Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
8C_433/2014
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Arrêt du 16 juillet 2015
Ire Cour de droit social
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Ursprung et Frésard.
Greffière : Mme von Zwehl.
Participants à la procédure
A.________,
recourant,
contre
Caisse de chômage UNIA,
rue Necker 17, 1201 Genève,
intimée.
Objet
Assurance-chômage (indemnité de chômage, délai, péremption, obligation de renseigner),
recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 22 avril 2014.
Faits :
A.
Le 17 mai 2011, A.________ s'est inscrit au chômage en sollicitant l'octroi des prestations dès la fin du mois de mars 2011. Selon les attestations de l'employeur qu'il a produites, il avait été employé comme agent de sécurité par les sociétés B.________ SA et C.________ SA respectivement du 1er janvier au 31 décembre 2011 et du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2010.
Constatant qu'au moment de sa demande d'indemnités, A.________ était inscrit au registre du commerce en qualité d'administrateur secrétaire de la société C.________ SA et en qualité de titulaire de l'entreprise individuelle D.________, la Caisse de chômage UNIA (ci-après: la caisse) a soumis le cas pour examen à l'Office cantonal pour l'emploi (ci-après: l'OCE), ce dont elle a informé l'intéressé par lettre du 19 mai 2011. Dans cette lettre, la caisse invitait également l'assuré à continuer de se soumettre aux prescriptions de contrôle et à lui remettre la formule "Indication de la personne assurée" (IPA) à la fin de chaque mois. Par décision du 26 juillet 2011, l'OCE a déclaré A.________ apte au placement depuis le 30 mars 2011. Le 7 septembre suivant, la caisse a fait savoir au prénommé qu'il avait droit aux prestations de chômage.
Le 22 septembre 2011, la caisse a annoncé à A.________ qu'elle soumettait à nouveau son cas à l'OCE pour examen sur son aptitude au placement compte tenu de faits récents portés à sa connaissance. Comme précédemment, elle lui a rappelé son obligation de se soumettre aux prescriptions de contrôle et à remettre les formules IPA. Après réception de cette lettre, l'assuré a cessé de faire des recherches d'emploi et n'a plus remis les formules IPA.
Par décision du 12 décembre 2011, confirmée sur opposition le 30 avril 2012, l'OCE a déclaré l'assuré inapte au placement dès le premier jour de contrôle. Sur recours de A.________, la Chambre des assurances sociales de la Cour de Justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre des assurances sociales) a annulé ces décisions, constaté l'aptitude au placement de l'assuré, et renvoyé la cause à l'OCE pour nouvelle décision sur le droit aux prestations (jugement du 29 janvier 2013).
A la suite de ce jugement, l'OCE a rendu le 28 mars 2013 une décision, par laquelle il a reconnu l'aptitude au placement de A.________ à partir du 30 mars 2011 en le priant de s'adresser à la caisse pour être indemnisé. Par décision du 3 mai 2013, confirmée sur opposition le 11 septembre suivant, la caisse a refusé d'indemniser l'assuré pour la période du 1er septembre 2011 au 30 avril 2012, au motif que celui-ci n'avait pas remis les formules IPA dans le délai de péremption de trois mois prévu par la loi et que, par conséquent, son droit au chômage pour cette période s'était éteint.
B.
L'assuré a déféré la décision sur opposition du 11 septembre 2013 à la Chambre des assurances sociales, en faisant valoir qu'il n'avait pas été suffisamment renseigné par les autorités du chômage au sujet des conséquences de la non remise des formules IPA sur son droit aux prestations.
Après avoir questionné par écrit la conseillère de l'Office régional de placement (ORP) qui s'était occupée du dossier de A.________, Madame E.________, la juridiction cantonale a rejeté le recours (jugement du 22 avril 2014).
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont il demande l'annulation. Il conclut à la reconnaissance de son droit aux prestations de l'assurance-chômage pour la période du 1er septembre 2011 au 30 juin 2012 avec un intérêt moratoire de 5 %. Il requiert également le renvoi à la caisse pour qu'elle calcule le montant des indemnités journalières en question et procède sans délai au paiement.
La caisse conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'Etat à l'économie a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
2.
