Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6B_555/2010
Arrêt du 21 octobre 2010
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges Favre, Président,
Mathys et Jacquemoud-Rossari.
Greffier: M. Vallat.
Participants à la procédure
A.X.________,
recourant,
contre
Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, 2000 Neuchâtel,
intimé.
Objet
Décision de non-lieu (enlèvement de mineur, etc.),
recours contre l'arrêt de la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 26 mai 2010.
Faits:
A.
Le 22 octobre 2007, A.X.________ a déposé plainte contre son ex-épouse. Il lui reprochait de n'avoir pas ramené de France, où elle était établie, à Courtelary leur fille C.X.________, cadette de leurs trois enfants, à la fin des vacances, soit le 21 octobre 2007. Cette plainte s'inscrivait dans le contexte des rapports conflictuels entre les deux parents récemment divorcés, notamment en relation avec leurs droits respectifs sur leurs enfants. Ces rapports ont été réglés par diverses conventions attribuant successivement la garde à la mère moyennant maintien d'une curatelle éducative (conventions des 22 décembre 2005 et 18 janvier 2006) et décisions la lui retirant provisoirement, ordonnant le placement des enfants en institution (jugement du 1er septembre 2006), puis confiant l'autorité parentale au père avec maintien d'une curatelle éducative et du placement des enfants (jugement de divorce du 3 octobre 2007). Ce dernier jugement a fait l'objet d'une procédure d'appel tranchée le 25 mars 2009.
Par décision du 19 mars 2010, le Ministère public neuchâtelois a prononcé un non-lieu. Tout en relevant que B.X.________, en ne laissant pas revenir C.X.________ de France le 21 octobre 2007, avait refusé formellement de remettre sa fille au titulaire de la tutelle, le Ministère public a jugé qu'au vu de la situation actuelle, une poursuite pénale était manifestement inopportune. Il a relevé notamment que la décision sur appel du jugement de divorce avait, en définitive, attribué l'autorité parentale ainsi que la garde de l'enfant à B.X.________.
B.
Saisie d'un recours de A.X.________, la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal neuchâtelois l'a rejeté, par arrêt du 26 mai 2010.
C.
A.X.________ interjette un recours en matière pénale. Il demande l'annulation de cet arrêt avec suite de frais.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Considérant en droit:
1.
L'art. 81 al. 1 LTF confère la qualité pour former un recours en matière pénale à quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente, ou a été privé de la possibilité de le faire, et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. La lettre b de cette disposition dresse une liste de personnes auxquelles cette qualité est expressément reconnue, à savoir l'accusé (ch. 1), le représentant légal de l'accusé (ch. 2), l'accusateur public (ch. 3), l'accusateur privé, si, conformément au droit cantonal, il a soutenu l'accusation sans l'intervention de l'accusateur public (ch. 4), la victime, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (ch. 5) et le plaignant, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte (ch. 6). Cette liste, comme cela résulte déjà des termes "en particulier", n'est pas exhaustive.
Le simple lésé n'a en principe pas qualité pour former un recours en matière pénale. Il peut uniquement faire valoir les droits procéduraux, dont la violation équivaut à un déni de justice formel, qui lui sont reconnus par le droit cantonal ou qui découlent directement du droit constitutionnel. Il n'est donc habilité à recourir que pour se plaindre de la violation de tels droits, notamment de n'avoir pas été entendu ou de s'être vu refuser la qualité de partie à la procédure. En revanche, il ne peut remettre en cause, même de façon indirecte, la décision sur le fond, par exemple contester l'application de la loi matérielle ou se plaindre d'une motivation insuffisante de la décision attaquée ou du refus d'administrer une preuve sur la base d'une appréciation anticipée de celle-ci (ATF 133 IV 228 consid. 2 p. 229 ss).
1.1 Le recourant n'allègue pas avoir subi une atteinte psychique, qui pourrait seule, éventuellement, entrer en considération eu égard à la nature des infractions dénoncées. Il ne soutient pas non plus que sa fille aurait subi une telle atteinte ou une atteinte à son intégrité physique ou sexuelle et cela ne ressort pas non plus du dossier de la cause. Le recourant n'est manifestement pas une victime au sens de l'art. 1 al. 1 ou al. 2 LAVI. La légitimation ne peut donc être fondée sur l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF. Compte tenu de la procédure neuchâteloise (art. 46, 48, 234, 243 CPP/NE), le recourant ne peut pas non plus être considéré comme un accusateur privé au sens de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 4 LTF. Il peut ainsi, tout au plus, invoquer la violation de son droit de porter plainte ainsi que celle de ses droits strictement procéduraux.
