BGer 2C_508/2014 |
BGer 2C_508/2014 vom 20.02.2015 |
2C_508/2014
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2C_509/2014
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{T 0/2}
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Arrêt du 20 février 2015 |
IIe Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Zünd, Président,
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Donzallaz et Stadelmann.
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Greffier: M. Tissot-Daguette.
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Participants à la procédure
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X.________ SA,
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représentée par Me Daniel Schafer et Me Arnaud Martin, avocats,
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recourante,
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contre
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Administration fiscale cantonale genevoise.
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Objet
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2C_508/2014
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Impôts cantonal et communal 2006, 2007 et 2009; soustraction d'impôt, amendes,
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2C_509/2014
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Impôt fédéral direct 2006, 2007 et 2009; soustraction d'impôt, amendes,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 1ère section, du 1er avril 2014.
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Faits : |
A. A.X.________ SA (d'avril 2005 à janvier 2007: B.X.________ SA, actuellement: X.________ SA) est une société anonyme ayant son siège à Genève et inscrite au registre du commerce de ce canton depuis le 3 avril 1996. Son but statutaire est la gestion de fortune et conseils financiers; transactions financières; toutes activités en qualité de trustee, cotrustee, exécuteur testamentaire, fiduciaire et mandataire général; acquisition, vente et gestion de participations dans d'autres sociétés. Jusqu'en juillet 2011, Y.________ a successivement été administrateur délégué puis, dès octobre 2004, administrateur président de la société, avec signature collective à deux. Il a en particulier cosigné les déclarations fiscales des années 2006 à 2009 de la société. Cette dernière est une filiale à 100% du groupe C.________ AG, société anonyme ayant depuis février 2007 son siège à H.________, dans le canton de Zoug.
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B. En février 2009, l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale) a procédé à une révision des comptes de A.X.________ SA en relation avec l'impôt anticipé. Dans le cadre de cette révision, elle a appris que C.________ AG exerçait, depuis la Suisse, notamment par l'intermédiaire de A.X.________ SA, une haute surveillance sur les activités déployées par les sociétés apparentées offshore D.________ Limited et E.________ Limited et leurs succursales. A.X.________ SA exerçait également, au besoin, des activités de controlling en matière financière et offrait son support dans les domaines de la comptabilité et de la gestion des ressources humaines. L'Administration fédérale a constaté que les prix de transfert pour les services intragroupe faisaient défaut. Elle a chiffré l'absence de rémunération pour les services rendus par A.X.________ SA à D.________ Limited et E.________ Limited, pour les années 2006 à 2008, à un montant total de 6'811'091 fr. Le 29 janvier 2010 A.X.________ SA a conclu un accord avec l'Administration fédérale (ruling) tendant à fixer une rémunération adéquate des services qu'elle fournissait à ses sociétés soeurs dès le 1er janvier 2009.
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C. Dans son courrier du 14 avril 2011 adressé à l'Administration fiscale cantonale, A.X.________ SA a toutefois contesté avoir commis une soustraction fiscale. Le 18 mai 2011, l'Administration fiscale cantonale a établi deux bordereaux "amende". L'amende relative à l'IFD 2006, 2007 et 2009 s'élevait à 428'417 fr. et celle relative à l'ICC 2006, 2007 et 2009 à 1'163'477 fr. Ces deux montants correspondaient à une fois la somme totale des suppléments d'impôt dus pour ces trois années. A.X.________ SA a élevé réclamation contre ces amendes. Par décision sur réclamation du 16 avril 2012, l'Administration fiscale cantonale a confirmé les amendes sur leur principe, mais réduit leur quotité à 0,75 fois le montant des impôts soustraits, prenant en compte la bonne collaboration et la régulation des opérations intragroupe. La société a interjeté recours contre ce prononcé. Le Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif de première instance) a rejeté le recours par jugement du 22 avril 2013. A.X.________ SA a contesté cette décision le 29 mai 2013 auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice).
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D. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.X.________ SA demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt de la Cour de justice du 1er avril 2014 et de constater qu'elle n'a commis aucune soustraction fiscale en relation avec les périodes fiscales 2006, 2007, 2008 et 2009. Elle se plaint en particulier de violation du droit fédéral et du principe de l'interdiction de la double peine.
