BGer 5A_933/2014 |
BGer 5A_933/2014 vom 16.04.2015 |
{T 0/2}
|
5A_933/2014
|
Arrêt du 16 avril 2015 |
IIe Cour de droit civil |
Composition
|
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
|
Marazzi et Herrmann.
|
Greffière : Mme de Poret Bortolaso.
|
Participants à la procédure
|
A.________ SA,
|
représentée par Me Alain Maunoir, avocat,
|
recourante,
|
contre
|
D.________,
|
intimé.
|
Objet
|
inscription provisoire de l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs,
|
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 7 novembre 2014.
|
Faits : |
A. |
A.a. D.________ est propriétaire de la parcelle no 3243, plan 80, de la commune de U.________, section V._______, d'une surface de 4982 m2, située au chemin ... à U.________.
|
A.b. Par dossier de mutation no 5/2012, daté du 26 mars 2012, et par réquisition no 03085 du 29 mars 2012, D.________ a requis la réunion des parcelles nos 3243 et 3342 en une nouvelle parcelle destinée à porter le no 4125.
|
A.c. A une date indéterminée, la Fondation B.________ a mandaté la société C.________ SA (ci-après C.________) pour la construction d'un nouveau bâtiment et d'équipements communs sur le site de la Cité Z.________.
|
A.d. Par contrat du 17 septembre 2012, C.________ a sous-traité la fourniture et la pose d'éléments préfabriqués de façades en béton sur le bâtiment susvisé à A.________ SA (ci-après A.________), société inscrite au registre du commerce du canton de G.________ et spécialisée dans la fabrication d'éléments en béton de tout type. Le montant des travaux se chiffrait à 1'253'336 fr. 85 hors TVA.
|
A.e. Les travaux se sont étendus sur plusieurs mois. Tout au long de ceux-ci, A.________ a adressé diverses factures à C.________, à savoir notamment une facture de situation no 4 du 25 février 2013 pour un montant de 229'674 fr. 58, une facture de situation no 5 du 20 juin 2013 pour un montant de 61'125 fr. 55 ainsi qu'une facture finale, datée du 10 octobre 2013, d'un montant de 691'052 fr. 86, montant des factures nos 4 et 5 non compris.
|
B. Par acte déposé devant le Tribunal de première instance du canton de Genève le 9 janvier 2014, A.________ a requis, à l'encontre de D.________, l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs pour un montant de 392'730 fr. 45 sur la parcelle no 3243 et pour un montant de 785'460 fr. 80 sur la parcelle no 3342.
|
B.a. Le 9 janvier 2014, le Tribunal de première instance a ordonné l'inscription sollicitée à titre superprovisoire.
|
B.b. Par ordonnance du 20 mai 2014, le Tribunal de première instance a déclaré la requête sans objet, retenant que les parcelles à grever avaient fait l'objet d'une réunion parcellaire et qu'elles n'existaient donc plus.
|
B.c. Statuant le 7 novembre 2014 sur appel de A.________, la Cour de justice a annulé l'ordonnance rendue le 20 mai 2014, ordonné l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs d'un montant maximum de 392'730 fr. 45 sur la parcelle no 3243, imparti à l'intéressée un délai de 30 jours dès la notification de l'arrêt pour faire valoir ses droits en justice, révoqué en tant que besoin l'ordonnance rendue à titre superprovisionnelle le 9 janvier 2014 et débouté les parties de toutes autres conclusions.
|
C. Le 26 novembre 2014, A.________ (ci-après la recourante) a formé une requête d'effet suspensif devant le Tribunal fédéral, annonçant que celle-ci serait ultérieurement suivie d'un mémoire au fond.
|
D. Le 11 décembre 2014, la recourante a déposé un mémoire de recours " complémentaire " au Tribunal fédéral, constituant en réalité son recours en matière civile. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal en tant qu'il rejette l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs sur la parcelle no 3342 et sollicite principalement l'inscription d'une telle hypothèque sur cette parcelle à concurrence d'un montant qu'elle réduit toutefois à 87'186 fr., un délai lui étant imparti pour faire valoir ses droits en justice; subsidiairement, la recourante réclame le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision.
|
E. Par ordonnance présidentielle du 18 décembre 2014, la requête d'effet suspensif a été admise, étant précisé que l'ordre donné le 27 novembre 2014 à titre superprovisoire au conservateur du registre foncier a été confirmé pour le montant réduit de 87'186 fr.
|
Considérant en droit : |
1. L'arrêt entrepris refuse d'ordonner l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs: il s'agit en conséquence d'une décision finale (art. 90 LTF; ATF 137 III 589 consid. 1.2.2 et les références), rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF). Le recours a par ailleurs été interjeté dans le délai (art. 100 al. 1 et 46 al. 2 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, par la partie qui a succombé dans ses conclusions prises devant l'autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 et 76 al. 1 LTF). La valeur litigieuse atteint 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF).
