BGer 2C_291/2013
 
BGer 2C_291/2013 vom 26.11.2013
2C_291/2013
2C_292/2013
{T 0/2}
 
Arrêt du 26 novembre 2013
 
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Zünd, Président,
Seiler, Aubry Girardin, Donzallaz et Stadelmann.
Greffière: Mme Vuadens.
Participants à la procédure
Hôtel X._________ S.A.,
représenté par Société fiduciaire Revisiana SA,
recourant,
contre
Administration fiscale cantonale genevoise.
Objet
2C_291/2013
Impôt cantonal et communal sur le bénéfice 2009,
2C_292/2013
Impôt fédéral sur le bénéfice 2009,
recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 19 février 2013.
 
Faits:
A. La société anonyme Hôtel X.________ SA (ci-après: la Société) exploite un hôtel à Genève, dont elle est propriétaire des murs et du fonds de commerce. Elle est détenue à 50% par la société anonyme Y.________ (Suisse) SA.
B. Dans deux décisions de taxation du 23 décembre 2010 concernant l'impôt cantonal et communal 2009 et l'impôt fédéral direct 2009, l'Administration fiscale cantonale genevoise (ci-après: l'Administration fiscale) a procédé à une reprise sur le bénéfice déclaré de la Société pour un montant de 5'850 fr. Selon l'Administration fiscale, la Société aurait dû appliquer un taux d'intérêt de 3.941% sur le prêt accordé à Y.________ (Suisse) SA. Calculé sur une créance moyenne de 591'743 fr., un intérêt de 23'321 fr. aurait donc dû être pris en considération. Partant, la différence entre ce dernier montant et l'intérêt comptabilisé par la Société (17'471 fr.), soit 5'850 fr., devait être rajoutée à son bénéfice imposable pour l'année fiscale 2009.
C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Hôtel X.________ SA conclut, avec suite de frais et dépens, à ce que le Tribunal fédéral constate que ses "placements de trésorerie" auprès d'un actionnaire sont financés au moyen de fonds propres et qu'en conséquence, la reprise querellée n'est pas justifiée. Elle conclut également à ce que le Tribunal fédéral demande à l'Administration fiscale d'annuler sa reprise et d'arrêter le bénéfice imposable pour l'année 2009 à 685'413 fr., soit au montant déclaré, en matière d'impôt cantonal et communal comme en matière d'impôt fédéral direct, subsidiairement à ce que l'Administration fiscale limite la reprise à 26.202% de son montant total, soit à 1'533 fr.
D. Le Tribunal fédéral a statué en audience publique le 26 novembre 2013.
 
Considérant en droit:  
Recevabilité
1. La Cour de justice a rendu une seule décision valant tant pour l'impôt fédéral direct que pour l'impôt cantonal et communal, ce qui est admissible, dès lors que la question juridique à trancher est réglée de la même façon en droit fédéral et dans le droit cantonal harmonisé (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 p. 262 s.; arrêt 2C_60/2013 et 2C_61/2013 du 14 août 2013 consid. 1). Dans ces circonstances, on ne peut reprocher à la recourante d'avoir, dans son recours au Tribunal fédéral, formé les mêmes griefs et pris des conclusions valant pour les deux catégories d'impôt (ATF 135 II 260 consid. 1.3.2 p. 263 s.; arrêt 2C_60/2013 et 2C_61/2013 du 14 août 2013 consid. 1).
 
2.
2.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 139 V 42 consid. 1 p. 44).
2.2. Sur le fond, l'arrêt attaqué concerne la détermination du bénéfice imposable de la recourante pour la période fiscale 2009, au niveau de l'impôt fédéral direct et de l'impôt cantonal et communal sur le bénéfice. Comme ce domaine relève du droit public et qu'aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est réalisée, la voie du recours en matière de droit public est ouverte en application de l'art. 82 let. a LTF. L'art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11) confirme l'existence de cette voie de droit pour l'impôt fédéral direct; s'agissant des impôts cantonal et communal, l'imposition du bénéfice étant une matière harmonisée aux art. 24 ss de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14), la voie du recours en matière de droit public est aussi réservée à l'art. 73 al. 1 LHID.
