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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4A_36/2010
Arrêt du 20 avril 2010
Ire Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Kolly.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.
Participants à la procédure
X.________, représenté par
Me Aba Neeman,
recourant,
contre
Y.________ SA, représentée par Me Alexis Turin,
intimée.
Objet
droit de l'actionnaire à l'information; abus de droit,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Autorité de cassation civile, du 30 novembre 2009.
Faits:
A.
Y.________ SA (ci-après: Y.________) a pour but social notamment la construction et l'exploitation d'installations mécaniques pour le transport de personnes dans la région ..., ainsi que toutes opérations mobilières, immobilières et financières convergentes. Le siège de la société est à Z.________ Son capital-actions s'élève à 4'250'000 fr.; il est divisé en 8'500 actions au porteur de 500 fr. chacune. X.________ détient deux actions de la société depuis le 29 octobre 1998.
A la recherche de fonds pour rénover ses installations, Y.________ est entrée en relation avec un homme d'affaires se faisant passer pour le patron d'une importante holding, susceptible d'offrir notamment des produits financiers avec des rendements mirobolants (de l'ordre de 20 à 50 % par semaine). Intéressée par un tel placement, Y.________ a versé, durant l'été 1999, un montant de 3'050'000 fr. sur un compte ouvert auprès de la banque B.________. Ayant appris par la suite que l'homme d'affaires était recherché par la police, le président du conseil d'administration de Y.________ a immédiatement interrompu les démarches initiées.
En septembre 2005, l'ancien partenaire de Y.________ a été renvoyé en jugement devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois, pour y répondre de diverses accusations en lien avec ses activités financières. Le journal V.________ s'est fait l'écho du procès, relevant notamment que Y.________ avait failli être la victime d'une escroquerie. En réponse à une interpellation de l'administrateur A.________, le directeur de Y.________ a expliqué, dans un courriel du 19 septembre 2005, que la société n'était pas impliquée dans le procès et que le dossier était clos en ce qui la concernait, ajoutant que le conseil d'administration avait été, en temps voulu, «informé des différentes démarches entreprises à l'époque et des frais liés à ces tentatives d'améliorer les finances de [la] société.»
A.________ est également président de Z.________ A la suite du rejet, par l'assemblée primaire des citoyens de cette commune, d'un important projet de planification globale soutenu par Y.________, le conseil d'administration de la société a inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée générale ordinaire du 28 septembre 2007 une proposition de révocation de l'administrateur A.________ (point 8).
X.________ a alors demandé au conseil d'administration de Y.________ de retirer cette proposition; son courrier du 18 septembre 2007 contenait les passages suivants:
Que lui [i.e. à A.________] reproche-t-on de concrètement?
Est-il victime de l'âne qui braie le plus fort...sachant que la bêtise est tonitruante?
Aurait-il mis en danger financier notre société par des engagements «non spéculatifs» (1400 % de rendement, que je qualifierai, en tant qu'adepte du monde boursier, Agt immobilier d'expérience et ancien Rpt. de la banque B.________, d'utopiques à l'instar de l'argent virtuel du monopoly [)]?
Je tiens encore à ajouter que lors de notre dernière AG 2006 (fin du procès/TA/Vevey 2005), par «compassion» pour vous les Administrateurs/cautionneurs individuels et solidaires, je n'ai pas soulevé le lièvre (...), mais après analyse des chiffres présentés...je me demande où se sont inscrits les quelques centaines de milliers de fr. perdus.
Il faut savoir parler d'argent quand il faut...
Il y a une espèce de tartufferie à s'en taire. Dans quelle rubrique financière ont-ils été dilués ou dispatchés - voire atténués par de forte réductions fiscales...?
Je ne verrais pas d'inconvénients à ce que le contenu du point 8 soit remplacé par un compte rendu chiffré de ces pertes et du risque de faillite encouru par notre société...Et pourquoi ne pas discuter de la responsabilité solidaire des initiateurs!
