Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
2C_732/2010
Arrêt du 28 juin 2012
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Zünd, Président,
Seiler, Aubry Girardin, Stadelmann et Berthoud,
Juge suppléant.
Greffier: M. Vianin.
Participants à la procédure
X.________ Ltd.,
représentée par Lenz & Staehelin, avocats,
Me Jean-Blaise Eckert,
recourante,
contre
Administration fédérale des contributions,
Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée.
Objet
TVA; 1er trimestre 2001 au 2ème trimestre 2003; assujettissement; droit à la déduction de l'impôt préalable; évasion fiscale,
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 29 juillet 2010.
Faits:
A.
La société X.________ Ltd (ci-après: la société, l'assujettie ou la recourante), constituée à A.________ en 1999, avait pour principal actif un avion de type "Challenger 604". Le 17 novembre 2000, elle a conclu avec la société B.________ AG, dont le siège est à C.________, un contrat intitulé "Operation Management Agreement" portant sur la maintenance, la gestion et l'exploitation de l'avion, soit la mise à disposition de ses clients de l'appareil pour des vols. Le contrat devait entrer en vigueur lors de l'immatriculation commerciale de l'avion en Suisse.
La société s'est annoncée en décembre 2000 à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: l'Administration fédérale), en vue de son inscription au registre des assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: TVA). Elle a précisé que son activité, consistant à affréter à B.________ AG un avion importé en Suisse, débuterait le 8 janvier 2001, que son chiffre d'affaires annuel atteindrait 100'000 fr. et que, pour le cas où il se révélerait inférieur, elle souhaitait opter pour l'assujettissement.
La société a été immatriculée en tant qu'assujettie à la TVA le 8 janvier 2001. Elle a importé l'avion en Suisse le 27 février 2001, en s'acquittant de la TVA à l'importation.
Dans ses décomptes TVA afférents à 2001, la société a indiqué un impôt préalable déductible de 3'157'103 fr. 25 et un impôt dû de 5'752 fr. La différence, soit 3'151'351 fr. 25, lui a été versée par l'Administration fédérale.
Le 21 octobre 2002, l'assujettie a conclu avec D.________ Ltd, société ayant son siège à E.________ (Iles Vierges britanniques), un contrat intitulé "Aircraft Wet Lease Agreement", prévoyant la mise à disposition de l'avion, avec le personnel de vol fourni par B.________ AG.
Dans ses décomptes TVA afférents à 2002, la société a indiqué un impôt préalable déductible de 259'493 fr. et un impôt dû de 5'752 fr., d'où il résultait un montant en sa faveur de 253'741 fr.
B.
Après avoir requis différents documents, notamment les factures justifiant l'impôt préalable déclaré, et renseignements, en particulier sur l'existence et la nature d'éventuelles prestations fournies à des tiers et sur les prestations grevées d'impôt préalable, l'Administration fédérale a, par décision du 3 juin 2003, radié l'assujettie du registre des contribuables TVA avec effet au 31 décembre 2002. Elle lui a en outre réclamé le paiement de 3'206'085 fr. 45 pour les périodes allant du 1er trimestre 2001 au 1er trimestre 2002 et a corrigé les décomptes relatifs aux périodes allant du 2ème au 4ème trimestre 2002 en ce sens que le chiffre d'affaires et l'impôt préalable étaient nuls.
A l'encontre de cette décision, l'assujettie a formé une réclamation, en concluant à son annulation et au paiement de l'excédent d'impôt préalable résultant des décomptes afférents aux périodes allant du 2ème au 4ème trimestre 2002.
Dans ses décomptes relatifs aux trois premiers trimestres 2003, la société a indiqué un impôt préalable déductible de 164'803 fr. et un montant de TVA égal à zéro. Le 28 août 2003, elle a annoncé que l'avion avait été vendu le 30 juin 2003. Elle a exposé le 26 septembre 2003 que cette circonstance justifiait sa radiation du registre des contribuables TVA avec effet au 30 septembre 2003.
C.
Par décision sur réclamation du 27 février 2007, l'Administration fédérale a considéré que les conditions de l'assujettissement de la société et du droit à la déduction de l'impôt préalable devaient être examinées au regard des seules prestations fournies à B.________ AG, à l'exclusion de celles effectuées en faveur de D.________ Ltd. La déduction de l'impôt préalable ne pouvait être admise que pour la période d'assujettissement, soit les années 2001 et 2002, et au surplus de manière réduite, à savoir exclusivement pour les prestations fournies à B.________ AG. L'assujettie devait dès lors restituer 3'156'315 fr. 45 d'impôt préalable déduit à tort, seul un montant de 18'735 fr. 35 étant déductible à ce titre pour les périodes allant du 2ème au 4ème trimestre 2002.
