BGer 1B_239/2015 |
BGer 1B_239/2015 vom 29.09.2015 |
{T 0/2}
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1B_239/2015
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Arrêt du 29 septembre 2015 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
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Merkli, Eusebio, Chaix et Kneubühler.
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Greffière : Mme Tornay Schaller.
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Participants à la procédure
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recourant,
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contre
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Ministère public du canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
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Tribunal des mesures de contrainte du canton de Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3.
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Objet
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Procédure pénale ; conditions de détention à la prison de Champ-Dollon,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 5 juin 2015.
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Faits : |
A. Arrêté le 7 mars 2013, A.________ se trouve en détention provisoire au sein de la prison de Champ-Dollon, dans le cadre d'une procédure pénale dirigée contre lui notamment pour diverses infractions à la liberté, au patrimoine et à l'intégrité corporelle.
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Selon le rapport du Directeur de la prison du 2 décembre 2014, le prénommé a passé 12 nuits (du 8 au 20 mars 2013), 18 nuits (du 21 mars au 8 avril 2013), 1 nuit (du 3 au 4 mai 2013), 2 nuits (du 24 au 26 août 2013), 7 nuits (du 26 septembre au 3 octobre 2013), 2 nuits (du 5 au 7 octobre 2013), 2 nuits (du 25 au 27 octobre 2013), 2 nuits (du 28 au 30 octobre 2013), 30 nuits (du 2 novembre au 2 décembre 2013), 184 nuits (du 7 décembre au 9 juin 2014), 68 nuits (du 23 juin au 30 août 2014), 14 nuits (du 1 er au 15 septembre 2014), 62 nuits (du 18 septembre au 19 novembre 2014), 3 nuits (du 25 au 28 novembre 2014), 6 nuits (du 5 au 11 décembre 2014), 42 nuits (du 13 décembre 2014 au 24 janvier 2015), 8 nuits (du 27 janvier au 4 février 2015) dans une cellule d'une surface nette de 10,18 m 2 hébergeant trois détenus, laissant à disposition de chacun d'entre eux un espace individuel net de 3,39 m 2.
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Du 7 décembre 2013 au 19 novembre 2014, les différentes périodes de séjours dans cette cellule ont été interrompues par 14 nuits (du 9 juin au 23 juin 2014), 2 nuits (du 30 août au 1 er septembre 2014) et 3 nuits (du 15 au 18 septembre 2014) : A.________ a alors disposé d'un espace individuel net allant de 5,09 à 10,18 m 2.
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Le 30 janvier 2015, le prénommé a formé auprès du Tribunal des mesures de contrainte du canton de Genève (Tmc) une requête visant au constat de l'illicéité de ses conditions de détention notamment pendant 389 nuits. Par ordonnance du 9 février 2015, le Tmc a constaté que les conditions dans lesquelles s'était déroulée la détention du prénommé respectaient les exigences légales. La Chambre pénale de recours de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours interjeté par le prévenu contre cette ordonnance, par arrêt du 5 juin 2015.
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Par jugement du 12 juin 2015, le Tribunal correctionnel du canton de Genève a reconnu le prévenu coupable de violation de domicile, dommages à la propriété, vol, brigandage aggravé et l'a condamné à une peine privative de liberté de 5 ans, sous déduction des jours de détention avant jugement.
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B. Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 5 juin 2015 et de constater que les conditions dans lesquelles s'est déroulée la détention provisoire sont illicites. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision au sens des considérants. Il sollicite en outre l'octroi de l'assistance judiciaire.
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Le Ministère public du canton de Genève conclut au rejet du recours. Le Tmc renonce à formuler des observations et maintient les termes de son ordonnance du 9 février 2015. La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. Le recourant a répliqué par courrier du 21 juillet 2015.
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Considérant en droit : |
1. Selon l'art. 78 LTF, le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions rendues en matière pénale, dont font partie les décisions relatives aux conditions de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté (arrêt 1B_369/2013 du 26 février 2014 consid. 1, non publié in ATF 140 I 125). La recevabilité du recours en matière pénale dépend notamment de l'existence d'un intérêt juridique actuel à l'annulation de la décision entreprise (art. 81 al. 1 let. b LTF). De cette manière, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non de prendre des décisions à caractère théorique, ce qui répond à un souci d'économie de procédure (ATF 136 I 274 consid. 1.3 p. 276). En tant qu'il a vu rejetées ses conclusions en constatation du caractère irrégulier de sa détention, le recourant a intérêt à l'annulation de l'arrêt attaqué.
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Les autres conditions de recevabilité ne posent pas de question particulière, de sorte qu'il convient d'entrer en matière.
