BGer 1C_353/2010 |
BGer 1C_353/2010 vom 12.01.2011 |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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1C_353/2010
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Arrêt du 12 janvier 2011
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Ire Cour de droit public
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Composition
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MM. les Juges Fonjallaz, Président, Reeb et Raselli.
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Greffier: M. Kurz.
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Participants à la procédure
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A.________, représenté par Me Marc-Olivier Buffat, avocat,
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recourant,
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contre
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Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud, avenue du Grey 110, 1014 Lausanne.
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Objet
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retrait du permis de conduire,
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 14 juillet 2010.
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Faits:
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A.
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Par prononcé du 17 décembre 2009, le Préfet du Gros-de-Vaud a condamné A.________ à 2'000 fr. d'amende pour violation simple de la LCR. Le 17 octobre 2009, il avait été intercepté par la police alors qu'il circulait de Cugy à Bottens au volant d'une camionnette chargée de dalles de jardin. Le véhicule paraissant surchargé, il a été conduit et pesé au centre de la Blécherette. Le véhicule pesait 7'934 kg au total alors que le poids total maximum autorisé était de 3'500 kg. Le chargement pesait 4'434 kg alors que la charge maximum était, selon le permis de conduire, de 1'300 kg.
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B.
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Le 21 janvier 2010, le Service vaudois des automobiles et de la navigation (SAN) a retiré le permis de conduire de A.________ pour douze mois, considérant que l'infraction devait être qualifiée de grave. Cette décision a été maintenue le 23 février 2010, sur réclamation.
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Par arrêt du 14 juillet 2010, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (CDAP) a confirmé cette dernière décision, considérant que le dépassement du poids autorisé du véhicule (126,69%) et de la charge utile (341%) constituait une faute grave, même sur une route secondaire et pour une courte distance; une telle surcharge ne pouvait échapper au recourant, professionnel de l'automobile, même s'il n'avait pas procédé lui-même au chargement. Sur ce dernier point, une demande d'audition de témoins a été écartée. Le prononcé préfectoral liait l'autorité administrative quant aux faits constatés, mais non pour l'appréciation de la faute et de la mise en danger. Compte tenu des antécédents de l'intéressé, la durée du retrait ne pouvait être inférieure à douze mois.
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C.
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Par acte du 11 août 2010, A.________ forme un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire. Il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal, subsidiairement à sa réforme en ce sens que son permis n'est retiré que pour six mois. A l'appui du recours constitutionnel, il demande le renvoi de la cause à la CDAP pour nouveau jugement dans le sens des considérants.
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La CDAP conclut au rejet du recours. Le SAN a renoncé à présenter des observations.
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Considérant en droit:
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1.
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Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) confirmant une mesure administrative en matière de permis de conduire (art. 82 let. a LTF), le recours est recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions mentionnées à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant est particulièrement touché par la décision attaquée, qui confirme le retrait de son permis de conduire pour une durée de trois mois; il a donc un intérêt digne de protection à obtenir son annulation, si bien qu'il a la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité sont réunies, de sorte qu'il convient d'entrer en matière.
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Le recours en matière de droit public permet d'invoquer la violation des droits constitutionnels, tel le droit d'être entendu. Le recours constitutionnel subsidiaire est dès lors irrecevable (art. 113 al. 1 LTF).
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2.
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Le recourant relève que le prononcé préfectoral retient une infraction simple à la LCR. Il n'aurait pas fait opposition car il pouvait s'attendre à une sanction administrative pour faute légère, voire moyenne. La CDAP ne pouvait s'écarter de la décision préfectorale sans procéder à une instruction complète, et notamment entendre les deux témoins proposés par le recourant. Invoquant son droit d'être entendu, le recourant estime que ces témoignages pouvaient contredire les affirmations de la cour cantonale selon laquelle l'excédent de poids du véhicule ne pouvait échapper au recourant. Ce dernier n'avait pas participé au chargement. La cour cantonale avait d'ailleurs retenu, de façon contradictoire, que les policiers qui ont intercepté le recourant et l'ont conduit à la Blécherette ignoraient l'importance de la surcharge.
