BGer 2C_1213/2013
 
BGer 2C_1213/2013 vom 06.01.2014
{T 0/2}
2C_1213/2013
 
Arrêt du 6 janvier 2014
 
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Zünd, Président,
Aubry Girardin et Kneubühler.
Greffier: M. Chatton.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Sébastien Pedroli, avocat,
recourant,
contre
Service de la population du canton de Vaud.
Objet
Autorisation de séjour, non-renouvellement,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal
du canton de Vaud, Cour de droit administratif
et public, du 18 novembre 2013.
 
Considérant en fait et en droit:
1. Ressortissant kosovar né en 1983, X.________ est entré en Suisse illégalement le 27 juillet 2005; lors de contrôles de police effectués en février et en septembre 2007, il a été interpellé à deux reprises alors qu'il travaillait au noir. En septembre 2007 toujours, il s'est vu refuser la délivrance d'une autorisation de séjour en vue de l'exercice d'une activité lucrative en Suisse. A la suite de son mariage avec une compatriote titulaire d'un permis d'établissement en juillet 2008, X.________ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour par regroupement familial. Les époux se sont séparés en novembre 2010 et ont divorcé en mai 2012. Aucun enfant n'est né de cette union.
La société A.________ Sàrl, que X.________ avait constituée à Payerne en 2009 et dont il était l'associé-gérant, a été déclarée en faillite en juillet 2011. Depuis lors, l'intéressé a créé une nouvelle entreprise de peinture à l'enseigne de B.________ Sàrl à C.________, dont il est salarié à raison de 5'000 fr. brut par mois. Au 30 mai 2013, X.________ présentait des poursuites à hauteur de 59'952 fr. 45.
Le 11 juillet 2013, après avoir entendu l'intéressé, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) a refusé le renouvellement de son autorisation de séjour et a prononcé son renvoi de Suisse. Par arrêt du 18 novembre 2013, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours que X.________ avait formé contre la décision du 11 juillet 2013, laquelle a été confirmée.
2. X.________ forme auprès du Tribunal fédéral un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire. Il conclut, avec suite de frais et dépens, préalablement, à l'octroi de l'effet suspensif; principalement, à l'annulation de l'arrêt du Tribunal cantonal du 18 novembre 2013, et à l'admission de l'autorisation de séjour; subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
 