1.2 Le recours est, en conséquence, irrecevable faute de qualité pour agir dans la mesure où le recourant reproche aux autorités cantonales, en relation avec l'art. 220 CP, de s'être méprises sur la décision déterminant le droit de garde au mois d'octobre 2007. Il l'est également en tant que le recourant reproche aux autorités cantonales d'avoir violé les art. 183 et 292 CP respectivement son droit à la plainte en relation avec ces infractions, toutes ces questions touchant au fond de la cause et ces délits se poursuivant d'office. Le recourant n'est pas habilité non plus à discuter devant la cour de céans les considérations d'opportunité qui ont fondé le classement. En effet, un classement en opportunité viole le droit fédéral lorsqu'il en résulte que l'autorité compétente se refuse par principe à appliquer une disposition du droit pénal, qu'elle en modifie le contenu, notamment en ajoutant des éléments constitutifs de l'infraction, qu'elle l'applique ou l'interprète faussement ou encore que son refus ne repose sur aucun motif raisonnable, de telle sorte qu'il équivaut à un refus d'appliquer le droit fédéral (ATF 120 IV 38 consid. 3 p. 42; 107 consid. 2c p. 111; 119 IV 92 consid. 3b p. 101). De tels griefs remettent donc en cause l'application du droit matériel fédéral, ce qui exclut la recevabilité du recours du lésé sur ce point.
1.3 La recevabilité du recours est, par ailleurs, douteuse en ce qui concerne l'éventuelle violation de droits fondamentaux, les écritures du recourant ne paraissant pas répondre aux exigences de motivation accrues déduites de l'art. 106 al. 2 LTF. On comprend, cependant, que le recourant, qui n'est pas assisté, reproche aux autorités cantonales de ne l'avoir pas entendu et d'avoir tardé à rendre leur décision (ATF 115 Ia 12 consid. 2b, p. 14).
1.3.1 Il est constant que la plainte du recourant a donné lieu à une enquête, dans laquelle l'intéressé a été entendu à deux reprises au moins et a pu produire des pièces. Son ex-épouse a, elle aussi, été entendue. Le juge d'instruction a, en outre, procédé à de nombreuses démarches pour obtenir des informations sur les décisions civiles rendues, les procédures en cours et les mesures d'entraide internationale entreprises (v. infra, consid. 1.3.2). Le recourant ne peut donc reprocher aux autorités cantonales, sous l'angle d'un déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst.), de lui avoir refusé l'accès à la procédure ou d'avoir violé son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.).
1.3.2 En tant que le recourant reproche aux autorités cantonales d'avoir tardé à statuer en ne prononçant le non-lieu que 29 mois après le dépôt de la plainte, il convient de rappeler que la durée raisonnable d'une procédure, qui détermine si l'autorité a violé le principe de célérité (art. 29 al. 1 Cst.) lorsqu'aucun délai n'est fixé dans la loi, dépend de la nature de l'affaire et des circonstances (ATF 130 I 312 consid. 5.1 p. 331 s.; 119 Ib 311 consid. 5 p. 323 ss et les références). Pour se prononcer sur le caractère raisonnable de cette durée, il y a lieu de se fonder sur des éléments objectifs. Doivent notamment être pris en compte le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes (ATF 130 I 312 consid. 5.2 p. 332 et les références citées).