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Considérant en droit : |
1. La Cour de justice a rendu un seul arrêt concernant les amendes pour les périodes fiscales 2006, 2007 et 2009 s'agissant de l'ICC et de l'IFD. Partant, on ne peut reprocher à la recourante d'avoir présenté une seule écriture et pris des conclusions valant pour les amendes tant en matière d'ICC et d'IFD (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.2 p. 263 s.). Par souci d'unification par rapport à d'autres cantons dans lesquels deux décisions sont rendues, la Cour de céans a ouvert deux dossiers, l'un concernant l'IFD (2C_509/2014), l'autre l'ICC (2C_508/2014). Comme l'état de fait est identique et que les questions juridiques se recoupent en partie, les deux causes seront néanmoins jointes et il sera statué dans un seul arrêt (cf. art. 71 LTF et 24 PCF [RS 273]).
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2.
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2.1. Le recours est dirigé contre une décision finale (cf. art. 90 LTF) rendue dans une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Déposé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. a LTF) par la contribuable destinataire de la décision attaquée, qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (cf. art. 89 al. 1 LTF), il est donc en principe recevable comme recours en matière de droit public s'agissant des deux catégories d'impôts (cf. art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct [LIFD; RS 642.11], art. 73 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; RS 642.14]; ATF 134 II 186 consid. 1.3 p. 188 s.).
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2.2. Aux termes de l'art. 42 al. 2 LTF, les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. De simples renvois à des écritures antérieures ou au dossier ne sont pas admissibles (ATF 133 II 396 consid. 3.2 p. 399 s.; arrêt 4A_709/2011 du 30 mai 2012 consid. 1.1). Par conséquent, en tant que la recourante fait référence à la motivation tenue devant des instances précédentes, il n'en sera pas tenu compte.
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2.3. D'après la jurisprudence, l'objet de la contestation qui peut être portée devant le Tribunal fédéral est déterminé par la décision attaquée (arrêts 2C_319/2009 du 26 janvier 2010 consid. 2.2, non publié in ATF 136 II 241; 2D_144/2008 du 23 mars 2009 consid. 3 et 2C_669/2008 du 8 décembre 2008 consid. 4.1 et les références citées) et par les conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). En l'espèce, la décision attaquée portant exclusivement sur la soustraction d'impôt commise durant les années fiscales 2006, 2007 et 2009, le litige ne saurait s'étendre à une autre période fiscale que celles-ci, soit en l'occurrence à l'année 2008. La conclusion de la recourante à ce propos doit être déclarée irrecevable.
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2.4. Selon un principe général de procédure, les conclusions en constatation de droit ne sont recevables que lorsque des conclusions condamnatoires ou formatrices sont exclues. Sauf situations particulières, les conclusions constatatoires ont donc un caractère subsidiaire (cf. ATF 135 I 119 consid. 4 p. 122; arrêts 2C_490/2014 du 26 novembre 2014 consid. 1.2; 2C_199/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.3, non publié in ATF 137 II 383). Dans la mesure où la recourante conclut, parallèlement à l'annulation de l'arrêt du 1er avril 2014 de la Cour de justice, à ce qu'il soit constaté "que A.X.________ SA n'a commis aucune soustraction fiscale en relation avec les périodes fiscales 2006, 2007, 2008 et 2009", elle formule une conclusion constatatoire qui est irrecevable.
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3.
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3.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF). Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF), ce que la partie recourante doit démontrer d'une manière circonstanciée, conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.). La notion de "manifestement inexacte" correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 136 II 447 consid. 2.1 p. 450).
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3.2. Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté (cf. art. 99 al. 1 LTF). Les documents remis par la recourante en annexe de son mémoire et nommés "pièces nouvelles" sont des moyens de preuve nouveaux et par conséquent irrecevables.
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4. La recourante estime que c'est à tort que son comportement a été considéré comme illicite par la Cour de justice. Elle exclut également toute culpabilité et invoque une violation du principe de l'interdiction de la double peine ainsi que de l'art. 54 CP.
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5.
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5.1. Aux termes de l'art. 175 al. 1 LIFD, le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende. En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD). Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent dès lors être réunis: la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier (arrêt 2C_664/2008 du 4 février 2009 consid. 2, non publié in ATF 135 II 86).
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5.2. L'existence et le montant du dommage ne sont à juste titre pas contestés par la recourante. Il ressort des faits retenus par les juges cantonaux que celle-ci n'a pas déclaré un montant total de 6'811'091 fr. de prestations effectuées pour des sociétés soeurs durant les années fiscales 2006 à 2008. Cette somme n'ayant pas été prise en compte comme bénéfice, il existe manifestement une différence entre les montants d'impôt figurant dans les décisions de taxation entrées en force pour les années en cause et les montants qui auraient effectivement dû être perçus.