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2. Le recourant reproche à la Cour de justice d'avoir refusé de constater le caractère illicite de sa détention provisoire en raison du fait qu'il n'avait pas demandé à occuper une place de travail. Il se prévaut d'une violation de l'art. 3 CEDH, sous l'angle de la violation de son droit à la constatation, par une décision, de l'irrégularité constitutive d'une violation d'une garantie conventionnelle ou constitutionnelle qui a entaché la procédure relative à sa détention.
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2.1. Au niveau conventionnel, l'art. 3 CEDH prévoit que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Sur le plan constitutionnel, l'art. 7 Cst. prescrit de son côté que la dignité humaine doit être respectée et protégée. A teneur de l'art. 10 al. 3 Cst., la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits. La Constitution genevoise prévoit aussi que la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits (art. 18 al. 2 Cst./GE) et que la dignité humaine est inviolable (art. 14 al. 1 Cst./GE).
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Au niveau législatif, l'art. 3 al. 1 CPP rappelle le principe du respect de la dignité humaine. L'art. 234 al. 1 CPP prévoit qu'en règle générale, la détention provisoire et pour des motifs de sûreté est exécutée dans des établissements réservés à cet usage et qui ne servent qu'à l'exécution de courtes peines privatives de liberté. L'art. 235 CPP régit l'exécution de la détention; il pose le principe général de proportionnalité (al. 1) et précise (al. 5) que les cantons règlent les droits et les obligations des prévenus en détention (sur l'exécution de la détention, voir MATTHIAS HÄRRI, Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2010, ad art. 234 et 235 CPP).
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Dans le canton de Genève, les droits et les obligations des détenus sont définis par le règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées du 30 septembre 1985 (RRIP; RSG F 1 50.04) : ainsi, chaque cellule est équipée de manière à permettre une vie décente et conforme aux exigences de la salubrité (art. 15 al. 1); les détenus peuvent se doucher régulièrement (art. 16); en règle générale, ils bénéficient d'une heure de promenade par jour dans les cours réservées à cet usage et peuvent, dans les limites déterminées, se livrer à des exercices physiques (art. 18); le service médical de la prison prodigue des soins en permanence (art. 29); les détenus ont droit à un parloir par semaine, limité à deux visiteurs, en présence d'un fonctionnaire de la prison et pendant une heure au maximum (art. 37). Le règlement précité ne contient en revanche aucune disposition plus précise concernant l'aménagement, l'équipement, la dimension des cellules ou la surface dont doit bénéficier chaque détenu à l'intérieur de celles-ci.
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2.2. Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, en application de l'art. 15 (b) du Statut du Conseil de l'Europe (RS 0.192.030), a adopté le 11 janvier 2006 la Recommandation Rec (2006) 2 sur les Règles pénitentiaires européennes (RPE), lesquelles s'inscrivent dans les précédentes recommandations établies dès 1989. L'art. 1 RPE pose que les personnes privées de liberté doivent être traitées dans le respect des droits de l'homme. Les art. 17 à 22 RPE traitent des locaux de détention, de l'hygiène, de la literie et du régime alimentaire: ainsi, les locaux de détention doivent satisfaire aux exigences de respect de la dignité humaine et, dans la mesure du possible, de la vie privée, et répondre aux conditions minimales requises en matière de santé et d'hygiène, compte tenu des conditions climatiques, notamment en ce qui concerne l'espace au sol, le volume d'air, l'éclairage et l'aération (art. 18.1); les fenêtres doivent être suffisamment grandes pour que les détenus puissent lire et travailler à la lumière naturelle dans des conditions normales, et pour permettre l'entrée d'air frais, sauf s'il existe un système de climatisation approprié (art. 18.2.a); la lumière artificielle doit être conforme aux normes techniques reconnues en la matière (art. 18.2.b); les locaux d'une prison doivent être maintenus en état et propres à tout moment (art. 19.1); les détenus doivent jouir d'un accès facile à des installations sanitaires hygiéniques et protégeant leur intimité (art. 19.3); les installations de bain et de douche doivent être suffisantes pour que chaque détenu puisse les utiliser à une température adaptée au climat (art. 19.4); chaque détenu doit disposer d'un lit séparé et d'une literie individuelle convenable, entretenue correctement et renouvelée à des intervalles suffisamment rapprochés pour en assurer la propreté (art. 21); la nourriture doit être préparée et servie dans des conditions hygiéniques (art. 22.3) et les détenus doivent avoir accès à tout moment à l'eau potable (art. 22.5). Tout détenu doit avoir l'opportunité, si le temps le permet, d'effectuer au moins une heure par jour d'exercice en plein air (art. 27.1).
