BGer 4A_53/2016 |
BGer 4A_53/2016 vom 13.07.2016 |
{T 0/2}
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4A_53/2016
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Arrêt du 13 juillet 2016 |
Ire Cour de droit civil |
Composition
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Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, Présidente, Kolly et Hohl.
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Greffière : Mme Godat Zimmermann.
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Participants à la procédure
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X.________ SA, représentée par Me François Dugast,
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recourante,
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contre
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Z.________,
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intimé.
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Objet
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exigence de la double instance (art. 75 al. 2 LTF); transmission de la cause,
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recours contre la sentence arbitrale rendue le
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22 décembre 2015 par la Chambre des relations collectives de travail du canton de Genève.
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Faits : |
A. Dans le litige l'opposant à X.________ SA (ci-après: l'entreprise) avec siège à..., Z.________ (ci-après: le syndicat) a requis, en date du 11 mars 2015, l'intervention de la Chambre genevoise des relations collectives de travail (CRCT). Dans sa requête, le syndicat invoque la volonté de l'entreprise de baisser les salaires avec menace de licenciements, à la suite de l'abandon du taux plancher du franc suisse par la Banque nationale suisse (BNS). Le 9 juin 2015, le syndicat et l'entreprise ont conclu un accord par-devant la CRCT.
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Le 18 septembre 2015, le syndicat a déposé une deuxième requête en conciliation auprès de la CRCT. Il reprochait à l'entreprise d'avoir, en violation de l'accord du 9 juin 2015, réduit le salaire de tous ses employés de 5% avec effet au 1er juillet 2015. Dans ses conclusions, il demandait à la CRCT de "faire appliquer l'accord et de [faire] rembourser les 5% de salaires manquants pour les mois de juillet et août 2015". Il concluait en outre à ce que les sanctions qui s'imposent soient prises à l'encontre de l'entreprise.
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Une première séance a eu lieu le 1er octobre 2015; l'entreprise a fait défaut. A cette occasion, le syndicat a allégué que les collaborateurs de l'entreprise lui ayant communiqué leur fiche de salaire avaient été licenciés par lettres des 24 et 25 septembre 2015.
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Une seconde audience a eu lieu le 1er décembre 2015. Le syndicat a déclaré alors avoir saisi la juridiction des prud'hommes pour licenciements abusifs; il a maintenu par ailleurs les conclusions prises devant la CRCT. Pour sa part, l'entreprise n'a pas contesté avoir procédé à une réduction de 5% du salaire des employés, mais a fait valoir qu'à l'exception des trois employés représentés par le syndicat, les autres travailleurs avaient accepté la baisse; en outre, l'entreprise a nié que les licenciements fussent des mesures de combat, alléguant qu'ils avaient été prononcés sur la base de motifs individuels concrets.
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Par sentence arbitrale du 22 décembre 2015, la CRCT a constaté que l'accord du 9 juin 2015 avait été violé (par l'entreprise) et que les travailleurs dont les salaires avaient été réduits de 5% depuis le 1er juillet 2015 en violation de l'accord du 9 juin 2015 disposaient à l'encontre de l'entreprise d'une créance correspondant au montant réduit; elle a par ailleurs annoncé prendre, par décision séparée du même jour, des ordonnances pénales pour violation de l'interdiction de mesures de combat (art. 12 LCRCT) et pour non-comparution à l'audience du 1er octobre (art. 18 LCRCT); elle a indiqué enfin que la sentence arbitrale pouvait faire l'objet d'un recours auprès du Tribunal fédéral.
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B. X.________ SA interjette un recours en matière civile, concluant à l'annulation de la sentence arbitrale et au renvoi de la cause à la CRCT.
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Z.________ propose la confirmation de la sentence.
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La CRCT a déposé des observations dans lesquelles elle conclut au rejet du recours.
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Considérant en droit : |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 140 IV 57 consid. 2 p. 59; 139 V 42 consid. 1 p. 44).
