BGer 2C_708/2009
 
BGer 2C_708/2009 vom 12.04.2010
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
2C_708/2009
Arrêt du 12 avril 2010
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Zünd, Président,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffière: Mme Kurtoglu-Jolidon.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Marianne Bovay, avocate,
recourant,
contre
Service de la population du canton de Vaud, avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne.
Objet
Autorisation de séjour,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 17 sep-tembre 2009.
Faits:
A.
X.________ (ci-après: l'intéressé ou le recourant), ressortissant colombien, né en 1967, est entré en Suisse en juin 1998 en qualité de touriste. Par la suite, il a bénéficié d'une autorisation de séjour de courte durée, puis d'autorisations de séjour pour études, lui permettant de parfaire sa formation. Il a ainsi obtenu un diplôme d'oenologue puis un diplôme de commerce des vins, tous deux délivrés par l'Ecole d'ingénieurs de A.________.
Le 1er février 2007, l'Office cantonal de la population du canton de Genève a refusé à l'intéressé le renouvellement de son autorisation de séjour pour études, constatant que sa formation avait été ponctuée de divers échecs successifs et que le but du séjour initialement annoncé, à savoir l'obtention d'un titre d'oenologue, avait été atteint.
B.
Après avoir cohabité depuis 2004, X.________ et Y.________, ressortissante suisse, se sont mariés le 16 février 2007. L'intéressé a depuis lors bénéficié d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial délivrée par le canton de Vaud, canton où il avait précédemment déménagé.
Environ cinq mois après le mariage, soit le 15 juillet 2007, les époux se sont séparés. Il ressort d'un rapport de renseignements du 23 juillet 2008 de la police municipale de la ville de B.________ que Y.________ a déclaré qu'elle souhaitait divorcer. Ce document mentionne également que X.________ a un oncle qui vit en Suisse, ainsi qu'un frère et une soeur qui vivent en Colombie en compagnie de leur père, sa mère vivant aux Etats-Unis.
Le 22 août 2008, X.________ a requis la prolongation de son autorisation de séjour. A la même date, l'employeur de l'intéressé a déposé une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative. Depuis 2007, il travaille en effet en tant qu'oenologue auprès de la société D.________.
C.
Le 12 février 2009, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) a refusé la prolongation de l'autorisation de séjour.
Par lettre du 20 juillet 2009 au Service de la population, Y.________ a confirmé qu'elle n'avait pas l'intention de reprendre la vie commune avec son époux et qu'elle s'apprêtait à déposer une demande en divorce, les deux ans de séparation étant atteints.
D.
Par arrêt du 17 septembre 2009, le Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours de X.________. Appliquant le nouveau droit des étrangers, les juges cantonaux ont retenu en substance que, comme la vie commune avait cessé en juillet 2007, X.________ ne pouvait prétendre au renouvellement de son autorisation de séjour sur la base des dispositions sur le regroupement familial, ni sur les droits accordés par la loi lorsque l'union conjugale a duré au moins trois ans. Le Tribunal cantonal n'a pas non plus admis l'existence d'une situation d'une extrême gravité permettant de déroger aux conditions d'admission. Finalement, il a jugé que l'intéressé, qui travaille dans un grand magasin, ne remplissait pas les conditions pour l'obtention d'un permis de séjour avec activité lucrative.
E.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de dépens, d'octroyer l'effet suspensif à son recours, d'annuler l'arrêt du 17 septembre 2009 du Tribunal cantonal et de le mettre au bénéfice d'une autorisation de séjour.
Invité à se prononcer sur cette écriture, le Service de la population a renoncé à se déterminer. Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral des migrations se réfèrent aux considérants de l'arrêt attaqué et concluent au rejet du recours.
Par ordonnance du 30 octobre 2009, le Président de la IIe Cour de droit public a octroyé l'effet suspensif au recours.
Considérant en droit:
1.
Le recourant a déposé la demande de renouvellement de son permis le 22 août 2008. Celle-ci sera donc examinée au regard de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr ou la loi sur les étrangers; RS 142.20), entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (art. 126 al. 1 LEtr a contrario).
2.
2.1 Selon l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, en droit des étrangers, le recours en matière de droit public est irrecevable à l'encontre des décisions qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Le recourant prétend que son séjour en Suisse doit être prolongé pour des raisons personnelles au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr. Son recours est recevable sous cet angle, cette disposition étant de nature à conférer un droit à une telle autorisation (cf. par analogie ATF 128 II 145 consid. 1.1.5 p. 149).