La révocation de A.________ a été discutée lors de l'assemblée générale du 28 septembre 2007. Le procès-verbal dressé à cette occasion rend compte de l'intervention de X.________ en ces termes: «M. X.________ demande qu'on tienne compte de sa requête écrite. Sans entrer dans les détails de son contenu, il laisse entrevoir des menaces à demi-voilées.» L'assemblée générale a décidé de suspendre la procédure de révocation, afin de permettre au conseil d'administration de rencontrer le conseil communal de Z.________ et d'examiner l'opportunité d'une candidature d'un autre membre de cette autorité.
Peu après, X.________ a adressé au président du conseil d'administration un message dans lequel il se félicitait de la décision de surseoir à la révocation de A.________ et sollicitait des renseignements comptables au sujet des frais occasionnés par les opérations financières entreprises à la fin des années 1990.
Par courrier du 16 novembre 2007, le conseil d'administration de Y.________ a répondu à X.________ qu'il considérait les allégations de celui-ci comme fallacieuses et diffamatoires; il l'a invité à se rétracter par écrit dans les dix jours, en se réservant la possibilité de déposer une plainte pénale.
Le conseil communal de Z.________ a maintenu son soutien à A.________. Ce dernier a été révoqué lors de l'assemblée générale extraordinaire de Y.________ du 21 novembre 2007.
Le même jour, sous la plume de son conseil, X.________ a imparti à la société un délai de dix jours pour lui remettre les comptes et des explications concernant les écritures comptables enregistrées à la suite de l'«affaire de 2005» et l'a avertie qu'à défaut, il agirait en justice. Le 30 novembre 2007, le conseil d'administration a remis à X.________ les comptes de l'exercice 2005 et l'a informé que C.________, organe de révision, était chargé de répondre à sa demande. Dans une lettre du 19 décembre 2007, le réviseur a certifié qu'il n'avait pu identifier aucune écriture comptable liée à l'affaire évoquée par X.________ et que, pour le surplus, Y.________ n'avait pas dû recourir aux services d'un avocat pour défendre ses intérêts lors du procès de Vevey.
Par courrier du 28 janvier 2008, X.________ a persisté dans sa requête de renseignements; il souhaitait désormais connaître l'étendue des frais engendrés par des hypothèques prétendument constituées en 1995 et 1996, ainsi que le coût occasionné par une garantie bancaire qui aurait été fournie en 1997 et 1998, le tout en lien avec les opérations de placement ébauchées durant cette période. Par la voix de son conseil, Y.________ a répété que la société n'avait pas eu à subir de frais en rapport avec cette affaire.
Lors de l'assemblée générale ordinaire du 24 octobre 2008, X.________, représenté par son avocat, a proposé l'instauration d'un contrôle spécial. Selon le procès-verbal, C.________ a réitéré «ce qu'il a[vait] déjà mentionné dans ses différents courriers, à savoir qu'aucune perte économique n'a[vait] été provoquée par cette affaire.» L'assemblée générale a rejeté la proposition.
B.
Le 23 janvier 2009, X.________ a ouvert action contre Y.________ en prenant notamment les conclusions suivantes:
Principalement
1. Ordre est donné à la société Y.________ SA (...) de permettre à Monsieur X.________ de consulter les pièces suivantes:
- comptes et rapports de gestion relatifs aux exercices 1995-1996, 1997-1998, 1999-2000
- toute pièce comptable relative aux hypothèques constituées à hauteur de 14 millions [de francs] fin 1995 début 1996
- toute pièce comptable relative au montant de 3 millions [de francs] bloqué à titre de garantie ainsi qu'aux intérêts qui en ont découlé
- toute pièce comptable relative aux cédules hypothécaires constituées en relation avec l'investissement prévu en 1997 ayant fait l'objet d'une procédure pénale, notamment le coût annuel engendré par lesdites cédules
- toute pièce comptable et correspondance relatives aux négociations, pourparlers et transactions ainsi qu'aux frais engendrés par celles-ci.
(...)