Saisi d'un recours contre la décision précitée, le Tribunal administratif fédéral l'a rejeté, par arrêt du 29 juillet 2010. Il a confirmé, en substance, que la société n'avait pas réalisé d'opérations au sens du droit de la TVA avec D.________ Ltd: un échange de prestations ne pouvait intervenir qu'entre des sujets distincts au plan économique, condition qui n'était pas réalisée en l'espèce; en outre, les transactions entre la société et D.________ Ltd présentaient les caractéristiques de l'évasion fiscale. Dès lors, seules les prestations fournies à B.________ AG sur le territoire suisse pouvaient être prises en considération pour se prononcer sur l'assujettissement de la société. Celles-ci dépassant le montant déterminant en 2001, la société était assujettie à titre obligatoire durant l'année en question. Même si elle n'avait pas effectué d'opérations en Suisse en 2002, elle demeurait assujettie jusqu'à la fin de cette année, sa radiation du registre des contribuables TVA avec effet à cette date étant intervenue à bon droit. Le Tribunal administratif fédéral a au surplus confirmé la réduction de l'impôt préalable déductible opérée par l'Administration fédérale au vu de l'absence d'opérations au sens du droit de la TVA avec D.________ Ltd et de la fin de l'assujettissement de la société au terme de l'année 2002.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la société demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 29 juillet 2010, de reconnaître sa qualité d'assujettie à la TVA et son droit à la déduction complète de l'impôt préalable pour toute la période allant du 8 janvier 2001 au 30 juin 2003, de dire qu'elle n'est redevable d'aucun montant envers l'Administration fédérale au titre de l'impôt préalable qui lui a été restitué (périodes allant du 1er trimestre 2001 au 1er trimestre 2002) et de condamner cette dernière à lui rembourser l'impôt préalable afférent aux périodes allant du 2ème trimestre 2002 au 2ème trimestre 2003, soit un montant total de 357'269 fr. Elle demande également que son recours soit doté de l'effet suspensif.
Le Tribunal administratif fédéral renonce à se déterminer sur le recours. L'Administration fédérale conclut à son rejet.
Par ordonnance du 20 octobre 2010, le Président de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif.
Considérant en droit:
1.
1.1 Interjeté par une partie directement touchée par l'arrêt attaqué et qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (cf. art. 89 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre une décision finale (cf. art. 90 LTF) rendue dans une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) par le Tribunal administratif fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. a LTF). Déposé dans le délai (cf. art. 100 al. 1 LTF) et la forme (cf. art. 42 LTF) prévus par la loi et ne tombant sous le coup d'aucune des clauses de l'art. 83 LTF, il est en principe recevable comme recours en matière de droit public.
1.2 Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , sous peine d'irrecevabilité (cf. art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Il ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel si le grief n'a pas été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; ATF 137 III 580 consid. 1.3 p. 584 et les références).
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
2.
La loi fédérale du 12 juin 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA; RS 641.20) est entrée en vigueur le 1er janvier 2010. En vertu de l'art. 112 al. 1 LTVA, les dispositions de l'ancien droit ainsi que leurs dispositions d'exécution demeurent applicables à tous les faits et rapports juridiques ayant pris naissance avant leur abrogation. En l'espèce, le litige porte sur les périodes fiscales allant du 1er janvier 2001 au 30 juin 2003 (1er trimestre 2001 au 2ème trimestre 2003). La présente cause doit dès lors être examinée au regard des dispositions de la loi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (aLTVA; RO 2000 1300 et les modifications ultérieures).
3.
Est assujetti à l'impôt quiconque, même sans but lucratif, exerce de manière indépendante une activité commerciale ou professionnelle en vue de réaliser des recettes, à condition que les livraisons de biens, les prestations de services et les prestations à soi-même qu'il a effectuées sur le territoire suisse dépassent globalement la somme de 75'000 fr. par an (art. 21 al. 1 aLTVA). Hormis l'impôt sur les prestations à soi-même, ne sont soumises à la TVA que les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux (cf. art. 5 aLTVA). Une opération est effectuée à titre onéreux, à savoir contre rémunération, s'il y a échange d'une prestation et d'une contre-prestation. Un rapport économique étroit doit exister entre elles, en ce sens que c'est la prestation qui déclenche la contre-prestation (ATF 126 II 443 consid. 6a p. 451; 132 II 353 consid. 4.1 p. 357). Un échange de prestations peut aussi avoir lieu entre des personnes proches. S'agissant de leur caractère imposable, les prestations à l'égard de personnes proches ne doivent en effet pas être traitées différemment de celles qui sont fournies à des tiers, les art. 5 ss aLTVA ne prévoyant aucune exception ou traitement particulier pour les prestations destinées à des proches (cf. arrêts 2C_638/2010 du 19 mars 2012, destiné à la publication, consid. 3.2; 2A.264/2006 du 3 septembre 2008 consid. 3.3, in Archives 78 p. 600, RDAF 2009 II p. 186, RF 64/2009 p. 40).
4.
4.1 La recourante fait valoir en premier lieu que le Tribunal administratif fédéral a arbitrairement nié l'existence d'un échange de prestations avec D.________ Ltd, faute de sujets distincts sur le plan économique, et en refusant en conséquence son assujettissement à la TVA au titre de ses relations d'affaires avec cette société. En outre, il n'y aurait pas lieu de retenir une quelconque évasion fiscale.