2.3. La recourante ne cite aucune disposition légale qui aurait été violée. Elle reproche seulement à l'autorité cantonale d'avoir appliqué la lettre-circulaire 2009 de manière absolue. Dès lors que l'on comprend, à la lecture du recours, que la recourante se plaint de ce que l'application stricte de la lettre-circulaire 2009 aboutit à un résultat qui n'est pas conforme aux dispositions figurant dans la LIFD, la LHID et la loi genevoise sur l'imposition des personnes morales (LIPM; RSG D 3 15) relatives aux distributions dissimulées de bénéfice et qui concrétisent le droit harmonisé, le recours répond aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF (cf. ATF 134 V 53 consid. 3.3. p. 60; 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s.; arrêts 5A_279/2013 du 10 juillet 2013 consid. 1.3; 2F_24/2012 du 21 juin 2013 consid. 1.2). Il y a donc lieu d'entrer en matière, étant précisé que le Tribunal fédéral examine d'office le droit fédéral (art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF) et le droit cantonal harmonisé (ATF 134 II 207 consid. 2 p. 210; arrêt 2C_386/2012 et 2C_387/2012 du 16 novembre 2012 consid. 3.5).
2.4. La recourante conclut à ce que le Tribunal fédéral demande à l'Administration fiscale d'annuler la reprise qu'elle a effectuée et d'arrêter le bénéfice imposable pour l'année 2009 au montant déclaré. Subsidiairement, elle conclut à ce que le Tribunal fédéral limite la reprise à 26.202% du montant de la reprise totale, soit à 1'533 fr.
Ces conclusions ont un caractère réformatoire. Le Tribunal fédéral a jugé que de telles conclusions étaient recevables également en ce qui concerne le droit cantonal harmonisé, car l'art. 73 al. 3 LHID, qui prévoit qu'en cas d'acceptation du recours, le Tribunal fédéral annule la décision attaquée et renvoie l'affaire pour nouvelle décision à l'autorité inférieure, doit céder le pas devant l'art. 107 al. 2 LTF qui confère au Tribunal fédéral un pouvoir général de réforme quel que soit le recours interjeté devant lui (cf. ATF 134 II 207 consid. 1 p. 209; arrêt 2C_83/2009 du 8 mai 2009 consid. 1.3).
2.5. Selon un principe général de procédure, les conclusions en constatation de droit ne sont recevables que lorsque des conclusions condamnatoires ou formatrices sont exclues. Sauf situations particulières, les conclusions constatatoires ont donc un caractère subsidiaire (cf. ATF 135 I 119 consid. 4 p. 122; arrêt 2C_199/2010 et 2C_202/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.3 non publié in ATF 137 II 383; arrêt 1B_129/2013 du 26 juin 2013 consid. 2.2). Dans la mesure où le recourant conclut, parallèlement à l'annulation de sa reprise et à la fixation de son bénéfice imposable à 685'413 fr., à ce qu'il soit dit que la reprise d'un montant d'intérêts de 5'850 fr. n'est pas justifiée et que ses "placements de trésorerie" sont financés au moyen de fonds propres, elle formule des conclusions constatatoires qui sont irrecevables.
2.6. Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Par ailleurs, il a été interjeté par la contribuable destinataire de la décision attaquée, qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 89 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière.
 Objet du litige
3. Le litige porte sur le point de savoir si la recourante a procédé à une distribution dissimulée de bénéfice en octroyant un prêt à son actionnaire à un taux d'intérêt de 2,5% en 2009.