Subsidiairement
1. Ordre est donné à la société Y.________ SA (...) de fournir à X.________ les renseignements suivants relatifs:
- aux frais engendrés par les hypothèques constituées pour un montant de l'ordre de 14 millions de francs fin 1995 à début 1996
- tout renseignement relatif à la constitution de cédules hypothécaires et les frais engendrés par celles-ci en relation avec l'affaire pénale
- tout renseignement relatif à l'emprunt de 3 millions de francs effectué en relation avec l'affaire pénale et plus particulièrement quant aux intérêts qui ont couru sur ce montant
- tout renseignement sur l'ensemble des pertes bancaires engendré par cette affaire pénale
- tout renseignement relatif aux frais engagés avec cette affaire pénale.
Y.________ a conclu à l'irrecevabilité de la requête, subsidiairement au rejet de celle-ci.
Lors d'une audience tenue le 26 mai 2009 devant le Juge du district de Monthey, le directeur de Y.________ a déclaré notamment qu'un montant de l'ordre de 3 millions de francs avait effectivement été consigné auprès d'un établissement bancaire et que cette somme, provenant de liquidités de la société, n'était resté bloquée que quelques mois. A la demande du juge, le directeur s'est engagé à verser en cause une pièce bancaire relative au blocage et au déblocage du montant en question. Quelques jours plus tard, Y.________ a déposé un extrait du grand livre relatif au compte B.________ n° xxx, ainsi que divers extraits et avis d'écriture concernant ledit compte, desquels il ressort que les opérations bancaires litigieuses ont eu lieu en 1999.
Par décision du 1er juillet 2009, le Juge I du district de Monthey a rejeté la requête tendant à la consultation de pièces et à l'obtention de renseignements.
X.________ s'est pourvu en nullité, concluant à l'annulation de la décision du 1er juillet 2009.
Par jugement du 30 novembre 2009, l'Autorité de cassation civile du Tribunal cantonal du canton du Valais, statuant par l'un de ses juges, a rejeté le pourvoi en nullité dans la mesure de sa recevabilité.
C.
X.________ interjette un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire. Principalement, il conclut à l'admission du recours en matière civile et de son action introduite le 23 janvier 2009, ainsi qu'à la communication des renseignements et pièces requis; subsidiairement, il conclut à l'admission du recours en matière civile et à la transmission du dossier à l'autorité cantonale pour nouvelle décision; à titre encore plus subsidiaire, il conclut à l'admission du recours constitutionnel et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
Y.________ propose l'irrecevabilité du recours en matière civile et le rejet du recours constitutionnel subsidiaire.
Considérant en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 135 III 1 consid. 1.1 p. 3, 329 consid. 1 p. 331).
1.1 Le jugement entrepris est une décision rendue en matière civile (cf. art. 72 al. 1 LTF). S'il n'appartient pas aux droits patrimoniaux, comme le droit au dividende par exemple, le droit à l'information prévu à l'art. 697 CO tend néanmoins à protéger les intérêts patrimoniaux de l'actionnaire. Une contestation à son sujet est ainsi de nature pécuniaire au sens de l'art. 74 al. 1 LTF (cf. mutatis mutandis sous l'ancien droit de procédure fédéral pour le droit au contrôle spécial ATF 120 II 393 consid. 2 p. 395). Dans les affaires pécuniaires ne relevant ni du droit du travail ni du droit du bail à loyer, le recours en matière civile n'est en principe recevable que si la valeur litigieuse s'élève à 30'000 fr. au moins (art. 74 al. 1 let. b LTF). En l'espèce, le juge cantonal a fixé la valeur litigieuse à un montant inférieur à 8'000 fr. et a conclu ainsi que seul le pourvoi en nullité, à l'exclusion de l'appel, était ouvert au niveau cantonal. Dans son écriture au Tribunal fédéral, le recourant reconnaît que la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. n'est pas atteinte en l'occurrence, mais soutient que le recours en matière civile est tout de même ouvert sur la base de l'art. 74 al. 2 let. a LTF, parce que la contestation soulèverait une question juridique de principe.
