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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
9C_935/2010
Arrêt du 18 février 2011
IIe Cour de droit social
Composition
MM. et Mme les Juges U. Meyer, Président,
Borella et Pfiffner Rauber.
Greffière: Mme Moser-Szeless.
Participants à la procédure
Service des prestations complémentaires, route de Chêne 54, 1208 Genève,
recourant,
contre
B.________,
représenté par Me Henri-Philippe Sambuc, avocat,
intimé.
Objet
Prestation complémentaire à l'AVS/AI,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 13 octobre 2010.
Faits:
A.
A.a B.________, marié et père de trois enfants nés en 1997, 2003 et 2010, est au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-invalidité depuis le 1er mars 2005. Par décisions du 7 février, puis du 11 décembre 2008, il s'est vu allouer des prestations complémentaires cantonales à partir du 1er mars 2006, respectivement du 1er janvier 2009. Celles-ci ont été calculées en tenant compte d'un gain potentiel que L.________, épouse de l'ayant droit, serait apte à réaliser si elle exerçait une activité lucrative (soit, pour la période courant dès le 1er janvier 2009, un montant de 41'161 fr. [ou 26'440 fr. après abattements légaux]). Par courrier du 27 avril 2009, B.________ a indiqué au Service des prestations complémentaires du canton de Genève (ci-après: le SPC) que la prise en compte d'un revenu théorique de son épouse - qui, comme lui, était née en 1978 et faisait partie de la communauté des gens du voyage - ne correspondait pas à la réalité de sa situation familiale, et requis un "réajustement" des prestations. Le SPC lui a répondu, le 6 mai 2009, qu'il se justifiait d'inclure un tel gain dans le calcul des prestations complémentaires, dès lors que rien ne s'opposait à ce que son épouse exerçât une activité professionnelle pour laquelle aucune formation n'était exigée.
A.b Saisi d'un recours de l'intéressé, le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève (aujourd'hui, Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales) a entendu les parties lors d'une audience de comparution personnelle, le 26 août 2009. Par jugement du 4 novembre 2009, il a déclaré irrecevable le recours et renvoyé le dossier au SPC pour qu'il statue "sur l'opposition formée par le recourant au refus de reconsidération des prestations complémentaires, en ce qui concerne le revenu hypothétique de son épouse" (jugement du 4 novembre 2009). Entre-temps, le 30 octobre 2009, le SPC a procédé à un nouveau calcul des prestations complémentaires du 1er juin 2007 au 31 octobre 2009; il a par ailleurs fixé à 629 fr. par mois les prestations complémentaires cantonales à partir du 1er novembre 2009 (compte tenu, à nouveau, d'un gain potentiel de l'épouse de 41'161 fr.). L'intéressé a contesté cette décision. Le 1er avril 2010, le SPC a rendu une décision sur opposition par laquelle il a maintenu sa décision du 6 mai 2009 et confirmé son refus de reconsidérer les décisions des 7 février et 11 décembre 2008 quant à la prise en considération d'un gain potentiel de l'épouse de l'ayant droit.
B.
Statuant le 13 octobre 2010 sur le recours formé par B.________ contre cette décision, le Tribunal cantonal genevois des assurances sociales l'a partiellement admis. Annulant la décision du 1er avril 2010 pour la période à compter du 1er novembre 2009 et la confirmant pour le surplus, il a renvoyé la cause au SPC pour nouveau calcul des prestations complémentaires "au sens des considérants à compter du 1er novembre 2009".
C.
Le SPC interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont il demande l'annulation en tant qu'il concerne les prestations complémentaires fédérales. Il conclut principalement à la confirmation de sa décision sur opposition du 1er avril 2010 et, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle établisse les faits en ordonnant éventuellement une instruction complémentaire, puis rende un nouveau jugement.
