Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
5A_845/2011
Arrêt du 26 mars 2012
IIe Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
von Werdt et Herrmann.
Greffière: Mme de Poret Bortolaso.
Participants à la procédure
A._______, (époux),
représenté par Me Jean-Pierre Wavre, avocat,
recourant,
contre
dame A.________, (épouse),
représentée par Me Julie Vaisy,
avocate,
intimée.
Objet
mesures protectrices de l'union conjugale,
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour
de justice du canton de Genève du 21 octobre 2011.
Faits:
A.
A.a A.________, né en 1944, et dame A.________, née en 1966, tous deux de nationalités suisse et tunisienne, se sont mariés le 30 juin 1984 à X.________.
Le couple a quatre enfants actuellement majeurs.
A.b Les époux A.________ se sont séparés fin 2010. A.________ a quitté la Suisse pour retourner vivre en Tunisie dès janvier 2011.
B.
Par requête de mesures protectrices de l'union conjugale déposées le 19 janvier 2011 auprès du Tribunal de première instance de Genève, l'épouse a notamment sollicité la condamnation de son époux à lui verser une contribution d'entretien mensuelle de 6'000 fr.
Le 12 avril 2011, le Tribunal de première instance a condamné A.________ à verser à son épouse la somme de 2'085 fr., correspondant au montant du loyer de l'appartement qu'elle occupe. La contribution était due dès le 1er janvier 2011, sous imputation de toutes avances d'entretien, en espèces ou en nature, que le débirentier aurait spontanément versées depuis cette date.
Statuant le 21 octobre 2011 sur appel de dame A.________, la Cour de justice a augmenté la contribution d'entretien à 4'400 fr. par mois, sous déduction des loyers que le mari aurait versés depuis cette date.
L'arrêt a été notifié aux parties le 2 novembre 2011.
C.
Par acte du 5 décembre 2011, A.________ dépose un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant principalement à l'annulation de l'arrêt cantonal et à ce qu'il lui soit donné acte de son engagement de verser à son épouse la somme mensuelle de 2'085 fr.; subsidiairement, il réclame le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.
Des déterminations n'ont pas été demandées.
D.
La Présidente de la Cour de céans a admis la requête d'effet suspensif présentée par le recourant s'agissant des aliments dus jusqu'à la fin novembre 2011, mais l'a rejetée pour le surplus.
Considérant en droit:
1.
Le prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale (art. 172 ss CC) est une décision en matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF (ATF 133 III 393 consid. 2). Elle est finale selon l'art. 90 LTF, dès lors qu'elle met fin à l'instance sous l'angle procédural (ATF 133 III 393 consid. 4). Le recours a en outre pour objet une décision rendue par une autorité cantonale de dernière instance statuant sur recours (art. 75 LTF), dans une affaire de nature exclusivement pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et al. 4 LTF, art. 74 al. 1 let. b LTF), et il a été interjeté dans le délai légal (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF), par la partie qui a succombé dans ses conclusions devant l'instance précédente (art. 76 al. 1 LTF), de sorte qu'il est recevable au regard de ces dispositions.
2.
Dès lors que les mesures protectrices de l'union conjugale sont considérées comme des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 393 consid. 5 p. 396), seule peut être invoquée à leur encontre la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine un tel grief que s'il a été dûment invoqué et motivé (art. 106 al. 2 LTF), à savoir exposé de manière claire et détaillée (ATF 134 I 83 consid. 3.2 et les arrêts cités). Lorsque le recourant se plaint d'arbitraire (art. 9 Cst.), il ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours dispose d'une libre cognition; il ne saurait se contenter d'opposer son opinion à celle de la juridiction précédente, mais doit démontrer, par une argumentation précise, que cette décision se fonde sur une application du droit manifestement insoutenable (ATF 134 II 349 et les arrêts cités). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 133 III 589 consid. 2).
3.
La cause présente un caractère d'extranéité compte tenu de la résidence étrangère du recourant. Le Tribunal fédéral doit donc examiner d'office la question du droit applicable (ATF 136 III 142 consid. 3.2; 135 III 562 consid. 3.2; 131 III 153 consid. 3). Conformément à l'art. 4 al. 2 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires (RS 0.211.213.01), par le renvoi de l'art. 49 al. 2 LDIP, le droit suisse est applicable en l'espèce.
4.
La Cour de justice a arrêté les revenus du recourant à 8'877 fr. et ceux de l'intimée à 2'800 fr. Les charges des conjoints ont quant à elles été fixées à 600 fr. pour le recourant et à 3'355 fr. pour l'intimée. Faisant application de la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, les juges cantonaux ont fixé la contribution d'entretien due à l'épouse à 4'400 fr., ce dès le 1er janvier 2011.
Le recourant critique les montants retenus au titre de ses revenus (consid. 5) et de sa fortune (consid. 6), puis s'en prend au revenu hypothétique imputé à son épouse (consid. 7). Il reproche enfin à la cour cantonale de l'avoir condamné à verser une pension dès le 1er janvier 2011 (consid. 8).
5.
Le recourant se plaint avant tout du montant du revenu que lui a imputé la Cour de justice, prétendant que celui-ci serait inférieur à celui retenu.
5.1 La cour cantonale a confirmé le revenu déterminé par le premier juge. Elle a ainsi retenu que le recourant, qui avait été fonctionnaire international jusqu'à sa retraite en 2004, percevait une pension de retraité mensuelle d'un montant de 7'375 fr. ainsi qu'une rente AVS de 280 fr. par mois. Il recevait également 390 fr. par mois de défraiement pour un mandat de représentation. A ce revenu réel, la Cour de justice a considéré que le recourant pouvait se voir imputer un revenu hypothétique de 832 fr. par mois, issu de sa fortune mobilière (application d'un taux de 1,5% à la fortune de l'intéressé, estimée à 690'000 fr.) La juridiction a ainsi arrêté le revenu mensuel du recourant à 8'877 fr. par mois (7'375 fr. + 280 fr. + 390 fr. + 832 fr.).