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5.3. La recourante nie en premier lieu avoir violé une obligation légale. Elle soutient en particulier que dans un tel cas, il ne lui était pratiquement pas possible de déclarer à temps les prestations effectuées en faveur de ses sociétés soeurs et qu'il ne saurait être question de soustraction fiscale lorsque le principe de pleine concurrence est violé sans que le droit comptable n'ait été transgressé.
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5.3.1. L'art. 57 LIFD prévoit que l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. D'après l'art. 58 al. 1 let. a LIFD, le bénéfice net imposable comprend le solde du compte de résultats, compte tenu du solde reporté de l'exercice précédent. Il s'ensuit que le bénéfice imposable est, sous réserve des règles correctrices prévues notamment par l'art. 58 al. 1 let. b et c LIFD, celui qui ressort de la comptabilité commerciale, dont le contenu, pour autant qu'il soit conforme au droit commercial, est contraignant pour l'autorité fiscale en vertu du principe de l'autorité du bilan commercial ("Massgeblichkeitsprinzip"), si bien que, pour autant que les autres conditions soient remplies, une soustraction est commise dès qu'il y a irrégularité dans la comptabilité (cf. ATF 135 II 86 consid. 3.1 p. 88).
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Le bénéfice net comprend notamment tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultat, qui ne servent pas à couvrir les dépenses justifiées par l'usage commercial, tels que les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par ledit usage (art. 58 al. 1 let. b in fine LIFD). Selon le Tribunal fédéral, il y a prestation appréciable en argent - également qualifiée de distribution dissimulée de bénéfice - lorsqu'une attribution est faite par la société, sans contre-prestation équivalente, à ses actionnaires ou à toute personne la ou les touchant de près et qui n'aurait pas été consentie à des tiers dans les mêmes circonstances (ATF 140 II 88 consid. 4.1 p. 92 s.; 131 II 593 consid. 5.1 p. 607); il faut encore que le caractère insolite de cette prestation soit reconnaissable par les organes de la société (ATF 119 Ib 431 consid. 2b p. 435; arrêts 2C_30/2010 du 19 mai 2010 consid. 2.1 et 2C_788/2010 du 18 mai 2011 consid. 4.1 et les références citées). Les transactions internationales entre sociétés du même groupe doivent correspondre à ce qui se ferait entre tiers. Même s'il n'est pas toujours facile de déterminer les prix de transfert pour ces opérations au sein d'un groupe, ceux-ci ne peuvent être fixés de manière à déplacer un bénéfice d'un Etat dans un autre ou à égaliser les résultats des sociétés (arrêts 2C_724/2010 du 27 juillet 2011 consid. 7.1, in RDAF 2012 II 37; 2C_788/2010 du 18 mai 2011 consid. 4.1 et 2A.588/2006 du 19 avril 2007 consid. 4.2).
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5.3.2. En l'absence d'une réglementation expresse contraire, le droit applicable à la taxation est celui en vigueur pendant la période fiscale en cause. Le rappel d'impôt relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (cf. arrêt 2C_620/2012 du 14 février 2013 consid. 3.1). Le présent litige porte sur les périodes fiscales 2006 à 2009 (l'année fiscale 2008 n'est pas concernée par l'infraction de soustraction fiscale, mais par une éventuelle violation du droit comptable ayant entraîné un report de pertes erroné en 2009). C'est par conséquent le droit comptable antérieur à la révision du 23 décembre 2011 (RO 2012 6679) qui est applicable.
