Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
6B_146/2016
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Arrêt du 22 août 2016
Cour de droit pénal
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jametti et Pont Veuthey, Juge suppléante.
Greffière : Mme Cherpillod.
Participants à la procédure
X.________, représentée par
Me Sébastien Thüler, avocat,
recourante,
contre
Ministère public central du canton de Vaud,
intimé.
Objet
Injure, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, contravention à la LStup,
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 30 novembre 2015.
Faits :
A.
Par jugement du 30 juin 2015, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a reconnu X.________ coupable d'injure, de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, d'empêchement d'accomplir un acte officiel, de contravention à la LStup et à la loi vaudoise sur les contraventions. Il l'a condamnée à 480 heures de travail d'intérêt général et à une amende de 500 fr., la peine privative de liberté de substitution étant de 5 jours. Il a renoncé à révoquer le sursis accordé le 30 octobre 2012 par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, a prolongé le délai d'épreuve d'un an et demi et a mis les frais de justice à la charge de X.________.
B.
Par jugement du 30 novembre 2015, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté l'appel de X.________, confirmé le jugement du 30 juin 2015 et statué sur les frais et dépens.
Les faits encore pertinents ici au vu des griefs soulevés sont les suivants:
Le 28 mai 2014, vers 23 h 05, à la rue A.________ à Lausanne, X.________ a été interpellée en possession de deux joints de marijuana. Un bol contenant un mélange de tabac et de marijuana a également été trouvé à proximité.
Le 29 mai 2014, vers 00 h 05, à la rue B.________ à Lausanne, une patrouille de police a tenté de contrôler l'identité de X.________ car elle correspondait au signalement d'une femme qui avait, dans la soirée précédente, bouté le feu à des catalogues à la rue C.________. Fortement alcoolisée, X.________ s'est montrée agressive envers les policiers. Elle gesticulait, une canette à la main. Un des agents lui a demandé de poser la canette, elle a refusé et s'est mise à hurler tout en continuant à se démener. Finalement, les agents l'ont mise au sol pour lui passer les menottes mais elle s'est débattue pour les en empêcher. Elle a été conduite au poste de police et durant le transfert elle a tenté de donner des coups de pieds aux agents. Un test à l'éthylomètre indiquait une alcoolémie de 2,78 g 0/00.
Le 16 décembre 2014, vers 22 h 32, à la place D.________ à Lausanne, X.________, sous l'influence de l'alcool, hurlait des propos incompréhensibles dans la rue, attirant l'attention des passants. Des agents sont intervenus et lui ont demandé à plusieurs reprises de cesser ses agissements et de présenter ses papiers. Elle a refusé et traité le premier lieutenant E.________ de « grand connard ». Elle a été menottée et amenée à l'Hôtel de police où a été ordonnée une fouille complète. Elle a refusé d'obtempérer aux injonctions de l'agent F.________. Affectant de lui jeter des cartons au visage, elle a ensuite donné un coup à la tempe gauche de la policière qui lui avait saisi le bras droit. X.________ l'a alors agrippée par les cheveux et le col de son pull et l'a traitée de « salope ». Elle a refusé de se soumettre à un éthylotest et à l'Identiscan tout en continuant à injurier les agents de police. E.________ et F.________ ont déposé plainte le même jour.
Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, X.________ a été condamnée, entre 2006 et 2012, à deux reprises pour dommage à la propriété, utilisation abusive d'une installation de télécommunication et menace.
Considérant en droit :
1.
La recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue sous l'angle d'un défaut de motivation. En bref, s'agissant des faits survenus le 28 mai 2014, elle considère que l'autorité précédente s'est contentée de retenir que la simple détention de stupéfiants était punissable sans examiner si les conditions de l'infraction étaient réalisées en l'occurrence.
1.1. Le Tribunal fédéral a déduit du droit d'être entendu, consacré par l'art. 29 al. 2 Cst., le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse en saisir la portée et, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565).