5.2 Le recourant conteste le montant du revenu qui lui a été imputé en invoquant essentiellement des faits nouveaux, à savoir l'adaptation, depuis le mois de novembre 2011, des rentes servies par son ancien employeur au coût de la vie de son pays de résidence - la Tunisie - ainsi que la diminution de sa rente AVS. Ces allégations sont par conséquent irrecevables devant la Cour de céans, conformément à l'art. 99 al. 1 LTF. Quant au revenu issu de sa fortune, le recourant se limite à simplement affirmer qu'il est inexistant dès lors qu'il ne dispose d'aucune fortune. En tant qu'il ne parvient pas à démontrer l'arbitraire du montant retenu au titre de sa fortune (infra consid. 6), la critique formulée est appellatoire, le recourant ne prenant pas la peine de s'en prendre au taux de rendement arrêté par la cour cantonale.
6.
Le recourant affirme ensuite que sa fortune ne se chiffrerait nullement à 660'000 fr., comme l'aurait arbitrairement constaté la juridiction d'appel.
Le premier juge a arrêté la fortune mobilière du recourant à 660'000 fr., à savoir 30'000 fr. déposés auprès d'une banque suisse et 630'000 fr. au minimum auprès d'une institution bancaire tunisienne. La Cour de justice a repris cette constatation de fait, que le recourant a d'ailleurs confirmée devant elle. Il ne saurait dès lors prétendre le contraire devant la Cour de céans sans se voir opposer le principe de l'épuisement des griefs (art. 75 LTF).
7.
7.1 Le recourant affirme encore que la juridiction cantonale aurait arbitrairement, et sans aucune motivation, ramené à 2'800 fr. le revenu hypothétique de l'intimée, pourtant fixé à 3'500 fr. par le Tribunal de première instance.
7.2 Les juges cantonaux ont en effet réduit le salaire hypothétique de l'intimée à 2'800 fr. par mois, soit un montant correspondant à 80% du montant retenu par la première instance. Ils ont à cet égard remarqué que l'on pouvait admettre que l'intéressée exerce une activité à 80% dès lors qu'elle hébergeait encore deux de ses quatre enfants et qu'elle recevait l'aîné, handicapé, durant les week-ends. Observant cependant la faible rentabilité de l'institut d'esthéticienne exploité par l'intimée, la cour cantonale a considéré qu'il convenait qu'elle en améliore la rentabilité (adaptation du tarif, accroissement de la clientèle ou diminution des charges du loyer notamment) ou qu'elle renonce à l'institut pour occuper un emploi salarié.
On ne perçoit guère l'absence de motivation d'un tel raisonnement et le recourant n'en développe aucunement l'arbitraire, de sorte que sa critique ne peut qu'être déclarée irrecevable.
8.
8.1 Dans un dernier grief, le recourant reproche à la Cour de justice d'avoir fait porter sa pension avec un effet rétroactif au 1er janvier 2011. Le recourant paraît appuyer cette critique en se plaignant du fait que le montant qu'il verse à ses enfants majeurs n'aurait pas été pris en considération par la juridiction cantonale. Ce faisant, et en fixant une pension de 4'400 fr. avec effet rétroactif au 1er janvier 2011, la cour aurait fixé une pension qui, cumulée à ce qu'il avait déjà versé pour ses enfants, représentait un montant supérieur à ses revenus. Le résultat ainsi obtenu serait dès lors arbitraire.
8.2 La cour cantonale n'a pas modifié la date à partir de laquelle la contribution d'entretien était due, mais en a augmenté le montant de 2'085 fr. à 4'400 fr.
La juridiction a constaté que le recourant avait effectivement allégué payer 4'500 fr. pour ses enfants, certes majeurs mais dépendants financièrement. L'intimée ne l'avait pas contesté jusqu'au 13 juillet 2011, date à laquelle elle avait indiqué que son mari avait cessé de contribuer à l'entretien de ses filles, sans toutefois préciser depuis quand. Se fondant sur un arrêt publié aux ATF 132 III 209, la Cour de justice a ensuite considéré, en droit, que les charges des enfants majeurs ne devaient cependant pas être incluses dans le minimum vital du débirentier et qu'il appartenait à ceux-ci, dont les prétentions ne pouvaient être satisfaites par l'un des parents, de rechercher directement l'autre parent.
8.3 Le recourant ne s'en prend pas efficacement à la motivation cantonale et ne démontre ainsi nullement le caractère prétendument arbitraire de cette argumentation, au demeurant fondée sur une jurisprudence fédérale confirmée (cf. parmi d'autres: arrêts 5A_301/2011 du 1er décembre 2011 consid. 5.2; 5A_528/2007 du 20 décembre 2007 consid. 3). La contribution d'entretien peut de surcroît être demandée pour l'avenir et pour l'année précédant le dépôt de la requête (art. 173 al. 3 CC): dès lors que l'intimée a déposée celle-ci le 19 janvier 2011, on ne saisit nullement l'arbitraire d'une décision fixant une pension alimentaire à compter du 1er janvier 2011.
9.
En définitive, le recours est irrecevable. Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est octroyée à l'intimée qui n'a pas été invitée à se déterminer sur le fond du litige, étant précisé qu'elle s'est opposée à la requête d'effet suspensif présentée par le recourant, partiellement admise par la Présidente de la Cour de céans.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 26 mars 2012
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Hohl
La Greffière: de Poret Bortolaso