4.2 Comme indiqué ci-dessus (consid. 3), à supposer que la recourante et D.________ Ltd soient des personnes proches, cela n'exclut pas l'existence entre elles d'opérations au sens du droit de la TVA. Sur ce point, la décision entreprise ne peut être suivie. L'autorité précédente a toutefois nié l'existence d'opérations entre ces deux sociétés aussi en admettant l'existence d'une évasion fiscale, ce que la recourante conteste. Il convient ainsi d'examiner si le cas d'espèce présente les caractéristiques de l'évasion fiscale. Des considérations sur ce concept en droit fiscal en général et dans le domaine de la TVA en particulier s'imposent au préalable.
5.
5.1 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 131 II 627 consid. 5.2 p. 635 s.; arrêt 2C_742/2008 du 11 février 2009 consid. 5.7, in Archives 79 p. 260, RF 64/2009 p. 604), il y a évasion fiscale lorsque a) la forme juridique choisie par le contribuable paraît insolite, inappropriée ou étrange, en tout cas inadaptée au but économique poursuivi, b) ce choix a été opéré abusivement, dans le seul but d'économiser des impôts qui seraient dus si les rapports de droit avaient été aménagés de façon appropriée et c) le procédé conduirait effectivement à une notable économie d'impôt s'il était admis par l'autorité fiscale.
Contrairement à ce que soutiennent certains auteurs (cf. en particulier PETER LOCHER, Rechtsmissbrauchsüberlegungen im Recht der direkten Steuern der Schweiz, Archives 75 p. 675 ss, spéc. p. 680; RENÉ MATTEOTTI, Der Durchgriff bei von Inländern beherrschten Auslandsgesellschaften im Gewinnsteuerrecht, 2003, p. 188 ss), il convient de s'en tenir à ces critères. La doctrine récente a certes raison lorsqu'elle prétend que l'évasion fiscale - comprise comme l'invocation abusive du sens considéré comme déterminant d'une norme (cf. ATF 131 II 562 consid. 3.5 p. 568) - ne saurait être envisagée que dans des cas très rares, lorsqu'une imposition ou une exemption fiscales ne sont pas possibles malgré une interprétation fondée sur le sens de la norme (cf. arrêt 2C_742/2008, précité, consid. 5.5; PIERRE-MARIE GLAUSER, Transparence fiscale: vers un nouveau mode d'allocation internationale du profit dans les groupes de sociétés, RF 61/2006 p. 486 ss [ci-après: Transparence fiscale], spéc. p. 502; Idem, Évasion fiscale et TVA, in Évasion fiscale, 2010, p. 21 ss, spéc. p. 42). Dans de tels cas, l'application de la loi conduit à un résultat qui, en raison des particularités de l'état de fait, apparaît comme hautement choquant, voire inconciliable avec le principe d'interdiction de l'arbitraire (cf. LOCHER, op. cit., p. 694; MARKUS REICH, Steuerrecht, 2e éd., 2012, § 6 no 47 p. 149; PIERRE-MARIE GLAUSER, Évasion fiscale et interprétation économique en matière de TVA, Archives 75 p. 727 ss, spéc. p. 742). Lorsque l'existence d'une évasion fiscale est examinée sous cet angle, les critères précités permettent de la distinguer de l'économie d'impôt acceptable du point de vue fiscal (cf. arrêt 2C_638/2010, précité, consid. 4.1).
S'agissant de l'examen de la construction juridique choisie, élément objectif de l'analyse, il convient par conséquent d'accorder une importance décisive à son caractère totalement inapproprié. Pour admettre l'existence d'une évasion fiscale, l'on doit ainsi être en présence d'une construction qui - abstraction faite des aspects fiscaux - n'a aucun sens du point de vue économique (cf. REICH, op. cit., § 6 no 20 p. 141). De son côté, l'élément subjectif joue un rôle déterminant dans la mesure où il est exclu d'admettre une évasion fiscale lorsque la construction juridique repose sur des raisons autres que la simple économie d'impôt. Lorsqu'une norme est invoquée de façon abusive, sans qu'aucun intérêt digne de protection ne le justifie, cela ne saurait rester sans conséquences. En ce qui concerne enfin l'analyse des effets de la construction, il ne faut pas perdre de vue que le contribuable est en principe libre de façonner ses relations juridiques comme il l'entend. Une intervention à l'encontre d'une construction abusive ne se justifie par conséquent que si celle-ci produit réellement des effets au plan fiscal (cf. arrêt 2C_638/2010, précité, consid. 4.1).
La question de savoir si les conditions pour admettre une évasion fiscale sont données doit être examinée en se fondant sur les circonstances concrètes du cas d'espèce. Lorsque l'évasion fiscale est retenue, la jurisprudence du Tribunal fédéral considère que l'imposition doit être fondée non pas sur la forme choisie par le contribuable, mais sur celle qui aurait été appropriée au but économique poursuivi (cf. ATF 131 II 627 consid. 5.2 p. 635 s.). Contrairement à l'opinion de la doctrine (voir p. ex. LOCHER, op. cit., p. 680 et 696; GLAUSER, Transparence fiscale, op. cit., p. 502), une telle fiction ne pose pas problème. En effet, ce n'est que la construction juridique formelle qui est niée. En ce qui concerne ses conséquences économiques - seules déterminantes pour l'analyse -, la situation reste inchangée (cf. REICH, op. cit., § 6 no 24 p. 142).