3.1. L'autorité attaquée confirme l'existence d'une distribution dissimulée de bénéfice (ou prestation appréciable en argent) en application de la lettre-circulaire du 3 février 2009 de l'Administration fédérale des contributions concernant les taux d'intérêt 2009 déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent (ci-après: la lettre-circulaire 2009, publiée in Archives 77, p. 645 ss, consultable à l'adresse http://www.estv.admin.ch/bundessteuer/dokumentation/00242/00383/ index.html?lang=fr). Cette directive classe les prêts ("avances") accordés en francs suisses aux actionnaires ou aux associés de la manière suivante:
au minimum:
 2 ½ %
+  ¼ - ½ % *
 2 ½ %
 * 
- jusqu'à et y compris
CHF 10 millions: ½ %
- au-dessus de
CHF 10 millions: ¼ %
Comme la recourante présente à son bilan des capitaux étrangers portant charge d'intérêts, le prêt qu'elle a accordé à son actionnaire a correctement été classé par l'Administration fiscale dans la catégorie des avances "financées au moyen de capitaux étrangers" (chiffre 1.2 de la lettre-circulaire 2009). En conséquence, le taux d'intérêt déterminant pour l'existence d'une prestation appréciable en argent se calcule par référence aux intérêts payés par la recourante elle-même ("propre charges"), à quoi s'ajoute un pourcentage de 1/4% [recte: 1/2%], le prêt accordé étant inférieur à 10 millions de francs. Le taux d'intérêt déterminant ainsi calculé s'élevant à 3,941% en l'espèce, la différence entre ce dernier taux et le taux effectivement appliqué par la recourante (2,5%) est dès lors constitutive, selon la Cour de justice, d'une prestation appréciable en argent.
3.2. La recourante soutient qu'il faut appliquer de façon nuancée la lettre-circulaire 2009 dans les cas qu'elle qualifie d'"intermédiaires" qui concernent des sociétés qui, comme elle, sont débitrices d'intérêts sur des capitaux étrangers et qui présentent par ailleurs des fonds propres suffisants pour financer un prêt à un actionnaire. Elle relève que ses dettes sont de nature hypothécaire et que le bénéfice qu'elle a réalisé en 2009 lui a permis de payer l'entier de la charge d'intérêt y afférente. Elle en déduit que le taux d'intérêt de 2,5% prévu par la lettre-circulaire 2009 pour les avances financées au moyen des fonds propres doit s'appliquer dans son cas, nonobstant l'existence de capitaux étrangers à son bilan. Elle ajoute que si elle avait placé les fonds prêtés à son actionnaire auprès d'un établissement bancaire dans les mêmes conditions, soit, selon ses allégations, à vue et retirables en totalité en tout temps, ce placement n'aurait été rémunéré qu'à un taux d'intérêt de 0,25%, de sorte que la comptabilisation d'un intérêt de 2,5% l'avait enrichie, ce qui démontre également l'inexistence d'une prestation appréciable en argent.
 Impôt fédéral direct
4. Aux termes de l'art. 57 LIFD, l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Selon l'art. 58 al. 1 LIFD, le bénéfice net imposable comprend notamment le solde du compte de résultats (let. a), ainsi que tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats, qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l'usage commercial (let. b). Au nombre de ces prélèvements figurent les distributions dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial (let. b 5ème tiret).