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Ces règles ont été précisées dans un Commentaire établi par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ci-après: CPT). S'agissant des conditions de logement, le CPT a arrêté quelques standards minimaux: l'espace au sol disponible est estimé à 4 m 2 par détenu dans un dortoir et à 6 m 2 dans une cellule (individuelle); ces conditions d'hébergement doivent cependant être modulées en fonction des résultats d'analyses plus approfondies du système pénitentiaire; le nombre d'heures passées en dehors de la cellule doit être pris en compte; en tout état, ces chiffres ne doivent pas être considérés comme la norme. A titre d'exemple, le CPT considère comme étant souhaitable pour une cellule individuelle une taille de 9 à 10 m 2; pour deux personnes la taille devrait être comprise entre 9 et 14,7 m 2et mesurer environ 23 m 2 pour trois personnes ( MORGAN/EVANS, Prévention de la torture en Europe: les normes du CPT en matière de détention par la police et de détention préventive, 2002, p. 34). S'agissant de la literie, le CPT précise que celle-ci comprend tout l'équipement standard d'un lit (sommier, matelas et couverture).
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Les RPE - et a fortiori leur commentaire - ont le caractère de simples directives à l'intention des Etats membres du Conseil de l'Europe. Cependant, en tant que reflet des traditions juridiques communes à ces Etats, le Tribunal fédéral en tient compte de longue date dans la concrétisation de la liberté personnelle et des autres droits fondamentaux garantis par la Cst. et par la CEDH. On parle à leur propos de "code de la détention pénitentiaire" ou de "soft law", néanmoins relativement contraignante pour les autorités (ATF 140 I 125 consid. 3.5 p. 135 et les références citées). Contrairement au droit fédéral ou cantonal pertinent, ce corpus de normes juridiques a le mérite de donner des précisions concernant l'aménagement, l'équipement, la dimension des cellules ou la surface souhaitables dont doit bénéficier chaque détenu à l'intérieur de celles-ci.
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2.3. La Cour européenne des droits de l'homme a aussi été amenée à statuer sur les conditions de détention dans des arrêts, que la Suisse s'est engagée à respecter (art. 46 ch. 1 CEDH et 122 LTF). Il ressort de la jurisprudence de la CourEDH que même si les mesures privatives de liberté s'accompagnent inévitablement de souffrance et d'humiliation, cela n'emporte pas en soi la violation de l'art. 3 CEDH. Pour enfreindre cette disposition, les conditions matérielles de détention doivent atteindre un niveau d'humiliation ou d'avilissement supérieur à ce qu'emporte habituellement la privation de liberté. Cela impose ainsi à l'Etat de s'assurer que les modalités de détention ne soumettent pas la personne détenue à une détresse ou à une épreuve d'une intensité qui excède le niveau inévitable de souffrance inhérent à une telle mesure et que, eu égard aux exigences pratiques de l'emprisonnement, sa santé et son bien-être sont assurés de manière adéquate (ATF 140 I 125 consid. 3.4 et 3.5 p. 134-136 et les références citées; pour un résumé des arrêts de la CourEDH en la matière, voir DAMIEN SCALIA, Droit international de la détention, 2015, p. 150 ss.). Pour atteindre le minimum de gravité requis, plusieurs éléments préjudiciables doivent être combinés ( BÉATRICE BELDA, L'innovante protection des droits du détenu élaborée par le juge européen des droits de l'homme, AJDA 2009 p. 409). Un simple inconfort ne suffit pas ( HOTTELIER/MOCK/ PUÉCHAVY, La Suisse devant la Cour européenne des droits de l'homme, 2011, p. 94). La CourEDH a ainsi notamment pris en compte - par rapport à l'exiguïté des cellules - des facteurs supplémentaires, tels que l'accès insuffisant à la lumière et à l'air naturels, la chaleur excessive associée à un manque de ventilation, le partage des lits entre prisonniers, les installations sanitaires dans la cellule et visibles de tous et l'absence de traitement adéquat pour les pathologies du détenu ainsi que la durée de la détention (cf. les nombreux arrêts cités dans l'opinion dissidente des Juges Zagrebelsky et Jociené de l'affaire
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2.4. S'agissant de la jurisprudence fédérale relative aux conditions de détention, le Tribunal fédéral a jugé qu'en cas de surpopulation carcérale telle que la connaît la prison de Champ-Dollon, l'occupation d'une cellule dite individuelle par trois détenus - chacun disposant d'un espace individuel de 4 m
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En revanche, l'occupation d'une cellule dite triple par six détenus avec une surface individuelle inférieure à 3,83 m 2 - restreinte encore par le mobilier - peut constituer une violation de l'art. 3 CEDH si elle s'étend sur une longue période et si elle s'accompagne d'autres mauvaises conditions de détention. Il faut dès lors considérer la période pendant laquelle le recourant a été détenu dans les conditions incriminées. Une durée qui s'approche de trois mois consécutifs (délai que l'on retrouve en matière de contrôle périodique de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté; cf. art. 227 al. 7 CPP) apparaît comme la limite au-delà de laquelle les conditions de détention susmentionnées ne peuvent plus être tolérées. En effet, si les conditions de détention provisoire peuvent être plus restrictives lorsque les risques de fuite, de collusion et de récidive sont plus élevés, ou lorsque l'ordre et la sécurité dans la prison sont particulièrement mis en danger, cela ne vaut pas lorsque la durée de la détention provisoire est de l'ordre de trois mois. Ce délai ne peut cependant pas être compris comme un délai au sens strict du terme mais comme une durée indicative à prendre en compte dans le cadre de l'appréciation globale de toutes les conditions concrètes de détention. La durée très limitée des périodes que le recourant est autorisé à passer hors de la cellule aggrave encore la situation (une heure de promenade en plein air par jour) (ATF 140 I 125 consid. 3.6.3 p. 138 s.).
