Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
5A_509/2011
Arrêt du 18 octobre 2011
IIe Cour de droit civil
Composition
Mmes et MM. les Juges Hohl, Présidente,
Escher, Marazzi, von Werdt et Herrmann.
Greffier: M. Richard.
Participants à la procédure
A.________ SA,
représentée par Me Pierre-Cyril Sauthier,
avocat,
recourante,
contre
B.________ SA,
représentée par Me Yannis Sakkas, avocat,
intimée.
Objet
inscription provisoire d'une hypothèque légale,
recours contre le jugement du Juge de la Chambre civile du Tribunal cantonal du canton du Valais du 7 juillet 2011.
Faits:
A.
Par ordonnance du 30 septembre 2010, statuant sur la requête formée le même jour par B.________ SA, le Juge II du district de Monthey a ordonné, à titre préprovisoire, l'annotation en faveur de la requérante d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs sur la parcelle n° 3977, plan n° 19, sise sur la commune de X.________ et propriété de A.________ SA, à concurrence de 204'075 fr. 30, avec intérêts à 5% l'an.
À l'appui de sa requête, B.________ SA a allégué qu'elle avait oeuvré, en qualité de sous-traitante de la société C.________ SA, pour différents travaux - à savoir du montage de tuyaux, du levage, ainsi que de la pose de tubes et de pièces diverses - en vue de la réalisation de conduites commandées durant le courant de l'année 2009 à cette dernière par D.________ SA et A.________ SA et qu'elle n'avait pu obtenir de C.________ SA le recouvrement d'une facture de 204'075 fr. 30.
Après avoir entendu les parties, le Juge II du district de Monthey a, par ordonnance du 11 novembre 2010, rejeté la requête et ordonné la radiation de l'hypothèque inscrite à titre préprovisoire.
B.
Le 17 décembre 2010, B.________ SA a formé un pourvoi en nullité au Tribunal cantonal du canton du Valais contre cette décision. L'effet suspensif a été octroyé le 24 janvier 2011.
Par arrêt du 7 juillet 2011, le Juge de la Chambre civile du Tribunal cantonal du canton du Valais a annulé la décision attaquée et renvoyé la cause en première instance pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Le Juge a en effet admis que B.________ SA pouvait prétendre à la qualification d'entrepreneur au sens de l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC, mais a requis du premier juge qu'il examine si les autres conditions permettant l'inscription du droit de gage étaient réalisées et détermine, cas échéant, le montant pouvant faire l'objet d'une hypothèque légale.
C.
Le 10 août 2011, A.________ SA exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cet arrêt concluant à son annulation, à la confirmation de la décision du 11 novembre 2010 du Juge du district de Monthey et, partant, au rejet de la requête d'annotation provisoire. Elle se plaint d'arbitraire dans l'application du droit de procédure cantonal et des art. 837 al. 1 ch. 3 et 961 al. 3 CC.
Des observations n'ont pas été requises.
Considérant en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 134 III 115 consid. 1 et les références citées).
1.1 Le recours a été interjeté dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, par une partie qui a succombé dans ses conclusions prises devant l'autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 et 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), de sorte qu'il est recevable au regard de ces dispositions.
1.2
1.2.1 La recevabilité du recours en matière civile suppose encore que celui-ci soit dirigé contre une décision finale, à savoir une décision mettant fin à la procédure (art. 90 LTF). Le recours est également recevable contre toute décision qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause ou qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts (décision partielle; art. 91 let. a et b LTF ), ainsi que contre les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation (art. 92 al. 1 LTF). Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse ( art. 93 al. 1 let. a et b LTF ). Si le recours n'est pas recevable, faute de remplir ces conditions, ou qu'il n'a pas été utilisé, la décision préjudicielle ou incidente peut être attaquée avec la décision finale dans la mesure où elle influe sur le contenu de celle-ci (art. 93 al. 3 LTF).
1.2.2 La décision, fondée sur l'art. 961 al. 1 ch. 1 CC, qui refuse l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs constitue une décision finale au sens de l'art. 90 LTF dès lors que, si elle est maintenue, elle met fin à la procédure, le droit de requérir l'hypothèque s'éteignant par péremption en vertu de l'art. 839 al. 2 CC (arrêt 5A_208/2010 du 17 juin 2010 consid. 1.1; arrêt 5A_227/2007 du 11 janvier 2008 consid. 1.1; sous l'empire de l'aOJ, cf. ATF 98 Ia 441 consid. 2b; 102 Ia 81 consid. 1).
