Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
1B_7/2016
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Arrêt du 25 janvier 2016
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Merkli et Chaix.
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Olivier Francioli, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
Objet
Détention provisoire,
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 16 décembre 2015.
Faits :
A.
Le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne instruit une enquête pénale contre A.________ notamment pour lésions corporelles simples au préjudice du partenaire ( art. 123 ch. 1 et 2 al. 4 CP ), mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP) et viol (art. 190 ch. 1 CP). Il lui est reproché d'avoir, dans la nuit du 28 au 29 novembre 2015, pénétré sa compagne - contre son gré -, vaginalement et analement, de l'avoir serrée au cou lorsqu'elle se débattait jusqu'à ce qu'elle perde connaissance, et de l'avoir tirée par les cheveux pour la faire revenir sur le lit qu'elle tentait de quitter. Le prévenu l'aurait également empêchée de se réfugier dans la salle de bain et l'aurait ensuite tirée de force au salon où il l'aurait à nouveau pénétrée contre son gré.
La victime a déposé plainte pénale le 29 novembre 2015 et A.________ a été appréhendé ce même jour. Dans le cadre de son arrestation, il a été entendu le 30 novembre 2015 par le Procureur. Par ordonnance du 1er novembre 2015, le Tribunal des mesures de contrainte (Tmc) a ordonné la détention provisoire du prévenu pour trois mois.
B.
Le 16 décembre 2015, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours intenté par A.________ contre cette décision. La cour cantonale a retenu l'existence d'un risque de récidive et l'absence de mesures de substitution propres à le pallier. Elle a également estimé qu'eu égard à la durée de la détention subie, le principe de proportionnalité était respecté. Elle a enfin considéré comme irrecevable la conclusion en constatation de l'illicéité de la détention, faute d'être l'objet du litige; le Tmc étant l'autorité compétente pour statuer sur cette question, elle lui a renvoyé le dossier.
C.
Par acte du 7 janvier 2016, A.________ forme un recours en matière pénale contre ce jugement, concluant à son annulation et à sa libération immédiate. A titre subsidiaire, il demande en substance sa mise en liberté assortie des mesures de substitution suivantes : interdiction de s'approcher de la victime, interdiction de consommer de l'alcool, obligation de remettre à la direction de la procédure des rapports d'examens réguliers confirmant le respect de la précédente mesure, ainsi que le prononcé de toute autre mesure que le Tribunal fédéral jugera proportionnée. Il sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
Invitée à se déterminer, l'autorité précédente s'est référée à ses considérants. Quant au Ministère public, il a conclu au rejet du recours, produisant un rapport du Centre universitaire romand de médecine légale - unité de toxicologie et chimie forensiques - du 28 décembre 2015. Le 20 janvier 2016, le recourant a persisté dans ses conclusions.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre les décisions relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. Le recours a été formé dans le délai fixé à l'art. 100 al. 1 LTF contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF). Le recourant, dont le maintien en détention a été confirmé, a qualité pour agir (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
1.2. La pièce produite par le Ministère public à l'appui de ses déterminations est postérieure à l'arrêt attaqué et, par conséquent, irrecevable (art. 99 al. 1 LTF).
2.
Le recourant ne remet en cause ni l'existence de charges suffisantes à son encontre, ni la proportionnalité de la durée de la détention provisoire subie, ni l'irrecevabilité de sa conclusion en constatation de l'illicéité de sa détention.
Il conteste en revanche l'existence d'un risque de récidive. Selon lui, les circonstances d'espèce ne permettraient pas de retenir un tel danger au vu notamment de l'absence d'antécédent et d'autres indices sur sa prétendue dangerosité. Si ce risque devait tout de même être retenu, le recourant requiert la mise en oeuvre de mesures de substitution.
2.1. Une mesure de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité ( art. 36 al. 2 et 3 Cst. , 212 al. 3 CPP). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP).
2.2. Aux termes de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, la détention provisoire peut être ordonnée lorsqu'il y a lieu de craindre que le prévenu compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre.
La loi et par conséquent la jurisprudence imposent de faire preuve de retenue dans l'appréciation du risque de récidive : le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si les délits dont l'autorité redoute la réitération sont graves et si le pronostic est très défavorable. A cet égard, entrent notamment en compte la fréquence, ainsi que l'intensité des infractions constatées et le casier judiciaire (ATF 137 IV 84 consid. 3.2 p. 85 s.; arrêt 1B_50/2013 du 25 février 2013 consid. 4.3). La jurisprudence se montre toutefois moins sévère dans l'exigence de vraisemblance lorsqu'il s'agit de délits de violence graves, car le risque à faire courir aux victimes potentielles est alors considéré comme trop important; en pareil cas, il convient de tenir compte de l'état psychique du prévenu, de son imprévisibilité ou de son agressivité (ATF 140 IV 19 consid. 2.1.1 p. 21 s.; 137 IV 122 consid. 5.2 p. 129 s.; 123 I 268 consid. 2e p. 271). Lorsque les infractions examinées sont graves et que d'autres circonstances inquiétantes viennent s'y ajouter, la jurisprudence peut autoriser le maintien en détention jusqu'à la réception d'un premier avis d'expert psychiatre sur le risque de récidive (cf. en particulier arrêts 1B_232/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.2 et 3.3 [nombreuses infractions à la loi sur la circulation routière, récidive au cours de l'instruction, antécédents dont 7 pour des faits similaires]; 1B_94/2014 du 21 mars 2014 consid. 3.2 [mise en danger avec une arme à feu chargée par un prévenu sous traitement psychiatrique]; 1B_49/2014 du 19 février 2014 consid. 5.2 [meurtre, subsidiairement homicide par négligence, avec antécédents (condamnation pour injure et enquête en cours par la justice militaire pour insoumission)]; 1B_305/2013 du 26 septembre 2013 consid. 3.2 [instruction en raison notamment d'incendies intentionnels et de tirs perpétrés en état d'alcoolisation ou sous l'influence de stupéfiants, expertise psychiatrique en cours]; ATF 123 I 268 consid. 2e p. 271 s. [meurtres de l'épouse et d'un des fils du prévenu et tentative de meurtre sur l'autre fils]; a contrario 1B_351/2015 du 30 octobre 2015 consid. 3.2).
Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3-4 p. 18 ss). Le risque de récidive peut aussi se fonder sur les infractions faisant l'objet de la procédure pénale en cours, si le prévenu est fortement soupçonné - avec une probabilité confinant à la certitude - de les avoir commises (ATF 137 IV 84 consid. 3.2 p. 86). En revanche, une possibilité hypothétique de réitération, ainsi que la probabilité que des infractions de peu d'importance soient à nouveau perpétrées ne suffisent pas pour justifier la détention provisoire (ATF 140 IV 19 consid. 2.1.1 p. 22.; 135 I 71 consid. 2.3 p. 73).
2.3. En l'espèce, les faits reprochés au recourant sont extrêmement graves et violents; ils sont susceptibles d'être constitutifs de pas moins de quatre chefs d'infraction. Ils touchent en outre à l'intégrité corporelle et sexuelle de la victime.
Le recourant explique ses actes par des pratiques sexuelles particulières, ainsi que par son état d'alcoolisation. Selon lui, au vu de ces explications et de son absence d'antécédent, il ne pourrait pas être retenu l'existence de circonstances inquiétantes au sens de la jurisprudence susmentionnée. Contrairement à ce qu'il croit, tel est pourtant le cas. En effet, il a suffi au recourant de se retrouver - exceptionnellement selon ses dires - sous l'emprise de l'alcool pour ne plus savoir mettre de limite à ses comportements sexuels; il ne remet au demeurant pas en cause le possible caractère violent de ceux-ci. Il n'a ainsi plus été à même d'entendre l'opposition clairement manifestée par la victime - à plusieurs reprises vu le déroulement allégué des faits - et d'arrêter ses agissements, cela au détriment de la sécurité de la victime. Le recourant ne conteste d'ailleurs pas avoir pu la stranguler, comportement mettant indéniablement en danger la vie d'une personne. Il se justifie dès lors en l'occurrence de privilégier la sécurité tant de la victime que celle d'autrui. Une telle constatation s'impose d'autant plus que les justifications données ne tendent pas à démontrer que le recourant aurait pris conscience de la gravité de ses actes.
Partant, la Chambre des recours pénale a retenu à juste titre l'existence d'un risque de récidive.
Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur les griefs soulevés par le recourant en lien avec un possible danger de collusion, risque par ailleurs non examiné par la juridiction précédente.
2.4. En raison des remarques précédentes, il apparaît également que les mesures de substitution (art. 237 CPP) proposées par le recourant ne permettent pas en l'état d'assurer de manière suffisante la sécurité publique. Il n'y a en effet aucune garantie qu'il s'abstiendrait de prendre contact avec la victime ou de boire à nouveau. A ce stade, peu importe de savoir si le recourant est dépendant ou pas de l'alcool. Entre en revanche en considération le fait que les événements dénoncés ont été perpétrés lorsqu'il était sous cette emprise et qu'il paraît alors ne pas être capable de se maîtriser. Or, des contrôles de l'abstinence ne semblent, en l'état, pas suffisants pour éviter les éventuelles graves conséquences pouvant découler d'un nouvel écart. Il sied enfin de relever que la situation stable dont le recourant se prévaut (cf. ad 27 p. 8 du recours) ne paraît pas nécessairement assurée à l'avenir au vu de la possible perte de son emploi (cf. ad 6 p. 3 de cette même écriture).
Les circonstances d'espèce justifient dès lors d'attendre le rapport d'expertise psychiatrique requis. Celui-ci ne manquera pas de se prononcer sur le risque de réitération et sur les possibles mesures médicales permettant de le réduire. L'autorité peut également interpeller l'expert pour obtenir un avis préalable sur cette question, notamment dans le cadre d'une éventuelle prolongation de la détention.
2.5. Partant, la Chambre des recours pénale n'a pas violé le droit fédéral en confirmant la détention ordonnée par le Tmc le 1er novembre 2015.
3.
Il s'ensuit que le recours est rejeté.
Le recourant a sollicité l'octroi de l'assistance judiciaire et les conditions en paraissent réunies (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Olivier Francioli en qualité d'avocat d'office et de fixer ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Olivier Francioli est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.
3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de l'arrondissement de Lausanne et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 25 janvier 2016
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Fonjallaz
La Greffière : Kropf