Cette notion s'interprète de manière restrictive. Il doit se poser une question juridique donnant lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part de l'autorité judiciaire suprême chargée de dégager une interprétation uniforme du droit fédéral (ATF 135 III 397 consid. 1.2 p. 399 et les arrêts cités). Lorsque le point soulevé ne concerne que l'application de principes jurisprudentiels à un cas particulier, il ne saurait être qualifié de question juridique de principe (ATF 133 III 493 consid. 1.2 p. 496).
En l'espèce, le recourant ne démontre pas de manière circonstanciée (art. 42 al. 2 LTF) en quoi son recours porterait sur une question juridique de principe (cf. ATF 133 III 439 consid. 2.2.2.1 p. 442). En particulier, le point de savoir si l'exercice de l'action en information prévue à l'art. 697 al. 4 CO est soumis à un délai n'est pas l'enjeu de la présente affaire. En effet, l'autorité cantonale, jurisprudence du Tribunal fédéral à l'appui, a précisément relevé que cette action n'était soumise à aucun délai de péremption; elle s'est référée à l'écoulement du temps uniquement pour apprécier l'intérêt de l'actionnaire moyen, ce qui n'a rien à voir avec une question juridique de principe. Au surplus, les conditions et la portée du droit de consultation de l'actionnaire ont été décrites dans l'ATF 132 III 71 (consid. 1 p. 73 ss), lequel contient également un passage sur les modalités d'exercice du droit aux renseignements (consid. 2 p. 81 ss).
En conséquence, seul le recours constitutionnel subsidiaire est ouvert en l'espèce (art. 113 LTF).
1.2 Le jugement attaqué est une décision finale (art. 117 et 90 al. 1 LTF). Le recourant a pris part à l'instance précédente et a succombé dans ses conclusions; il a donc qualité pour recourir (art. 115 LTF). Déposé en temps utile (art. 117 et 100 al. 1 LTF; art. 45 al. 1 et art. 46 al. 1 let. c LTF) et dans la forme requise (art. 42 LTF), le recours est recevable.
1.3 Comme cela ressort de son intitulé, le recours constitutionnel subsidiaire ne peut être formé que pour violation des droits constitutionnels, dont notamment l'interdiction de l'arbitraire (art. 116 LTF). Le Tribunal fédéral n'examine que les griefs soulevés et motivés de façon détaillée par la partie recourante (art. 117 et 106 al. 2 LTF). L'auteur du recours doit indiquer quel droit constitutionnel a été violé, selon lui, et montrer, par une argumentation circonstanciée, en quoi consiste la violation (ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 133 III 439 consid. 3.2 p. 444). Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 118 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis en violation d'un droit constitutionnel (art. 118 al. 2 et 116 LTF), ce que la partie recourante doit invoquer avec précision (art. 117 et 106 al. 2 LTF; ATF 133 III 439 consid. 3.2 p. 445). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 117 et 99 al. 1 LTF).
2.
Le jugement attaqué repose sur deux motivations indépendantes. D'une part, l'autorité cantonale a considéré que le juge de district n'avait pas versé dans l'arbitraire en jugeant que les informations requises n'étaient pas nécessaires au recourant pour lui permettre d'exercer ses droits d'actionnaire. D'autre part, elle a jugé que, même si tel avait été le cas, la requête apparaissait abusive au regard du but poursuivi en réalité par le recourant.
Conformément aux exigences déduites de l'art. 42 al. 2 LTF (ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s. et les arrêts cités), le recourant s'en prend à chacune de ces motivations de sorte que son recours est recevable à cet égard.
3.
