Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
1B_551/2012
Arrêt du 10 octobre 2012
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, Karlen et Chaix.
Greffier: M. Rittener.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Kathrin Gruber, avocate,
recourant,
contre
Ministère public de l'arrondissement de Lausanne,
p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
Objet
refus de remise en liberté provisoire,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 3 septembre 2012.
Faits:
A.
A.________, ressortissant portugais interdit d'entrée en Suisse, a été arrêté une première fois le 17 novembre 2010, dans le cadre d'une instruction ouverte sur plainte de son ex-amie B.________. Conduite par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le Ministère public), cette procédure avait pour objet des voies de fait, menaces, tentative de contrainte, dommages à la propriété, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur les étrangers. Le prévenu a été remis en liberté le 21 janvier 2011. Le 7 février 2011, B.________ a déposé une nouvelle plainte contre le prénommé pour utilisation abusive d'une installation de télécommunication, tentative de contrainte, tentative de contrainte sexuelle et désagréments causés par la confrontation à un acte d'ordre sexuel. Elle a ensuite déclaré vouloir retirer cette plainte le 31 mars 2011. Elle a enfin formulé une nouvelle plainte le 25 mai 2011 pour contrainte, menace et utilisation abusive d'une installation de télécommunication pour des faits survenus en mai 2011.
Le 11 juin 2011, A.________ a été arrêté une nouvelle fois dans le cadre d'une instruction distincte conduite par le Ministère public de l'arrondissement de la Côte pour lésions corporelles simples et infraction à la loi fédérale sur les étrangers. Il lui était alors reproché d'avoir mordu jusqu'au sang la main de B.________. Il a été placé en détention provisoire en raison de risques de fuite et de réitération. Le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud (ci-après: le Tmc) a rejeté une demande de mise en liberté par ordonnance du 13 juillet 2011, confirmée par un arrêt rendu le 21 juillet 2011 par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Statuant sur recours de A.________, le Tribunal fédéral a annulé cet arrêt et renvoyé la cause au Tmc pour qu'il examine si la détention pouvait être remplacée par les mesures de substitution prévues aux art. 237 ss du Code de procédure pénale suisse (CPP; RS 312.0); la détention provisoire risquait en effet de devenir disproportionnée au regard d'une prévention qui se limitait dans ce cas à une morsure et un séjour illégal en Suisse (arrêt 1B_411/2011 du 31 août 2011).
B.
Par ordonnance du 14 septembre 2011, le Tmc a ordonné la libération de A.________ ainsi qu'une mesure de substitution consistant en une interdiction d'entretenir des relations avec B.________. Celle-ci et son père ayant déposé de nouvelles plaintes contre le prénommé en novembre et décembre 2011, l'enquête a été reprise. Les causes susmentionnées ont été jointes et leur instruction a été confiée au Ministère public de l'arrondissement de Lausanne.
Le 22 avril 2012, la nouvelle amie de A.________, C.________, a déposé une plainte contre ce dernier en lui reprochant notamment une tentative d'étranglement. L'intéressé a été appréhendé le jour même. Le 25 avril 2012, le Tmc a ordonné une nouvelle fois sa mise en détention provisoire pour une durée de trois mois, en retenant l'existence de risques de fuite, de collusion et de réitération. Par ordonnance du 18 juillet 2012, il a prolongé cette détention pour trois mois supplémentaires. Le 15 août 2012, le prénommé a présenté une demande de mise en liberté, que le Tmc a rejetée par ordonnance du 23 août 2012, considérant qu'aucune mesure de substitution n'était à même de parer aux risques précités. Le Tribunal cantonal a rejeté le recours formé contre cette ordonnance par arrêt du 3 septembre 2012. Il a considéré en substance qu'il existait des charges suffisantes contre A.________ et que le maintien en détention était justifié par un risque concret de récidive qu'aucune mesure de substitution ne pourrait pallier, le principe de proportionnalité étant en outre respecté.
C.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer cet arrêt en ce sens que sa libération immédiate est ordonnée, subsidiairement de renvoyer la cause au Tmc pour qu'il prononce une mesure de substitution. Il requiert en outre l'octroi de l'assistance judiciaire. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer. Le recourant a renoncé à présenter des observations complémentaires.
Considérant en droit:
1.
Selon l'art. 78 LTF, le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions rendues en matière pénale, dont font partie les décisions relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP (ATF 137 IV 22 consid. 1 p. 23). Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, l'accusé a qualité pour agir. Pour le surplus, le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF.
2.