2.1. Aux termes de l'art. 20 al. 3 LACI, première phrase, le droit à l'indemnité de chômage s'éteint s'il n'est pas exercé dans les trois mois suivant la fin de la période de contrôle à laquelle il se rapporte. Chaque mois civil constitue une période de contrôle (art. 27a OACI [RS 837.02]). Le délai prévu par l'art. 20 al. 3 LACI est un délai de péremption dont l'inobservation entraîne l'extinction du droit à l'indemnité pour la période de contrôle concernée. Il ne peut être ni prolongé ni interrompu, mais il peut faire l'objet d'une restitution s'il existe une excuse valable pour justifier le retard (ATF 117 V 244 consid. 3 p. 245; arrêt 8C_320/2010 du 14 décembre 2010 consid. 2.1).
2.2. Selon l'art. 29 OACI, l'assuré exerce son droit à l'indemnité, notamment en remettant la formule "Indications de la personne assurée" (al. 1 let. d et al. 2 let. a). L'alinéa 3 prévoit qu'au besoin, la caisse impartit à l'assuré un délai convenable pour compléter les documents et le rend attentif aux conséquences d'une négligence. Ce délai ne peut et ne doit être accordé que pour compléter les premiers documents et non pour pallier à leur absence (arrêt 8C_320/2010 cité, consid. 2.2).
2.3. Il est établi, d'une part, que le recourant - qui a déménagé fin avril 2012 - a reçu à son ancien domicile les formules IPA au moins jusqu'à cette date et, d'autre part, qu'il ne les a pas retournées à la caisse dans le délai de trois mois pour la période allant de septembre 2011 à avril 2012. Son droit au chômage est donc périmé pour cette période. La seule question litigieuse qui se pose est de savoir s'il peut se prévaloir d'une violation de son droit à être renseigné et conseillé au sens de l'art. 27 LPGA (RS 830.1), de sorte que l'intimée ne saurait lui opposer les conséquences négatives découlant de l'art. 20 al. 3 LACI en relation avec l'art. 29 OACI.
3.
Le jugement entrepris expose de manière exacte les dispositions légales et réglementaires régissant les devoirs de conseil des organes d'exécution de l'assurance-chômage (art. 27 LPGA et art. 19a OACI), ainsi que la jurisprudence y relative, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.
On rappellera que le défaut de renseignement dans une situation où une obligation de renseigner est prévue par la loi, ou lorsque les circonstances concrètes du cas particulier auraient commandé une information de l'assureur, est assimilé à une déclaration erronée qui peut, sous certaines conditions, obliger l'autorité (ou l'assureur) à consentir à un administré un avantage auquel il n'aurait pu prétendre en vertu du principe de la protection de la bonne foi découlant de l'art. 9 Cst. (ATF 131 V 472 consid. 5 p. 480).
D'après la jurisprudence, il faut que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées (a), qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences (b) et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu (c). Il faut également que celui-ci se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice (d), et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (e) (ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636 s. et les références citées). Ces principes s'appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante: que l'administré n'ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu'il n'avait pas à s'attendre à une autre information (ATF 131 V 472 consid. 5 p. 480).
4.
La cour cantonale a retenu que l'assurance-chômage avait correctement informé l'assuré sur son obligations de remettre les formules IPA pour chaque période de contrôle. A cet égard, elle a constaté que l'assuré avait participé à la séance d'information générale à l'intention des personnes inscrites au chômage et reçu les documents usuels sur les obligations des chômeurs (pochette ORP), que la conseillère ORP en charge de son dossier avait expressément attiré son attention sur le fait que l'obligation de fournir les IPA persistait même si la question de l'aptitude au placement faisait l'objet d'une procédure par l'OCE, information qui lui avait également été rappelée par la caisse par courrier les 19 mai et 22 septembre 2011. La cour cantonale s'est ensuite référée à la jurisprudence du Tribunal fédéral pour considérer que les mentions écrites sur les formules IPA (qui reproduisent le texte légal de l'art. 20 al. 3 LACI) suffisaient en soi à répondre de manière appropriée à l'obligation faite à la caisse de rendre l'assuré attentif à la perte de son droit à l'indemnité en cas de négligence. En ce qui concerne les justifications données par l'intéressé (naissance de jumeaux, deux procédures ouvertes par l'OCE en l'espace de quelques mois, attitude hostile d'un employé de la caisse à son égard), elle a estimé qu'elles ne constituaient pas un empêchement de déposer les IPA dans le délai. Enfin, l'assuré ne pouvait rien tirer en sa faveur de l'entretien téléphonique qu'il avait eu avec sa conseillère ORP en date du 4 avril 2012. En effet, cet entretien n'avait pas porté sur la question des formules IPA, de sorte qu'il n'y avait pas eu de renseignement erroné à ce sujet. Par conséquent, la caisse était fondée à refuser les prestations du 1er septembre 2011 au 30 avril 2012 en raison de la péremption du droit à l'indemnité.