Il convient d'examiner tout d'abord la seconde motivation du jugement attaqué. Le recourant fait valoir à ce propos que le juge cantonal a retenu de manière arbitraire un abus de droit, conduisant au rejet de l'action. L'actionnaire s'en prend en particulier à la constatation de l'autorité précédente selon laquelle, en usant de son droit à l'information, il cherchait à exercer une certaine pression sur le conseil d'administration de l'intimée afin que ce dernier retire la proposition de révocation de A.________ de l'ordre du jour de l'assemblée générale du 28 septembre 2007. A lire le recours, cette constatation ne reposerait sur aucun élément concret. La demande d'informations sur les placements litigieux n'aurait pas été de nature à exercer une quelconque pression sur le conseil d'administration. De plus, A.________ a été finalement révoqué sans que le recourant ait pu obtenir les renseignements requis. Enfin, si le courrier du 18 septembre 2007 de l'actionnaire contenait bien une demande de renseignements et une requête relative au point 8 de l'ordre du jour, on ne saurait, de l'avis du recourant, en tirer la conclusion que les deux démarches étaient indissociablement liées, sauf à exiger de tout actionnaire qui entend déposer une requête et émettre une proposition de le faire par lettres séparées, ce qui relèverait du formalisme excessif.
3.1 Aux termes de l'art. 2 al. 2 CC, l'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi. La règle prohibant l'abus de droit permet au juge de corriger les effets de la loi dans certains cas où l'exercice d'un droit allégué créerait une injustice manifeste. L'existence d'un abus de droit se détermine selon les circonstances concrètes du cas, en s'inspirant des diverses catégories mises en évidence par la jurisprudence et la doctrine. Les cas typiques sont l'absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique contrairement à son but, la disproportion manifeste des intérêts en présence, l'exercice d'un droit sans ménagement et l'attitude contradictoire (ATF 135 III 162 consid. 3.3.1 p. 169 et les arrêts cités).
Le droit à l'information institué à l'art. 697 CO comprend un droit aux renseignements et un droit de consultation. A l'instar de n'importe quel autre droit, son exercice est soumis à la réserve de l'abus de droit. Il est ainsi abusif de la part d'un actionnaire de faire valoir son droit à l'information en poursuivant des buts étrangers à ceux visés par la norme, par exemple en agissant de manière chicanière ou égoïste, contrairement à l'intérêt général de la société, en cherchant à satisfaire les intérêts de la concurrence ou à causer intentionnellement un dommage à la société (arrêt 4C.234/2002 du 4 juin 2003 consid. 4.2.4, in Pra 2004 n° 68 p. 390; ROLF H. WEBER, in Basler Kommentar, Obligationenrecht II, 3e éd. 2008, n° 7 ad art. 697 CO; LARISSA MAROLDA MARTINEZ, Information der Aktionäre nach schweizerischem Aktien- und Kapitalmarktrecht, 2006, p. 146; FABRIZIO GABRIELLI, Das Verhältnis des Rechts auf Auskunftserteilung zum Recht auf Einleitung einer Sonderprüfung, 1997, p. 31; FORSTMOSER/MEIER-HAYOZ/NOBEL, Schweizerisches Aktienrecht, 1996, § 40 n° 172 p. 505). Le but du droit aux renseignements et du droit à la consultation est de permettre à l'actionnaire d'obtenir les informations nécessaires pour exercer ses droits de manière judicieuse. Les droits d'actionnaire en jeu concernent en particulier le vote (approbation des comptes annuels, répartition du bénéfice, élections, décharge), l'institution d'un contrôle spécial, l'opposition aux décisions de l'assemblée générale, l'introduction d'une action en responsabilité et la vente d'actions (ATF 132 III 71 consid. 1.3 p. 75 s. et les références).
Par ailleurs, la jurisprudence a précisé que le seul écoulement du temps ne suffisait pas à fonder un abus de droit. En l'absence d'éléments supplémentaires, le fait que l'actionnaire ait tardé à déposer une requête sur la base de l'art. 697 al. 4 CO ne révèle pas un comportement abusif (arrêt précité du 4 juin 2003 consid. 3.2).