5.2 Contrairement à l'avis de GLAUSER (in Archives 75, op. cit., p. 759), rien ne s'oppose à l'application de ces règles en matière de TVA (cf. arrêts 2C_638/2010, précité, consid. 4.2; 2C_742/2008, précité, consid. 5.5 et 5.6; 2C_632/2007 du 7 avril 2008 consid. 4.2, in Archives 77 p. 354, RF 63/2008 p. 556). Dans l'ATF 132 II 353 consid. 10 p. 369 s., le Tribunal fédéral a expressément réservé l'évasion fiscale, de même que dans l'arrêt 2A.748/2005 du 25 octobre 2006 consid. 3.5 (in RF 62/2007 p. 234). Comme le relève à juste titre la recourante, cette jurisprudence a fait l'objet de critiques. On peut se référer à cet égard aux réflexions de principe de la doctrine selon lesquelles une évasion fiscale ne saurait être admise que dans les situations où la norme fiscale se fonde sur le droit civil, ce qui ne serait pas le cas de la TVA, car celle-ci repose principalement sur des concepts économiques (cf. BÉATRICE BLUM, Steuerumgehung bei der Mehrwertsteuer - Halten eines Flugzeuges in einer "Briefkastengesellschaft", in Entwicklungen im Steuerrecht 2009, p. 343 ss, spéc. p. 347; GLAUSER, in Archives 75, op. cit., p. 759; HAROLD GRÜNINGER/STEFAN OESTERHELT, Steuerrechtliche Entwicklungen [insbesondere im Jahr 2008], RSDA 2009 p. 51 ss, spéc. p. 66 s.).
Cette opinion ne saurait être suivie. Il est vrai que, selon une jurisprudence constante, en présence d'une norme fiscale fondée sur des points de rattachement économiques, l'interprétation selon la réalité économique ne dépend pas de la réalisation des conditions d'une évasion fiscale (cf. arrêt 2C_879/2008 du 20 avril 2009 consid. 6.1, in RDAF 2009 II p. 386, StE 2009 B 92.3 no 17; ATF 115 Ib 238 consid. 3b p. 241). On ne saurait pourtant en déduire qu'il n'y a plus de place pour l'évasion fiscale lorsqu'une norme doit être interprétée selon la réalité économique: l'admission d'une évasion fiscale se justifie parce que le fait de se prévaloir abusivement d'un droit ou d'invoquer de manière abusive une norme ne mérite pas d'être protégé. Cette réflexion fondamentale garde sa validité que l'on doive interpréter une norme selon son seul contenu de droit civil ou en se plaçant sous l'angle économique. Si l'on constate qu'une construction juridique est totalement inappropriée aux buts économiques poursuivis et qu'en vertu des normes légales pertinentes, son acceptation conduirait à des économies d'impôt indues, le fait de se prévaloir abusivement de cette forme juridique qui ne correspond en définitive pas au but économique poursuivi ne mérite pas d'être protégé. Il importe peu à cet égard que le contenu des normes invoquées de façon abusive soit établi en se fondant sur les seuls concepts de droit civil ou en procédant à une interprétation selon la réalité économique (cf. dans ce sens le modèle à deux niveaux de LOCHER, op. cit., p. 693 s.; voir aussi Danielle Yersin, Commentaire romand, Impôt fédéral direct, 2008, Remarques préliminaires no 54; d'un autre avis PIERRE-MARIE GLAUSER, Notion d'évasion fiscale - Introduction générale, in Évasion fiscale, 2010, p. 1 ss, spéc. p. 18, lorsqu'il affirme: "Il serait en effet tout à fait contradictoire d'invoquer la réalité économique dans le cadre de l'évasion pour s'écarter d'une disposition interprétée selon la même réalité économique.").
Ce qui précède trouve une illustration dans les situations où il s'impose en définitive de nier l'existence juridique d'une personne morale (Durchgriff). Même si l'activité exercée par la personne morale devait, en vertu d'une norme comportant des points de rattachement économiques, entraîner des conséquences fiscales pour celle-ci, l'invocation de l'existence autonome de la personne morale, indépendamment du titulaire des droits de participation, apparaît dans de tels cas de figure comme totalement inappropriée à la réalité économique. Si l'application des normes pertinentes conduit à un résultat totalement inacceptable et insoutenable, qui ne correspond en aucun cas aux intentions du législateur, il est possible d'atténuer l'effet d'écran lié à la personne morale ou de le supprimer complètement (cf. REICH, op. cit., § 18 no 15 p. 441; voir aussi GLAUSER, in Évasion fiscale, op. cit., p. 21 ss, spéc. p. 39; Idem, in Archives 75, op. cit., spéc. p. 762 s., qui aboutit apparemment au même résultat). Le fait que, dans certaines circonstances, l'interprétation fondée sur la réalité économique suffit à admettre que l'on n'est pas en présence d'opérations au sens du droit de la TVA, de sorte qu'il ne reste plus de place pour l'évasion fiscale, ne saurait rien y changer (cf. arrêt 2C_638/2010, précité, consid. 4.2).
