Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
6B_909/2015
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Arrêt du 22 juin 2016
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
Greffière : Mme Musy.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Ilir Cenko, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de la République
et canton de Genève,
intimé.
Objet
Indemnités et réparation du tort moral,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale
de recours, du 10 juillet 2015.
Faits :
A.
Par ordonnance du 5 février 2015, le Ministère public genevois a ordonné le classement de la procédure ouverte à l'encontre de X.________. Il lui a alloué les montants de 739 fr. à titre d'indemnité pour perte de gain et de 11'320 fr. (99 jours à 30 fr. + 5 jours à 150 fr. + 76 jours à 100 fr.) à titre de réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité.
B.
Par arrêt du 10 juillet 2015, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a partiellement admis le recours de X.________ et annulé l'ordonnance entreprise en tant qu'elle n'allouait pas au recourant d'indemnité pour ses frais de séjour en Suisse et ses frais de déplacement aux audiences, et qu'elle n'assortissait pas d'intérêts les montants devant être accordés. Au titre de son dommage économique, elle a alloué à X.________ la somme de 852 fr. 80 avec intérêts à 5% dès le 9 juillet 2014 pour son entretien durant son séjour en Suisse du 18 juin au 31 juillet 2014 et les sommes de 699 euros 95 avec intérêts à 5% dès le 20 septembre 2014 et 495 euros avec intérêts à 5% dès le 18 novembre 2014 pour ses frais de déplacement aux audiences des 29 septembre et 20 novembre 2014. Elle lui a également alloué la somme de 11'320 fr. avec intérêts à 5% dès le 1
er mars 2014 pour le tort moral subi en raison de la détention injustifiée. Le montant de 739 fr. accordé par le Ministère public à titre d'indemnité pour perte de gain lui demeurait acquis pour le surplus.
Les faits retenus par la cour cantonale à l'appui de son arrêt sont les suivants.
X.________ a été condamné le 26 septembre 2013, pour infraction à la LStup, à une peine privative de liberté de 3 ans, avec sursis partiel à concurrence de 21 mois, sous déduction de 368 jours de détention provisoire. Le 28 novembre 2013, une altercation est survenue entre plusieurs détenus dans les cuisines de la prison de A.________, où X.________ était employé depuis le 31 janvier 2013. L'un des détenus a été poignardé; il a désigné plusieurs détenus albanais, dont X.________, comme étant les auteurs. X.________, qui devait être libéré le 23 décembre 2013, a été immédiatement sanctionné par la Direction de la prison d'une suppression de son emploi en cuisine et d'un placement en cellule forte d'une durée de cinq jours. Il a ensuite fait l'objet d'une mesure d'isolement afin d'éviter tout risque de collusion. Le 29 novembre 2013, une instruction pénale a été ouverte, dans le cadre de laquelle X.________ a été prévenu, le 6 décembre 2013, de complicité de tentative de meurtre, subsidiairement de complicité de lésions corporelles graves. Sur ordre du Ministère public, l'intéressé a subi une fouille corporelle complète et divers prélèvements (frottis sous-unguéaux, sang, urine) ont été effectués pour analyse. L'altercation a par ailleurs fait l'objet d'un article dans un quotidien genevois en décembre 2013, relatant l'ouverture d'une procédure pour tentative de meurtre impliquant trois prisonniers d'origine balkanique détenus à la prison de A.________ pour d'autres affaires.
