. Par ailleurs, la valeur litigieuse, déterminée par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF), est d'au moins 21'000 fr. 60, ce qui dépasse le seuil de 15'000 fr. ouvrant la voie du recours en matière de droit public (art. 85 al. 1 let. b LTF) . Enfin, le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il y a dès lors lieu d'entrer en matière.
2.
Le litige porte sur la durée du délai de congé donné le 19 mars 2008 ainsi que sur le caractère abusif ou non de ce congé. A cet égard, les parties s'accordent à dire que le contrat de travail du 22 novembre 2007 ainsi que le règlement du personnel du foyer ne règlent pas ces questions et qu'il convient, pour y répondre, de se référer aux dispositions régissant le statut des employés de l'Etat du canton de Fribourg (LPers/FR).
3.
3.1 La période probatoire et les modalités du congé durant cette période sont réglementées aux art. 31 et 32 LPers/FR.
3.1.1 Sous la note marginale «Période probatoire a) Principe», l'art. 31 LPers/FR dispose ce qui suit :
1 Le collaborateur ou la collaboratrice est soumis/e à une période probatoire d'une année.
2 Durant la période probatoire, les rapports de service peuvent être résiliés librement de part et d'autre, sous réserve de l'art. 46 [licenciement abusif]. La résiliation est communiquée par pli recommandé.
3 Durant les trois premiers mois de la période probatoire, les rapports de service peuvent être résiliés de part et d'autre une semaine d'avance pour la fin d'une semaine. Dès le quatrième mois, le délai de résiliation est d'un mois pour la fin d'un mois.
4 Il peut être renoncé, dès l'engagement ou pendant la période probatoire, à tout ou à une partie de celle-ci, pour les contrats de durée déterminée, ou lorsque le collaborateur ou la collaboratrice a déjà exercé antérieurement la fonction concernée, ou encore lorsque les prestations, le comportement et les aptitudes sont comparables à celle d'une personne expérimentée. Les articles 34 et 35 sont en outre réservés [transfert; principe et conditions].
3.1.2 Quant à l'art. 32 LPers/FR (note marginale : «b) Fin de la période probatoire et reconnaissance officielle»), il a le contenu suivant :
1 A moins que les rapports de service n'aient été résiliés antérieurement, le collaborateur ou la collaboratrice est réputé/e, au terme de la période probatoire, répondre aux exigences de son poste; en ce cas, il ou elle fait l'objet d'une reconnaissance officielle de sa qualité d'agent ou d'agente des services publics.
2 Si, à la suite d'une évaluation des prestations, il existe un doute sur la capacité du collaborateur ou de la collaboratrice d'occuper le poste de travail, la reconnaissance officielle est reportée au terme d'une nouvelle période probatoire d'une année au plus. Au plus tard au terme de la période probatoire, le collaborateur ou la collaboratrice doit être avisé/e de sa prolongation et du report de la reconnaissance officielle.
3 Durant la prolongation, les rapports de service peuvent être résiliés librement de part et d'autre deux mois d'avance pour la fin d'un mois. Une nouvelle prolongation n'est pas possible.
4 Les lois spéciales prévoyant une nomination du collaborateur ou de la collaboratrice sont réservées.
3.2 D'après l'autorité cantonale, le législateur fribourgeois a voulu établir une échelle des délais de résiliation dépendant de la longueur de la période probatoire. Plus celle-ci était longue, plus les collaborateurs se voyaient accorder une protection accrue en matière de durée du délai de congé. En l'occurrence, B.________ venait de débuter le quatrième mois de son temps d'essai lorsque le foyer lui avait signifié le congé (le 19 mars 2008). Cette situation était justement celle décrite par l'art. 31, al. 3, 2ème phrase, LPers/FR. Le délai de congé applicable en l'espèce était donc d'un mois pour la fin d'un mois.
3.3 Le recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir interprété et appliqué arbitrairement les art. 31 et 32 LPers/FR. Selon lui, ces dispositions opèrent une distinction claire suivant que le congé est donné durant la période probatoire initiale ou en cours de prolongation de celle-ci. Dans la première hypothèse, le délai de congé se détermine d'après l'art. 31 al. 3 LPers/FR, dans la seconde d'après l'art. 32 al. 3 LPers/FR. Le raisonnement des premiers juges ne trouve son fondement ni dans le texte légal ni dans le message du Conseil d'Etat sur la LPers/FR où il n'est pas question d'une échelle des délais de congé. Dans son cas, la décision de licenciement était intervenue alors que son temps d'essai avait été prolongé, si bien que le délai de congé était de deux mois pour la fin d'un mois en vertu de l'art. 32 al. 3 LPers/FR.
3.4 Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme cantonale, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 134 II 124 consid. 4.1 p. 133; 133 II 257 consid. 5.1 p. 260 s. et les arrêts cités).