4.1. Selon la jurisprudence, il y a distribution dissimulée de bénéfice lorsque quatre conditions cumulatives sont remplies: 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près; 3) elle n'aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers; 4) la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que les organes de la société auraient pu se rendre compte de l'avantage qu'ils accordaient (cf. par exemple ATF 138 II 57 consid. 2.2 p. 59 s.; 131 II 593 consid. 5.1 p. 607; 119 Ib 116 consid. 2 p. 119; arrêt 2C_394/2013 du 24 octobre 2013 consid. 5.1). Il convient ainsi d'examiner si la prestation aurait été accordée dans la même mesure à un tiers étranger à la société, soit si la transaction a respecté le principe de pleine concurrence ("Dealing at arm's length"; ATF 138 II 545 consid. 3.2 p. 549; 138 II 57 consid. 2.2 p. 60 et les références citées, in RDAF 2012 II p. 299; arrêt 2C_644/2013 du 21 octobre 2013 consid. 3.1). Le droit fiscal suisse ne connaissant pas, sauf disposition légale expresse, de régime spécial pour les groupes de sociétés, les opérations entre sociétés d'un même groupe doivent également intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence. En conséquence, il n'est pas pertinent que la disproportion d'une prestation soit justifiée par l'intérêt du groupe (ATF 110 Ib 127 consid. 3 a/aa p. 132; arrêts 2C_834/2011 du 6 juillet 2012 consid. 2.3; 2A.588/2006 du 19 avril 2007 consid. 4.2).
4.2. La mise en oeuvre du principe de pleine concurrence suppose l'identification de la valeur vénale du bien transféré ou du service rendu. Lorsqu'il existe un marché libre, les prix de celui-ci sont déterminants et permettent une comparaison effective avec les prix appliqués entre sociétés associées (arrêt 2A.588/2006 du 19 avril 2007 consid. 4.2 et les références citées; Peter Brülisauer/Flurin Poltera, in Kom-mentar zum Schweizerischen Steuerrecht I/2a, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer (DBG), Art. 1-82, 2ème édition, 2008, n° 102 ad art. 58; Robert Danon, in Commentaire romand, Impôt fédéral direct, 2008, n° 110 ad art. 57-58; Reto Heuberger, Die verdeckte Gewinnausschüttung aus Sicht des Aktienrechts und des Gewinnsteuerrechts, 2001, p. 194). S'il n'existe pas de marché libre permettant une comparaison effective, il convient alors de procéder selon la méthode de la comparaison avec une transaction comparable (ou méthode du prix comparable), qui consiste à procéder à une comparaison avec le prix appliqué entre tiers dans une transaction présentant les mêmes caractéristiques (Peter Brülisauer/Flurin Poltera, in op. cit., n° 103 ad art. 58; Reto Heuberger, op. cit. p. 195; Robert Danon, in op. cit., n° 111 ad art. 57-58), soit en tenant compte de l'ensemble des circonstances déterminantes (ATF 138 II 57 consid. 2.2 p. 60 et les références citées, in RDAF 2012 II p. 299). A défaut de transaction comparable, la détermination du prix de pleine concurrence s'effectue alors selon d'autres méthodes, telles que la méthode du coût majoré ("cost plus") ou celle du prix de revente (Robert Danon, in op. cit., n° 112 ad art. 57-58; Reto Heuberger, op. cit. p. 195), qui font partie, à côté de la méthode de la transaction comparable, des méthodes traditionnelles fondées sur les transactions selon la classification opérée par l'OCDE en matière de prix de transfert (OCDE, Principes applicables en matière de prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales, édition 2010, § 2.12 ss). La méthode du coût majoré consiste en particulier à déterminer les coûts supportés par la société qui fournit la prestation, à quoi s'ajoute une marge appropriée de manière à obtenir un bénéfice approprié compte tenu des fonctions exercées et des conditions du marché (OCDE, op. cit., § 2.39 ss).
5. Lorsqu'une société anonyme accorde un prêt à son actionnaire, ce prêt ne respecte pas le principe de pleine concurrence (indépendamment de la problématique du prêt simulé, cf. à cet égard notamment ATF 138 II 57 consid. 3 p. 60 ss, in RDAF 2012 II 299; PETER LOCHER, in Kommentar zum DBG, II. Teil, 2004, n° 114 ad art. 58; BRÜLISAUER/ FLURIN POLTERA, in op. cit., n° 171 ad art. 58) si le taux d'intérêt appliqué est inférieur au taux du marché ou s'il est accordé sans intérêt. La prestation appréciable en argent se mesure alors par la différence entre le taux d'intérêt conforme au principe de pleine concurrence et le taux effectivement appliqué (ATF 138 II 545 consid. 3.2; arrêts 2C_788/2010 du 18 mai 2011 consid. 4.4; 2C_557/2010 du 4 novem- bre 2010 consid. 3.2.1, in RF 66/2011, p. 62, commenté par ADRIANO MARANTELLI, in Archives 80, p. 522; arrêts du 8 octobre 1965 consid. 1, in Archives 35, p. 209; du 30 novembre 1956 consid. 1e, in Archives 26, p. 89; du 2 avril 1957 consid. 2, in Archives 26, p. 137; du 8 décembre 1950, in Archives 19, p. 403).