Au terme de son audition par le Ministère public le 6 décembre 2013, X.________ a été placé en détention provisoire, ce qui a eu pour effet d'interrompre l'exécution de la peine qu'il purgeait. Par ordonnance du 8 décembre 2013, le Tribunal des mesures de contrainte (TMC) a confirmé sa mise en détention provisoire pour une durée de trois mois, puis, ultérieurement, la prolongation de celle-ci. A la requête de l'intéressé, la levée avec effet immédiat de la mesure d'isolement dont il faisait l'objet a été ordonnée par le Ministère public le 19 février 2014. Le 27 mai 2014, le TMC a ordonné la mise en liberté de X.________, moyennant diverses mesures de substitution, comprenant l'obligation de résider à Genève, une interdiction de quitter le territoire suisse, le dépôt de son passeport et d'une garantie de 10'000 fr. et l'obligation de se présenter deux fois par semaine à un poste de police ainsi que de donner suite à toute convocation par la police ou le Ministère public. X.________ est toutefois demeuré incarcéré à la prison de A.________ jusqu'au 18 juin 2014, en raison du solde de peine qu'il devait encore exécuter. Le 29 juillet 2014, le Ministère public a allégé les mesures de substitution imposées à X.________, ce dernier n'ayant plus à résider à Genève ni à se présenter deux fois par semaine au poste de police. Son passeport lui a été restitué le 31 juillet 2014 et il a regagné l'Albanie. Le recourant a été convoqué à des audiences du Ministère public les 29 septembre et 20 novembre 2014.
C.
Contre ce dernier arrêt, X.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et à sa réforme en ce sens que l'autorité cantonale lui octroie les sommes de 1'312 fr. 55 avec intérêts à 5% dès le 1
er juillet 2014, 1'741 fr. 55 avec intérêts à 5% dès le 1
er août 2014, 73 fr. 50 avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2014 et 1'197 euros 95 avec intérêts à 5% dès le 20 octobre 2014 à titre d'indemnité pour son dommage économique, ainsi qu'une indemnité pour son tort moral découlant de la détention injustifiée à hauteur de 36'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1
er mars 2014. A titre subsidiaire, il demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.
D.
Invités à se déterminer, la cour cantonale s'est référée à son arrêt et le Ministère public a conclu au rejet du recours.
Considérant en droit :
1.
Le recourant discute le montant de l'indemnité qui lui a été allouée en réparation de son dommage économique.
1.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. b CPP, le prévenu acquitté totalement ou en partie, ou qui bénéficie d'une ordonnance de classement, a le droit d'obtenir une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale.
Cette disposition vise essentiellement des pertes de salaires et de gains liées à l'impossibilité de réaliser une activité lucrative en raison du temps consacré à la participation aux audiences ou d'une mise en détention avant jugement. Elle concerne également l'éventuelle atteinte à l'avenir économique consécutif à la procédure, de même que les autres frais liés à la procédure, comme les frais de déplacement ou de logement (arrêt 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 4.1.1 et les références citées, destiné à la publication). En revanche, les dépenses privées et les pertes de temps, par exemple pour l'étude du dossier, ne sont en règle générale pas indemnisées.
L'évaluation du dommage économique se fait en application des règles générales en matière de responsabilité civile (art. 41 ss CO) (arrêt 6B_928/2014 précité consid. 4.1.2 et les références citées). Le dommage se définit comme la diminution involontaire de la fortune nette; il correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant que ce même patrimoine aurait si l'événement dommageable ne s'était pas produit. Il peut se présenter sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif (arrêts 6B_1061/2014 du 18 avril 2016 consid. 1.3.1, destiné à la publication; 6B_928/2014 précité consid. 4.1.2 et les références citées).
Le droit à des dommages et intérêts suppose l'existence d'un lien de causalité adéquat entre le dommage subi et la procédure pénale (FF 2006 1057 p. 1313; NIKLAUS SCHMID, Praxiskommentar StPO, 2013, n° 6 ad art. 429 CPP). Un fait constitue la cause adéquate d'un résultat s'il est propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 131 IV 145 consid. 5.1 p. 147). Pour savoir si un fait est la cause adéquate d'un préjudice, le juge procède à un pronostic rétrospectif objectif: se plaçant au terme de la chaîne des causes, il lui appartient de remonter du dommage dont la réparation est demandée au chef de responsabilité invoqué et de déterminer si, dans le cours normal des choses et selon l'expérience générale de la vie humaine, une telle conséquence demeure dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles (ATF 129 II 312 consid. 3.3 p. 318 et les arrêts cités).