Il convient par conséquent d'examiner si l'autorité précédente a admis à juste titre l'existence d'une évasion fiscale dans le cas d'espèce.
5.3 Le Tribunal administratif fédéral a considéré que l'interposition de deux sociétés offshore - disposant d'ailleurs de la même adresse et du même numéro de fax en Arabie saoudite - aux fins de détenir l'avion devait être qualifiée d'insolite. Les risques inhérents à la détention d'un avion pouvaient en effet être réduits autrement, notamment en concluant une assurance appropriée ou en constituant une personne morale d'un autre type. La construction juridique en cause paraissait donc avoir été choisie dans le seul but de réaliser une notable économie d'impôts, ce qui aurait été le cas si elle avait été acceptée par les autorités fiscales.
5.4
5.4.1 Dans l'arrêt 2C_632/2007, précité, le Tribunal fédéral a considéré que le fait d'interposer une personne morale comme détentrice d'un avion n'avait en soi guère de sens - cette personne morale ne disposant pas d'une organisation professionnelle aux fins d'exploiter celui-ci - et que l'argument lié à une prétendue limitation de la responsabilité n'y changeait rien. Si la personne physique recourait à une personne morale sans activité propre, agissant comme simple "société relais" (Durchlaufgesellschaft), pour détenir son avion, cela apparaissait comme insolite (consid. 4.5). Or, on ne saurait s'en tenir à ces considérants de manière aussi générale. En premier lieu, il convient de constater qu'il est d'usage courant de ne pas détenir des avions à titre privé, mais par l'entremise d'une personne morale (cf. XAVIER OBERSON/JACQUES PITTET, La jurisprudence du Tribunal fédéral rendue en 2008 en matière de TVA, in Archives 79 p. 149 ss, spéc. p. 163 ss, qui relèvent en particulier le fait qu'aucune personne physique ne figure comme détenteur dans le registre matricule des aéronefs; cf. aussi URS R. BEHNISCH/ANDREA OPEL, Die steuerrechtliche Rechtsprechung des Bundesgerichts im Jahre 2008, in RSJB 145/2009 p. 503 ss, spéc. p. 576 ss; BLUM, op. cit., p. 350; GRÜNINGER/OESTERHELT, op. cit., p. 66). Comme divers auteurs le soulignent, ce sont des raisons liées au financement des avions et à la limitation de la responsabilité qui déterminent ce choix (cf. OBERSON/PITTET, op. cit., p. 164; GRÜNINGER/OESTERHELT, loc. cit.). Les dommages pouvant découler de l'utilisation d'un avion peuvent en effet s'avérer importants, en particulier si l'on songe que, dans certains États, les dommages-intérêts représentent un multiple de ceux qui ont cours dans notre pays (cf. BLUM, loc. cit.). C'est ainsi en particulier la limitation de la responsabilité qui constitue dans de nombreux cas un motif économiquement adéquat pour exercer une activité risquée par le biais d'une personne morale distincte (cf. aussi ANNIE ROCHAT PAUCHARD, Actualités en matière fiscale dans le champ de l'aviation, ASDA 2009 p. 33 ss, spéc. p. 38). Cet aspect a été négligé dans l'arrêt précité. Des raisons supplémentaires de détenir un avion d'affaires par l'entremise d'une personne morale peuvent consister dans le fait que les banques subordonnent leur financement à l'existence de telles constructions, ou que la transparence du registre matricule des aéronefs - qui est public - peut être atténuée de cette manière (cf. GRÜNINGER/OESTERHELT, loc. cit.; cf. aussi GLAUSER, in Évasion fiscale, op. cit., p. 21 ss, p. 39).
5.4.2 Il en va en revanche autrement lorsque la société est utilisée principalement aux fins de satisfaire des besoins privés de son actionnaire unique. Le Tribunal fédéral a relevé il y a longtemps déjà - en relation avec la détention, par une société anonyme, d'une maison de vacances mise à la disposition presque exclusive de l'actionnaire unique - qu'il est dans la nature des choses qu'un tel objet soit destiné principalement à satisfaire les besoins personnels de l'actionnaire et que les autres objectifs qui sont normalement visés par la création d'une société immobilière deviennent tout à fait secondaires. Envisagée dans son ensemble, une telle construction de droit civil apparaît comme totalement inappropriée aux réalités économiques effectives (cf. arrêt du 12 novembre 1969, in Archives 40 p. 210 ss, spéc. p. 219 ss). Cette conclusion s'impose en principe de même lorsque la société est créée principalement aux fins de mettre un avion à la disposition de l'actionnaire pour son usage privé. L'abus ne consiste certes pas dans le fait de constituer une personne morale servant à détenir l'avion utilisé à titre privé. Mais il y a abus lorsque l'on tente par là d'obtenir en plus un avantage fiscal, notamment en se faisant rembourser l'impôt préalable dont le montant est plus élevé que les sommes versées au titre de la TVA. Or, si l'avion n'est utilisé qu'à titre privé par l'ayant droit économique de la personne morale, l'inscription dans le registre des contribuables TVA ne peut poursuivre que ce seul but. Il se justifie alors de ne pas reconnaître une telle personne morale comme sujet fiscal distinct.