Par contre, en tant que l'intéressé invoque une violation de l'art. 30 LEtr, son recours est irrecevable. En effet, l'art. 83 let. c ch. 5 LTF dispose que le recours en matière de droit public est irrecevable contre les dérogations aux conditions d'admission.
Pour le surplus, le recours est en principe recevable au regard des art. 42 et 82 ss LTF.
2.2 Sous réserve des droits fondamentaux et des dispositions de droit cantonal et intercantonal, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 134 III 102 consid. 1.1 p. 104).
Le Tribunal fédéral examine la violation du droit fédéral en se fondant sur les faits constatés par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF). Le recourant doit expliquer, dans une argumentation répondant aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF, en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, l'autorité de céans n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4 p. 254/255; 133 IV 286 consid. 6.2 p. 288 et les arrêts cités). Par ailleurs, l'art. 99 al. 1 LTF dispose qu'aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (ATF 135 II 1 consid. 1.4 p. 5).
2.3 Le recourant allègue qu'il vient d'apprendre que la rémission de son cancer de la peau est interrompue par une récidive, ce qui nécessite un traitement dont il ne pourrait pas bénéficier en Colombie. Il s'agit là d'un fait nouveau postérieur à l'arrêt attaqué. Partant, le Tribunal fédéral ne peut pas le prendre en considération (art. 99 al. 1 LTF).
3.
L'intéressé estime que le Tribunal cantonal n'a pas suffisamment motivé l'arrêt attaqué. Il se plaint, en outre, du fait que certains arguments n'y aient pas été mentionnés.
3.1 En effet, le droit d'être entendu implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. La motivation d'une décision est suffisante lorsque l'intéressé est mis en mesure d'en apprécier la portée et de la déférer à une instance supérieure en pleine connaissance de cause. Il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son prononcé. Elle peut ainsi se limiter aux points essentiels pour la décision à rendre (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88; 133 I 270 consid. 3.1 p. 277; 133 III 439 consid. 3.3 p. 445).
3.2 L'arrêt attaqué satisfait à ces exigences, étant mentionné que le juge n'a pas à se prononcer sur les arguments soulevés qu'il n'estime pas décisifs. Cet arrêt est parfaitement compréhensible en ce qui concerne l'exception à l'exigence du ménage commun (cf. art. 49 LEtr et infra consid. 5.1) dans le cadre de la prolongation de l'autorisation de séjour. Le Tribunal cantonal a en effet jugé que les conditions posées à cette exception n'étaient pas remplies (arrêt attaqué consid. 3b p. 4), le couple ayant des domiciles séparés depuis deux ans et l'épouse voulant divorcer.
Quant à l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr, il est exact que le jugement cantonal n'exclut qu'implicitement son application. Cela s'explique par le fait qu'à la lecture du dossier il est évident que la condition posée à la poursuite du séjour en Suisse par cette disposition, soit des raisons personnelles majeures, n'est manifestement pas remplie. En outre, il ressort également de l'analyse des conditions de l'art. 30 al. 1 let. b Letr, régissant les dérogations aux conditions d'admission, que cette condition n'est pas réalisée. D'ailleurs, le recourant a clairement saisi (p. 12 du recours) que cette motivation pouvait s'appliquer mutatis mutandis au refus de mise en oeuvre de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr.
3.3 Compte tenu de ce qui précède, le grief de violation du droit d'être entendu doit être rejeté.
4.
A l'appui de plusieurs de ses griefs, le recourant se plaint d'une mauvaise constatation des faits.
Le Tribunal cantonal a retenu que les conjoints étaient séparés depuis le 15 juillet 2007, que la femme du recourant avait déclaré de façon claire, en 2008 et en 2009, ne pas vouloir reprendre la vie commune et qu'elle s'apprêtait à déposer une demande en divorce. Le recourant prétend au contraire que son épouse a quitté le domicile conjugal à la suite d'une dépression nerveuse et que les conjoints suivent une thérapie de couple qui pourrait amener à la reprise de la vie commune.
Le recourant ne fait qu'opposer sa version des faits à celle du Tribunal cantonal dans une argumentation purement appellatoire. Celle-ci ne répond ainsi pas aux exigences susmentionnées (cf. consid. 2.2). Partant, elle est irrecevable. De toute façon, les faits présentés comme déterminants, soit les problèmes psychologiques de son épouse et la thérapie de couple, ne seraient pas de nature à influer sur le sort de la cause, condition retenue par l'art. 97 al. 1 in fine LTF pour admettre une correction de l'état de fait.
