Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_663/2009
{T 0/2}
Arrêt du 23 février 2010
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Müller, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffier: M. Vianin.
Parties
A.X.________,
représenté par Me Franck-Olivier Karlen, avocat,
recourant,
contre
Service de la population du canton de Vaud,
avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne.
Objet
Autorisation de séjour,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 8 septembre 2009.
Faits:
A.
A.X.________, ressortissant du Kosovo né en 1972, est entré en Suisse le 23 septembre 2003 et a déposé une demande d'asile le même jour. Cette demande a été rejetée par décision de l'Office fédéral des réfugiés du 7 octobre 2003, entrée en force. A.X.________ a quitté la Suisse le 12 mars 2004 à destination de Pristina (Kosovo).
A.X.________ est revenu en Suisse au bénéfice d'une autorisation de séjour d'une durée de trois mois qui lui a été délivrée le 21 juin 2004 en vue de la célébration de son mariage. Le 29 juillet 2004, à Morges, il a épousé B.________, ressortissante suisse. Le 2 septembre 2004, il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.
Les époux X.________ se sont séparés le 29 mars 2007.
Le 22 juin 2007, A.X.________ a adressé au Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) une demande de prolongation de son autorisation de séjour, dans laquelle il a indiqué être marié et faire ménage commun avec son épouse. Son autorisation de séjour a été prolongée jusqu'au 28 juillet 2009.
Statuant le 25 septembre 2007 sur une requête de mesures protectrices de l'union conjugale déposée par B.X.________ le 31 mai 2007, le Tribunal de première instance du canton de Genève a autorisé les époux à vivre séparés.
Le 2 novembre 2007, B.X.________ a signalé au Contrôle des habitants de la commune de Morges qu'elle s'était séparée de son mari et n'était plus domiciliée dans la commune. Ce courrier a été transmis au Service de la population.
Après avoir entendu les époux X.________ (questionnaire adressé le 6 février 2008 à B.X.________, audition de son mari par la police de Morges, échange d'écritures avec ce dernier), le Service de la population a rendu le 6 novembre 2008 une décision par laquelle il a révoqué l'autorisation de séjour de A.X.________.
B.
Saisi d'un recours à l'encontre de cette décision, le Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté par arrêt du 8 septembre 2009. Il a considéré que le recourant ne pouvait ignorer, lorsqu'il avait sollicité la prolongation de son autorisation de séjour, le 22 juin 2007, que la séparation d'avec son épouse n'était pas passagère. Ses indications sur le formulaire de demande constituaient donc de fausses déclarations, de sorte que c'était à bon droit que son autorisation de séjour avait été révoquée. Les juges cantonaux ont ensuite examiné si le recourant pouvait obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour. Ils ont estimé qu'il ne se trouvait pas dans l'une des situations où, selon l'art. 50 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr; RS 142.20), le droit du conjoint à la prolongation de son autorisation de séjour subsiste nonobstant la dissolution de l'union conjugale. D'une part, l'union conjugale avait duré moins de trois ans, de sorte que le recourant ne pouvait se prévaloir de la lettre a de l'art. 50 al. 1 LEtr. D'autre part, sa situation personnelle n'était pas telle que la poursuite de son séjour en Suisse s'imposerait pour des raisons personnelles majeures, au sens de la lettre b de l'art. 50 al. 1 LEtr.
C.
A.X.________ forme un recours au Tribunal fédéral à l'encontre de l'arrêt du 8 septembre 2009. Il conclut en substance à ce qu'il soit réformé en ce sens que, principalement, son autorisation de séjour est prolongée et, subsidiairement, il est admis provisoirement à demeurer en Suisse, le tout sous suite de frais et dépens. Il soutient qu'il remplit les conditions de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr. Il demande également à bénéficier de l'assistance judiciaire et, à titre préalable, requiert que son recours soit doté de l'effet suspensif.
L'autorité précédente ainsi que le Service de la population renoncent à se déterminer sur le recours. L'Office fédéral des migrations propose de le rejeter.
Par ordonnance présidentielle du 16 octobre 2009, la requête d'effet suspensif a été admise.
Considérant en droit:
1.
Le 1er janvier 2008 est entrée en vigueur la loi fédérale sur les étrangers, qui a remplacé la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 1 113; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007). En vertu de l'art. 126 al. 1 LEtr, les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la loi sont régies par l'ancien droit. Selon la jurisprudence, cette règle vaut pour toutes les procédures engagées en première instance avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les étrangers, non seulement lorsqu'elles ont été ouvertes sur requête de l'étranger, mais aussi quand elles l'ont été d'office (arrêts 2C_745/2008 du 24 février 2009 consid. 1.2.3; 2C_98/2009 du 10 juin 2009 consid. 1.4).
En l'occurrence, il ressort de la décision attaquée que la procédure de révocation a été engagée le 6 février 2008, par l'envoi d'un questionnaire à l'épouse du recourant. Il s'ensuit que c'est à juste titre que l'autorité précédente a examiné aussi la question de savoir si le recourant peut obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour à la lumière du nouveau droit.