5.
5.1. Au vu des constatations du jugement attaqué, on doit admettre que le recourant ne pouvait ignorer que la contestation de la décision d'inaptitude au placement de l'OCE ne changeait rien à son obligation de remettre les formules IPA. Par ailleurs, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que l'intimée n'était pas tenue de répéter l'avertissement donné au préalable sur les formules IPA avant de prononcer une décision de refus de prestations fondée sur le non-respect du délai de l'art. 20 al. 3 LACI. Le recourant n'avance aucun motif sérieux qui justifierait de revenir sur la jurisprudence constante en la matière (arrêts 8C_320/2010 du 14 décembre 2010 consid. 6.1, C 12/05 du 13 avril 2006 consid. 4.2.2., DTA 1998 p. 283 consid. 1b et les arrêts cités). On rappellera que la formule IPA est conçue de telle manière que la personne assurée doit apposer sa signature avec l'indication du lieu et de la date juste en dessous de l'avertissement suivant: "La caisse ne pourra effectuer aucun versement, si le formulaire n'est pas dûment complété ou que des annexes manquent. Le droit aux prestations de l'assurance expire, si personne ne l'a fait valoir au cours de trois mois qui suivent la période de contrôle à laquelle il se rapporte. Toute indication inexacte ou incomplète peut entraîner la suppression des prestations ou l'ouverture d'une plainte. Les prestations versées à tort doivent être restituées". Or le recourant en a pris connaissance - cela est démontré par le fait qu'il a fourni ces documents dûment signés et en temps utile pour les périodes de contrôle des mois d'avril, mai, juin, juillet et août 2011 - et n'expose nullement en quoi les termes de cet avertissement ne lui auraient pas permis de comprendre les conséquences d'une inaction de sa part.
5.2. En vérité, ce n'est pas un défaut d'information qui explique son omission. Le recourant l'admet du reste lui-même quand il déclare, dans son écriture, qu'il a cessé de respecter ses obligations de chômeur en réaction à l'ouverture de la seconde procédure de l'OCE et à l'arrêt du versement des prestations par la caisse. Il ne pouvait toutefois pas raisonnablement penser que s'il manquait à ses obligations vis-à-vis de l'assurance-chômage, cela resterait sans effet sur son droit aux prestations au cas où il obtiendrait gain de cause sur la question de son aptitude au placement. En réagissant ainsi, il s'est lui-même mis dans une situation contradictoire dont il ne saurait, de bonne foi, en faire le reproche à la caisse sous prétexte d'une information défaillante.
5.3. Pour terminer, c'est à tort que le recourant se prévaut d'une violation du devoir de conseil de la part de sa conseillère ORP à l'occasion de leur entretien du 4 avril 2012. En effet, comme on l'a vu, le recourant connaissait ses obligations relatives aux formules IPA et ce n'est pas l'absence de renseignement à ce sujet qui l'a conduit à négliger d'y donner suite. Contrairement à ce qu'il semble croire, le devoir de conseil de l'assureur social au sens de l'art. 27 al. 2 LPGA n'implique pas que celui-ci donne à titre préventif des informations dont on peut admettre qu'elles sont connues de manière générale (cf. arrêt 9C_894/2008 du 18 décembre 2008 consid. 3.2, in RSAS 2009 p. 132). La conseillère ORP n'avait donc aucune raison d'interpeller l'assuré au sujet des formules IPA alors que celui-ci lui avait uniquement fait part du fait qu'il n'effectuait plus de recherches d'emploi depuis septembre 2011 et qu'il avait recouru contre la décision sur opposition de l'OCE. Cela étant, le conseil qu'elle lui a donné en se fondant sur ces déclarations - à savoir demander la clôture du dossier - n'a pas porté préjudice au recourant puisque l'OCE a ultérieurement réactivé son dossier à partir de la date d'annulation de celui-ci.
5.4. Vu ce qui précède, le recourant n'a pas à être placé dans la situation qui aurait été la sienne s'il avait déposé les formules IPA dans le délai légal. Le recours se révèle mal fondé.
6.
Le recourant, qui succombe doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et au Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO).
Lucerne, le 16 juillet 2015
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Leuzinger
La Greffière : von Zwehl