B.________ conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet. Pour sa part, l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
1.1 Le recourant a correctement limité ses conclusions aux prestations complémentaires de droit fédéral dans la mesure où il n'a pas qualité pour former un recours en matière de droit public portant sur de telles prestations prévues par le droit cantonal (ATF 134 V 53 consid. 2.3.4 p. 60).
1.2 Dans les considérants de son jugement auxquels renvoie le ch. 4 du dispositif, la juridiction cantonale a retenu que le revenu hypothétique déterminant à prendre en considération pour fixer les prestations complémentaires de l'ayant droit était de 13'220 fr. (après abattements légaux) dès le 1er novembre 2009. Aussi, a-t-elle annulé la décision sur opposition du 1er avril 2010 pour la période à compter du 1er novembre 2009 et renvoyé la cause au recourant pour nouveau calcul des prestations complémentaires dès cette date. D'un point de vue formel, il s'agit d'une décision de renvoi, soit d'une décision incidente qui ne peut faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral qu'aux conditions de l'art. 93 LTF (ATF 133 V 477 consid. 4.2. et 4.3 p. 481 s.) Toutefois, lorsque l'autorité inférieure à laquelle la cause est renvoyée n'a pratiquement plus aucune marge de manoeuvre pour statuer et que le renvoi ne vise qu'à mettre à exécution la décision de l'autorité supérieure, cette décision doit être considérée comme une décision finale sujette à recours conformément à l'art. 90 LTF (arrêt 9C_684/2007 du 27 décembre 2007 consid. 1.1, in SVR 2008 IV n° 39 p. 131). C'est le cas en l'espèce, puisqu'il revient au recourant de mettre en oeuvre le jugement entrepris en tenant compte du gain potentiel du conjoint de l'épouse de l'ayant droit, tel que fixé par l'autorité de recours de première instance et dont dépend le droit de l'intimé à des prestations complémentaires de droit fédéral. Il convient dès lors d'entrer en matière sur le recours.
2.
Au regard du dispositif du jugement entrepris et des conclusions du recours, le litige porte sur le droit de l'intimé à des prestations complémentaires pour la période courant à partir du 1er novembre 2009, singulièrement sur la prise en compte dans le calcul de celles-ci du gain hypothétique du conjoint.
A cet égard, le jugement entrepris expose correctement les règles légales (dans leur teneur en vigueur à partir du 1er janvier 2008, applicable en l'espèce [ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 p. 220]) et la jurisprudence sur la notion de revenus déterminants pour le calcul de la prestation complémentaire et les conditions auxquelles il y a lieu de tenir compte, au titre des ressources dont un ayant droit s'est dessaisi, d'un revenu hypothétique du conjoint de celui-ci. Il rappelle également les critères posés en droit de la famille à l'aune desquels doit être examiné le point de savoir si l'on peut exiger du conjoint d'un bénéficiaire de prestations complémentaires qu'il exerce une activité lucrative (ATF 134 V 53 consid. 4.1 p. 61). Il suffit donc d'y renvoyer.
3.
3.1 Admettant que l'épouse de l'intimé était à même d'exercer une activité à plein temps en 2008 et au début de l'année 2009, dès lors qu'elle était jeune, en bonne santé et parlait le français, la juridiction cantonale a retenu que seule une activité à mi-temps était exigible de sa part à partir du 1er novembre 2009. A ce moment-là, L.________ était en effet enceinte de près de cinq mois de son troisième enfant (né le 7 mars 2010), alors que son époux était atteint d'une maladie psychiatrique grave. B.________ avait en effet indiqué lors de l'audience de comparution personnelle du 26 août 2009 qu'il avait été hospitalisé en février 2009 à la suite d'une tentative de suicide et suivi pendant deux mois dans un foyer de jour, dans lequel il allait retourner au mois de novembre pour trois à quatre ans. Aux yeux des premiers juges, l'intimé n'était dès lors, selon toute vraisemblance, pas d'une grande aide pour le ménage et la surveillance des enfants. Toujours selon eux, compte tenu de l'avancement de la grossesse et de l'exercice d'une activité lucrative physiquement relativement lourde dans le domaine des travaux de nettoyage, l'épouse de l'intimé n'était pas en mesure d'exercer une activité à plus de 50%.
