Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
1B_175/2011
Arrêt du 14 juillet 2011
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Fonjallaz, Président, Merkli et Eusebio.
Greffière: Mme Tornay Schaller.
Participants à la procédure
A.________ et B.________, représentés par Me Michel Dupuis,
recourants,
contre
C.________,
intimé,
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
Objet
Procédure pénale, non-lieu,
recours contre l'arrêt du Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 19 janvier 2011.
Faits:
A.
Par ordonnance du 12 novembre 2010, le Juge d'instruction de l'arrondissement du Nord vaudois a clôturé par un non-lieu l'enquête instruite d'office et sur plainte de A.________ et B.________, contre C.________, pour dommages à la propriété, contrainte et infraction à la loi fédérale sur la protection des animaux (LPA; RS 220). Il était reproché à C.________, vétérinaire, d'avoir causé la mort du chat de A.________ et B.________, en le nourrissant de force et en provoquant ainsi une bronchopneumonie par corps étranger.
B.
Le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours de A.________ et B.________ par arrêt du 19 janvier 2011.
C.
Agissant par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ et B.________ demandent au Tribunal fédéral principalement d'annuler cet arrêt et d'ordonner un complément d'expertise, à confier au Professeur D.________. Ils concluent subsidiairement au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision et complément d'instruction dans le sens des considérants.
Dans sa détermination du 15 avril 2011, le Tribunal cantonal a précisé ne pas avoir écarté le mémoire de réplique des recourants. Le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois s'est référé aux considérants de l'ordonnance de non-lieu du 12 novembre 2010. C.________ a conclu au rejet du recours. Par courrier du 20 juin 2011, A.________ et B.________ ont présenté des observations complémentaires.
Considérant en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 136 V 141, consid. 1 p. 142).
La décision attaquée confirme le non-lieu en faveur de l'intimé. Rendue en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) par une autorité de dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF), elle met fin à la procédure pénale (art. 90 LTF). Partant, elle peut faire l'objet d'un recours en matière pénale selon les art. 78 ss LTF. Les recourants devaient donc agir par cette voie et non par celle du recours constitutionnel subsidiaire. En soi, cette dénomination inexacte ne leur porte pas préjudice, pour autant que les conditions de recevabilité du recours en matière pénale soient réunies (ATF 134 III 379 consid. 1.2 p. 382 et les arrêts cités). Tel est le cas en l'occurrence. Les griefs soulevés par les recourants dans leur recours constitutionnel subsidiaire peuvent en effet être invoqués dans un recours ordinaire, dès lors que le droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF comprend les droits constitutionnels. Quant à la question de la qualité pour recourir des recourants, elle peut demeurer indécise, vu l'issue du recours.
2.
Les recourants se prévalent d'une violation de leur droit d'être entendus.
2.1 Ils reprochent d'abord à l'instance précédente d'avoir arbitrairement écarté leur mémoire de réplique. Ce grief doit être d'emblée rejeté, dans la mesure où le Tribunal cantonal a pris en compte le mémoire de réplique déposé par les recourants. Celui-ci est en effet expressément mentionné dans l'arrêt litigieux ("vu le mémoire complémentaire de A.________ et B.________" en page 2 de la décision attaquée). Contrairement à ce que prétendent les recourants, lorsque le Tribunal cantonal a considéré que "les nouvelles pièces produites par les recourants étaient irrecevables", le mémoire complémentaire ne figurait pas dans cette exclusion. Le Tribunal cantonal l'a d'ailleurs précisé dans ses déterminations devant le Tribunal de céans.
2.2 Les recourants soutiennent ensuite que le Tribunal cantonal a fait preuve d'arbitraire en confirmant le refus du Juge d'instruction d'ordonner un complément d'expertise.
2.2.1 Garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier, d'offrir des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 II 286 consid. 5.1 p. 293; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16 et les arrêts cités). Toutefois, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion. Ce refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 136 I 229 consid. 5.3 p. 236; 131 I 153 consid. 3 p. 157; 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135; 124 I 208 consid. 4a p. 211).