5.1. L'Administration fédérale des contributions édicte chaque année des directives sur les taux d'intérêt déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent, publiées sous la forme de lettres-circulaires, destinées à simplifier la mise en oeuvre du principe de pleine concurrence en relation avec les taux d'intérêt de prêts conclus en francs suisses entre des sociétés et leurs actionnaires ou associés (ou leurs proches) (Robert Danon, in op. cit., n° 113 ad art. 57-58).
5.1.1. La lettre-circulaire 2009, applicable à la période en cause, prévoit - comme les versions précédentes et postérieures de cette directive - des taux d'intérêt déterminants minimums en cas de prêts accordés aux actionnaires ou associés (chiffre 1) et des taux d'intérêt déterminants maximums en cas de prêts accordés par les actionnaires ou associés (ou leurs proches) (chiffre 2).
5.1.2. Faisant partie des instructions et directives internes à l'administration, la lettre-circulaire 2009 n'appartient pas au droit fédéral. Elle ne lie donc ni le contribuable, ni l'autorité de taxation, ni le Tribunal fédéral (ATF 138 II 536 consid. 5.4.3 p. 543; 133 II 305 consid. 8.1 p. 315; arrêt 2C_116/2013 et 2C_117/2013 du 2 septembre 2013 consid. 3.7.1). Toutefois, dès lors qu'elle tend à une application uniforme et égale du droit, il ne convient de s'en écarter que dans la mesure où elle ne traduit pas une concrétisation convaincante des dispositions légales applicables (arrêts 2C_95/2011 du 11 octobre 2011 consid. 2.3, in RDAF 2012 II p. 72; 2C_103/2009 du 10 juillet 2009 consid. 2.2, in RF 64/2009, p. 906).
6. L'application du taux d'intérêt minimum fixe prévu au chiffre 1.1 de la lettre-circulaire 2009 suppose la réalisation de deux conditions cumulatives: il faut ainsi que le prêt ait été financé au moyen de fonds propres et qu'aucun intérêt ne soit dû par la société prêteuse sur des capitaux étrangers. En conséquence, il suffit qu'il existe des capitaux étrangers portant charge d'intérêt au bilan de la société prêteuse pour que le taux d'intérêt minimum se calcule conformément au chiffre 1.2, indépendamment de la question de savoir si ces capitaux étrangers ont effectivement servi à mobiliser les fonds nécessaires à l'octroi du prêt. La lettre-circulaire 2009 postule ainsi implicitement que la société prêteuse a financé le prêt accordé à son actionnaire ou associé au moyen d'un emprunt et que pour respecter le principe de pleine concurrence, une telle opération doit conduire à la réalisation d'un bénéfice. C'est la raison pour laquelle le taux d'intérêt minimum se calcule dans ce cas non pas par référence à un taux fixe, comme le prévoit le chiffre 1.1, mais par référence aux "propres charges" de la société prêteuse, à quoi s'ajoute une marge de 0.5% ou de 0.25% selon le montant du prêt, de manière à permettre la réalisation d'une marge bénéficiaire.
