BGer 5A_934/2012 |
BGer 5A_934/2012 vom 12.03.2013 |
Bundesgericht
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Tribunal fédéral
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Tribunale federale
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{T 0/2}
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5A_934/2012
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Arrêt du 12 mars 2013
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IIe Cour de droit civil
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Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président,
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Hohl et Herrmann.
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Greffier: M. Braconi.
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Participants à la procédure
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A.________,
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recourant,
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contre
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B.________,
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intimé,
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Office des poursuites de Genève,
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rue du Stand 46, 1204 Genève.
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Objet
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invalidation d'un contrat de vente (réalisation),
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recours contre la décision de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève du 6 décembre 2012.
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Faits:
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A.
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A.a Dans le cadre de poursuites dirigées contre B.________, l'Office des poursuites de Genève a saisi le 1er mars 2011 un véhicule électrique estimé à 4'000 fr.; selon le procès-verbal de saisie, ce véhicule est neuf, sans numéro de châssis ni plaques.
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L'office a reçu plusieurs offres d'achat de gré à gré dudit véhicule, la dernière ayant été présentée le 23 janvier 2012 par A.________ pour le prix de 6'500 fr.; le 12 juin suivant, le débiteur a donné son accord à cette opération.
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Le 21 juin 2012, l'office a établi un procès-verbal aux termes duquel les créanciers de la série n° xxxx et le débiteur se sont accordés pour vendre de gré à gré le véhicule électrique à A.________ pour le prix de 6'500 fr.; cet acte indique, en particulier, que le bien est vendu sans aucune garantie et que sa prise de possession n'aurait lieu que lors du paiement complet du prix. L'acquéreur a signé le procès-verbal le 28 juin 2012, puis réglé le prix le 5 juillet 2012; il a pris possession du véhicule le 11 juillet 2012.
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A.b Dès le 16 juillet 2012, A.________ s'est adressé à l'office pour formuler diverses récriminations (i.e. absence d'entretien du véhicule et de documents d'immatriculation); le 31 août 2012, il a déclaré invalider la vente pour erreur essentielle. Le 4 septembre 2012, l'office a avisé le prénommé qu'il ne pouvait donner suite à sa demande d'invalidation, car le véhicule avait été vendu sans aucune garantie, de telle sorte qu'il appartenait à l'acquéreur de s'informer sur l'état du véhicule et sur ses possibilités d'immatriculation avant la conclusion du contrat. Après un échange de correspondances, A.________ a écrit le 5 octobre 2012 à l'office pour confirmer l'invalidation du contrat de vente et réclamer le remboursement du prix moyennant la restitution du véhicule. Dans sa réponse du 16 octobre suivant, l'office a «confirm[é] les termes de sa précédente lettre, dans laquelle, [il lui] a rappelé que, dans la mesure où le procès-verbal de vente indiquait que le bien réalisé était attribué sans aucune garantie, l'invalidation de la vente n'était pas justifiée».
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B.
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Le 22 octobre 2012, A.________ a porté plainte contre le courrier de l'office du 16 octobre 2012; il a conclu à l'annulation de la décision ayant refusé l'invalidation de la vente de gré à gré, ainsi qu'à la constatation de l'invalidation de celle-ci et au remboursement du prix d'achat, avec intérêts à 5% dès le 5 juillet 2012.
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Statuant le 6 décembre 2012, la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève a déclaré la plainte irrecevable.
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C.
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Par mémoire du 17 décembre 2012, le plaignant exerce un recours en matière civile; il demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision de l'autorité cantonale de surveillance, de constater que la vente de gré à gré a été valablement invalidée et d'ordonner à l'office de rembourser la somme de 6'500 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 juillet 2012.
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Des observations n'ont pas été requises.
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Considérant en droit:
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1.
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Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 2 let. a LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF; ATF 133 III 350 consid. 1.2) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF, en relation avec l'art. 19 LP) par une autorité de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF; MARCO LEVANTE, in: Basler Kommentar, SchKG I, 2e éd., 2010, n° 19 ad art. 19 LP); il est ouvert sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF); le plaignant, dont les conclusions ont été rejetées par l'autorité précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
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2.