En l'espèce, ni le comportement du recourant ni une éventuelle surcharge des autorités ne sont en question. Le juge d'instruction a informé le recourant dès le mois de novembre 2007 qu'il envisageait de ne pas brusquer les choses dans la procédure pénale pour éviter de compromettre le résultat des démarches civiles en cours en vue du rapatriement de l'enfant (lettre du 26 février 2008). Il ressort en effet du dossier que, parallèlement à la procédure pénale et à la procédure de divorce suisse, des démarches d'entraide internationale ont été entreprises notamment par l'entremise de l'Office fédéral de la justice auprès du Ministère de la justice français dans le cadre de l'application de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants. Ces démarches ont abouti à une décision rendue, à la demande du Procureur de la République, par le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande instance de Montpellier, ordonnant le retour immédiat de l'enfant en Suisse (lettre du Ministère de la justice français à l'Office fédéral de la justice, du 3 mars 2008). Cette décision paraît avoir été exécutée le 14 avril 2008, date à laquelle l'enfant est revenue en Suisse. Ensuite, la présidente de la 2e Chambre civile de la cour d'appel du canton de Berne a, le 28 avril 2008 déjà, attribué par mesures provisionnelles la garde de l'enfant à sa mère et levé la mesure de placement à Courtelary. Le recourant en a informé le juge d'instruction le 7 mai 2008. Toutes ces mesures ont été confirmées au stade de la décision sur appel, par l'homologation de la convention partielle, souscrite par le recourant, qui réglait les effets accessoires du divorce, l'autorité parentale ayant, en outre, été confiée à la mère. Ces procédures étant terminées, le Juge d'instruction a encore entendu le recourant le 8 juillet 2009 en l'invitant à déposer les pièces des procédures civiles et à réfléchir à la possibilité d'un retrait de plainte. Une telle démarche d'apaisement n'était pas dénuée de bon sens une fois la situation de l'enfant réglée sur le plan civil. Le juge a encore poursuivi son instruction au mois d'août 2009 en demandant des pièces supplémentaires aux autorités judiciaires bernoises. Un avis de prochaine clôture d'enquête a été adressé aux parties le 8 janvier 2010. Après prolongation du délai de détermination, le juge d'instruction a clôt l'enquête le 2 mars 2010. La décision de non-lieu a été rendue par le Ministère public le 19 mars suivant.
L'attitude modérée du juge d'instruction, motivée par le souci de ne pas compromettre la perspective d'une issue favorable des démarches civiles jusqu'au mois d'avril 2008 n'est pas critiquable et paraît même avoir porté ses fruits dès lors que l'enfant est rentrée en Suisse au mois d'avril 2008 avant que sa garde ne soit à nouveau provisoirement confiée à sa mère. Dès ce moment et compte tenu de ces nouvelles mesures provisionnelles civiles, il ne se justifiait pas non plus de précipiter l'issue de la procédure pénale jusqu'à droit connu sur la procédure d'appel du jugement de divorce (3 mars 2009). Dans la suite et jusqu'au prononcé du non-lieu, la procédure a été régulièrement marquée par des actes d'instruction.
En conclusion, bien qu'elle ait duré plus de deux ans, la procédure pénale n'apparaît pas d'une durée déraisonnable au vu des circonstances particulières du cas. Les périodes d'activité réduite du juge d'instruction peuvent être justifiées, dans un premier temps, par les procédures civiles en cours tendant au retour de l'enfant puis, dans le contexte du régime provisoire instauré dès avril 2008, par le souci de ne pas interférer avec la procédure d'appel qui a, en définitive, abouti à un accord des parents sur l'attribution de l'autorité parentale et de la garde de l'enfant. Cette attitude était conforme à l'intérêt bien compris de cette dernière.
1.4 Le recourant reproche aussi aux autorités cantonales de n'avoir pas examiné sa plainte en tant qu'il y aurait dénoncé une violation de l'art. 404 CPC/BE.
1.4.1 En relation avec l'art. 403 al. 1 CPC/BE, cette norme cantonale sanctionne, sur plainte, d'une amende ainsi que, dans les cas graves, d'une peine privative de liberté, l'inexécution de mauvaise foi d'un jugement portant condamnation à faire quelque chose, sur requête de la partie adverse. L'infraction suppose que le jugement contienne une commination de ces peines (art. 403 al. 1 2e phr. CPC/BE)
1.4.2 En l'espèce, la seule décision judiciaire figurant au dossier et comportant une telle injonction est une ordonnance de mesures préliminaires du 13 décembre 2005 fixant le droit de visite du recourant le week-end du 16 au 18 décembre 2005 et ordonnant à la mère la remise des enfants durant cette période sous menace des peines prévues par la norme cantonale et l'art. 292 CP. Cette décision pré-provisionnelle ne déployait ainsi, de toute évidence, plus aucun effet au moment des faits. Il s'ensuit que les autorités cantonales n'ont pas violé le droit à la plainte du recourant en n'instruisant pas de manière plus approfondie cette accusation, qui ne ressort, du reste, pas clairement de la plainte déposée.
2.
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure qui seront fixés en tenant compte de sa situation économique (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté autant que recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 21 octobre 2010
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:
Favre Vallat