2.
2.1 Selon l'art. 83 lettre c ch. 3 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable à l'encontre des décisions relatives au droit des étrangers qui concernent l'admission provisoire.
La conclusion subsidiaire du recourant, tendant à ce qu'il soit admis provisoirement à rester en Suisse, est par conséquent irrecevable.
2.2 Lorsque le recours a pour objet une décision confirmant la révocation d'une autorisation de séjour qui a expiré dans l'intervalle, la personne concernée n'a plus d'intérêt (actuel) à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, de sorte que la condition de recevabilité de l'art. 89 al. 1 LTF n'est plus remplie. Selon une pratique constante, le Tribunal fédéral entre toutefois exceptionnellement en matière lorsque, comme en l'espèce, la décision attaquée se prononce aussi sur le renouvellement de ladite autorisation (voir déjà, sous le régime de l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 [OJ; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006], arrêt 2A.381/1993 du 18 janvier 1994 consid. 2a; cf. plus récemment, sous l'empire de la LTF, arrêt 2C_91/2009 du 10 juin 2009 consid. 4).
2.3 Selon l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF, en droit des étrangers, le recours en matière de droit public est irrecevable à l'encontre des décisions qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit.
En l'occurrence, le recourant prétend disposer d'un droit à une autorisation de séjour en vertu de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr. Cette disposition étant de nature à conférer un droit à une telle autorisation, le recours est recevable sous l'angle de l'art. 83 lettre c ch. 2 LTF, la question de savoir si c'est à juste titre que l'autorité précédente a nié l'existence de raisons personnelles majeures au sens de la norme en question relevant du fond (cf. arrêt 2C_216/2009 du 20 août 2009 consid. 1.4 et 2.2).
2.4 Au surplus, dirigé contre une décision finale (cf. art. 90 LTF) rendue par une autorité judiciaire cantonale supérieure de dernière instance (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), le recours a été déposé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (cf. art. 42 LTF), de sorte qu'il est en principe recevable.
2.5 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire pour l'essentiel de manière arbitraire (art. 9 Cst.) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant doit expliquer de manière circonstanciée (s'agissant du grief d'arbitraire dans l'établissement des faits, voir l'art. 106 al. 2 LTF qui pose des exigences de motivation accrues) en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, l'autorité de céans n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (cf. ATF 135 III 397 consid 1.4 p. 400; 133 II 249 consid. 1.4 p. 254/255; 133 IV 286 consid. 6.2 p. 288).
3.
Selon l'art. 50 al. 1 LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 subsiste dans les cas suivants:
- l'union conjugale a duré au moins trois ans et l'intégration est réussie (lettre a);
- la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (lettre b).
L'alinéa 2 précise que les "raisons personnelles majeures" sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale et que la réintégration dans le pays de provenance semble fortement compromise (voir aussi l'art. 77 al. 2 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative [OASA; RS 142.201], qui reprend la teneur de l'art. 50 al. 2 LEtr).
L'art. 50 al. 1 lettre b et 2 LEtr a pour vocation d'éviter les cas de rigueur ou d'extrême gravité qui peuvent être provoqués notamment par la violence conjugale, le décès du conjoint ou des difficultés de réintégration dans le pays d'origine. Ces dispositions ne sont pas exhaustives (cf. le terme "notamment") et laissent aux autorités une certaine liberté d'appréciation humanitaire. La violence conjugale ou la réintégration fortement compromise dans le pays d'origine peuvent revêtir une importance et un poids différents dans cette appréciation et, selon leur intensité, suffire isolément à admettre l'existence de raisons personnelles majeures (arrêt 2C_460/2009 du 4 novembre 2009 destiné à la publication, consid. 5.3).
S'agissant de la réintégration sociale dans le pays de provenance, l'art. 50 al. 2 LEtr exige qu'elle semble fortement compromise ("stark gefährdet"). La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêt 2C_216/2009 précité, consid. 3 avec renvoi à Thomas Geiser/Marc Busslinger, Ausländische Personen als Ehepartner und registrierte Partnerinnen, in Ausländerrecht, 2e éd., 2009, no 14.54).
4.
4.1 Aux fins de déterminer si le recourant peut se prévaloir de "raisons personnelles majeures" au sens de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr, l'autorité précédente s'est référée à l'art. 31 al. 1 OASA, ainsi qu'à l'art. 4 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 sur l'intégration des étrangers (OIE; RS 142.205).