6.1. Le Tribunal fédéral s'est prononcé à quelques reprises sur les taux d'intérêt de prêts entre sociétés et actionnaires ou leurs proches. Dans un arrêt ancien, qui concernait un prêt qu'une société avait accordé sans intérêt à son actionnaire principal, il a considéré que le taux d'intérêt de 4% retenu par l'Administration fédérale des contributions comme le taux d'intérêt que la société aurait dû appliquer au prêt était convenable, car proche du taux d'intérêt exigé des banques suisses pour des crédits accordés sans garantie durant la période considérée (Archives 19, p. 403). Dans un autre arrêt ancien, qui concernait également un prêt qu'une société avait accordé sans intérêt à son actionnaire principal, il a confirmé le taux d'intérêt de 5% retenu par l'Administration fédérale des contributions comme taux d'intérêt qui aurait dû être appliqué par la société prêteuse, en précisant qu'il s'agissait là d'un taux "normal", qui était prévu notamment à l'art. 73 du Code suisse des obligations (Archives 26, p. 137 consid. 3). Plus récemment, le Tribunal fédéral a confirmé la méthode appliquée par l'Administration fédérale des contributions pour fixer le taux d'intérêt conforme au principe de pleine concurrence dans le cas d'un prêt accordé en dollars américains par une société à sa société grand-mère américaine, qui avait consisté à comparer les taux d'intérêt effectivement appliqués avec les taux moyens des obligations américaines durant les périodes considérées, cette comparaison étant justifiée, selon le Tribunal fédéral, dès lors que les prêts entre sociétés associées doivent être qualifiés de prêts à long terme d'un point de vue fiscal (arrêt 2A.355/2004 du 20 juin 2005 consid. 3.3 et 3.4, in RF 60/2005, p. 963, commenté par Peter Gurtner, in Archives 76, p. 53).
6.2. La détermination du taux d'intérêt d'un prêt conforme au principe de pleine concurrence dépend de multiples facteurs, dont, notamment, le montant et la durée du prêt (cf. à cet égard l'arrêt 2A.355/2004 du 20 juin 2005 consid. 3.3, in RF 60/2005, p. 963), sa nature, son objet (crédit commercial, prêt à objet général, crédit immobilier, etc.), la garantie dont le prêt est assorti ou non et la surface financière de l'emprunteur. La situation financière de la société prêteuse et la source du financement du prêt sont également des éléments qui doivent être pris en considération. Dans sa jurisprudence, le Tribunal fédéral ne s'est toutefois pas intéressé à la question de la situation financière de la société prêteuse ni à celle du financement du prêt pour déterminer le taux d'intérêt conforme au principe de pleine concurrence. Pourtant, ces éléments sont importants, dès lors qu'une société qui est elle-même endettée n'a en principe pas de raison économique de prêter des fonds à son actionnaire ou à son associé plutôt que d'affecter ces fonds au remboursement de sa dette, à moins que cette opération ne s'avère bénéficiaire. Or, le chiffre 1.2 de la lettre-circulaire 2009 permet précisément de vérifier que l'opération permet à la société de dégager une marge bénéficiaire, puisque le taux d'intérêt minimum du prêt accordé à l'actionnaire ou à l'associé doit être supérieur de 0.25% ou de 0.5% au taux d'intérêt payé par la société sur ses propres charges d'intérêt.
6.3. Le chiffre 1.2 postule l'existence d'un lien de connexité économique entre la propre dette de la société, d'une part, et le prêt à l'actionnaire, d'autre part. Cette solution est, certes, très schématique. Un tel schématisme est toutefois admissible en l'espèce, dans la mesure où la méthode est prévue dans une directive de l'administration et non pas dans une norme qui aurait un effet contraignant. En effet, l'irrespect du taux découlant de l'application du chiffre 1.2 ne crée qu'un indice d'existence de prestation appréciable en argent, le contribuable conservant toujours la possibilité de prouver que le taux inférieur qu'il a appliqué respecte néanmoins le principe de pleine concurrence (cf. sur ce point ci-dessous consid. 7).