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst. ), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité ( art. 36 al. 2 et 3 Cst. ; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH; arrêt 1B_63/2007 du 11 mai 2007 consid. 3 non publié in ATF 133 I 168). Le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des faits, revue sous l'angle restreint des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF (ATF 135 I 71 consid. 2.5 p. 73 s. et les références).
3.
Le recourant admet que les charges sont suffisantes mais il remet en question l'existence d'un risque de récidive.
3.1 Aux termes de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, la détention provisoire peut être ordonnée lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu "compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre". Selon la jurisprudence, il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation du risque de récidive: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le pronostic est très défavorable et si les délits dont l'autorité redoute la réitération sont graves (ATF 137 IV 13 consid. 4.5 p. 21; 135 I 71 consid. 2.3 p. 73; 133 I 270 consid. 2.2 p. 276 et les arrêts cités). Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3-4 p. 18 ss; cf. arrêt 1B_133/2011 du 12 avril 2011 consid. 4.7). Le risque de récidive peut également se fonder sur les infractions faisant l'objet de la procédure pénale en cours, si le prévenu est fortement soupçonné - avec une probabilité confinant à la certitude - de les avoir commises (ATF 137 IV 84 consid. 3.2 p. 86 et les références citées).
3.2 En l'occurrence, le Tribunal cantonal relève que le recourant a été condamné à cinq reprises entre novembre 2002 et mars 2010, notamment pour lésions corporelles simples, injure, menaces, contrainte, violation de domicile, infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et à la loi fédérale sur les étrangers. Les détentions provisoires qu'il a subies en 2010 et 2011 ne l'ont pas dissuadé de commettre de nouvelles infractions, une nette progression dans la perpétration de celles-ci étant en outre perceptible dans le cadre la présente procédure. L'intéressé minimise les faits qu'il reconnaît et ses déclarations dénotent une absence de prise de conscience, nonobstant les remords qu'il a pu exprimer. Le Tribunal cantonal en conclut que le risque de récidive est concret, les infractions dont la réitération est redoutée étant en outre de nature à compromettre sérieusement la sécurité d'autrui.
Le recourant ne remet pas en cause cette appréciation de façon convaincante. Il minimise ses actes en les assimilant à de "simples disputes de couple" et répète qu'il est "désolé" et "fondamentalement gentil", ce qu'aucun élément du dossier ne vient corroborer. Quoi qu'il en soit, même si toutes les accusations portées contre le recourant ne sont pas démontrées ou reconnues, il est établi à ce stade qu'il a mordu jusqu'au sang la main de B.________ et qu'il a serré le cou de C.________ jusqu'à lui fait perdre connaissance, ce qui suffit, eu égard aux antécédents précités et à l'impulsivité manifestée à maintes reprises par l'intéressé, à faire redouter la commission d'infractions graves susceptibles de compromettre sérieusement la sécurité d'autrui au sens de l'art. 221 al. 1 let. c CPP. L'appréciation de l'instance précédente peut donc être confirmée sur ce point.
4.
Pour le surplus, le recourant allègue que la durée de la détention provisoire viole le principe de proportionnalité et il sollicite sa libération moyennant une mesure de substitution consistant à lui interdire d'approcher B.________ et C.________. Cette dernière requête peut être écartée d'emblée, le recourant ayant démontré qu'il n'était pas apte à respecter une telle injonction. Cette mesure n'est en outre pas suffisante au regard de la gravité des actes redoutés et des risques encourus par les victimes potentielles. S'agissant de la durée de la détention, les trois périodes de détention provisoire subies par le recourant atteignent à ce jour environ dix mois et demi. Mis en cause notamment pour mise en danger de la vie d'autrui, lésions corporelles simples, voies de fait, tentative de contrainte sexuelle, menaces, infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et à la loi fédérale sur les étrangers, le recourant encourt une peine dépassant la durée de la détention subie à ce jour. De plus, la procédure ne devrait en principe pas se prolonger au-delà de la durée admissible, le délai pour déposer le rapport d'expertise psychiatrique étant arrivé à échéance le 15 septembre 2012 et l'essentiel des moyens de preuve envisageables ayant apparemment été administrés. Cela étant, il conviendra de veiller à ce que la procédure ne se prolonge pas inutilement et à ce que le jugement du prévenu intervienne dans un délai raisonnable.
5.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Dès lors que le recourant est dans le besoin et que l'on peut admettre que ses conclusions n'étaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Kathrin Gruber en qualité d'avocate d'office et de fixer d'office ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Kathrin Gruber est désignée comme défenseur d'office du recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs.
3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
4.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, par le Ministère public central du canton de Vaud, et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
Lausanne, le 10 octobre 2012
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Fonjallaz
Le Greffier: Rittener