1.2.3 En revanche, la décision qui autorise l'inscription provisoire d'une telle hypothèque légale se présente comme une mesure conservatoire, ordonnée provisoirement; elle doit en effet nécessairement être suivie, pour produire tous ses effets, d'une action au fond tendant à l'inscription définitive avec laquelle elle forme un tout; elle ne constitue qu'une étape vers le but recherché: l'inscription définitive. Une telle ordonnance ne constitue donc pas une décision finale au sens de l'art. 90 LTF, mais bien une décision incidente au sens de l'art. 93 LTF (cf. sous l'empire de l'aOJ, ATF 98 Ia 441 consid. 2b; arrêt 5P.281/1989 du 12 mars 1990 consid. 2a publié in SJ 1990 p. 524). Une telle décision n'est en outre pas susceptible de causer un préjudice irréparable au propriétaire visé (art. 93 al. 1 let. a LTF). Le préjudice subi n'est en effet pas définitif, puisqu'il prend fin automatiquement si le requérant est débouté de son action en inscription définitive ou s'il n'introduit pas son action dans le délai fixé par le juge. Si l'inscription provisoire peut certes limiter les possibilités du recourant de disposer entre-temps de son immeuble, il s'agit toutefois de conséquences de nature purement économique, qui n'entrent pas ici en ligne de compte (pour l'ancien droit: ATF 98 Ia 441 consid. 2b; 93 I 63 consid. 3b; arrêt 5P.297/1989 du 8 février 1990 consid. 2; 5P.142/1991 du 5 novembre 2011 consid. 2b; cf. également HOHL, Procédure civile, Tome II, 2010, n. 1577; arrêt 5A_636/2009 du 13 novembre 2009 consid. 1.1.1). Par principe, l'éventualité prévue à l'art. 93 al. 1 let. b LTF ne peut pas non plus se réaliser en présence d'une décision qui autorise l'inscription provisoire étant donné qu'elle ne préjuge pas du fond ni n'est susceptible de mettre fin à la procédure. Il s'agit là d'une décision conservatoire rendue sur la base des éléments de preuve immédiatement disponibles (art. 961 al. 3 CC; cf. arrêt 5A_475/2010 du 15 septembre 2010 consid. 3.1.2) et dont la validité est subordonnée à l'ouverture d'une action en inscription définitive. En présence de telles décisions, ordonnant des mesures à titre provisoire pour la durée d'une procédure principale au fond pendante ou à la condition qu'une telle procédure soit introduite, l'hypothèse de l'art. 93 al. 1 let. b LTF est d'emblée exclue (ATF 134 I 83 consid. 3.1). En effet, cette éventualité est reprise de l'art. 50 al. 1 aOJ (FF 2001 p. 4000 ss, 4131) et la jurisprudence relative à cette disposition de l'ancienne loi d'organisation judiciaire (ATF 134 III 426 consid. 1.3 et les références citées) excluait de ses prévisions les décisions conservatoires ou provisoires, en particulier celles qui ordonnaient une inscription provisoire au registre foncier (ATF 101 II 63 consid. 1 et les références citées; POUDRET, Recours de droit public ou recours en réforme en matière d'inscription provisoire de l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs, in Mélanges Pierre Engel, 1989, p. 287 ss, 294).
1.3 En l'espèce, on n'est en présence ni d'une décision refusant l'inscription provisoire, ni d'une décision autorisant l'inscription provisoire. En effet, la décision attaquée admet la qualité d'entrepreneur au sens de l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC de la requérante et renvoie la cause au premier juge pour qu'il examine si les autres conditions permettant l'inscription provisoire de l'hypothèque légale sont réalisées. Elle constitue ainsi une décision incidente de renvoi.
De manière générale, un recours contre une décision incidente de renvoi n'est recevable que pour autant que le recours contre la décision, qui doit être rendue à l'issue de la procédure, soit également ouvert (ATF 133 III 645 consid. 2.2; 135 I 265 consid. 1.2). Or, en l'espèce, tel n'est pas le cas. En effet, si, après instruction et jugement sur les autres conditions du droit à l'inscription provisoire de l'hypothèque légale, le juge autorise l'inscription provisoire, sa décision (incidente) ne pourra pas faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral (cf. supra consid. 1.2.3).
Le recours est donc irrecevable.
2.
Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée qui n'a pas été invitée à répondre (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Juge de la Chambre civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.
Lausanne, le 18 octobre 2011
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Hohl
Le Greffier: Richard