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2.5. En l'occurrence, le 2 décembre 2014, le Directeur de la prison a établi, à la requête du Tmc, un rapport relatif aux conditions de détention du recourant. Il en ressort que les cellules dites individuelles ont été équipées, entre le 2 et le 30 septembre 2013, de deux lits voire trois (dont un lit rabattable); en présence d'un troisième détenu, celui-ci dort sur un matelas à même le sol; la prison n'identifie pas le détenu qui dort à même le sol. Les places de travail sont attribuées par ordre chronologique; le délai d'attente est de l'ordre de six mois. Les détenus qui vont bénéficier d'un travail doivent séjourner à l'aile Est; les horaires de travail oscillent entre 1h00 et 5h45 par jour, tous les jours ou une semaine sur deux.
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Les délais d'attente pour les consultations médicales dépendent de la gravité du cas; les consultations urgentes sont immédiatement garanties, les autres peuvent attendre jusqu'à un mois (consultation médicale somatique non urgente), voire plusieurs mois (consultation psychologique non urgente). Tous les détenus bénéficient d'une heure de promenade quotidienne à l'air libre, d'une heure de sport par semaine dans la salle de gymnastique et ils peuvent, en plus, pratiquer du sport dans la petite salle de l'unité pendant une heure, deux ou trois jours par semaine, de manière cyclique.
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2.5.1. A l'instar du Tmc, la Cour de justice a considéré qu'en refusant de s'inscrire pour obtenir une place de travail, le recourant avait volontairement renoncé à une amélioration de ses conditions de détention. Elle a en effet exposé que le recourant savait qu'en travaillant, il aurait pu passer entre 1h00 et 5h45 de plus hors de sa cellule. S'il avait exprimé le souhait de travailler, il aurait pu bénéficier, au plus tard, d'une place de travail à partir du 8 septembre 2013. Sa plainte concernant les conditions de détention était ainsi incompatible avec l'effort minimal qui pouvait être exigé de lui, soit s'inscrire sur la liste d'attente pour une place de travail, puis travailler.
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Pour le reste, la Cour de justice a laissé indécise la question de savoir si la période allant du 23 juin au 19 novembre 2014 - pendant laquelle le recourant disposait d'un espace individuel net de 3,39 m 2 - pouvait être considérée comme un continuum, dès lors qu'elle avait été interrompue par 2 puis 3 nuits où il bénéficiait d'un espace supérieur.
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2.5.2. En l'occurrence, il y a deux périodes consécutives critiques pendant lesquelles le prévenu a séjourné dans une cellule de moins de 4 m
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La seconde période allant du 23 juin au 19 novembre 2014 doit être considérée comme un séjour de 149 jours ininterrompu, les très brèves interruptions de deux puis de trois jours sur les 144 que le recourant a passés dans une cellule avec 3,39 m 2 n'étant pas prises en compte.