A teneur de l'art. 42 al. 2 CO, lorsque le montant exact du dommage ne peut pas être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée. Cette disposition édicte une règle de preuve de droit fédéral dont le but est de faciliter au lésé l'établissement du dommage. Elle s'applique aussi bien à la preuve de l'existence du dommage qu'à celle de son étendue. L'art. 42 al. 2 CO allège le fardeau de la preuve, mais ne dispense pas le lésé de fournir au juge, dans la mesure du possible, tous les éléments de fait constituant des indices de l'existence du préjudice et permettant l'évaluation ex aequo et bono du montant du dommage. Les circonstances alléguées par le lésé doivent faire apparaître un dommage comme pratiquement certain; une simple possibilité ne suffit pas pour allouer des dommages-intérêts. L'exception de l'art. 42 al. 2 CO à la règle du fardeau de la preuve doit être appliquée de manière restrictive (arrêts 6B_1061/2014 précité consid. 1.3.1; 6B_928/2014 précité consid. 4.1.2 et les références citées).
1.2. Le recourant soutient que le coût d'un billet d'avion du 26 juin 2014 (500 fr.) et d'un billet de bus du 9 juillet 2014 (250 fr.), qu'il a acquis à ses frais en vue de permettre la visite de sa fiancée en Suisse en juillet 2014, constitue une dépense découlant directement de l'obligation imposée au recourant de demeurer à Genève durant les mois de juin et juillet 2014. Séparé de son amie depuis septembre 2012, soit près de deux ans, cette dépense était raisonnable et nécessaire, lui-même n'étant pas autorisé à quitter le territoire suisse pour regagner son domicile en Albanie.
Le lien de causalité adéquat entre la mesure d'interdiction de quitter le territoire suisse prononcée à l'encontre du recourant dans le cadre de la procédure pénale et les frais du voyage que celui-ci a décidé d'offrir à sa fiancée fait défaut. En effet, de tels frais relèvent d'une dépense privée (cf. NIKLAUS SCHMID, op. cit., n° 8 ad art. 429 CPP), à savoir le choix personnel du recourant d'offrir à sa fiancée le coût de son déplacement en Suisse pour lui rendre visite. Il ne s'agit donc pas de frais liés à la procédure au sens de l'art. 429 al. 1 let. b CPP. C'est à raison que la cour cantonale a exclu le remboursement de la somme de 750 fr. correspondant à l'achat de ces titres de transport.
1.3. Le recourant reproche à la cour cantonale de l'avoir indemnisé pour ses frais de séjour en Suisse sur la base d'une estimation abstraite de son préjudice, au demeurant erronée, alors qu'il avait pourtant chiffré et justifié le coût effectif de son séjour.
1.3.1. Le recourant a formé des prétentions en indemnisation à concurrence de 1'312 fr. 55 et 1'741 fr. 55 pour ses dépenses d'entretien en Suisse durant les mois de juin et juillet 2014 et produit les justificatifs y relatifs (produits d'alimentation, vêtements, frais de téléphone et billets de transport pour sa fiancée). Il n'a cependant fourni aucune indication sur les frais d'entretien qu'il aurait de toute façon eu à subir à son domicile en Albanie. Or, le recourant n'a pas droit au remboursement intégral de ses frais de séjour en Suisse, mais uniquement à la réparation du dommage résultant de la mesure de substitution prononcée. Il lui appartenait d'apporter au juge tous les éléments de fait permettant d'évaluer, au moins sur une base ex aequo et bono (cf. art. 42 al. 2 CO), la différence entre le montant actuel de son patrimoine et le montant que ce même patrimoine aurait s'il avait pu rentrer chez lui, en Albanie, dès sa mise en liberté. A cet égard, le recourant se limite à alléguer qu'il aurait pu subvenir à ses besoins grâce à ses revenus professionnels s'il avait été autorisé à regagner immédiatement l'Albanie à sa sortie de prison. Présentées pour la première fois devant le Tribunal fédéral, ces allégations de fait sont irrecevables, de même que les pièces nouvelles qui les accompagnent (art. 99 al. 1 LTF). Au demeurant, le recourant n'a jamais allégué avoir subi un dommage découlant d'une incapacité de gain en Suisse.