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La comptabilisation est soumise à un certain nombre de principes, dont on présentera brièvement notamment les suivants. Le principe de sincérité représente l'un des buts même des comptes annuels, comme cela ressort de l'exigence de transparence figurant à l'ancien art. 959 CO. En vertu de la sincérité matérielle, il est ainsi interdit d'omettre purement et simplement un actif dans les comptes pour créer une réserve latente (cf. Pierre-Marie Glauser, Apports et impôt sur le bénéfice, 2005, p. 55; Peter Böckli, Schweizer Aktienrecht, 4e éd. 2009, § 8 n° 899; Peter Brülisauer/Flurin Poltera, in Zweifel/Athanas [éd.], Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer [DBG], 2e éd. 2008, n° 23 ad art. 58 LIFD). Le principe de l'intégralité découle du principe de sincérité. Il exige que tous les faits économiques qui ont un effet sur les capitaux engagés soient pris en compte, aussi bien dans le bilan que dans le compte de profits et pertes. Les comptes ne doivent ainsi ni taire, ni escamoter des éléments essentiels (cf. ancien art. 662a al. 2 ch. 1 CO; Glauser, op. cit., p. 56; Böckli, op. cit., § 8 n° 115). Le principe de prudence pousse à une approche pessimiste dans les différents aspects de la démarche comptable; en cas d'hésitation sur l'évaluation, c'est ainsi la valeur la plus basse qui doit être retenue (cf. ancien art. 662a al. 2 ch. 3 CO; Glauser, op. cit., p. 56; Brülisauer/Poltera, op. cit., n° 26 ad art. 58 LIFD).
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5.3.3. En l'espèce, il ressort des faits retenus par la Cour de justice que la recourante n'a pas facturé certaines prestations effectuées en faveur de deux de ses sociétés soeurs. Il faut admettre, avec la recourante d'ailleurs, que celle-ci n'aurait pas consenti de telles prestations en faveur de tiers. La recourante a ainsi fourni des services pour un montant de 6'811'091 fr., sans encaisser de contre-prestations, ou à tout le moins sans reporter le montant de ces contre-prestations à l'actif de son bilan pour les années en cause. De ce fait, contrairement à ce qu'elle avance, elle a violé le droit commercial. Elle n'a en effet notamment pas respecté les principes de sincérité et d'intégralité du bilan qui lui commandaient de prendre en compte les faits économiques ayant une incidence sur les capitaux engagés et de ne pas simplement les omettre. Le fait que la question des prix de transfert soit, selon elle, hautement technique, n'y change rien. Certes, la recourante pourrait arguer avoir respecté le principe de prudence. Toutefois, ce principe, s'il pousse à une approche pessimiste dans l'évaluation des produits, ne permet pas de passer ceux-ci complètement sous silence. Or, dans le cas d'espèce, il n'est pas question d'une mauvaise appréciation du montant des prix de transfert, mais du fait que la prestation fournie n'a purement et simplement pas été prise en compte. On peine au demeurant à saisir ce que la recourante tente d'invoquer lorsqu'elle explique ne pas avoir eu la possibilité de démontrer la légalité de ses agissements. Dans ces conditions, la Cour de justice pouvait juger, sans violer les art. 58 al. 1 let. a et 175 al. 1 LIFD, que la recourante avait violé une disposition de droit commercial et constater que cet élément objectif de la soustraction fiscale était réalisé. Mal fondé, ce grief doit être rejeté.
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5.4. La recourante conteste également qu'un montant d'impôt aurait été soustrait à la collectivité publique par son comportement. Elle estime que l'autorité précédente a reconnu le caractère intentionnel de son comportement sur la base d'une simple présomption et qu'un défaut de rémunération de certaines prestations rendues à deux sociétés du groupe n'implique en rien une conscience préalable des risques fiscaux, ceux-ci étant essentiellement liés à la croissance du groupe et la technicité des questions liées aux prix de transfert.
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5.4.1. Lorsque la soustraction d'impôt est commise par une personne morale, la faute au sens des art. 175 et 181 LIFD ne peut être qu'un attribut de la personne physique, en l'espèce d'un organe de la personne morale, dont le comportement doit être imputé à celle-ci. (ATF 135 II 86 consid. 4.2 p. 89 ss et les références citées). La soustraction est punissable aussi bien lorsqu'elle est commise intentionnellement que lorsqu'elle l'est par négligence. La preuve d'un comportement intentionnel doit être considérée comme apportée lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que le contribuable était conscient que les indications fournies étaient erronées ou incomplètes. Si cette conscience est établie, il faut admettre qu'il a volontairement cherché à induire les autorités fiscales en erreur, afin d'obtenir une taxation moins élevée ou du moins qu'il a agi par dol éventuel (cf. ATF 114 Ib 27 consid. 3a p. 29 s.; arrêt 2C_908/2011 du 23 avril 2012 consid. 3.4).
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Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé, voulu ou accepté relève par ailleurs des constatations de faits, qui lient le Tribunal fédéral, à moins que ceux-ci n'aient été établis de façon manifestement inexacte (cf. ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 4 s.; 135 IV 152 consid. 2.3.2 p. 156; arrêt 6B_712/2012 du 26 septembre 2013 consid. 3.4, non publié in ATF 139 IV 282; consid. 3.1 ci-dessus).