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Quant à la période de 14 jours passée dans une cellule de plus de 5 m 2entre les deux laps de temps précités, il y a lieu de l'évaluer dans le cadre d'une appréciation globale qui tienne compte de toute la durée de la détention, de la durée précédant la période d'interruption et des autres conditions concrètes de détention (nombre journalier d'heures passées hors de la cellule; possibilité de travailler; visites; hygiène; installations sanitaires; régime alimentaire; éclairage; aération). L'espace individuel net largement inférieur à 4 m 2 (3,39 m 2 ) dont disposait le recourant doit notamment être pris en considération. Compte tenu de la longue période le précédant (184 jours) et de celle tout aussi longue lui succédant (149 jours), le laps de temps de 14 jours n'est pas suffisamment long pour interrompre le délai indicatif de trois mois au-delà duquel les conditions de détention ne sont plus tolérables et sont contraires à la dignité humaine. Il n'est pas susceptible de justifier l'ouverture d'une nouvelle période de trois mois, durant laquelle le recourant peut tolérer une surface individuelle nette inférieure à 4 m 2.
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Dans la constatation du nombre de jours pendant lesquels les conditions de détention ont été illicites, il y a cependant lieu de retrancher les jours durant lesquels les conditions de détention ont été conformes à l'art. 3 CEDH. En l'espèce, du 7 décembre 2013 au 19 novembre 2014 (347 jours), le recourant a passé 19 nuits dans une cellule lui laissant un espace individuel net allant de 5,09 à 10,18 m 2. Ses conditions de détention ont donc été contraires à l'art. 3 CEDH pendant 328 jours.
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2.5.3. La question litigieuse qui demeure est celle savoir si le fait de ne pas demander à occuper une place de travail permet de rendre les conditions de détention telles que décrites ci-dessus conformes à l'art. 3 CEDH, dans la mesure où l'exercice d'un travail diminue le temps passé en cellule et améliore ainsi les conditions de détention.
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La possibilité de sortir de la cellule, entre 1h00 par jour et 5h45 par jour une semaine sur deux, est certes susceptible d'alléger les conditions de détention. Cette seule circonstance ne suffit cependant pas en soi, dans la situation telle que décrite précédemment de la prison de Champ-Dollon, à rendre ces conditions de détention conformes à l'art. 3 CEDH. Même dans l'hypothèse d'une prise de travail par le détenu - ce qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer comme étant une certitude -, les périodes du 7 décembre 2013 au 9 juin 2014 (184 jours) et du 23 juin au 19 novembre 2014 (149 nuits) auraient ainsi aussi, très vraisemblablement, été qualifiées de contraires à la dignité humaine.
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Par ailleurs, le Ministère public a souligné que le comportement du lésé devait être pris en compte dans l'interprétation de l'atteinte à la dignité humaine, en se référant à l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Ribitsch contre Autriche du 4 décembre 1995 (§ 38). Cette affaire ne concerne toutefois pas la problématique des conditions de détention mais celle du recours à la force des agents de police à l'encontre d'une personne détenue illégalement en garde à vue. La CourEDH a précisé que le comportement du détenu entrait uniquement en considération lorsqu'il avait provoqué l'usage de la force physique. On ne saurait assimiler un tel acte avec l'attitude, certes désinvolte, du recourant qui a simplement renoncé à s'inscrire pour obtenir un travail au sein de la prison.
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2.6. Il s'ensuit que le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé. Le Tribunal fédéral constate que les conditions de détention du recourant n'ont pas été conformes aux standards minimaux durant 328 jours, entre le 7 décembre 2013 et le 19 novembre 2014.
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3. Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge du canton de Genève (art. 68 al. 1 LTF). Dans ces conditions, sa demande d'assistance judiciaire pour la présente procédure est sans objet. Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF).
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Les frais et dépens de la procédure cantonale peuvent également être fixés dans le présent arrêt (art. 67 et 68 al. 5 LTF). Les dépens sont ainsi arrêtés de manière globale pour les procédures cantonale et fédérale, et les frais judiciaires de l'instance cantonale sont laissés à la charge du canton de Genève.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est admis. L'arrêt du 5 juin 2015 de la Cour de justice du canton de Genève et l'ordonnance du Tmc du 9 février 2015 sont annulés. Il est constaté que les conditions dans lesquelles s'est déroulée la détention provisoire et pour des motifs de sûreté du recourant ont été illicites pendant 328 jours (entre le 7 décembre 2013 et le 19 novembre 2014).
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2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure fédérale et les frais judiciaires de la procédure cantonale sont laissés à la charge du canton de Genève.
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3. Une indemnité de dépens globale de 3'000 francs est allouée au mandataire du recourant, pour les procédures fédérale et cantonale, à la charge du canton de Genève. La demande d'assistance judiciaire pour la procédure fédérale est sans objet.
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4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Genève, au Tribunal des mesures de contrainte du canton de Genève et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours.
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Lausanne, le 29 septembre 2015
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Fonjallaz
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La Greffière : Tornay Schaller
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