1.3.2. En conséquence, il y a lieu de retenir, faute de toute explication sur le coût supplémentaire résultant de son séjour contraint en Suisse par rapport aux dépenses qu'il aurait consenties pour son entretien en Albanie, que le recourant n'a pas établi son dommage économique sous cet angle. Son grief est par conséquent rejeté.
En vertu de l'interdiction de la
reformatio in pejus, il n'y a toutefois pas lieu de revenir sur l'indemnité de 852 fr. 80 avec intérêts à 5% dès le 9 juillet 2014 allouée par la cour cantonale au motif des frais d'entretien encourus en Suisse du 18 juin au 31 juillet 2014 (art. 107 al. 1 LTF). Cette indemnité demeure acquise au recourant. Au vu de ce qui précède, est sans objet la question de savoir si la cour cantonale aurait établi les faits de manière arbitraire en retenant que les dépenses d'entretien dont il sollicitait l'indemnisation comprenaient également les frais d'entretien de sa fiancée, la cour cantonale n'ayant d'ailleurs pas opéré de réduction de l'indemnité pour ce motif.
1.4. Le recourant discute le refus de la cour cantonale de l'indemniser pour ses frais d'assurance obligatoire pour le voyage dans l'espace Schengen effectué pour se rendre à l'audience devant le Ministère public (3 euros), ainsi que pour ses frais de téléphone (70 fr.) et d'autobus (3 fr. 50) alors qu'il se trouvait à Genève pour assister à cette audience. La cour cantonale n'ayant pas motivé ce refus, il se plaint, outre la violation de l'art. 429 al. 1 let. b CPP, d'une violation de son droit d'être entendu.
1.4.1. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270; 136 I 229 consid. 5.2 p. 236). La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision (arrêt 6B_1237/2014 du 24 mars 2015 consid. 3.1).
1.4.2. C'est à juste titre que la cour cantonale a exclu les frais de téléphone produits par le recourant, qui n'a pas établi le lien entre ces frais et les audiences convoquées dans le cadre de la procédure pénale. En tant qu'il allègue pour la première fois devant le Tribunal fédéral que ces frais correspondraient aux communications téléphoniques avec son avocat, le recourant procède de manière irrecevable (art. 99 al. 1 LTF). Par ailleurs, la motivation de la cour cantonale est suffisante eu égard au droit d'être entendu du recourant; en effet, il ressort de l'arrêt attaqué que les frais en question ne relevaient pas du dommage subi au titre de la participation obligatoire du recourant à la procédure pénale. Vu l'absence d'explication du recourant au sujet de ce poste allégué de dommage, une motivation plus détaillée n'était pas nécessaire. Il en va mutatis mutandis de ses frais d'assurance voyage et d'autobus, dont le lien de causalité naturel et adéquat avec la participation obligatoire du recourant à la procédure pénale n'a pas été suffisamment démontré par ce dernier.
Au vu de ce qui précède, les griefs pris à l'encontre de l'indemnité allouée pour le dommage économique sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité.
2.
Le recourant critique le montant de l'indemnité qui lui a été allouée à titre de réparation du tort moral pour la détention injustifiée.
2.1. Dans un premier moyen, le recourant se plaint d'un établissement manifestement inexact des faits. Selon lui, la cour cantonale aurait dû constater que son placement en cellule forte avait été ordonné par la Direction de la prison de A.________ dans le but d'éviter tout risque de collusion. Sa détention en cellule forte était ainsi en lien avec la procédure pénale, et dès lors pertinent pour l'indemnisation de l'atteinte grave à sa personnalité.