5.4.3 Il appartient à l'autorité fiscale d'apporter la preuve d'une évasion fiscale. Il lui suffit à cet effet de démontrer qu'il n'existe aucune raison économique ou commerciale justifiant l'utilisation de l'avion. On peut alors en déduire, dans le sens d'une présomption naturelle, que l'avion est utilisé à des fins privées par l'actionnaire ou les proches de ce dernier. Cela vaut notamment dans un contexte international, où les exigences en matière de preuves sont accrues (cf. ATF 133 II 153 consid. 7.2 p. 166; arrêts 2A.79/2002 du 27 janvier 2003 consid. 5.2, in Archives 72 p. 736, RDAF 2003 II p. 382, RF 58/2003 p. 368; 2A.609/2003 du 27 octobre 2004 consid. 2.4, in StE 2005 A 23.2 no 2, PJA 2005 p. 869). Le contribuable peut de son côté renverser la présomption, en démontrant qu'il a besoin de l'appareil à des fins commerciales.
5.5 En l'espèce, il ressort du contrat intitulé "Operation Management Agreement" que B.________ AG s'est engagée vis-à-vis de la recourante à maintenir l'avion prêt à l'usage 24h sur 24 (ch. 2.3). Lorsque l'avion n'était pas utilisé par la recourante, B.________ AG devait s'efforcer de le louer à des tiers, location qui ne pouvait toutefois avoir lieu sans le consentement écrit de celle-ci (ch. 1.2, 5.1 et 5.2). Il apparaît ainsi que l'avion devait principalement servir à la recourante, ainsi qu'à des personnes proches de celle-ci. A cet égard, il n'y a pas lieu de s'écarter de la constatation de l'autorité précédente, selon laquelle il y a identité entre le ou les ayant(s) droit économique(s) de la recourante et ceux de D.________ Ltd. Le Tribunal administratif fédéral a en effet considéré que la recourante s'était toujours refusée à donner des indications nominatives à ce propos, mais qu'elle avait finalement déclaré, dans un courrier du 3 janvier 2006, que "les usagers de l'avion étaient en grande partie, voire tous, des membres d'une famille qui possède un groupe international de sociétés [...], tous résidents hors de Suisse [et ayant] tous utilisé l'avion dans le cadre de leurs activités de direction ("active management") des sociétés qu'ils possèdent dans le monde entier, mais principalement en Grande-Bretagne et au Moyen-Orient". L'autorité précédente a en outre relevé que les deux sociétés en question disposaient de la même adresse en Arabie saoudite et du même numéro de fax. Quoi qu'en dise la recourante, il n'est à tout le moins pas arbitraire de conclure, dans ces conditions, à l'identité de l'/des ayant(s) droit économique(s) des deux sociétés.
Dans un courrier du 17 décembre 2004, l'Administration fédérale a demandé à la recourante de produire les billets de passage (Flugscheine) et la liste des passagers transportés pendant les années 2001 à 2003, ce à quoi la recourante s'est refusée (courrier du 28 février 2005). Par ailleurs, lors d'une séance tenue le 19 septembre 2005 en présence des mandataires de la recourante, la question de savoir si l'avion avait été utilisé à des fins privées ou commerciales a été soulevée par les représentants de l'Administration fédérale. Dans une écriture du 12 janvier 2006, faisant suite au courrier précité de la recourante du 3 janvier 2006, l'Administration fédérale a demandé une nouvelle fois des précisions au sujet de l'abréviation "PVT" qui figurait sur le plan de vol en regard d'une grande partie des vols effectués par l'avion durant les années 2001 à 2003, abréviation qui désignait, selon les renseignements donnés par B.________ AG, les trajets parcourus en faveur du propriétaire de l'avion ou de personnes proches de celui-ci. La recourante était invitée à dire, en particulier, si les vols en question avaient servi à transporter des employés de la société D.________ Ltd. Dans sa décision sur réclamation du 27 février 2007, l'Administration fédérale a indiqué qu'elle avait voulu par là déterminer aussi s'il s'agissait de vols liés à des activités imposables ou à un usage privé (ch. 4.8). Elle a en outre relevé qu'au vu des pièces figurant au dossier, il n'était pas établi que l'avion avait été utilisé à des fins commerciales, en vue de réaliser des opérations imposables (ch. 4.15 p. 25, ch. 6.2 et 6.3). Or, dans son recours au Tribunal administratif fédéral, la recourante n'a, pas davantage qu'auparavant, remis en cause cette constatation.