3.2 En l'espèce, les faits sur lesquels le recourant entendait obtenir des éclaircissements se sont déroulés à la fin des années 1990. Selon les constatations de l'autorité cantonale, l'actionnaire a eu connaissance des faits litigieux au plus tard en automne 2005. Or, il a exercé son droit à l'information pour la première fois dans sa lettre du 18 septembre 2007, soit environ deux ans plus tard. Cette constatation lie le Tribunal fédéral. Certes, le recourant prétend à présent n'avoir «eu de cesse de requérir des renseignements (...) dès qu'il a eu connaissance des démarches entreprises par le Conseil d'administration de Y.________ en vue du placement litigieux, soit en 2005 au plus tôt». Mais cette simple allégation, qui n'est assortie d'aucune démonstration, ne saurait manifestement établir que la constatation cantonale au sujet des démarches du recourant est entachée d'arbitraire.
A lui seul, le fait que l'actionnaire ait attendu aussi longtemps avant d'interpeller le conseil d'administration ne suffit pas à rendre abusif l'exercice du droit à l'information. Cet élément doit toutefois être mis en relation avec le contenu de la demande du 18 septembre 2007. Dans ce document, le recourant commence par s'insurger contre la révocation de A.________ proposée par le conseil d'administration de l'intimée, puis mentionne immédiatement après les opérations financières litigieuses, en s'interrogeant de manière faussement naïve sur les reproches faits à A.________. Plus loin, le recourant lie clairement son opposition à la révocation avec l'affaire financière de la fin des années 1990, en demandant que le point 8 de l'ordre du jour - portant sur la révocation - soit «remplacé par un compte rendu chiffré de ces pertes et du risque de faillite encouru par [la] société», voire par une rubrique relative à la «responsabilité solidaire des initiateurs». Le recourant précise même, selon ses propres termes, que c'est par «compassion» pour les administrateurs qu'il n'a pas «soulevé le lièvre» lors de la dernière assemblée générale, en 2006. L'autorité cantonale pouvait sans arbitraire interpréter ces lignes comme une tentative de faire retirer le point 8 de l'ordre du jour en exerçant une certaine pression sur le conseil d'administration par l'évocation d'une opération malheureuse.
Quelque temps après l'assemblée générale du 28 septembre 2007 ayant sursis à la révocation de A.________, le recourant a adressé un message au président du conseil d'administration pour se féliciter de cette décision et, dans la foulée, réclamer des renseignements à propos des opérations financières litigieuses. Et le jour même où l'assemblée générale a finalement révoqué A.________, l'actionnaire a agi par l'entremise de son avocat en demandant les comptes et des explications sur les écritures comptables enregistrées à la suite de l'«affaire de 2005», une action en justice étant d'ores et déjà réservée pour le cas où il n'obtiendrait pas satisfaction. Vu le déroulement des faits, il n'était pas arbitraire de la part du juge cantonal de déduire que, ce faisant, le recourant mettait ses menaces à exécution. Il convient d'ajouter à ce propos que, selon le jugement attaqué, le recourant lui-même a déclaré dans ses écritures cantonales n'avoir jamais eu l'intention de déposer une action en responsabilité contre les administrateurs.
En conclusion, le long laps de temps mis par le recourant pour demander des renseignements et la consultation de documents internes à la société, ainsi que l'interprétation de son attitude telle que dégagée sans arbitraire par l'autorité cantonale autorisaient celle-ci à constater que le recourant ne cherchait pas réellement à obtenir les renseignements nécessaires à l'exercice de ses droits d'actionnaire et, partant, que le but poursuivi, visant avant tout à déstabiliser le conseil d'administration, était exorbitant de la finalité du droit à l'information telle que voulue par le législateur.
Sur le vu de ce qui précède, la motivation du jugement attaqué relative à l'abus de droit commis par le recourant résiste au grief d'arbitraire. Comme cette argumentation suffit à fonder le rejet de la requête, le recours constitutionnel sera rejeté sans qu'il soit nécessaire d'examiner l'autre motivation développée par le juge cantonal.
4.
Vu le sort réservé aux recours, leur auteur prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours en matière civile est irrecevable.
2.
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Une indemnité de 2'500 fr., à payer à titre de dépens à l'intimée, est mise à la charge du recourant.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Autorité de cassation civile.
Lausanne, le 20 avril 2010
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: La Greffière:
Klett Godat Zimmermann