2.1.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer ceux-ci que s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 LTF), ce qu'il lui appartient d'exposer et de démontrer de manière claire et circonstanciée (art. 106 al. 2 LTF). La correction du vice soulevé doit en outre être susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 139 II 404 consid. 10.1 p. 445; 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62).
2.1.2. Le Ministère public a retenu que le placement du recourant en cellule forte constituait un facteur d'aggravation du tort moral. Il a par conséquent majoré, pour les 5 jours correspondant à ce régime de détention, le montant de l'indemnité journalière allouée au recourant pour la détention injustifiée. L'arrêt entrepris ne remet pas en cause cette majoration et, dans son recours devant le Tribunal fédéral, le recourant ne discute pas ce point. Le placement en cellule forte ayant été pris en compte dans le calcul de l'indemnisation du recourant, on ne discerne pas en quoi la correction du vice invoqué serait susceptible d'influer sur le sort de la cause. Le grief du recourant est dès lors irrecevable.
2.2. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu un montant de base de l'indemnité de 100 fr. par jour de détention.
2.2.1. Selon l'art. 429 al. 1 let. c CPP, le prévenu a droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.
Conformément à la jurisprudence rendue avant l'entrée en vigueur du CPP, qui garde sa portée sous l'empire du CPP (cf. arrêt 6B_1052/2014 du 22 décembre 2015, consid. 2.1), le montant de l'indemnité en matière de détention injustifiée doit être fixé en fonction de la gravité de l'atteinte portée à la personnalité (art. 49 al. 1 CO; ATF 135 IV 43 consid. 4.1 p. 47; 113 IV 93 consid. 3a p. 98). Il faut tenir compte de toutes les circonstances, notamment des effets négatifs de la détention sur l'intégrité physique, psychique ou encore sur la réputation de l'intéressé (ATF 112 Ib 446 consid. 5b/aa p. 458). Il appartient au demandeur d'invoquer et de prouver les atteintes subies (ATF 135 IV 43 consid. 4.1 p. 47; 117 IV 209 consid. 4b p. 218).
Selon la jurisprudence, un montant de 200 fr. par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (arrêt 6B_133/2014 du 18 septembre 2014 consid. 3.2 et les arrêts cités). Le taux journalier n'est qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral. Il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas (durée de la détention, retentissement de la procédure sur l'environnement de la personne acquittée, gravité des faits reprochés, etc.). Lorsque la détention injustifiée s'étend sur une longue période, une augmentation linéaire du montant accordé dans les cas de détentions plus courtes n'est pas adaptée, car le fait de l'arrestation et de la détention pèse d'un poids en tout cas aussi important que l'élément de durée pour apprécier l'atteinte que subit la personne incarcérée. Aussi, lorsque la durée de détention est de plusieurs mois, convient-il en règle générale de réduire le montant journalier de l'indemnité (arrêt 6B_111/2012 du 15 mai 2012 consid. 4.2; cf. ATF 113 Ib 155 consid. 3b p. 156).
La fixation de l'indemnité pour tort moral est une question d'appréciation, de sorte que le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité précédente a mésusé de son pouvoir d'appréciation en se fondant sur des considérations étrangères à la disposition applicable, en omettant de tenir compte d'éléments pertinents ou encore en fixant une indemnité inéquitable parce que manifestement trop faible ou trop élevée (arrêts 6B_928/2014 précité consid. 5.1; 6B_53/2013 du 8 juillet 2013, consid. 3.2 non publié in ATF 139 IV 243, in Pra 2013, n° 108 p. 835; 6B_111/2012 du 15 mai 2012 consid. 4.2; ATF 129 IV 22 consid. 7.2 p. 37).