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2.1 En principe, l'autorité administrative statuant sur un retrait du permis de conduire ne peut pas s'écarter des constatations de fait d'un prononcé pénal entré en force. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits (ATF 109 Ib 203 consid. 1 p. 204; 96 I 766 consid. 4 p. 774). L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal qu'à certaines conditions, notamment en présence de preuves ou de faits nouveaux (ATF 129 II 312 consid. 2.4 p. 315; 123 II 97 consid. 3c/aa p. 104; 119 Ib 158 consid. 3c/aa p. 164; 105 Ib 18 consid. 1a p. 19; 101 Ib 270 consid. 1b p. 273 s.; 96 I 766 consid. 5 p. 774 s.). Si les faits retenus au pénal lient donc en principe l'autorité et le juge administratifs, il en va différemment des questions de droit, en particulier de l'appréciation de la faute et de la mise en danger (arrêts 1C_585/2008 du 14 mai 2009 consid. 3.1; 1C_222/2008 du 18 novembre 2008 consid. 2.4; 1C_71/ 2008 du 31 mars 2008 consid. 2.1; ATF 120 Ib 312 consid. 4b p. 315; 115 Ib 163 consid. 2a p. 164; 102 Ib 193 consid. 3c p. 196).
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2.2 La cour cantonale ne s'est en rien écartée des faits constatés au pénal. Elle a fondé son appréciation de la faute sur l'importance de la surcharge du véhicule, soit plus du double du poids maximum pour le véhicule et près de 3,5 fois la charge utile autorisée, ces faits n'étant pas contestés. L'arrêt attaqué ne met pas en doute le fait que le recourant n'avait pas procédé lui-même au chargement du véhicule, mais la cour cantonale s'est déclarée convaincue que le dépassement considérable du poids total admissible ne pouvait échapper au recourant. Or, au contraire de ce que le recourant savait (élément qui relève du fait) ce que le recourant devait savoir relève du droit. L'autorité administrative, tout comme la cour cantonale, était donc libre de procéder ainsi à sa propre appréciation juridique en se fondant sur les faits constatés au pénal.
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2.3 Tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, le droit de consulter le dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuve pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 II 287 consid. 5.1 p. 293; 132 II 485 consid. 3.2 p. 494, V 368 consid. 3.1 p. 371; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 I 54 consid. 2b p. 56; 124 I 48 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 429; 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135; 124 I 208 consid. 4a p. 211 et les arrêts cités).
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2.4 La cour cantonale a estimé que le dépassement du poids autorisé ne pouvait échapper au recourant. Cette considération n'a rien d'arbitraire. Garagiste professionnel, le recourant ne pouvait manquer de remarquer que le véhicule était surchargé, que ce soit de visu (comme l'ont d'ailleurs fait les policiers qui ont décelé le problème à la simple vue du véhicule) ou lorsqu'il s'est mis au volant. Le recourant relève que les policiers ne l'auraient pas forcé à se rendre à la Blécherette s'ils avaient eux-mêmes soupçonné un état de fait dangereux. On ne voit toutefois pas de quelle autre manière ils auraient pu procéder à la vérification requise. Le fait que le véhicule ait été escorté pouvait en outre contribuer à réduire le risque. Dans ces conditions, le fait que le recourant a agi pour rendre service, qu'il n'a pas participé au chargement du véhicule et que ce dernier ne lui appartenait pas, apparaît sans pertinence pour juger de la faute commise, et c'est à juste titre que la cour cantonale pouvait s'estimer suffisamment renseignée sur les faits de la cause. Il n'y a pas dès lors de violation du droit d'être entendu.
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3.
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Sur le vu de ce qui précède, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable, et le recours en matière de droit public doit être rejeté, aux frais du recourant (art. 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
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2.
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Le recours en matière de droit public est rejeté.
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3.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
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4.
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Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service des automobiles et de la navigation et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'à l'Office fédéral des routes.
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Lausanne, le 12 janvier 2011
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Fonjallaz Kurz
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