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1.1. La CRCT, qui a rendu la décision attaquée, est une instance cantonale instituée par la loi genevoise concernant la Chambre des relations collectives de travail du 29 avril 1999 (LCRCT; RS/GE J 1 15). Son président est élu par le parlement cantonal; les juges assesseurs sont choisis, par leurs pairs, parmi des membres de la juridiction des prud'hommes (art. 4 LCRCT). La CRCT est notamment compétente pour prévenir et concilier les différends d'ordre collectif concernant les conditions de travail (art. 1 al. 1 let. a LCRT); en cas de conciliation, l'accord des parties, revêtu de la signature du président et du secrétaire, déploie les effets d'un jugement exécutoire (art. 8 al. 2 LCRCT).
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A l'origine, la CRCT était également compétente pour juger certains litiges en instance judiciaire cantonale unique (art. 1 al. 1 let. d et art. 9 aLCRCT), notamment pour trancher tout litige qui lui était soumis par une organisation professionnelle lorsque celle-ci avait la qualité pour agir selon le droit fédéral et que le litige concernait les rapports de travail (art. 9 al. 3 aLCRCT). L'arrêt rendu par la CRCT en qualité d'instance judiciaire cantonale unique était exécutoire sous réserve de recours au Tribunal fédéral (art. 9 al. 5 aLCRCT). Ces dispositions ont été abrogées par la modification législative du 27 mai 2011, entrée en vigueur le 27 septembre 2011.
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La CRCT est toujours compétente pour trancher les différends collectifs comme Tribunal arbitral public (art. 1 al. 1 let. e LCRCT); elle peut statuer comme Tribunal arbitral public sur tout litige qui lui est soumis d'entente entre les parties (art. 10 al. 1 LCRCT). A l'origine, la loi précisait que le concordat intercantonal sur l'arbitrage (du 27 mars 1969) n'était pas applicable et que la sentence arbitrale n'était pas susceptible de recours sur le plan cantonal (art. 10 al. 3 et 4 aLCRCT); ces dispositions ont été supprimées au 1er janvier 2011 (modification du 28 novembre 2010), date de l'entrée en vigueur du code de procédure civile fédéral (CPC).
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1.2. Lorsqu'elle agit en qualité de Tribunal arbitral public, la CRCT est une instance publique cantonale. Sa composition et la détermination de son siège étant soustraites au choix des parties, la CRCT n'est pas un tribunal arbitral au sens des art. 353 ss CPC. Un recours direct au Tribunal fédéral sur la base de l'art. 77 al. 1 LTF est dès lors exclu. Au demeurant, il ne ressort pas du dossier que la recourante et l'intimé auraient soumis la cause à la CRCT d'entente entre eux; en réalité, l'intimé a ouvert action comme si l'art. 9 al. 3 aLCRCT était encore en vigueur.
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En l'espèce, la CRCT a statué en tant qu'autorité judiciaire cantonale de première instance. Sa décision, comme jugement étatique, n'est pas non plus susceptible d'être attaquée directement devant le Tribunal fédéral. En effet, le recours en matière civile est ouvert contre une décision cantonale pour autant qu'elle ait été rendue par un tribunal supérieur du canton, lequel, sauf exceptions n'entrant pas en ligne de compte en l'espèce, aura statué sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF).
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Il s'ensuit que le recours est irrecevable. En vertu du droit fédéral, une voie de recours cantonale doit être ouverte contre une décision judiciaire de première instance de la CRCT. Le recours est dès lors transmis pour suite utile à la Cour de justice, autorité judiciaire supérieure du canton de Genève (cf. ATF 139 III 252 consid. 1.6 p. 255 s.).
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2. La recourante s'est fiée à l'indication erronée des voies de recours par la CRCT; dans ces conditions, il se justifie de ne pas percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Comme les parties n'ont pas traité le problème qui se posait, aucune d'elles n'obtient gain de cause, de sorte qu'il convient de ne pas allouer de dépens (art. 68 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est irrecevable.
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2. La cause est transmise à la Cour de justice du canton de Genève.
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3. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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4. Il n'est pas alloué de dépens.
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5. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des relations collectives de travail.
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Lausanne, le 13 juillet 2016
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Au nom de la Ire Cour de droit civil
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du Tribunal fédéral suisse
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La Présidente : Kiss
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La Greffière : Godat Zimmermann
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