2.2.2. En l'espèce, les autorités cantonales pouvaient tenir compte de la longue durée de détention pour s'écarter du montant de référence de 200 fr. par jour, applicable aux courtes durées de détention. La cour cantonale n'a, par ailleurs, pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que l'impact de la détention sur le recourant, qui était déjà incarcéré pour une durée de 15 mois, était nécessairement moindre que sur une personne qui n'avait jamais été arrêtée, même si ses conditions de détention s'étaient durcies par rapport au régime d'exécution de peine auquel il était auparavant soumis, qu'il n'avait encore jamais subi de prélèvements ni d'examen corporel approfondi et qu'il s'était vu privé de liberté quelques jours avant Noël. En effet, le fait que ses conditions de vie n'ont pas considérablement changé, d'un point de vue professionnel et social, du fait de sa mise en détention provisoire justifie une réduction de l'indemnité (cf. arrêt 6B_196/2014 du 5 juin 2014 consid. 1.4). De même n'était-il pas erroné de retenir que les conséquences négatives de la gravité des accusations portées contre le recourant devaient être relativisées dans la mesure où celui-ci avait déjà été condamné à une peine privative de liberté pour des infractions d'une gravité certaine. La frustration et le sentiment d'injustice que le recourant soutient avoir ressenti sont communs à toute personne placée en détention avant qu'une décision d'acquittement ou de classement ne soit rendue, de sorte que ces sentiments ne constituent pas encore des facteurs aggravants. La cour cantonale pouvait également retenir que la médiatisation de l'affaire avait été toute relative puisque l'identité des protagonistes n'avait pas été dévoilée dans l'article paru dans la presse et que le cercle des personnes qui avaient pu faire le lien entre la bagarre intervenue dans les cuisines de la prison de A.________ était demeuré circonscrit à la prison. S'agissant des conditions de détention à la prison de A.________, réputées difficiles, il appartient au prévenu de faire état des effets concrets que ces circonstances ont eues sur sa personne (arrêt 6B_928/2014 précité consid. 5.2). La seule évocation, par le recourant, de la surpopulation carcérale ne saurait dès lors suffire à justifier une augmentation de l'indemnité.
En tous les cas, il faut rappeler que l'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie (ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 704 s. et les arrêts cités). Or, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le recourant aurait spécialement mal vécu sa détention provisoire ni qu'elle lui aurait causé des souffrances particulières, et le recourant n'établit pas que l'absence d'une telle constatation de fait serait arbitraire.
2.2.3. Au regard de ce qui précède, il n'apparaît pas que l'autorité précédente se serait fondée sur des considérations étrangères à la disposition applicable, ou aurait omis de tenir compte d'éléments pertinents. La base d'indemnisation de 100 fr. demeure dans les limites de son pouvoir d'appréciation, compte tenu de la longue durée de détention du recourant (180 jours de détention provisoire intervenus alors que le recourant exécutait déjà une peine de 15 mois), et de l'absence de facteurs d'aggravation du tort moral, à tout le moins de facteurs qui ne puissent être relativisés par d'autres circonstances - sous réserve des placements en cellule forte puis en isolement qui fondent le droit à une majoration de l'indemnité pour les périodes concernées. Le cas d'espèce se distingue ainsi des arrêts 6B_437/2014 (constatant une violation du droit fédéral dans la mesure où la cour cantonale avait retenu un montant de base journalier de 100 fr. en se fondant sur sa seule pratique, alors qu'en l'absence de circonstance particulière l'indemnité pour détention injustifiée de courte durée est de 200 fr. par jour) et 6B_133/2014 (dans le cadre duquel de nombreux facteurs d'aggravation devaient être pris en compte, en particulier le handicap mental du prévenu) mentionnés par le recourant. Il est encore précisé que le recourant ne peut rien déduire de particulier des arrêts 6B_745/2009 et 6B_53/2013, qu'il cite également, car le rejet d'un recours du prévenu contre la quotité de l'indemnisation fixée à 200 fr. signifie uniquement que celle-ci n'était pas trop basse, mais non pas qu'une indemnisation inférieure n'eût pas aussi été encore compatible avec le pouvoir d'appréciation qu'accorde l'art. 429 al. 1 let. c CPP. Le grief du recourant à l'encontre de la base d'indemnisation retenue par la cour cantonale est infondé.