A cet égard, le reproche du recourant quant à l'instruction prétendument insuffisante du Tribunal cantonal au sujet de l'absence de ménage commun ne saurait être retenu. En effet, compte tenu de ce qui précède, le juge pouvait mettre un terme à l'instruction en procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui étaient encore proposées (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148; 130 II 425 consid. 2.1 p. 429).
5.
5.1 Selon l'art. 42 al. 1 LEtr, le conjoint d'un ressortissant suisse ainsi que ses enfants célibataires de moins de 18 ans ont droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui.
L'art. 49 LEtr prévoit cependant une exception à cette exigence du ménage commun lorsque la communauté familiale est maintenue et que des raisons majeures justifiant l'existence de domiciles séparés peuvent être invoquées. Ces raisons majeures peuvent être dues, notamment, à des obligations professionnelles ou à une séparation provisoire en raison de problèmes familiaux importants (art. 76 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative, [OASA], entrée en vigueur le 1er janvier 2008; RS 142.201).
5.2 Le recourant ne fait plus ménage commun avec son épouse. En outre, sur la base des faits constatés par le Tribunal cantonal, l'épouse du recourant va déposer une demande en divorce. La communauté familiale n'a ainsi pas été maintenue au sens de l'art 49 LEtr. Il n'y a dès lors pas lieu de se pencher sur la question de savoir, comme le demande le recourant, si la séparation aurait été provoquée par des problèmes familiaux importants et ne serait que provisoire (cf. consid. 4).
Partant, l'intéressé ne peut pas déduire de droit à la prolongation de son autorisation de séjour de l'art. 42 al. 1 LEtr, l'exception à la condition du ménage commun de l'art. 49 LEtr n'étant pas remplie, contrairement à ce que qu'il prétend.
6.
6.1 Selon l'art. 50 al. 1 LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu de l'art. 42 LEtr subsiste lorsque l'union conjugale a duré au moins trois ans et que l'intégration est réussie (let. a) ou lorsque la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (let. b). L'alinéa 2 précise que les "raisons personnelles majeures" sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale et que la réintégration dans le pays de provenance semble fortement compromise (voir aussi l'art. 77 al. 2 OASA, qui reprend la teneur de l'art. 50 al. 2 Letr).
L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr a pour vocation d'éviter les cas de rigueur ou d'extrême gravité qui peuvent être provoqués notamment par la violence conjugale, le décès du conjoint ou des difficultés de réintégration dans le pays d'origine. Sur ce point, l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr n'est pas exhaustif (cf. le terme "notamment") et laisse aux autorités une certaine liberté d'appréciation humanitaire. La violence conjugale ou les difficultés de réintégration peuvent revêtir une importance et un poids différents dans cette appréciation et suffire isolément à admettre des raisons personnelles majeures (ATF 136 II 1 consid. 5.3 p. 4).
S'agissant de la réintégration sociale dans le pays de provenance, l'art. 50 al. 2 LEtr exige qu'elle semble fortement compromise ("stark gefährdet"; ATF 136 II 1 consid. 5.3 p. 4). La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêt 2C_663/2009 du 23 février 2010 consid. 3 in fine avec renvoi à Thomas Geiser/Marc Busslinger, Ausländische Personen als Ehepartner und registrierte Partnerinnen, in Ausländerrecht, 2e éd., 2009, no 14.54).
Quant aux notions d'union conjugale et de mariage, elles ne sont pas identiques. Le mariage peut être purement formel, alors que l'union conjugale implique en principe la vie en commun des époux, sous réserve des exceptions mentionnées à l'art. 49 LEtr (arrêt 2C_416/2009 du 8 septembre 2009 consid. 2.1.2).
6.2 En l'espèce, même si les époux sont encore mariés actuellement, l'union conjugale a duré moins de six mois, puisque le couple est séparé depuis juillet 2007, sans maintien de la communauté familiale au sens de l'art. 49 LEtr. Le recourant ne peut donc déduire aucun droit de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr.
6.3 En ce qui concerne les art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr, les onze années de résidence en Suisse du recourant, sans être négligeables, ne sont pas suffisantes à elles seules pour justifier de raisons personnelles majeures. En outre, aucun élément ne permet de retenir que la réintégration sociale de l'intéressé en Colombie serait fortement compromise. Il y a, en effet, vécu jusqu'à l'âge de 31 ans et y dispose encore d'une partie de sa famille. Les liens amicaux et professionnels tissés en Suisse durant son séjour n'ont pour leur part rien d'exceptionnel et ne sauraient jouer un rôle décisif dans la balance des intérêts.
7.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux participants à la procédure, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 12 avril 2010
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Zünd Kurtoglu-Jolidon