1.2. L'autorité précédente a exposé de manière suffisante les éléments qui l'ont amenée à retenir la culpabilité de la recourante. En particulier, cette dernière avait d'abord indiqué être propriétaire de la marchandise pour ensuite se rétracter et soutenir qu'elle l'avait « bêtement » prise des mains des deux toxicomanes avec qui elle discutait et qui avaient fui à l'approche de la police. Or, comme l'a souligné la cour d'appel, la recourante n'apporte pas le début d'un indice que sa version serait crédible. Le rapport de police ne fait état d'aucune fuite ni de la présence de tiers à son arrivée. L'autorité précédente souligne également que la simple détention de stupéfiants étant punissable, la condamnation est justifiée sans qu'il soit nécessaire de discuter de la question de la propriété des stupéfiants. La motivation permet de comprendre le raisonnement suivi pour retenir la culpabilité de la recourante. Elle a été comprise par la recourante qui a été en mesure de la critiquer comme l'en atteste son recours. Quant à l'argumentation supposée insuffisante de la simple détention de stupéfiants par rapport à la propriété de stupéfiants, elle n'est pas convaincante. Il n'était pas nécessaire que l'autorité précédente développe plus avant la notion de détention de stupéfiants dans la mesure où la recourante, également dans son recours au Tribunal fédéral, ne conteste pas les faits, à savoir qu'au moment de l'intervention de la police, elle détenait sans droit des stupéfiants. Elle en est donc détentrice au sens de l'art. 19 al. 1 let. d LStup, qui lui est applicable. La réalisation de l'élément subjectif de l'infraction ne fait pas non plus de doute.
Partant le grief de violation du droit d'être entendu est infondé, tout comme celui d'une violation de l'art. 19 al. 1 let. d LStup.
2.
Arguant d'une violation de l'art. 29 Cst., la recourante se plaint que l'autorité précédente a refusé d'administrer la preuve tendant à la production des images de vidéo surveillance. S'agissant des faits survenus les 28 et 29 mai 2014, elle reproche à l'autorité précédente d'avoir fondé son refus sur l'absence d'une requête idoine.
2.1. La garantie constitutionnelle de l'art. 29 al. 2 Cst. prévoit que toute personne a le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision à rendre, de participer à l'administration des preuves valablement offertes, à moins que le fait à prouver ne soit dépourvu de pertinence ou que le moyen de preuve n'apparaisse manifestement inapte à établir le fait allégué, et de se déterminer à leur propos (ATF 132 V 368 consid. 3.1 p. 370 s. et les références; 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 III 576 consid. 2c p. 578; 127 I 54 consid. 2b p. 56).
2.2. Il ressort du jugement attaqué que l'autorité précédente a renoncé à administrer les preuves invoquées par la recourante, car elle estimait non seulement que de ces preuves n'avaient pas été requises correctement, mais également à titre subsidiaire car rien n'établissait que les images évoquées par la recourante existent. Cette seconde motivation suffisait à sceller le sort de la cause. Faute pour la recourante d'exposer que celle-ci aurait été contraire au droit, son grief est irrecevable (cf. ATF 138 I 97 consid. 4.1.4 p. 100).
3.
S'agissant des faits survenus le 29 mai 2014, la recourante invoque une violation de l'art. 19 CP. Elle critique à cet égard la fiabilité du test à l'éthylomètre effectué et conclut à son irresponsabilité pour cause de consommation excessive d'alcool. Elle conteste que l'on puisse lui imputer une
actio libera in causa au sens de l'art. 19 al. 4 CP.
3.1. Aux termes de l'art. 19 CP, l'auteur n'est pas punissable si, au moment d'agir, il ne possédait pas la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation (al. 1). Le juge atténue la peine si, au moment d'agir, l'auteur ne possédait que partiellement la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation (al. 2). Si l'auteur pouvait éviter l'irresponsabilité ou la responsabilité restreinte et prévoir l'acte commis en cet état, les al. 1 à 3 ne sont pas applicables (al. 4). L'art. 19 al. 4 CP vise celui qui abolit ou qui réduit ses facultés d'apprécier le caractère illicite de l'acte ou de se déterminer d'après cette appréciation, intentionnellement ou par une imprévoyance coupable. Il n'est pas nécessaire que le délinquant ait voulu l'infraction (dol simple), mais il suffit qu'il ait accepté la possibilité de commettre une infraction (dol éventuel) ou qu'il ait pu ou dû se rendre compte ou tenir compte du fait qu'en diminuant ses facultés, il s'exposait au danger de commettre une infraction (négligence; cf. Message du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse [dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal] et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, FF 1999 II 1813 ch. 212.42).