3.2 Le tribunal statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer les constatations de faits que si ceux-ci ont été établis de manière manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire. L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier ou contraire au sens de la justice et de l'équité ou encore lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). L'appréciation des preuves doit être arbitraire non seulement en ce qui concerne les motifs évoqués par la juridiction cantonale pour écarter un moyen de preuve, mais également dans son résultat. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle retenue par l'autorité précédente pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable (cf. ATF 135 V 2 consid. 1.3 p. 4 sv.; 134 I 140 consid. 5.4 p. 148).
3.3 Pour retenir que B.________ n'était pas en mesure de s'occuper de la tenue du ménage et de ses enfants en raison d'une maladie psychiatrique grave et du suivi de celle-ci, la juridiction cantonale s'est exclusivement fondée sur les déclarations de l'intimé du 26 août 2009, selon lesquelles il a été hospitalisé en février 2009 à la suite d'une tentative de suicide. Elle n'a procédé à aucune mesure d'instruction qui aurait permis d'appréhender la situation de l'intimé en ce qui concerne ses capacités et sa disponibilité (en novembre 2009) pour soutenir et collaborer avec son épouse dans l'éducation et la surveillance de leurs deux aînés en âge de scolarité. En l'absence de toute pièce (médicale) au dossier, on ignore en particulier la nature de l'atteinte à la santé dont souffre l'intimé, qui n'a donné aucune précision à ce sujet, ainsi que les empêchements et les besoins thérapeutiques qu'elle entraîne. Contrairement à ce qu'il prétend, la décision de l'assurance-invalidité relative à l'octroi de la rente entière d'invalidité ne comporte pas non plus d'indication à ce sujet. Sur ces points, l'état de faits a dès lors été établi de façon incomplète et arbitraire.
Pour autant, la solution retenue par les premiers juges n'apparaît pas arbitraire dans son résultat. Leurs considérations, selon lesquelles seule une activité à mi-temps dans le domaine du nettoyage était exigible de L.________ à partir du 1er novembre 2009, étaient avant tout fondées sur l'état avancé de sa grossesse. Si, comme le relève le recourant, on ne saurait d'emblée admettre que la grossesse empêche l'exercice d'une activité lucrative, il n'est pas arbitraire de considérer qu'on ne pouvait exiger de l'intéressée qu'elle fournît dans son état un travail relativement lourd à plus de 50%. Les autres activités citées par le recourant ne sont au demeurant pas pertinentes, dans la mesure où elles impliquent également un certain nombre d'efforts physiques.
On précisera encore que le motif pour lequel on peut, en définitive, suivre les premiers juges quant au revenu hypothétique de l'épouse de l'intimé à prendre en considération dès le 1er novembre 2009 a disparu postérieurement à la naissance de son troisième enfant en mars 2010. Il appartiendra donc au recourant de tenir compte, en tant que de besoin, du changement des circonstances pour l'année 2010, et d'examiner dans ce contexte tant la disponibilité de l'épouse de l'intimé pour l'exercice d'une activité professionnelle à plus de 50% que celle de l'intimé pour l'éducation et la surveillance de leurs enfants au regard de la nature et des effets de l'atteinte à la santé dont il souffre (une fois ceux-ci établis).
3.4 Il résulte de ce qui précède que le recours est mal fondé. Vu le présent arrêt, la requête du recourant tendant à l'octroi de l'effet suspensif à son recours est sans objet.
4.
Compte tenu de l'issue de la procédure, le recourant doit supporter les frais judiciaires y afférents (art. 66 al. 1 LTF), ainsi que l'indemnité de dépens à laquelle a droit l'intimé (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans le sens des considérants (cf. consid. 3.3).
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 1000 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 18 février 2011
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Meyer Moser-Szeless