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2.1 Après avoir laissé indécise la question de savoir si la plainte avait été déposée dans le délai de l'art. 132a al. 2 LP, l'autorité précédente a considéré qu'elle était de toute manière tardive en tant qu'elle visait le refus d'invalider la vente de gré à gré, dès lors qu'elle était dirigée à l'encontre d'une «décision de confirmation», l'office ayant maintenu sa décision du 4 septembre 2012. La conclusion serait la même si la lettre du 16 octobre 2012 (i.e. mesure attaquée) était qualifiée de «nouvelle décision», dans la mesure où aucun fait nouveau, de nature à modifier la décision antérieure, n'est intervenu dans l'intervalle. Au demeurant, aucun cas de nullité, au sens de l'art. 22 al. 1 LP, n'est réalisé, l'erreur essentielle (art. 24 al. 1 ch. 4 CO) ne pouvant conduire qu'à l'annulation sur plainte de la vente.
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L'autorité précédente a estimé que, même recevable, la plainte aurait dû être rejetée: le plaignant devait s'assurer, lors de la conclusion de la vente, que le véhicule en discussion pouvait être immatriculé en Suisse, d'autant qu'il s'agit d'un véhicule peu courant; s'étant abstenu d'éclaircir ce point, l'intéressé ne pouvait plus, de bonne foi, invoquer une erreur essentielle aux fins d'annuler le contrat.
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2.2 Le recourant expose, en bref, que le courrier du 4 septembre 2012 n'était pas une «décision» au sens de l'art. 17 al. 1 LP, mais un simple «avis», qui laissait entendre que la situation n'était pas «figée», puisque des recherches avaient été effectuées auprès du débiteur pour obtenir les documents nécessaires à l'immatriculation du véhicule. Dans ces conditions, l'on ne saurait lui reprocher de n'avoir pas immédiatement saisi l'autorité de surveillance, dès lors que des «démarches étaient en cours [pour] sortir de l'impasse».
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3.
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3.1 La plainte, au sens de l'art. 17 LP, n'est recevable qu'à l'encontre d'une «mesure», c'est-à-dire tout acte d'autorité accompli par l'office en exécution d'une mission officielle dans une affaire concrète; il s'agit là d'un acte matériel qui a pour but la continuation ou l'achèvement de la procédure d'exécution forcée et qui produit des effets externes (parmi l'abondante casuistique: ATF 116 III 91 consid. 1).
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En l'espèce, il ressort des constatations de l'autorité cantonale (art. 105 al. 1 LTF) que, dans sa lettre du 4 septembre 2011, l'office a «rejet[é]» la «demande d'invalidation du contrat de gré à gré», car le véhicule en cause avait été «vendu en l'état, sans aucune garantie», de sorte qu'il incombait à l'acquéreur «de [s']informer sur l'état du véhicule et sur ses possibilités d'immatriculation avant la conclusion du contrat». Au regard des principes qui précèdent, le caractère décisionnel de cette prise de position ne saurait être contesté. Dès lors que le vice du consentement allégué devait être invoqué par la voie de la plainte (art. 132a al. 1 LP; cf. ATF 95 III 21 consid. 1; 79 III 114 consid. 1), ce courrier ne pouvait être compris que dans le sens où l'office estimait que la vente de gré à gré n'était pas susceptible d'invalidation pour cause d'erreur essentielle et manifestait son intention de s'en tenir à la convention litigieuse, étant par ailleurs souligné que la seule déclaration de l'errans n'eût pas suffi à invalider le contrat (cf. ATF 128 III 70 consid. 1b); contrairement à ce que soutient le recourant, l'office ne s'est donc pas borné à émettre un avis ou une déclaration d'ordre général (cf. ATF 116 III 91 consid. 1; 85 III 90 consid. 2). Peu importe, enfin, que sa décision n'indiquait pas les voies de droit; à teneur de l'art. 20a al. 2 ch. 4 LP, une telle obligation échoit aux «autorités cantonales de surveillance», et non à l'office des poursuites ou des faillites (arrêt 5A_65/2012 du 23 janvier 2012, qui se réfère à l'arrêt 7B.75/2006 du 6 juillet 2006 consid. 2.2.2).