3.
3.1. Selon l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral, ni le droit international ne donnent droit. Le recourant invoque l'art. 50 al. 1 let. b LEtr (RS 142.20) selon lequel, après dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité subsiste dans certains cas. Comme il n'est pas d'emblée exclu que cette disposition soit applicable, il convient d'admettre un droit de recourir sous l'angle de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le point de savoir si c'est à juste titre que les autorités cantonales en ont nié l'application relevant du fond et non de la recevabilité (cf. ATF 136 II 177 consid. 1.1 p. 179). La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte, ce qui entraîne l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire également formé en parallèle (art. 113 LTF a contrario).
3.2. Est en revanche irrecevable la violation alléguée de l'art. 34 al. 4 LEtr (sur renvoi de l'art. 50 al. 3 LEtr), puisque cette disposition ne confère aucun droit à une autorisation d'établissement (arrêts 2C_48/2013 du 18 janvier 2013 consid. 3; 2C_950/2010 du 19 décembre 2010 consid. 4). Ce grief serait également irrecevable s'il devait être considéré sous l'angle d'un recours constitutionnel subsidiaire, car le recourant n'invoque la violation d'aucun droit constitutionnel (art. 113 et 116 LTF; cf. arrêt 2C_377/2013 du 7 mai 2013 consid. 3) en relation avec ladite disposition.
3.3. Pour le surplus, le mémoire de recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF) par le destinataire de l'acte attaqué qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il faut lui reconnaître la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Il convient partant d'entrer en matière.
4. Le recours en matière de droit public interjeté par X.________ à l'encontre de l'arrêt du 18 novembre 2013 est manifestement infondé, de sorte qu'il convient de le rejeter sur la base d'une motivation sommaire (cf. art. 109 LTF).
4.1. A juste titre, le recourant ne fonde plus son recours sur l'art. 50 al. 1 let. a LEtr (cum art. 43 LEtr), dès lors qu'il est établi que son union conjugale avec une titulaire d'un permis d'établissement a duré moins de trois ans. Il convient par conséquent d'examiner dans quelle mesure la poursuite du séjour du recourant en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr; le grief tiré de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.; ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5) que le recourant invoque en lien avec l'art. 50 al. 1 let. b LEtr et qui se confond ici avec la violation alléguée de cette disposition de droit fédéral, n'a pas de portée propre.
4.2. Selon l'art. 50 al. 1 let. b LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 subsiste si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures. L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, mais où - eu égard à l'ensemble des circonstances - l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (cf. ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 395; 137 II 345 consid. 3.2.1 p. 348). A cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée "raisons personnelles majeures" et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEtr confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l'art. 30 al. 1 let. b LEtr. Comme il s'agit de cas de rigueur survenant à la suite de la dissolution de la famille, en relation avec l'autorisation de séjour découlant du mariage, les raisons qui ont conduit à sa dissolution revêtent par conséquent de l'importance. L'admission d'un cas de rigueur personnel survenant après la dissolution de la communauté conjugale suppose que, sur la base des circonstances d'espèce, les conséquences pour la vie privée et familiale de la personne étrangère liées à ses conditions de vie après la perte du droit de séjour découlant de la communauté conjugale (art. 42 al. 1 et 43 al. 1 LEtr) soient d'une intensité considérable (ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 395 et les jurisprudences citées). Le Tribunal fédéral a mis en lumière un certain nombre de situations dans lesquelles la poursuite du séjour en Suisse peut s'imposer. Celles-ci ne sont pas exhaustives (ATF 136 II 1 consid. 5.2 p. 3 s.). Parmi celles-ci figurent notamment les violences conjugales (art. 50 al. 2 LEtr et 77 al. 2 OASA [RS 142.201]), qui doivent revêtir une certaine intensité (ATF 136 II 1 consid. 5.3 p. 4), la réintégration fortement compromise dans le pays d'origine et le cas dans lequel le conjoint duquel dépend le droit de séjour de l'étranger décède (ATF 137 II 345 consid. 3.2.2 p. 349).
4.3. En l'occurrence, le Tribunal cantonal a, au terme d'un examen soigné des conditions relevant de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr, nié toute raison majeure propre à justifier le renouvellement du permis de séjour en faveur du recourant à la suite de la séparation d'avec son épouse: si le recourant vivait en Suisse depuis huit ans, il y avait toutefois passé les trois premières années dans l'illégalité (de jurisprudence constante, cette période doit donc être fortement relativisée; ATF 137 II 1 consid. 4.2 p. 8; arrêt 2C_977/2012 du 15 mars 2013 consid. 3.6). Il était certes vrai que plusieurs membres de sa famille, dont son frère avec lequel il travaillait, vivaient en Suisse; toutefois, il n'y avait pas d'enfant, et il possédait encore de la famille, voire des proches avec lesquels il entretenait des contacts, au Kosovo, où il avait vécu les vingt-deux premières années de sa vie, avant d'entrer sans droit en Suisse. Par ailleurs, l'intégration économique du recourant, âgé de trente ans, se devait d'être relativisée, dans la mesure où il avait accumulé des dettes importantes, dont un montant de 44'467 fr. 35 à l'égard des assurances sociales obligatoires, et qu'il avait, de 2005 à 2008, continué - fait non contesté devant le Tribunal fédéral - à travailler comme peintre sans la moindre autorisation, au mépris de l'ordre juridique établi et malgré plusieurs contrôles effectués par les autorités (cf., au sujet de la gravité du travail au noir, arrêt 2C_881/2012 du 16 janvier 2013 consid. 4.3.2). En outre, il lui était possible d'exercer son métier dans son pays, les risques de chômage et problèmes conjoncturels allégués au Kosovo ne permettant pas de retenir un cas de rigueur s'il devait retourner dans cet Etat.
4.4. Dans son mémoire, le recourant ne remet pas fondamentalement en cause l'appréciation opérée par les juges cantonaux. Il se contente d'affirmer que sa réintégration sociale dans son pays d'origine serait particulièrement difficile, qu'il maîtriserait couramment la langue française et qu'il n'aurait jamais commis d'infraction pénale, ni bénéficié de l'aide sociale, son activité lucrative actuelle lui permettant au contraire de régler rapidement les dettes résultant de la faillite de sa première société. Du reste, bien qu'il prétende que "la quasi-totalité de la famille et des amis" résideraient en Suisse, le recourant n'en concède pas moins la présence de sa mère au Kosovo (recours, p. 9). Or, si les éléments précités sont susceptibles de marquer un certain degré d'intégration en Suisse, ils ne permettent assurément pas de retenir que le non-renouvellement du permis de séjour et l'obligation qui en résulte pour le recourant de quitter la Suisse et d'envisager la poursuite de son existence et de sa carrière au Kosovo, le plongeraient dans une situation de détresse personnelle qui irait au-delà des conséquences parfois difficiles découlant de l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire helvétique.
4.5. En confirmant le refus de renouveler l'autorisation de séjour en Suisse en faveur du recourant, le Tribunal cantonal n'a par conséquent pas violé le droit fédéral. Dans ces circonstances, le recours ne peut qu'être rejeté.
5. Compte tenu de cette issue, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet. Les frais seront mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1. Le recours en matière de droit public est rejeté.
2. Le recours constitutionnel subsidiaire est déclaré irrecevable.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 6 janvier 2014
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Zünd
Le Greffier: Chatton