BGer 8C_907/2010 |
BGer 8C_907/2010 vom 08.07.2011 |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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8C_907/2010
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Arrêt du 8 juillet 2011
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Ire Cour de droit social
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Composition
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MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, Leuzinger et Frésard.
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Greffier: M. Beauverd.
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Participants à la procédure
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Ville de Genève, Palais Eynard, rue de la Croix-Rouge 4, 1204 Genève,
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recourante,
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contre
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D.________,
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représenté par Me Jean-Bernard Waeber, avocat,
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intimé.
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Objet
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Droit de la fonction publique (révocation),
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recours contre le jugement du Tribunal administratif de la République et canton de Genève du 28 septembre 2010.
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Faits:
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A.
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A.a D.________ a été engagé le 1er juillet 1976 en qualité de jardinier au service de la Ville de Genève. Le 19 septembre 1990, il a été nommé chef des cultures à X.________.
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Dans le courant de l'année 2007, la Ville a décidé de délocaliser la production des plantes du site de Y.________ à celui, plus excentré, de Z.________. A cette fin, elle a loué des serres à un maraîcher. D.________, ainsi que M.________, sous-chef de culture, ont été affectés à ce nouveau site.
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R.________, alors âgée de 16 ans, était apprentie horticultrice de deuxième année à l'établissement de Z.________. Par lettre du 16 janvier 2009, sa mère, C.________, s'est plainte de ce que sa fille faisait l'objet de remarques désobligeantes de la part de D.________.
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R.________ a été entendue le 28 janvier 2009 par le chef du service et une adjointe administrative. A cette occasion, elle a exposé que D.________ et M.________, de même que certains horticulteurs et apprentis, buvaient de la bière sur leur lieu de travail et que les employés cessaient leur travail trente minutes avant l'horaire pour boire. Parfois, ils buvaient de l'alcool pendant les heures de travail. Elle a aussi signalé qu'un horticulteur faisait pousser du cannabis dans les serres. Il en consommait quotidiennement sur place, de même que certains apprentis. D.________ et M.________ fermaient les yeux sur cette consommation. Enfin, elle a expliqué que ces derniers prélevaient des plantes, par cageots entiers, manifestement à des fins privées. L'apprentie a confirmé faire l'objet de brimades, de gestes et de paroles déplacés et de discriminations de la part de D.________.
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La direction de X.________ a mené diverses investigations préliminaires. Le 10 février 2009, le maire de la Ville a signifié à D.________ une interdiction de travailler jusqu'à la saisine du Conseil administratif. Le 18 février suivant, le Conseil administratif a décidé d'ouvrir une enquête administrative à l'encontre de D.________ et il a confirmé la suspension temporaire d'activité de l'intéressé qui lui avait été provisoirement signifiée précédemment. L'enquête a été confiée à B.________, adjoint du directeur général et chef du service juridique, assisté de O.________, juriste à la direction des ressources humaines.
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M.________ a fait l'objet des mêmes mesures et de la même enquête administrative.
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A.b Les enquêteurs ont mené une enquête commune pour les deux fonctionnaires impliqués. Ils ont tenu une audience de comparution personnelle, ont procédé à l'audition de douze témoins et se sont rendus en transport sur place au centre horticole de Z.________. Ils ont rendu leur rapport le 2 juin 2009. Ils ont constaté que D.________ et M.________ n'avaient pas respecté certaines obligations découlant de leur statut de fonctionnaire. D'abord ils avaient consommé de l'alcool sur le lieu de travail durant les heures travaillées et toléré la consommation de boissons alcoolisées par les employés et apprentis dont ils avaient la charge. Ils avaient en outre toléré la culture de cannabis sur le site du centre. Enfin, ils avaient procédé à des prélèvements de plantes appartenant à la Ville sans disposer des autorisations nécessaires. D.________ avait aussi, pour sa part, autorisé les employés et apprentis à prélever des plantes sans autorisation du magistrat compétent ou de la direction du service. En revanche, l'enquête n'avait pas permis d'établir que les personnes mises en cause aient toléré la consommation de cannabis sur le lieu de travail, pas plus qu'elle n'avait permis d'établir que D.________ ou M.________ se soient livrés à des discriminations ou aient exercé des pressions psychologiques sur le lieu de travail à l'égard de certains employés et apprentis dont ils avaient la charge. De même, il n'avait pas été établi que l'une ou l'autre des personnes mises en cause ait eu des paroles ou des gestes déplacés envers les apprenties.