Renvoyant aux art. 30 al. 1 lettre b, 50 al. 1 lettre b et 84 al. 5 LEtr, ainsi qu'à l'art. 14 de la loi fédérale du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi; RS 142.31), l'art. 31 OASA énumère de manière non exhaustive les critères à prendre en considération pour juger de l'existence d'un cas individuel d'une extrême gravité. Le Tribunal de céans a déjà eu l'occasion de se demander si le renvoi à l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr est justifié, étant donné que cette disposition est la seule parmi les normes citées à conférer un droit à une autorisation de séjour. Même s'il existe des analogies, les critères permettant d'admettre l'existence de raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr ne se recoupent pas nécessairement toujours avec ceux qui justifient d'autoriser un étranger à résider en Suisse même sans droit, dans des cas d'extrême gravité. La question des rapports entre les deux dispositions n'a toutefois pas été tranchée définitivement (arrêt 2C_216/2009 précité, consid. 2.2). Il peut en aller de même en l'espèce, comme aussi des relations entre l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr et l'art. 4 OIE.
4.2 Le recourant fait valoir qu'on ne peut lui reprocher d'être à l'origine de la rupture de l'union conjugale. Il allègue que celle-ci est due, outre à l'attitude de sa belle famille, à des divergences entre les époux quant au fait d'avoir des enfants: alors que lui-même aurait éprouvé un fort désir de paternité, son épouse aurait avorté à deux reprises pendant le mariage, avant de donner naissance à un enfant conçu avec un autre homme. Le recourant fait grief à l'autorité précédente de n'avoir pas tenu compte de ces circonstances qui ressortiraient de pièces produites en procédure cantonale.
Le fait que l'épouse du recourant aurait avorté par deux fois pendant qu'ils faisaient ménage commun ne ressort pas de la décision entreprise. Ces circonstances ne sont pas même alléguées dans le mémoire de recours à l'autorité précédente, du 1er décembre 2008, mais seulement dans une pièce jointe à cette écriture, à savoir la réponse du recourant du 17 septembre 2008 à la demande de divorce déposée le 8 mai 2008 par son épouse. Le Tribunal de céans étant lié par les constatations de fait de l'autorité précédente (cf. consid. 2.5), dont le recourant ne démontre pas qu'elles seraient manifestement incomplètes ou inexactes, les circonstances en question ne peuvent être prises en considération. Il ressort en revanche de la décision entreprise que l'épouse du recourant a eu un enfant avec un autre homme avec qui elle a refait sa vie.
Quoi qu'il en soit, ces circonstances ne sauraient conduire à admettre l'existence de raisons personnelles majeures, au sens de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr, qui imposeraient d'autoriser le recourant à poursuivre son séjour en Suisse.
4.3 Le recourant conteste l'affirmation de l'autorité précédente selon laquelle ses perspectives de réintégration dans son pays d'origine paraissent bonnes. Il fait valoir qu'il n'a plus vécu au Kosovo depuis de très nombreuses années, qu'il parle une autre langue depuis plus de dix ans, qu'il n'a plus conservé aucune attache amicale, culturelle ou sociale avec cette région, que seuls "quelques membres de sa famille éloignée" y sont toujours domiciliés et que la situation administrative et économique y a changé. En parallèle, le recourant se prévaut de son intégration en Suisse, qui serait particulièrement réussie: la "quasi-totalité de sa famille proche" ainsi que tous ses amis résident dans ce pays, à Morges ou à Winterthur. Il travaille depuis plusieurs années pour le compte du même employeur, qui est très satisfait de ses services. De nombreuses personnes, amis et collègues de travail, ont spontanément signé une pétition de soutien tendant à ce qu'il puisse poursuivre son séjour en Suisse. S'il ne parle pas parfaitement le français, il s'exprime couramment en allemand, langue qui est celle de son employeur et de ses collègues de travail. En outre, il n'a jamais attiré défavorablement l'attention des autorités par son comportement.
Comme indiqué plus haut (consid. 3), la question n'est pas de savoir s'il est plus facile pour le recourant de vivre en Suisse ou dans son pays d'origine, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans ce dernier, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises. Or, à cet égard, le recourant ne prétend pas que sa réintégration s'avérerait particulièrement difficile en tant qu'homme séparé ou divorcé. Par ailleurs, l'autorité précédente a constaté, d'une manière qui lie le Tribunal de céans, que la plupart des membres de la famille du recourant (ses parents, une soeur et un frère) vivent dans son pays d'origine. Si l'on ajoute à cela que le recourant ne séjourne en Suisse que depuis 2004, on ne saurait dire que sa réintégration au Kosovo paraisse gravement compromise. Par ailleurs, l'intégration professionnelle du recourant ne signifie pas encore qu'il ait établi avec la Suisse des liens si étroits qu'ils fassent obstacle à son retour dans son pays d'origine.
Dans ces conditions, l'autorité précédente a considéré à bon droit que le recourant ne peut se prévaloir de raisons personnelles majeures, au sens de l'art. 50 al. 1 lettre b LEtr, aux fins d'en déduire un droit à une autorisation de séjour.
5.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Les conclusions du recourant apparaissant dénuées de toute chance de succès, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (cf. art. 64 al. 1 LTF a contrario). Partant, le recourant doit supporter les frais de justice (cf. art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Des frais judiciaires de 2'000 fr. sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la population et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 23 février 2010
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:
Müller Vianin