La recourante a ainsi eu à de nombreuses reprises l'occasion de démontrer que l'avion avait été utilisé à des fins commerciales, ce qu'elle n'a pas fait. Dans ces conditions, il y a lieu de s'en tenir à la présomption selon laquelle l'appareil a servi à l'usage privé du ou des ayant(s) droit économique(s) de la recourante ainsi que de D.________ Ltd. Pour ce qui est des opérations réalisées entre ces deux sociétés, il apparaît dès lors que l'immatriculation de la recourante au registre des contribuables TVA poursuivait essentiellement le but d'obtenir un avantage fiscal, en se faisant rembourser l'excédent d'impôt préalable résultant de ces opérations. Dans cette mesure, il se justifie de retenir l'existence d'une évasion fiscale, comme l'a admis l'autorité précédente. Cela implique de faire abstraction de la personnalité morale (Durchgriff) de la recourante ainsi que de D.________ Ltd, pour ce qui est des opérations réalisées entre elles; lesdites opérations doivent être imputées à la sphère privée de l'/des ayant(s) droit économique(s) des deux sociétés, avec pour conséquence qu'elles ne donnent pas droit à la déduction de l'impôt préalable comme activités privées au sens de l'art. 38 al. 4 aLTVA. De même, ces opérations n'ont pas à être prises en considération pour se prononcer sur l'assujettissement de la recourante à la TVA.
Il n'y a en revanche pas de raison d'admettre l'existence d'une évasion fiscale en relation avec les opérations que la recourante a réalisées avec B.________ AG, qui est indépendante vis-à-vis d'elle. A la différence de celles effectuées entre la recourante et D.________ Ltd, ces opérations - pour autant que les autres conditions soient réunies - doivent donc être prises en considération pour statuer sur l'assujettissement de la recourante et, par ailleurs, elles donnent droit à la déduction de l'impôt préalable. S'agissant de ce dernier point, il y a ainsi eu double affectation au sens de l'art. 41 aLTVA, dès lors que la recourante a utilisé des biens et des services grevés de l'impôt à la fois pour des affectations donnant droit à la déduction de l'impôt préalable (opérations avec B.________ AG) et à d'autres fins (opérations avec D.________ Ltd).
6.
La recourante conteste que son assujettissement à la TVA ait pris fin au 31 décembre 2002. Elle soutient qu'elle est demeurée assujettie jusqu'à la vente de l'avion, intervenue à la fin du 2ème trimestre 2003.
6.1 En vertu du contrat intitulé "Operation Management Agreement", B.________ AG devait s'efforcer de louer l'avion à des tiers, lorsque la recourante n'en avait pas besoin elle-même (cf. ci-dessus consid. 5.5). En cas de location à des tiers, B.________ AG devait créditer la recourante de 3'820 USD par heure de vol, 700 USD par atterrissage et 700 USD pour les frais d'hébergement de l'équipage (ch. 5.3 dudit contrat). Le fait de mettre l'avion à la disposition de B.________ AG moyennant les contre-prestations précitées constitue en droit de la TVA une livraison de biens au sens de l'art. 6 al. 1 et 2 let. b aLTVA (cf. arrêt 2C_904/2008 du 22 décembre 2009 consid. 2.2, in RF 65/2010 p. 344). Compte tenu du fait que l'avion servait en premier lieu à la recourante et ne pouvait être loué à des tiers qu'avec le consentement de cette dernière, il y a lieu d'admettre, à l'instar de l'autorité précédente et conformément à l'arrêt précité 2C_904/2008 (consid. 5.4), qu'il n'y a pas eu une seule livraison (en 2001, lorsque l'avion a été pour la première fois mis à la disposition de B.________ AG), mais plusieurs livraisons successives.
Aux termes de l'art. 21 al. 1 aLTVA, seules les opérations réalisées sur le territoire suisse sont prises en considération afin de déterminer si la limite de chiffre d'affaires de 75'000 fr. par année est atteinte et, partant, s'il y a assujettissement obligatoire. La question de l'assujettissement est ainsi liée à celle de la localisation des opérations.
La livraison consistant à mettre à disposition un avion est localisée à l'endroit où l'appareil se trouve lorsqu'il est remis au destinataire (cf. art. 13 let. a aLTVA et arrêt 2C_904/2008, précité, consid. 2.2).
6.2 En l'occurrence, l'autorité précédente a relevé pour 2001 que deux des notes de crédit figurant au dossier de la cause représentaient à elles seules un montant de plus de 75'000 fr. pour la mise à disposition de B.________ AG de l'avion au départ de la Suisse. Par conséquent, la recourante était assujettie à titre obligatoire durant l'année en question, ce qui n'est pas contesté.
S'agissant de 2002, l'autorité précédente a retenu sur la base des notes de crédit et du listing ("Flight information System, Aircraft movements") figurant au dossier que la recourante n'avait pas réalisé d'opérations en Suisse avec B.________ AG durant l'année en question. La recourante ne faisant pas valoir - en tout cas pas d'une manière conforme aux exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF rappelées ci-dessus - que cette appréciation des preuves serait arbitraire, cette constatation de fait lie le Tribunal de céans (cf. consid. 1.2 ci-dessus). L'absence d'opérations en Suisse en 2002 n'empêche pas que la recourante est demeurée assujettie à la TVA durant cette année, puisqu'en vertu de l'art. 29 let. b aLTVA, l'assujettissement prend fin au terme de l'année civile au cours de laquelle les montants déterminants n'ont plus été dépassés, si l'on peut s'attendre à ce qu'ils ne le soient pas non plus pendant l'année civile suivante.