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En réalité, la question de savoir si le courrier de l'office constitue ou non une décision sujette à plainte n'apparaît pas déterminante. En vertu de l'art. 132a al. 2 LP, le délai pour déposer plainte contre l'acte de vente de gré à gré court dès que le plaignant a eu connaissance de l'acte de vente attaqué et pouvait connaître le motif de la contestation; ce délai ne court pas dès la conclusion du contrat de vente (i.c. le 21 juin 2012), mais dès le moment où les vices qui affectent celui-ci sont connus du plaignant (ATF 47 III 127 consid. 1). Partant, ce qui est décisif, c'est de savoir si le recourant connaissait les vices ayant motivé sa «demande d'invalidation» de la vente de gré à gré à la date où l'office a refusé d'y donner suite (i.c. le 4 septembre 2012). Une réponse affirmative n'est pas douteuse. Il résulte des faits constatés par la juridiction précédente (art. 105 al. 1 LTF), dont le caractère manifestement inexact - à savoir arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 III 268 consid. 1.2, avec les citations) - n'a pas été démontré (art. 97 al. 1 et 106 al. 2 LTF), que, dans son courrier du 16 juillet 2012 adressé à l'office, l'intéressé s'est plaint que le véhicule n'avait jamais été entretenu depuis qu'il avait été déposé à l'office, qu'il n'avait jamais été immatriculé en Suisse, qu'il ne possédait pas de permis de circulation et que les données techniques étaient absentes de la boîte à gants, et il a réservé expressément «ses droits à l'invalidation de la vente». En tout cas, il faut admettre que le délai a commencé à courir le 31 août 2012, jour où il a déclaré invalider le contrat pour erreur essentielle, faute de la documentation nécessaire à l'immatriculation du véhicule, réservant ses droits au sujet des frais engagés auprès de son garagiste pour le transport, le démontage et la vérification des batteries du véhicule. Au regard de ces faits, la plainte, déposée le 22 octobre 2012, s'avère ainsi largement tardive et devait être écartée pour ce motif déjà.
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3.2 Le délai pour porter plainte est un délai de péremption (ATF 114 III 5 consid. 3; COMETTA/MÖCKLI, in: Basler Kommentar, SchKG I, 2e éd., 2010, n° 50 ad art. 17 LP), dont l'autorité de surveillance doit examiner d'office le respect (ATF 102 III 127 p. 128). Comme l'a rappelé à juste titre la juridiction précédente, la lettre du 16 octobre 2012, par laquelle l'office a confirmé son refus de revoir sa position quant à l'invalidation de la vente, ne fait pas renaître le délai pour porter plainte (ATF 29 I 233 consid. 2; 35 I 208 consid. 1; arrêt 7B.72/1998 du 24 avril 1998 consid. 1, avec les citations). L'objection du recourant, selon laquelle la solution de l'autorité cantonale imposerait au plaignant de se prémunir contre l'irrecevabilité en déposant systématiquement plainte, n'est pas fondée. D'une part, l'intéressé - de son propre aveu - connaissait les prétendus vices de la vente dès le 16 juillet 2012, indépendamment de toute «décision» ultérieure de l'office. D'autre part, le Tribunal fédéral a relevé dans un ancien arrêt que, si l'on peut certes comprendre que la partie qui estime qu'une mesure de l'office est erronée demande à celui-ci de revoir sa position «avant de s'engager immédiatement dans la voie de la plainte», «elle ne saurait prétendre suspendre de la sorte les délais fixés en conformité à la loi»; cette démarche «ne saurait être assimilée à un recours ensuite duquel l'office serait tenu de statuer à nouveau, car la loi n'a pas prévu semblable recours préalablement à la voie de la plainte auprès des autorités de surveillance» (ATF 29 I 233 consid. 2 p. 236). Enfin, comme l'a jugé l'autorité cantonale, le courrier du 16 octobre 2012 ne peut pas être considéré comme une «nouvelle décision» (indépendante), à défaut d'éléments nouveaux qui seraient de nature à modifier l'appréciation antérieure de l'office (ATF 35 I 208 consid. 1; cf. par exemple: ATF 133 III 580 [i.c. question de la prise en compte d'un poste dans le calcul du minimum vital qui se pose - pour la troisième fois - à l'occasion de la formation d'une nouvelle série de créanciers poursuivants au sens de l'art. 110 al. 1 LP]).
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3.3 La tardiveté de la plainte n'est pas opposable au plaignant lorsque la décision attaquée est nulle au sens de l'art. 22 LP (COMETTA/MÖCKLI, ibid., n° 60 et les arrêts cités). L'autorité précédente a retenu que cette éventualité n'était pas réalisée, point que le recourant (avec raison) ne critique pas (art. 42 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.1).
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3.4 Le recours étant rejeté pour le motif qui précède, il devient superflu d'examiner si le motif surérogatoire de la juridiction précédente, tiré de l'absence d'erreur essentielle au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4 CO - aussi critiqué par le recourant (cf. ATF 138 I 97 consid. 4.1.4, avec les arrêts cités) -, enfreint ou non le droit fédéral (cf. ATF 135 III 608 consid. 4.6 et la jurisprudence citée).
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4.
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En conclusion, le présent recours doit être rejeté, aux frais du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté.
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2.
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Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
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3.
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Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office des poursuites de Genève et à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève.
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Lausanne, le 12 mars 2013
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Au nom de la IIe Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président: von Werdt
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Le Greffier: Braconi
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