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5.4.2. En l'espèce, selon les faits retenus par la Cour de justice, " les organes dirigeants de la recourante ne pouvaient, au moment des faits reprochés entre 2006 et 2008, ignorer le risque que des prestations soient fournies par la recourante aux sociétés soeurs sans rémunération correspondante conforme au prix du marché, ni celui qu'elles ne soient pas déclarées dans leur intégralité et à leur juste valeur aux autorités fiscales compétentes ". S'agissant ensuite de Y.________, l'autorité précédente continue en mentionnant que celui-ci " se trouvait, au moment des faits litigieux, dans une situation hiérarchique et concrète lui permettant d'identifier et d'apprécier en toute connaissance de cause ledit risque ".
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Pour sa part, la recourante explique que les organes dirigeants de la société ne pouvaient avoir conscience du défaut de rémunération en raison du fait que le groupe dans lequel elle se trouve croît et que les questions de prix de transfert intragroupe sont des questions techniques. En outre, elle estime que l'insuffisance de rémunération n'était que le résultat d'une mauvaise appréciation de son implication envers ses sociétés soeurs et pas une volonté de ne pas facturer.
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Dans la mesure où les critiques de la recourante portent sur l'établissement des faits, sans exposer concrètement, dans le respect des exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, en quoi l'instance précédente serait tombée dans l'arbitraire en matière de constatation des faits, ses griefs sont irrecevables.
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Les faits retenus par les juges cantonaux lient par conséquent le Tribunal fédéral. Il en découle que, ne pouvant ignorer qu'il existait un risque de fournir des prestations à des sociétés soeurs sans contre-prestation, les administrateurs de la recourante ont, à tout le moins par dol éventuel, cherché à obtenir une taxation moins élevée. Le grief relatif à cette question doit par conséquent également être rejeté, dans la mesure où il est recevable.
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5.5. L'ensemble des griefs soulevés par la recourante en lien avec l'application de l'art. 175 al. 1 LIFD s'avère ainsi sans fondement. En fixant l'amende à un montant de 0,75 fois le montant d'impôt soustrait et en prenant en compte la bonne collaboration de la contribuable au cours de la procédure, l'appréciation des juges cantonaux à ce propos n'est pas critiquable. Au demeurant, la recourante ne se plaint pas, devant le Tribunal fédéral, de la quotité de l'amende en relation avec une infraction commise intentionnellement ou par dol éventuel.
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6. La recourante estime ensuite que l'amende pour soustraction d'impôt contrevient au principe ne bis in idem, puisqu'elle s'ajoute au montant perçu par l'Administration fédérale au titre de l'impôt anticipé.
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Selon la jurisprudence, le principe ne bis in idem, qui est un corollaire de l'autorité de chose jugée, interdit qu'une personne soit pénalement poursuivie deux fois pour les mêmes faits. L'autorité de chose jugée et le principe ne bis in idem supposent qu'il y ait identité de l'objet de la procédure, de la personne visée et des faits retenus (ATF 123 II 464 consid. 2b p. 466; 120 IV 10 consid. 2b p. 12 s.; 118 IV 269 consid. 2 p. 271).
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En l'occurrence, si l'amende pour soustraction d'impôt constitue bien l'issue d'une poursuite pénale, le paiement d'un montant au titre de l'impôt anticipé n'est ni le résultat d'une procédure pénale ou d'une procédure disciplinaire, ni même ne constitue une sanction administrative (cf. arrêt 2C_54/2008 du 16 avril 2008 consid. 4.6). Au demeurant, la recourante indique que le paiement de l'impôt anticipé constitue une charge pour le groupe auquel elle appartient. Or, ce groupe a une personnalité propre. Partant, l'objet de la procédure et, si l'on suit les propos de la recourante, les personnes visées étant différentes, le principe ne bis in idem ne saurait s'appliquer au présent cas d'espèce. Le recours doit être rejeté sur ce point.
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7. Dans un dernier grief, la recourante invoque une violation de l'art. 54 CP. Selon elle, en raison de l'ampleur de la charge définitive que représente l'impôt anticipé pour le groupe C.________ AG, une peine pour soustraction fiscale est inappropriée.