L'autorité précédente a considéré que les conditions de l'art. 29 let. b aLTVA étaient réunies à la fin de l'année 2002, de sorte que l'assujettissement de la recourante avait cessé à ce moment-là. La recourante conteste que l'on ait pu s'attendre à la fin 2002 à ce que le montant déterminant ne serait pas atteint durant l'année 2003. Or, s'il est exact que la loi n'exige pas la preuve stricte d'un chiffre d'affaires futur, encore faut-il que le contribuable établisse, au plan de la prévisibilité, que ce chiffre d'affaires pourrait atteindre le montant déterminant pour l'assujettissement. La recourante, qui a expliqué la baisse du chiffre d'affaires en 2002 par la conjoncture défavorable sur le marché de l'aviation, n'a fait état d'aucune amélioration prévisible pour l'année 2003. Elle n'a notamment allégué aucune circonstance permettant de prévoir qu'en 2003 l'avion serait mis à la disposition de B.________ AG en Suisse, contrairement à ce qui s'était passé pendant toute l'année 2002. De telles prévisions ne se sont d'ailleurs pas réalisées, puisque le chiffre d'affaires que la recourante indique avoir réalisé avec B.________ AG en 2003 est documenté par trois notes de crédit, qui indiquent toutes un aéroport de départ se situant hors de Suisse. Ces prestations constituaient donc des opérations à l'étranger, qui ne sont pas déterminantes pour l'assujettissement obligatoire. C'est dès lors à bon droit que l'autorité précédente a considéré que l'assujettissement de la recourante avait cessé à la fin de l'année 2002.
Quant à la vente de l'avion, intervenue à la fin du 2ème trimestre 2003, elle ne pouvait conduire à faire réinscrire la recourante au registre des contribuables TVA pour les deux premiers trimestres 2003. L'assujettissement à la TVA suppose en effet une activité économique durable (cf. arrêt 2A.501/2001 du 27 mai 2002 consid. 2, in Archives 73 p. 222, RDAF 2003 II p. 14, RF 57/2002 p. 674), condition qui n'était plus remplie dès lors que la recourante avait vendu son principal actif. Les conditions de l'assujettissement obligatoire n'étaient ainsi pas remplies durant les deux premiers trimestres de l'année 2003.
6.3 La recourante se prévaut des règles sur l'assujettissement à option. Elle soutient qu'elle demeurait assujettie durant l'année 2003 à titre volontaire, en application de l'art. 56 al. 3 aLTVA, disposition aux termes de laquelle toute personne qui ne réalise plus le chiffre d'affaires déterminant l'assujettissement et omet de l'annoncer est censée avoir opté pour ce dernier. Elle fait valoir qu'elle avait en effet atteint, tant en 2002 qu'en 2003, la limite requise pour l'assujettissement à option, étant précisé que les livraisons effectuées à l'étranger doivent selon elle être prises en considération à cet égard, conformément à la brochure spéciale no 2, intitulée "Assujettissement à la TVA", éditée par l'Administration fédérale en septembre 2000 (ch. 4.2.1).
Selon la brochure précitée, la condition pour un assujettissement volontaire est de réaliser annuellement plus de 40'000 fr. de chiffre d'affaires provenant notamment "d'exportations ou de livraisons/prestations de services effectuées à l'étranger par des entreprises suisses, qui seraient imposables si elles étaient fournies sur le territoire suisse [...]" (loc. cit.; voir aussi les Instructions 2001 sur la TVA, ch. 688). On peut se demander si cette disposition est conforme à la loi, en particulier dans la mesure où elle prévoit que les opérations effectuées à l'étranger sont prises en considération. La question n'a toutefois pas à être tranchée en l'espèce, du moment que l'option n'est de toute manière offerte qu'aux entreprises suisses, de sorte que la recourante ne peut s'en prévaloir.
6.4 Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que l'autorité précédente a jugé que la recourante avait cessé d'être assujettie à la TVA à la fin de l'année 2002.
7.
S'agissant du droit à la déduction de l'impôt préalable, la recourante prétend que celui-ci doit lui être reconnu aussi pour ce qui est des opérations réalisées avec D.________ Ltd. A cet égard, il peut être renvoyé au consid. 5.5 ci-dessus.
A titre subsidiaire, la recourante soutient que la vente de l'avion donne également droit à la déduction de l'impôt préalable. Le fait qu'elle n'était plus assujettie à la TVA à compter de la fin de l'année 2002 (cf. consid. 6 ci-dessus) y fait toutefois obstacle. A cela s'ajoute que les charges préalables en cause, liées aux prestations d'"aircraft management" de B.________ AG, ont servi essentiellement à l'utilisation de l'avion et non à la vente de celui-ci (cf. détermination de l'Administration fédérale sur le recours au Tribunal de céans, p. 5). Pour ce motif aussi, la vente en question ne saurait donner droit à la déduction de l'impôt préalable litigieux.
8.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 LTF) et n'a pas droit à des dépens (cf. art. 68 LTF a contrario).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 20'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I.
Lausanne, le 28 juin 2012
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Zünd
Le Greffier: Vianin