|
2. La décision attaquée a pour objet des mesures provisionnelles, au sens de l'art. 98 LTF (arrêts 5A_102/2007 du 29 juin 2007 consid. 1.3; 5A_777/2009 du 1 février 2010 consid. 1.3; 5A_475/2010 du 15 septembre 2010 consid. 1.2), de sorte que seule peut être invoquée la violation de droits constitutionnels. Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine celle-ci que si de tels moyens ont été invoqués et motivés par le recourant, à savoir exposés de manière claire et détaillée ( «principe d'allégation»; ATF 139 I 229 consid. 2.2; 134 II 244 consid. 2.2 et 349 consid. 3 et les références). La partie recourante doit ainsi indiquer quelle disposition constitutionnelle aurait été violée et démontrer, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation (ATF 134 II 349 consid. 3; 133 III 393 consid. 6).
|
Erwägung 3 |
3.1. La Cour de justice a partiellement fait droit aux conclusions que la recourante formulait devant elle.
|
Erwägung 3.2 |
3.2.1. La recourante soutient qu'une partie du bâtiment sur lequel elle a effectué les travaux litigieux serait située sur la parcelle no 3342 sans être couverte par le DDP no 3407, ce dont attesteraient les pièces 17 à 19 produites en instance cantonale. En retenant au contraire que la partie du bâtiment réalisée sur la parcelle no 3342 était entièrement sous l'emprise du DDP, la Cour de justice aurait ainsi procédé à une appréciation arbitraire des faits.
|
3.2.2. L'intimé soutient que ce serait la première fois devant le Tribunal de céans que la recourante invoquerait la différence de surface entre la parcelle no 3342 et l'assiette du DDP no 3407. Cet argument serait ainsi irrecevable au sens de l'art. 99 LTF.
|
Erwägung 3.3 |
3.3.1. En vertu des principes de la bonne foi et de l'épuisement des griefs (art. 75 al. 1 LTF), tous les moyens nouveaux sont exclus dans le recours en matière civile au sens de l'art. 98 LTF, que ceux-ci relèvent du fait ou du droit, sauf dans les cas où seule la motivation de la décision attaquée donne l'occasion de les soulever (ATF 135 III 1 consid. 1.2; 134 III 524 consid. 1.3).
|
3.3.2. Conformément à l'art. 961 al. 3 CC, le juge autorise l'inscription provisoire si le droit allégué lui paraît exister. La procédure sommaire s'applique (art. 249 let. d ch. 5 CPC). Selon la jurisprudence, vu la brièveté et l'effet péremptoire du délai de l'art. 839 al. 2 CC, l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs ne peut être refusée que si l'existence du droit à l'inscription définitive du gage immobilier paraît exclue ou hautement invraisemblable (ATF 86 I 265 consid. 3; arrêts 5A_475/2010 du 15 septembre 2010 consid. 3.1.2; 5A_208/2010 du 17 juin 2010 consid. 4.2; 5A_777/2009 du 1er février 2010 consid. 4.1). A moins que le droit à la constitution de l'hypothèque n'existe clairement pas, le juge qui en est requis doit ordonner l'inscription provisoire (ATF 102 Ia 81 consid. 2b/bb; arrêts 5A_777/2009 du 1er février 2010 consid. 4.1; 5A_475/2010 précité consid. 3.1.2 et les références).
|
4. En définitive, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué doit être complété en ce sens que l'inscription provisoire de l'hypothèque légale sollicitée par la recourante devant le Tribunal de céans doit être ordonnée. Les frais et dépens sont mis à la charge de l'intimé dont l'intérêt patrimonial est ici en cause (art. 66 al. 1 et 3 et 68 al. 1 et 2 LTF). Il appartiendra à l'autorité cantonale de statuer à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale (art. 67 et 68 al. 5 LTF).
|
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est admis et l'arrêt cantonal est complété en ce sens qu'il est ordonné, aux frais, risques et périls de la recourante, au conservateur du registre foncier de Genève de procéder, à l'encontre de D.________, à l'inscription provisoire, au profit de la recourante, d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs d'un montant maximum de 87'186 fr. sur la parcelle no 3342, plan 80, de la commune de U.________, section Plainpalais, propriété de D.________.
|
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
|
3. Une indemnité de 9'000 fr., à verser à la recourante à titre de dépens, est mise à la charge de l'intimé.
|
4. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
|
5. Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève et au registre foncier du canton de Genève.
|
Lausanne, le 16 avril 2015
|
Au nom de la IIe Cour de droit civil
|
du Tribunal fédéral suisse
|
Le Président : von Werdt
|
La Greffière : de Poret Bortolaso
|