6.4. Le Tribunal fédéral a considéré, dans un arrêt du 25 novembre 1983 (in Archives 53, p. 84, in RDAF 1985, p. 127) qui se référait à l'ATF 107 Ib 325 du 11 décembre 1981 (arrêt dit "Bellatrix"), que le taux d'intérêt déterminant pour un prêt accordé par un actionnaire à sa société fille ne pouvait pas être fixé en fonction de l'exigence d'un rendement minimal. Il a ainsi jugé que le chiffre 2.2 de la directive de l'Administration fédérale des contributions qui était applicable à la période fiscale en cause (éditée sous la forme d'une notice sur les taux d'intérêts déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent annexée à la Circulaire du 6 août 1971 et publiée in Archives 40, p. 195) n'était pas décisif pour apprécier l'existence et la mesure d'une prestation appréciable en argent, dès lors qu'il prévoyait qu'en cas de crédit d'exploitation accordé par un actionnaire à une société holding ou de gérance de fortune, le taux d'intérêt dû en contrepartie de ce crédit devait correspondre au maximum au taux moyen du rendement des investissements de la société holding ou de gérance de fortune, moins 0,25% à 0,5%, de manière à ce que l'opération permette de dégager une marge bénéficiaire (cf. également Jacques-André Reymond, Dividendes cachés et rendement minimum des Sociétés anonymes, in Société anonyme suisse 1983 p. 14 s., p. 17, Markus Rudolf Neuhaus, Die Besteuerung des Aktienertrages, 1988, p. 125 s., p. 135 s.).
6.5. En l'espèce, la recourante présentait à son bilan 2009 des emprunts hypothécaires pour un montant total de 1'450'000 fr., qui ont occasionné une charge d'intérêt représentant un taux global de 3.441% durant l'exercice 2009. Le taux d'intérêt minimum applicable au prêt qu'elle a accordé à son actionnaire se calcule donc en application du chiffre 1.2 de la lettre-circulaire et s'élève, s'agissant d'un prêt ne dépassant pas 10 millions de francs, à 3.941% (3.441% + 0.5%), ainsi que l'a correctement constaté l'instance attaquée. Ce mode de calcul ne permet pas d'envisager une réduction proportionnelle du montant de la reprise en fonction du taux d'endettement de la société, comme le demande subsidiairement la recourante.
7. Les taux d'intérêt déterminants fixés par l'Administration fédérale des contributions ne constituent que des "safe harbour rules". En conséquence, l'irrespect de ces taux ne crée qu'une présomption réfragable d'existence de prestation appréciable en argent, qui renverse toutefois le fardeau de la preuve en défaveur de la société contribuable, cette dernière devant démontrer que la prestation octroyée est néanmoins conforme au principe de pleine concurrence (arrêt 2C_557/2010 du 4 novembre 2010 consid. 3.2.3, in RF 66/2011, p. 62; Peter Brülisauer/ Flurin Poltera, in op. cit., n° 104 ad art. 58; Robert Danon, in op. cit., n° 114 et 155 ad art. 57-58; Martin Zweifel/Silvia Hunziker, Steuerverfahrensrecht, Beweislast, Drittvergleich, "dealing at arm's length", Art. 29 Abs. 2 BV, Art. 58 DBG: Beweis und Beweislast im Steuerverfahren bei der Prüfung von Leistung und Gegenleistung unter dem Gesichts-winkel des Drittvergleichs ["dealing at arm's length"], in Archives 77, p. 657 ss, p. 684).