L'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue en dernière instance cantonale que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 136 I 316 consid. 2.2.2 p. 318 s.; 135 V 2 consid. 1.3 p. 4; 134 I 263 consid. 3.1 p. 266; 132 I 13 consid. 5.1 p. 17; 131 I 217 consid. 2.1 p. 219, 57 consid. 2 p. 61; 129 I 173 consid. 3.1 p. 178).
2.2.2 En l'occurrence, les recourants soutiennent que les experts ont été privés d'éléments fondamentaux d'appréciation dans la mesure où ils n'étaient pas en possession de la sous-taie d'oreiller, posée dans le panier du chat, sur laquelle étaient présentes des traces de rejet, de vomissures, de sang et de nourriture. Ils estiment que le Professeur D.________ devait disposer non seulement de l'expertise du Docteur E.________, qui a pu examiner la pièce en question et confirmer que l'on était en présence de traces de sang "dans un autre liquide tel que vomissement", mais aussi de la sous-taie elle-même "pour que l'expert puisse juger de l'importance des traces de sang et des vomissures, et non seulement de leur présence révélée par une analyse uniquement chimique". Ce point serait essentiel pour déterminer si le vétérinaire a voulu nourrir le chat contre son gré.
Considérant qu'il disposait de suffisamment d'éléments permettant de statuer en toute connaissance de cause, le Tribunal cantonal n'a pas donné suite au complément d'expertise requis par les recourants. Il a d'abord considéré que l'expertise du 31 mai 2010, établie par le Professeur D.________ et le Docteur F.________ ainsi que le complément d'expertise daté du 6 septembre 2010 étaient complets, répondaient de manière claire aux questions posées par le magistrat instructeur et ne comprenaient aucune contradiction. Les experts avaient indiqué qu'ils n'adhéraient pas à la conclusion des recourants, selon laquelle C.________ aurait infligé de mauvais traitements au chat. Le Professeur D.________ avait exclu définitivement comme cause du décès de l'animal toute bronchopneumonie par corps étranger ou toute possibilité de "fausse route". Il avait ajouté qu'il était strictement impossible que le pneumothorax révélé par l'expertise ait été provoqué par l'ingestion de médicaments administrés de force à l'animal par le vétérinaire ou par une alimentation forcée.
Ensuite, l'instance précédente a relevé que les experts s'étaient prononcés sur les souillures retrouvées sur la couche de l'animal, mentionnant que la présence de matières vomies ou de sang ne permettait pas d'affirmer que le chat avait été nourri contre son gré ou de force. De surcroît, le Professeur D.________ avait indiqué que si le chat avait présenté une toux grasse, ainsi que des sécrétions nasales purulentes ou putrides en date du 23 février 2004, à moins de deux heures de sa mort, soit lorsqu'il a été rendu à ses propriétaires, ceux-ci n'auraient pas manqué d'apercevoir ces signes cliniques, tant ils sont sévères en pareilles circonstances. Les recourants n'avaient cependant jamais fait état de ces signes caractéristiques.
Enfin, le Tribunal cantonal a souligné que les experts avaient relevé qu'à défaut d'un rapport clinique suffisamment détaillé et d'un rapport d'autopsie, il n'y avait pas d'éléments de preuve majeurs pour déterminer les causes et les circonstances du décès du chat.
Ce faisant, l'instance précédente a procédé à une appréciation anticipée des preuves, en considérant que les moyens offerts n'étaient pas de nature à modifier son opinion. Cette appréciation n'est pas manifestement insoutenable. L'arbitraire de l'appréciation anticipée des preuves n'est dès lors pas démontré, de sorte que ce grief doit être rejeté.
3.
Il s'ensuit que le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants, qui succombent, supportent les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). L'intimé, qui a agi sans l'assistance d'un mandataire professionnel et qui n'a pas justifié avoir supporté des dépenses particulières en lien avec la réponse déposée devant l'instance fédérale (ATF 129 II 2 consid. 5 p. 304; 125 II 518 consid. 5b p. 519 s.), n'a pas droit à des dépens.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge des recourants.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Ministère public central et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 14 juillet 2011
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: La Greffière:
Fonjallaz Tornay Schaller