3.5 En l'occurrence, l'interprétation que le tribunal cantonal a donnée des dispositions en cause n'est pas arbitraire. La lecture de l'art. 31 al. 3 LPers/FR permet de retenir qu'il y a une gradation dans la longueur des délais de résiliation en fonction de la durée des rapports de service accomplis pendant la période probatoire. Cette conception trouve également appui dans le message n° 277 du 28 novembre 2000 accompagnant le projet de loi sur le personnel de l'Etat (LPers). Le Conseil d'Etat y préconisait, pendant le temps d'essai, deux délais de résiliation, l'un emprunté au CO pendant les trois premiers mois (une semaine d'avance pour la fin d'une semaine) et l'autre d'un mois d'avance pour la fin d'un mois pendant le reste de la première année de service, le but étant de permettre à l'Etat de renoncer plus rapidement à la continuation des rapports de service au cas où le collaborateur ne donne pas satisfaction (cf. Bulletin officiel des séances du Grand Conseil, septembre 2001, p. 1018). Le recourant objecte vainement que le sens littéral de l'art. 32 al. 3 LPers/FR ne laisse pas de place pour une application de l'art. 31 al. 3 LPers/FR dans le cadre d'une prolongation du temps d'essai. La LPers prévoit en effet une période probatoire d'une année (art. 31 al. 1), prolongeable d'une année supplémentaire (art. 32 al. 2), soit une période probatoire maximale de deux ans. D'un point de vue systématique, il n'apparaît d'aucune manière insoutenable de considérer que l'art. 31 al. 3 LPers/FR régit la résiliation des rapports de service durant la première année de la période probatoire, tandis que l'art. 32 al. 3 LPers/FR se rapporte à la deuxième année de celle-ci. Le fait d'accorder une protection plus importante aux employés dans leur deuxième année de service par rapport à ceux effectuant leur première année répond d'ailleurs à une certaine logique. On comprendrait mal que durant les douze premiers mois, le congé des collaborateurs dont le temps d'essai est d'un an soit soumis à des délais différents que celui des collaborateurs engagés avec une période probatoire plus courte qui a été prolongée, ce qui est le cas du recourant. Dans ces conditions, on ne saurait dire que le point de vue adopté par l'autorité précédente soit déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but des art. 31 et 32 LPers/FR. On ne voit pas non plus que l'application d'un délai de congé d'un mois pour la fin d'un mois conduise, dans le cas d'espèce, à un résultat arbitraire.
4.
4.1 Le recourant soutient également avoir été victime d'un licenciement abusif au sens de l'art. 46 al. 1 let. c LPers/FR, qui qualifie d'abusif un congé donné afin d'empêcher la naissance ou l'exercice de bonne foi de prétentions juridiques résultant de la présente loi, des dispositions d'exécution et du contrat. Il se réfère à une lettre du 5 mars 2008 par laquelle il avait fait part à la directrice du foyer de certaines difficultés qu'il rencontrait dans l'exercice de ses tâches, notamment avec l'infirmière-cheffe, ainsi qu'à une formule d'auto-évaluation du 9 mars suivant dans laquelle il avait émis des propositions en vue d'une meilleure collaboration au sein de l'unité de soins. Selon lui, ces éléments, qui ont été arbitrairement écartés par le tribunal cantonal, mettent en lumière le caractère abusif de son congé. Il était en effet évident, vu la chronologie des événements, que l'intimé l'avait licencié parce qu'il entendait faire valoir de bonne foi des prétentions juridiques relatives à l'organisation du service dans lequel il travaillait et visant sa supérieure hiérarchique.
4.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération. Aucun fait nouveau ou preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 LTF).
4.3 La lettre et la formule d'auto-évaluation dont parle le recourant n'ont fait l'objet d'aucune constatation dans le jugement attaqué. Dans son écriture cantonale, B.________ a certes renvoyé à la partie en fait de la décision du Préfet qui en mentionne l'existence. Il n'a toutefois pas allégué devant le tribunal cantonal le fait déterminant dont il se prévaut maintenant, à savoir que le contenu de ces pièces a constitué le vrai motif pour lequel il a été licencié (cf. ses observations du 23 décembre 2008). On notera au demeurant que l'autorité de première instance n'a pas non plus discuté la validité du renvoi du recourant sous cet angle. Or s'agissant d'une circonstance de fait qui ne peut être établie sans la collaboration de celui qui a reçu le congé, il incombait au recourant de faire valoir ce motif en vertu de son devoir de collaborer à l'instruction de la cause (cf. art. 45 et 47 du code de procédure et de juridiction administrative du canton de Fribourg du 23 mai 1991 [RS/FR 150.1]). Tout au plus a-t-il invoqué l'art. 46 al. 1 let. c LPers/FR en argumentant que le foyer avait voulu empêcher la naissance du «salaire auquel il aurait eu droit si son délai de congé avait été respecté» (voir p. 7 du jugement entrepris). Dans ces conditions et en l'absence d'indices contraires ressortant du dossier - le seul déroulement chronologique des événements ne constituant pas un indice suffisant à cet égard -, aucun reproche ne saurait être fait aux premiers juges de ne pas avoir considéré comme pertinentes les pièces dont le recourant se réfère dans son recours en matière de droit public. En vérité, celui-ci soulève ici une argumentation juridique nouvelle qui repose sur des faits nouveaux, à savoir des faits qui n'ont pas été constatés par l'autorité cantonale. Le moyen invoqué est par conséquent irrecevable (cf. art. 99 LTF).
5.
Il découle de ce qui précède que le recours est mal fondé.
Compte tenu de l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant, qui supportera également ses propres dépens (art. 66 al. 1 ainsi que 68 al. 1 et 2 LTF). L'intimé ne peut se voir allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal fribourgeois.
Lucerne, le 20 février 2010
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Ursprung von Zwehl