7.1.1 Une société qui finance un prêt accordé à son actionnaire ou associé au moyen de fonds étrangers a deux moyens de prouver que le taux d'intérêt qu'elle a appliqué et qui est inférieur à celui qui résulte du chiffre 1.2 de la lettre-circulaire applicable à la période fiscale considérée correspond néanmoins au principe de pleine concurrence. Premièrement, elle peut dévoiler à l'autorité fiscale la situation économique complète de son actionnaire et démontrer qu'elle aurait accordé un prêt aux mêmes conditions à un tiers se trouvant dans une situation économique comparable à celle de ce dernier. Deuxièmement, elle peut également prouver qu'elle a respecté le principe de pleine concurrence quand bien même l'opération s'est soldée par une perte Une telle situation pourrait se produire dans l'hypothèse où la société prêteuse ne pourrait pas amortir son emprunt en raison de clauses contractuelles qui le lui interdiraient ou qui le subordonneraient au paiement d'une prime dont le montant serait supérieur à l'intérêt reçu de l'actionnaire emprunteur. Dans de telles circonstances, il serait alors justifié d'appliquer à la société le taux d'intérêt fixe prévu au chiffre 1.1 de la lettre-circulaire.
7.1.2 En l'espèce, la recourante n'a pas démontré que le taux d'intérêt de 2.5% qu'elle a réclamé de son actionnaire en 2009 était conforme au principe de pleine concurrence. Elle s'est limitée à avancer que si elle avait laissé les fonds prêtés sur un compte bancaire, l'intérêt qu'elle en aurait retiré aurait été inférieur à 2,5%, de sorte qu'elle a été enrichie et non pas appauvrie en accordant un prêt à son actionnaire. Elle perd toutefois de vue que l'octroi d'un prêt à un actionnaire n'est pas une situation comparable à un simple placement de fonds sur un compte bancaire, qui peuvent être retirés en tout temps (cf. arrêt 2A.355/2004 consid. 3.3) et que ce qui est déterminant est de démontrer qu'elle aurait exigé le même taux d'intérêt à un tiers dans des circonstances économiques identiques. Par ailleurs, la recourante n'a pas non plus démontré que des circonstances spécifiques l'auraient quasiment contrainte à réaliser une perte sur l'opération, en raison, par exemple, de limitations contractuelles quant à la possibilité d'amortir son emprunt. Elle a au contraire indiqué, dans son mémoire de recours, qu'elle procédait régulièrement à des remboursement de ses dettes et qu'elle avait même effectué un amortissement de 500'000 fr. en 2009 après négociation avec l'établissement bancaire prêteur.
8. L'existence d'une prestation appréciable en argent suppose encore que la disproportion entre la prestation et la contreprestation soit manifeste, de telle sorte qu'elle était reconnaissable pour les organes de la société (cf. supra consid. 4.1). Tel est le cas en l'espèce, dès lors que l'opération a conduit à une perte pour la recourante et que l'insuffisance du taux d'intérêt exigé de l'actionnaire ressortait clairement de la lettre-circulaire 2009, ce qui était reconnaissable pour les organes.
9. Au vu de ce qui précède, la Cour de justice a retenu à bon droit que tous les éléments caractéristiques d'une prestation appréciable en ar-
gent étaient réunis. Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct.
 Droit cantonal
10. La jurisprudence rendue en matière d'impôt fédéral direct est également valable pour l'application des dispositions cantonales harmonisées correspondantes (arrêts 2C_843/2012 du 20 décembre 2012 consid. 3.1, in RF 68/2013, p. 227; 2C_961/2010 et 2C_962/2010 du 30 janvier 2012 consid. 8, in StE 2012 B 24.4 Nr. 80 [consid. non publié aux ATF 138 II 57]).
 Conséquence, ainsi que frais et dépens
11. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1. Les causes 2C_291/2013 et 2C_292/2013 sont jointes.
2. Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable, en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct de la période fiscale 2009.
3. Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable, en tant qu'il concerne l'impôt cantonal et communal de la période fiscale 2009.
4. Les frais judiciaires, fixés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
5. Le présent arrêt est communiqué à la représentante de la recourante, à l'Administration fiscale cantonale genevoise, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2 ème section, et à l'Administration fédérale des contributions.
Lausanne, le 26 novembre 2013
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Zünd
La Greffière: Vuadens