BGer 1B_233/2016 |
BGer 1B_233/2016 vom 27.07.2016 |
{T 0/2}
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1B_233/2016
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Arrêt du 27 juillet 2016 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Eusebio, Juge présidant,
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Chaix et Kneubühler.
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Greffière : Mme Kropf.
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Participants à la procédure
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recourant,
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contre
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Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
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Objet
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Procédure pénale, demande de récusation des inspecteurs de police,
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recours contre la décision du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois du 2 juin 2016.
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Faits : |
A. Dans le cadre l'instruction menée à son encontre pour infraction grave à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121), A.________ a demandé, le 6 novembre 2015, la récusation du Procureur en charge de l'enquête, ainsi que celle des inspecteurs B.________, C.________, voire de l'inspectrice D.________. La première de ces requêtes a été admise le 25 février 2016 sur recours par le Tribunal fédéral (cause 1B_435/2015). Quant à la seconde, elle a été rejetée, s'agissant des deux premiers inspecteurs susmentionnés, le 2 juin 2016 par le nouveau Procureur saisi de cette cause.
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B. Par acte du 28 juin 2016, A.________ forme un recours en matière pénale contre cette décision, concluant à son annulation et à l'admission de sa requête de récusation des inspecteurs B.________ et C.________. Il sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire.
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Invité à se déterminer, le Ministère public a conclu au rejet du recours. Par courrier du 8 juillet 2016, le recourant a renoncé à déposer d'autres observations.
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Considérant en droit : |
1. Conformément aux art. 78 et 92 al. 1 LTF, une décision incidente relative à la récusation dans le cadre d'une procédure pénale peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale. Les décisions rendues par le Ministère public relatives à la récusation de policiers sont susceptibles d'un recours direct auprès du Tribunal fédéral (art. 59 al. 1 let. a, 380 CPP et 80 al. 2 in fine LTF; ATF 138 IV 222 consid. 1.1 et 1.2 p. 223 s.). L'auteur de la demande de récusation a qualité pour recourir (art. 81 al. 1 LTF). Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et les conclusions qui y sont prises sont recevables (art. 107 al. 2 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière.
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2. Dans un premier grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu. Il soutient à cet égard ignorer si des déterminations des inspecteurs ont été versées au dossier, mais que, si tel est le cas, elles ne lui auraient pas été transmises.
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2.1. Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens des art. 29 Cst. et 6 CEDH, le droit d'être entendu - rappelé en matière pénale à l'art. 3 al. 2 let. c CPP - garantit notamment le droit pour une partie à un procès de prendre connaissance de toute pièce du dossier ainsi que de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à leur propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 p. 52 s.). Il appartient en effet aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier appelle des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 138 I 484 consid. 2.1 p. 485 s.). Ces considérations valent également lorsque le juge renonce à ordonner un second échange d'écritures. En revanche, le droit de répliquer n'impose pas à l'autorité judiciaire l'obligation de fixer un délai à la partie pour déposer d'éventuelles observations; elle doit seulement laisser à la partie un laps de temps suffisant, entre la remise des documents et le prononcé de sa décision, pour qu'elle ait la possibilité de déposer des observations si elle l'estime nécessaire (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 p. 53 s.).
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En matière de récusation, l'art. 58 al. 2 CPP prévoit que la personne concernée par cette demande prend position sur celle-ci. Cette disposition est impérative. Elle tend à permettre l'établissement des faits et à garantir le respect du droit d'être entendu, tant de la personne concernée que de l'auteur de la demande de récusation auquel un droit de réplique doit, le cas échéant, être accordé. Cette mesure d'instruction a toute son importance, puisque l'administration d'autres preuves est en principe limitée, voire exclue (art. 59 al. 1 CPP) et qu'aucune autorité cantonale de recours n'est susceptible de revoir les faits (art. 59 al. 1 et 380 CPP; ATF 138 IV 222 consid. 2.1 p. 224).
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2.2. En l'occurrence, il ressort des observations du Ministère public du 5 juillet 2016 que les déterminations des enquêteurs ont été versées au dossier en novembre 2015. Le Procureur relève également qu'elles n'ont pas été communiquées expressément au conseil du recourant. Il ne prétend cependant pas que le recourant en aurait eu connaissance par un autre biais, relevant au contraire qu'il appartenait à celui-ci de requérir l'accès au dossier, notamment en application de l'art. 101 CPP.
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Le Ministère public omet cependant de prendre en considération le rôle particulier qui lui incombe en matière de récusation de policiers. Dans cette procédure, il n'agit ni en tant qu'autorité de poursuite pénale proprement dite (cf. art. 12 let. b et 16 CPP), ni en qualité de partie (cf. en particulier art. 104 al. 1 let. c CPP). Il est en effet appelé à trancher en première et unique instance cantonale la demande de récusation (cf. art. 59 al. 1 let. a CPP). Il lui appartient en conséquence, en tant qu'autorité de décision, de s'assurer que les droits du requérant, respectivement des policiers concernés, sont respectés au cours de cette procédure. Cela implique en particulier, non seulement d'interpeller les inspecteurs concernés (art. 58 al. 2 CPP), mais également d'offrir au requérant l'opportunité de se déterminer sur les observations éventuellement déposées par ceux-ci (dans ce sens, YVAN JEANNERET, Le droit de répliquer en procédure pénale, in FRANÇOIS BOHNET [édit.], Le droit de réplique, 2013, p. 169 ss, ad ch. 20 p. 181). Contrairement à ce que soutient le Ministère public, l'existence d'un éventuel droit d'accès au dossier - qui dépend par ailleurs de l'initiative d'une partie - ne décharge pas l'autorité de ses propres obligations dans le cadre de la procédure de récusation (ATF 138 IV 222 consid. 2.1 et 2.2 p. 224 s.), à savoir en particulier la transmission de toute pièce versée au dossier (ATF 138 I 484 consid. 2.1 p. 485 s.).
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Partant, faute de transmission des observations des policiers au recourant, le droit d'être entendu de ce dernier a été violé et ce grief doit être admis.
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2.3. La procédure devant le Tribunal fédéral - qui se prononce sur recours contre une décision rendue par une autorité cantonale statuant en instance unique (art. 59 al. 1 et 380 CPP) - ne permet pas de considérer que ce vice pourrait être guéri devant lui. La violation du droit d'être entendu constatée entraîne donc l'annulation de la décision entreprise, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 2.8.1 destiné à la publication et les arrêts cités).
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3. Il s'ensuit que le recours est admis. La décision du 2 juin 2016 du Ministère public est annulée et la cause est renvoyée à cette autorité pour qu'elle procède au sens des considérants, puis rende une nouvelle décision.
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Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF); sa requête d'assistance judiciaire est dès lors sans objet. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est admis. La décision du 2 juin 2016 du Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois est annulée et la cause est renvoyée à cette autorité pour qu'elle procède au sens des considérants.
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2. La requête d'assistance judiciaire est sans objet.
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3. Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée au mandataire du recourant, à la charge du canton de Vaud.
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4. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
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5. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant et au Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois.
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Lausanne, le 27 juillet 2016
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Juge présidant : Eusebio
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La Greffière : Kropf
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