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A.c Le rapport d'enquête a été transmis à D.________, qui s'est déterminé à son sujet. Le 2 juillet 2009, le Conseil administratif a informé l'intéressé qu'il envisageait de le révoquer. Après que celui-ci se fut une nouvelle fois déterminé, le Conseil administratif a pris la décision de le révoquer; une indemnité correspondant à trois mois de salaire lui serait néanmoins versée. Cette décision, déclarée exécutoire nonobstant recours, a été communiquée à D.________ le 23 septembre 2009.
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B.
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Celui-ci a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif du canton de Genève (depuis le 1er janvier 2011, Chambre administrative de la Cour de justice).
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Par décision du 2 décembre 2009, la Présidente du Tribunal administratif a rejeté une requête tendant à la restitution de l'effet suspensif au recours.
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Le Tribunal administratif a entendu de nouveaux témoins, soit le propriétaire de la parcelle louée à la Ville à Z.________, deux anciens commissaires d'apprentissage, un horticulteur qui avait effectué son apprentissage à Y.________ et qui travaillait à Z.________ au bénéfice d'un contrat temporaire depuis août 2009, un floriculteur qui avait été appelé à donner des cours à Z.________, ainsi que quatre apprentis qui avaient fait tout ou partie de leur apprentissage sous la direction de D.________ et de M.________. Les témoins auditionnés au cours de l'enquête administrative n'ont pas été réentendus.
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Statuant par arrêt du 28 septembre 2010, le Tribunal administratif a annulé la décision attaquée en tant qu'elle prononçait la révocation de l'intéressé et prononcé en lieu et place une réduction de traitement pour une durée de trois ans dans les limites de la catégorie dès le 10 février 2009.
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C.
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La Ville de Genève a interjeté un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire, concluant préalablement à l'octroi de l'effet suspensif et, au fond, à l'annulation de l'arrêt cantonal et à la confirmation de la décision du Conseil administratif du 23 septembre 2009. Subsidiairement, elle a conclu au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouveau jugement.
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D.________ s'est opposé à l'octroi de l'effet suspensif et a conclu au rejet des recours.
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D.
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Par ordonnance du 11 avril 2011, le juge instructeur a accordé l'effet suspensif au recours.
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Considérant en droit:
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1.
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1.1 Selon l'art. 83 let. g LTF, en matière de rapports de travail de droit public (lorsque, comme en l'espèce, la question de l'égalité des sexes n'est pas en cause), le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions qui concernent une contestation non pécuniaire. Le litige soumis à l'autorité cantonale ne porte pas sur le versement d'une somme d'argent, mais sur l'annulation d'une décision de révocation. Dans cette mesure, on peut considérer qu'il s'agit d'une contestation pécuniaire, et le motif d'exclusion de l'art. 83 let. g LTF n'entre pas en considération (voir les arrêts 8C_170/2009 du 25 août 2009 consid. 1.1; 1C_547/2008 du 23 février 2009 consid. 2.1; 1C_116/2007 du 24 septembre 2007 consid. 2).
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1.2 Pour que le recours soit recevable, il faut encore, en principe, que la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. soit atteinte (art. 85 al. 1 let. b LTF). Vu que la contestation porte potentiellement sur le salaire de plusieurs mois, voire plusieurs années, le seuil de la valeur litigieuse déterminante est donc largement dépassé.
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1.3 En tant que la voie du recours en matière de droit public est ouverte, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF).
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2.
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Selon l'art. 89 al. 2 let. c LTF, les communes et les autres collectivités publiques ont qualité pour recourir en invoquant la violation de garanties qui leur sont reconnues par les constitutions cantonale ou fédérale. La Ville invoque en l'espèce l'autonomie qui lui est reconnue dans le domaine de la gestion du personnel. Il y a donc lieu de lui reconnaître la qualité pour agir sur la base déjà de cette disposition. La question de savoir si elle est réellement autonome dans le domaine considéré relève du fond (ATF 135 I 43 consid. 1.2 p. 45; 129 I 313 consid. 4.2 p. 319). Au reste, la recourante peut également, comme elle l'affirme, agir sur la base de l'art. 89 al. 1 LTF; obligée de réintégrer un employé par l'autorité cantonale, la recourante est touchée de manière analogue à un employeur privé (cf. ATF 134 I 204 consid. 2.3 p. 207).