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Selon cette disposition, si l'auteur a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée, l'autorité compétente renonce à le poursuivre, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine. Cette disposition a été reprise de l'ancien art. 66 bis CP dont les principes demeurent valables (ATF 137 IV 105 consid. 2.3). En cas d'infraction intentionnelle, une réduction de la peine en application de l'art. 54 CP est possible, mais ne doit être admise qu'avec retenue (arrêt 6B_373/2009 du 22 septembre 2009 consid. 3.3.2; Franz Riklin, Basler Kommentar, Strafrecht, 3e éd. 2013, n° 41 ad art. 54 CP). L'auteur est directement atteint par les conséquences de son acte s'il a subi des atteintes physiques - par exemple s'il a été blessé lors de l'accident qu'il a provoqué - ou psychiques - comme celles qui affectent une mère de famille devenue veuve par suite de l'accident de la circulation qu'elle a causé (ATF 119 IV 280 consid. 2b p. 283) - résultant de la commission même de l'infraction. En revanche, les désagréments dus à l'ouverture d'une instruction pénale, le paiement de frais de procédure, la réparation du préjudice, ainsi que la dégradation de la situation financière, le divorce ou le licenciement consécutifs à l'acte délictueux, ne constituent que des conséquences indirectes de l'infraction, sans pertinence au regard de l'art. 54 CP (cf. ATF 117 IV 245 consid. 2a p. 247).
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En l'occurrence, on ne voit pas en quoi la recourante serait atteinte par les conséquences de son acte. Au demeurant, seule la situation financière de la recourante est concernée par le paiement de l'impôt anticipé suite à l'ajustement des prix de transfert. Il ne s'agit-là tout au plus que d'une conséquence indirecte de l'infraction qui n'entre donc de toute façon pas dans le champ d'application de l'art. 54 CP. Au surplus, s'agissant du montant de l'impôt anticipé versé par la recourante, débitrice de la prestation imposable, on peut encore relever que l'obligation fiscale incombe certes à cette dernière en tant que contribuable (cf. art. 10 al. 1 de la loi fédérale du 13 octobre 1965 sur l'impôt anticipé [LIA; RS 642.21]), il n'en demeure pas moins que le montant de l'impôt est en finalité à la charge du bénéficiaire de la prestation (cf. art. 14 al. 1 LIA). Le recours, sur ce point, doit également être rejeté.
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8. Entièrement mal fondé, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct.
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II. Impôts cantonal et communal
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Erwägung 9 |
Les art. 56 al. 1 LHID et 69 al. 1 de la loi genevoise du 4 octobre 2001 de procédure fiscale (LPFisc/GE; D 3 17) relatifs à la soustraction d'impôt, ont la même teneur que l'art. 175 al. 1 LIFD. Par ailleurs, conformément aux art. 24 al. 1 LHID et 12 de la loi genevoise du 23 septembre 1994 sur l'imposition des personnes morales (LIPM/GE; D 3 15), le bénéfice net se détermine de manière comparable et selon les mêmes principes comptables que ceux prévus à l'art. 58 al. 1 LIFD (cf. Stephan Kuhn/Peter Brülisauer, in Zweifel/Athanas [éd.], Bundesgesetz über die Harmonisierung der direkten Steuern der Kantone und Gemeinden [StHG], 2002, n° 9 ss ad art. 24 LHID; Glauser, op. cit., p. 69 s.). Partant, les considérations développées en relation avec l'amende pour l'impôt fédéral direct trouvent à s'appliquer à l'amende relative aux impôts cantonal et communal pour les périodes fiscales sous examen (cf. arrêt 2C_104/2008 du 20 juin 2008 consid. 3.2). Il suffit donc de renvoyer, s'agissant de l'amende pour les impôts cantonal et communal, aux considérants relatifs à l'amende relative à l'impôt fédéral direct (cf. arrêt 2C_276/2010 du 19 octobre 2010 consid. 5). Le recours doit par conséquent être rejeté également en tant qu'il concerne l'amende prononcée en lien avec les impôts cantonal et communal pour les périodes fiscales 2006, 2007 et 2009, dans la mesure où il est recevable.
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10. Succombant en tous points, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Les causes 2C_508/2014 et 2C_509/2014 sont jointes.
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2. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct.
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3. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable en tant qu'il concerne les impôts cantonal et communal.
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4. Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
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5. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Administration fiscale cantonale et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 1ère section, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions.
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Lausanne, le 20 février 2015
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Zünd
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Le Greffier : Tissot-Daguette
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