2.3. Le Ministère public, suivi en cela par la cour cantonale, a réduit à 30 fr. par jour l'indemnité de base de 100 fr. pour les 180 jours de détention au motif du domicile du recourant en Albanie, montant qu'il a ensuite majoré pour tenir compte des périodes de détention en cellule forte et en isolement. Il a ainsi fixé à une indemnité journalière de 30 fr. pour les 99 jours de détention dans des conditions "normales", de 100 fr. pour les 76 jours passés en isolement et de 150 fr. pour les 5 jours de cellule forte. Le recourant soutient que la réduction de l'indemnité en raison du coût de la vie plus faible à son domicile serait contraire au droit. Il invoque également une violation de son droit d'être entendu sous l'angle d'une motivation insuffisante.
2.3.1. Conformément à la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral en relation avec l'indemnisation des victimes LAVI, il n'y a en principe pas lieu de prendre en considération les frais d'entretien au domicile de l'ayant droit lors de la fixation de l'indemnité pour tort moral. L'indemnité doit ainsi être fixée sans égard au lieu de vie de l'ayant droit et à ce qu'il va faire de l'argent obtenu (ATF 125 II 554 consid. 4a p. 559; 123 II 10 consid. 4c p. 13). Toutefois, dans la mesure où le bénéficiaire domicilié à l'étranger serait exagérément avantagé en raison des conditions économiques et sociales existant à son lieu de domicile, il convient d'adapter l'indemnité vers le bas (ATF 125 II 554 consid. 4a p. 559; 123 III 10 consid. 4 p. 11 ss). L'ampleur de l'indemnité pour tort moral doit être justifiée compte tenu des circonstances particulières, après pondération de tous les intérêts, et ne doit donc pas paraître inéquitable. Cela signifie que, lorsqu'il faut prendre exceptionnellement en considération un coût de la vie plus faible pour calculer une indemnité pour tort moral, on ne peut pas procéder schématiquement selon le rapport du coût de la vie au domicile du demandeur avec celui de la Suisse ou à peu près selon ce rapport. Sinon, l'exception deviendrait la règle (ATF 125 II 554 consid. 4a p. 559). Ainsi le Tribunal fédéral a-t-il admis une réduction, non schématique, de l'indemnité pour tort moral lorsque les frais d'entretien au domicile de l'intéressé sont beaucoup plus bas (ATF 125 II 554 consid. 4a p. 559: Voïvodine, pouvoir d'achat 18 fois plus élevé, permettant une réduction de l'indemnité, réduction toutefois ramenée de 14 fois à 2 fois; arrêt 1A.299/2000 du 30 mai 2001 consid. 5c: Bosnie Herzégovine, pouvoir d'achat 6 à 7 fois plus élevé permettant une réduction de l'indemnité de 75%, jugée élevée par le Tribunal fédéral mais demeurant néanmoins dans les limites du pouvoir d'appréciation de la cour cantonale; arrêt 1C_106/2008 du 24 septembre 2008 consid. 4.2: Portugal, coût de la vie correspondant à 70 % du coût de la vie suisse ne justifiant pas de réduction).