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3.
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Pour le surplus, interjeté en temps utile et dans les formes requises contre une décision finale prise en dernière instance cantonale non susceptible de recours devant le Tribunal administratif fédéral, le recours respecte les exigences des art. 42, 86 al. 1 let. d, 90 et 100 al. 1 LTF.
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Il convient toutefois de souligner que le recours a un caractère prolixe, de sorte qu'il aurait pu être renvoyé à son auteur en application de l'art. 42 al. 6 LTF. Le Tribunal fédéral y a exceptionnellement renoncé.
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4.
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4.1 Selon l'art. 30 al. 1 let. w de la loi genevoise sur l'administration des communes du 13 avril 1984 (RS/GE B 6 05), le conseil municipal délibère lui-même sur le statut du personnel communal, ainsi que sur l'échelle des traitements et des salaires. Il s'agit donc d'un domaine du droit communal autonome, dans lequel la commune peut se plaindre d'une violation de son autonomie (arrêts 8C_596/2009 du 4 novembre 2009 consid. 2.1; 1C_341/2007 du 6 février 2008 consid. 2). Par ailleurs, les sanctions disciplinaires à l'encontre du personnel communal sont prévues à l'art. 34 du Statut du personnel de l'administration municipale du 3 juin 1986 (ci-après: le Statut) et relèvent donc aussi du droit communal autonome (arrêts 8C_596/2009, précité, consid. 2.1; 2P.363/1996 du 31 janvier 1997 consid. 2b).
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4.2 Reconnue autonome dans un domaine, une commune peut se plaindre d'un excès voire d'un abus du pouvoir d'appréciation ou d'une fausse application par la juridiction cantonale des normes cantonales ou communales régissant le domaine en cause. Le Tribunal fédéral examine librement l'interprétation du droit constitutionnel cantonal ou fédéral; en revanche il ne vérifie l'application des règles de rang inférieur à la Constitution et la constatation des faits que sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 128 I 3 consid. 2b p. 9; 126 I 133 consid. 2 p. 136; 122 I 279 consid. 8c p. 291).
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5.
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5.1 Selon l'art. 33 du Statut, le fonctionnaire qui enfreint ses devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence, est passible d'une sanction disciplinaire (al. 1). Les sanctions disciplinaires sont énumérées dans l'ordre croissant de gravité de la sanction à l'art. 34 du Statut. La révocation est la sanction la plus grave. Elle est prononcée par le Conseil administratif.
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5.2 Les premiers juges ont examiné les trois griefs reprochés à l'intimé par les enquêteurs dans leur rapport du 2 juin 2009. En ce qui concerne la consommation d'alcool, ils retiennent, sur la base des témoignages recueillis au cours de la procédure cantonale, que durant la pause de midi, l'intimé et des employés majeurs consommaient de l'alcool. Ils considèrent comme avéré que des apéritifs organisés à Z.________ étaient également l'occasion de boire de l'alcool, que ce soit du vin ou de la bière. De même, ils retiennent pour établie la culture de cannabis au centre de Z.________. Sur ce point, l'autorité cantonale a écarté les témoignages, pourtant concordants, de plusieurs apprentis, au profit des déclarations des autres témoins qui avaient constaté la présence de plants de cannabis sur le site. En ce qui concerne enfin le prélèvement de plantes, les premiers juges constatent que l'intimé a admis qu'il lui arrivait de prendre des plantes dans la benne, soit le surplus des plantations qui n'était pas utilisé par la Ville, tout en précisant qu'il s'agissait là d'une pratique connue qu'aucune note interne n'interdisait. Tous les témoins entendus par le tribunal, à l'exception d'un seul, ont confirmé cette pratique. La Ville s'était contentée d'affirmer que des directives internes existaient à ce sujet, mais elle ne les avait pas produites. En conséquence, le reproche d'un prélèvement illicite de plantes n'était pas établi.