3.2. En l'état la question de savoir si l'alcoolémie de la recourante le 29 mai 2014 était celle constatée par le test d'éthylomètre (2,78 g 0/00) ou était supérieure comme l'affirme la recourante de manière non convaincante peut rester ouverte. La recourante, qui n'a pas soutenu ne se souvenir de rien, n'a pas qualifié son comportement d'inhabituel, aberrant ou incompréhensible. Elle avait déjà eu affaire à la police pour des abus de consommation de stupéfiants et leurs conséquences (cf. pièce 14 citée par le jugement entrepris où elle reconnaît des antécédents de consommation de stupéfiants sur la voie publique et de chute d'un mur et condamnation pour trouble à l'ordre public). Dans ces circonstances, l'autorité précédente pouvait constater sans arbitraire qu'en buvant de l'alcool de manière excessive - la recourante soutenant qu'une alcoolémie supérieure à 2,78 g 0/00 aurait dû être retenue - la recourante savait qu'elle pouvait avoir des comportements inadéquats du type de celui adopté le 29 mai 2014. Dans ces conditions, retenir que la recourante avait à tout le moins par dol éventuel accepté la possibilité de commettre l'infraction et donc lui opposer l'art. 19 al. 4 CP, rendant inapplicable les al. 1 et 2 de cette disposition, ne prête pas flanc à la critique. Le grief de violation de l'art. 19 CP est ainsi infondé.
4.
La recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir accordé aux déclarations des policiers qui ont servi de base à l'élaboration du rapport de police une force probante accrue alors qu'elle conteste les faits qui se sont produits le 16 décembre 2014.
4.1. La présomption d'innocence, garantie par l'art. 32 al. 1 Cst., ainsi que son corollaire le principe
in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. L'appréciation des preuves est violée lorsque le juge, qui s'est déclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité du prévenu au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 36 s.). Dans cette mesure, elle se confond avec l'interdiction générale de l'arbitraire, prohibant une appréciation reposant sur des preuves inadéquates ou sans pertinence (ATF 138 V 74 consid. 7 p. 82; 124 IV 86 consid. 2a p. 87 s.).
Le principe de l'appréciation libre des preuves interdit d'attribuer d'entrée de cause une force probante accrue à certains moyens de preuve, comme des rapports de police (arrêts 6B_353/2015 du 14 décembre 2015 consid. 2; 1P.283/2006 du 4 août 2006 consid. 2.3). On ne saurait toutefois dénier d'emblée toute force probante à un tel document. Celui-ci est en effet, par sa nature, destiné et propre à servir de moyen de preuve, dans la mesure où le policier y reproduit des faits qu'il a constatés et où il est fréquent que l'on se fonde, dans les procédures judiciaires, sur les constatations ainsi transcrites (cf. arrêt 6B_750/2010 du 5 mai 2011 consid. 2.2).
4.2. La recourante se contente de présenter une argumentation purement appellatoire en indiquant que les policiers, en déposant plainte pénale, ont agi comme des personnes privées, ce qui n'est pas contesté. Toutefois, cet argument n'est pas pertinent. La seule question à résoudre est celle de savoir si l'autorité précédente a, par une appréciation arbitraire des preuves, accordé à la version des faits présentée par les deux policiers et verbalisée dans le rapport de police, une force probante qui porterait atteinte à la présomption d'innocence. Or, la recourante n'indique pas en quoi les faits retenus par l'autorité précédente, et notamment la force probante donnée à leurs déclarations, seraient arbitraires. L'autorité précédente a précisé que pour douter de la version des faits provenant d'agents de police assermentés, des indices concrets étaient nécessaires. Elle a souligné que le dossier ne contenait aucun élément qui pourrait contredire la version des agents de police. En particulier, le fait que les policiers n'indiquent pas nommément quels avaient été les tiers dérangés par le comportement de la recourante ou que la plaignante n'ait pas conservé la touffe de cheveux qui lui a été arrachée par la recourante, ne sont pas des éléments de nature à mettre en doute les déclarations des agents de police sur les faits de la cause. Elle pouvait donc sans arbitraire retenir que rien au dossier ne permettait de mettre en doute les déclarations des agents assermentés. Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
5.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, aux frais de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 22 août 2016
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
La Greffière : Cherpillod