2.3.2. La cour cantonale a dûment rappelé les principes qui précèdent, avant de réduire le montant de l'indemnité allouée au recourant au motif des frais d'entretien beaucoup plus bas à son domicile. Elle a ainsi implicitement écarté les développements du recourant contestant l'application de ces principes dans le cadre de la fixation de l'indemnité selon l'art. 429 al. 1 let. c CPP. Cette motivation permet de comprendre le raisonnement suivi par la cour cantonale, que le recourant est en mesure de critiquer. Cela suffit à exclure la violation du droit d'être entendu invoquée. Par ailleurs, les principes développés en matière d'indemnisation du tort moral dans le cadre de la LAVI doivent également s'appliquer à l'indemnité pour tort moral définie à l'art. 429 al. 1 let. c CPP, d'où il s'ensuit que les développements du recourant étaient infondés (arrêt 6B_1052/2014 précité consid. 2.4; WEHRENBERG/FRANK, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2ème éd., 2014, n° 29 ad art. 429 CPP; cf. aussi DONATSCH/SCHMID, Kommentar zur Strafprozessordnung des Kantons Zürich, 2007, tome I, n° 20 ad par. 43).
Il reste à examiner si, comme le soutient le recourant, la quotité de la réduction pratiquée en l'espèce viole le droit fédéral.
2.3.3. La cour cantonale a considéré que la réduction de 70% pratiquée par le Ministère public au motif du domicile du recourant en Albanie était conforme, tant dans son principe que dans sa quotité, à la jurisprudence. Ni le Ministère public ni la cour cantonale n'ont cependant expliqué comment ils étaient parvenus à ce résultat. L'autorité précédente a seulement constaté, dans ses considérants relatifs au dommage économique résultant de la procédure pénale, que le pouvoir d'achat en Albanie était considérablement moins élevé qu'en Suisse. La consultation du site internet dont l'adresse est indiquée dans l'arrêt attaqué révèle que le facteur de conversion pour la parité du pouvoir d'achat est de 0,45 en Albanie et de 1,49 en Suisse.
Même à supposer que ces indications soient suffisantes sous l'angle du droit d'être entendu, ce qui est très discutable, elles conduisent à admettre une violation du pouvoir d'appréciation de l'autorité précédente. En effet, en jugeant la réduction de 70% raisonnable, la cour cantonale semble s'être laissée guider exclusivement par la différence de pouvoir d'achat entre les deux pays: l'indemnité pour tort moral accordée au recourant est environ 3,3 fois inférieure à celle qu'aurait obtenu un ayant droit vivant en Suisse, ce qui correspond à la différence de pouvoir d'achat entre les deux pays selon le site internet consulté par la cour cantonale. Une telle diminution schématique de l'indemnité pour tort moral est inadmissible et conduit à un résultat disproportionné (consid. 2.3.1 supra, en particulier arrêt 1C_106/2008 consid. 4.2 précité). Le recours doit par conséquent être admis sur ce point.
3.
L'arrêt attaqué est annulé dans la mesure où il condamne l'État de Genève à verser au recourant la somme de 11'320 fr. avec intérêts à 5% dès le 1
er mars 2014 à titre de réparation du tort moral (art. 429 al. 1 let. c CPP). La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle indique précisément les différences de niveaux de vie de la Suisse et de l'Albanie sur lesquelles elle se fonde et, cas échéant, qu'elle détermine, pour les 180 jours de détention, une nouvelle réduction de l'indemnité de 100 fr. ou renonce à opérer une telle réduction. Partant de l'indemnité journalière nouvellement arrêtée, elle adaptera les majorations pour les périodes de placement en isolement et en cellule forte.
Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
4.
Le recourant a requis l'assistance judiciaire. Il peut prétendre à une indemnité de dépens réduite (art. 68 al. 1 LTF), ce qui rend sa demande d'assistance judiciaire sans objet dans cette mesure. Le recours était, pour le surplus, dénué de chance de succès, si bien que l'assistance judiciaire doit être refusée dans cette mesure ( art. 64 al. 1 et 2 LTF ). Le recourant supporte des frais réduits en raison de l'issue de la cause et de sa situation financière (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est partiellement admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée, dans la mesure où elle n'est pas sans objet.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
La République et canton de Genève versera au recourant une indemnité de 2000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours.
Lausanne, le 22 juin 2016
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
La Greffière: Musy