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A la charge de l'intimé, l'autorité cantonale retient qu'il occupait un poste à responsabilités hiérarchiques, en particulier qu'il avait la responsabilité de la formation des apprentis. A sa décharge, elle considère que la consommation d'alcool durant la pause de midi pouvait en grande partie s'expliquer par la situation géographique décentrée de Z.________. Seuls les chefs et les employés majeurs, à l'exception des apprentis mineurs étaient autorisés à consommer des boissons alcoolisées. Quant aux apéritifs organisés à diverses occasions, on pouvait comprendre D.________ lorsqu'il affirmait que ceux-ci étaient autorisés pour recréer l'ambiance qui avait pâti du déménagement de Y.________ à Z.________. L'intéressé avait de plus affirmé que la consommation d'alcool n'était pas non plus autorisée pour les apprentis mineurs lors de telles agapes. Certains d'entre eux avaient certes bravé cette interdiction mais ils avaient bien précisé qu'ils avaient agi à l'insu de leurs formateurs. Enfin, il n'était pas contesté que la Ville utilisait des plants de cannabis pour ses propres plantations. Elle était donc malvenue d'ériger en principe l'interdiction totale de cette culture, bien que l'on ne pût la cautionner dans un établissement officiel à des fins personnelles, ce qui semblait avoir été le cas en l'espèce. Enfin, il convenait de tenir compte du parcours professionnel de l'intimé, qui comptait 33 ans d'activité au sein de X.________, à l'entière satisfaction de ses collaborateurs et, surtout, de ses apprentis, lesquels, dans leur immense majorité, l'avaient dépeint de manière élogieuse.
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Aussi bien la faute reprochée à l'intéressé pouvait-elle être qualifiée de moyenne et ne justifiait donc pas une mesure aussi sévère que la révocation.
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5.3 La recourante se prévaut d'une appréciation arbitraire des faits en reprochant à la juridiction cantonale d'avoir fait fi de plusieurs témoignages concernant la consommation d'alcool, y compris par des mineurs, sur le lieu de travail et la tolérance de la culture de cannabis et de sa consommation, également sur le lieu de travail. Elle souligne par ailleurs que plusieurs témoins ont indiqué, de manière non ambiguë, que les plantes prélevées par D.________ n'étaient pas toujours destinées à être jetées. Elle soutient que la réglementation en vigueur depuis cinq ans environ, soit depuis l'affaire dite «E.________», est d'interdire toute appropriation par un employé de ce qui appartient à la Ville.
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5.4 Il est vrai que le contenu des témoignages recueillis dans la procédure d'enquête administrative contraste singulièrement avec les déclarations de plusieurs témoins entendus par la juridiction cantonale:
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Devant les enquêteurs, R.________ a confirmé ses déclarations précédentes concernant la consommation d'alcool et de marijuana par des employés et apprentis pendant les heures de travail, en précisant que certains employés commençaient à boire dès l'entrée en service et que la consommation se poursuivait jusqu'en fin d'après-midi. Elle a aussi confirmé, tout en se déclarant consciente de la gravité des ses accusations, qu'à six reprises au moins, elle avait surpris D.________ ou M.________ emportant plus d'une vingtaine de cageots de plantes dans leurs voitures privées et expliqué les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas s'agir de livraisons officielles.
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L.________, contremaitre principal à X.________ et subordonné hiérarchiquement à D.________ et M.________, a déclaré que les employés consommaient de la bière pendant les heures de travail à Z.________. Cette consommation était parfois importante et même excessive. Elle avait des conséquences sur les rapports humains et était notamment à l'origine de certains dérapages (écarts de langage de la part des employés et des supérieurs). Le même témoin a aussi affirmé avoir constaté que D.________ et M.________ prélevaient des plantes pour leurs besoins personnels; il a précisé qu'il existait à cet égard une tolérance «officieuse».
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J.________, horticulteur, a confirmé la présence au centre d'une plante de cannabis en précisant que lors d'un apéritif de service, les feuilles de cannabis provenant de cette plante étaient utilisées à des fins décoratives sur la table.
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H.________, horticulteur, a déclaré avoir été étonné de la présence d'une plante de cannabis au centre. S'agissant de la consommation d'alcool, il a fait état d'abus en précisant que la consommation avait lieu pendant les heures de travail, certaines personnes travaillant «avec leur cannette de bière à côté».
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A.________, adjointe administrative à X.________, a expliqué qu'il existait depuis environ cinq ans une règle interdisant toute appropriation par un employé de plantes appartenant à la Ville. Le prélèvement de plantes à des fins privées ou pour des associations caritatives nécessitait un accord écrit soit du chef de service soit du magistrat responsable.
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Enfin, F.________, technicien agricole à X.________ a déclaré avoir eu au début d'excellents rapports avec D.________ et M.________. Les choses se sont mal passées lorsqu'il leur a fait remarquer que la consommation d'alcool en service était interdite. Ses remarques, faites à plusieurs reprises, ont été mal accueillies. Il les a pourtant émises après avoir constaté la présence de bouteilles de vin pleines et de cannettes de bière au sein du service. Le témoin a par ailleurs confirmé que les employés n'étaient pas autorisés à se servir des plantes, même celles qui allaient être jetées, celles-ci étant parfois offertes à des associations. Il a confirmé que le prélèvement nécessitait l'autorisation écrite du chef de service, voire du magistrat.
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5.5 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de faits que si ceux-ci ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire. La violation peut consister en un état de faits incomplet, car l'autorité précédente viole le droit matériel en n'établissant pas tous les faits pertinents pour l'application de celui-ci. L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier ou contraire au sens de la justice et de l'équité ou encore lorsque le juge a interprété les pièces du dossier de manière insoutenable, a méconnu des preuves pertinentes ou s'est fondé exclusivement sur une partie des moyens de preuve ( ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62; 120 Ia 31 consid. 4b p. 40; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30).
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5.6 En l'espèce, les premiers juges n'ont pas auditionné les témoins entendus au cours de l'enquête administrative. Ils ont établi les faits essentiellement sur la base des déclarations des seuls témoins entendus en procédure cantonale.
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Bien qu'ils aient relaté en détail les témoignages recueillis au cours de l'enquête administrative (partie «En fait» du jugement attaqué, sous chiffre 12), ils ne les ont tout simplement pas discutés. Or, il n'était pas admissible d'écarter d'emblée les déclarations de ces témoins, régulièrement entendus au cours de la procédure administrative. Si l'autorité cantonale estimait que les dépositions verbalisées avant la procédure judiciaire avaient moins de poids que des déclarations faites en justice, elle devait alors entendre ces témoins de manière à se fonder sur une impression générale laissée par toutes les personnes susceptibles d'apporter des éclaircissements sur les reproches formulés à l'endroit de l'intimé et être en mesure d'indiquer les motifs pour lesquels elle retenait leurs dépositions ou, au contraire, les écartait.
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5.7 En écartant sans motifs divers éléments de preuve régulièrement administrés - et incontestablement déterminants pour le sort de la procédure - la juridiction cantonale a procédé à un établissement des faits incomplet et arbitraire. Aussi bien le recours doit-il être admis et le jugement attaqué annulé. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle établisse les faits et apprécie les preuves dans le respect de l'art. 9 Cst. Cette annulation ne préjuge en rien l'issue de la procédure, la Chambre administrative conservant sa liberté pour apprécier l'ensemble des preuves, dans les limites définies ci-dessus (cf. arrêt 1C_418/2008 du 27 mai 2009 consid. 2.3).
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6.
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L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'obtenant gain de cause, la Ville n'a pas droit à des dépens (arrêts 8C_404/2010 du 24 janvier 2011 consid. 8; 8C_151/2010 du 31 août 2010 consid. 6).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
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2.
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Le recours en matière de droit public est admis en ce sens que l'arrêt attaqué est annulé, la cause étant renvoyée à la Cour de justice, Chambre administrative, pour nouvelle décision au sens des considérants.
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3.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
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4.
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Il n'est pas alloué de dépens.
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5.
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Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative.
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Lucerne, le 8 juillet 2011
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Au nom de la Ire Cour de droit social
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: Le Greffier:
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Ursprung Beauverd
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