BGer 1C_216/2016 |
BGer 1C_216/2016 vom 05.12.2016 |
{T 0/2}
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1C_216/2016
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Arrêt du 5 décembre 2016 |
Ire Cour de droit public |
Composition
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MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
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Eusebio et Kneubühler.
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Greffière : Mme Sidi-Ali.
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Participants à la procédure
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recourant,
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contre
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Département de l'économie et de l'action sociale de la République et canton de Neuchâtel, Le Château, 2001 Neuchâtel 1.
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Objet
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indemnité LAVI,
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recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, du 6 avril 2016.
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Faits : |
A. A.________ a été blessé au cours d'une altercation à la sortie d'un établissement public à Neuchâtel le 28 août 2002. La personne à l'origine de ses blessures a été condamnée par le Tribunal de police du district de Neuchâtel le 12 février 2004. Le 1er mars 2004, A.________ a saisi le département neuchâtelois compétent d'une demande fondée sur la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5) pour 30'000 fr. d'indemnité de tort moral (réduits depuis à 25'000 fr.) ainsi qu'une participation à ses frais d'avocat.
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B. Par décision du 14 novembre 2014, le Département de l'économie et de l'action sociale (DEAS) a rejeté la demande LAVI. La Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a confirmé cette décision par arrêt du 6 avril 2016.
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C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et de renvoyer la cause à l'instance cantonale pour nouvelle décision lui accordant une indemnité pour réparation du tort moral. La cour cantonale se réfère aux motifs de son arrêt et conclut au rejet du recours. Consulté, l'Office fédéral de la justice renonce à prendre position.
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Considérant en droit : |
1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions mentionnées à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant a un intérêt à obtenir l'annulation ou la modification de l'arrêt attaqué qui confirme la décision de rejet de sa requête d'indemnité LAVI (art. 89 al. 1 LTF).
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Les autres conditions de recevabilité énoncées aux art. 82 ss LTF sont remplies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière.
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2. Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu et d'une violation de la maxime inquisitoire en matière de LAVI. Il se prévaut également de l'art. 3 CEDH sans toutefois expliquer en quoi cette disposition consacrant l'interdiction de la torture serait en lien avec le cas d'espèce, de sorte qu'il ne sera pas tenu compte de ce grief, irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).
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Erwägung 2.1 |
2.1.1. La loi fédérale du 23 mars 2007 sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5) est entrée en vigueur le 1er janvier 2009. Elle a abrogé la loi du 4 octobre 1991 (aLAVI; RO 1992 2465). En vertu de l'art. 48 let. a LAVI, le droit d'obtenir une indemnité pour des faits qui se sont déroulés avant l'entrée en vigueur de la loi est régi par l'ancien droit. Applicables à toute personne ayant subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe à son intégrité corporelle, sexuelle ou psychique (art. 2 aLAVI), les art. 11 ss aLAVI prévoient que la victime dont les revenus ne dépassent pas le seuil fixé par la loi peut demander une réparation morale en cas d'atteinte grave et lorsque des circonstances particulières le justifient.
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Comme en matière de responsabilité civile, le droit à l'indemnité au sens de l'aLAVI suppose tout d'abord un lien de causalité naturelle entre l'événement et le dommage (arrêts 1C_244/2015 du 7 août 2015 consid. 3.3; 1C_503/2012 du 3 septembre 2013 consid. 2; 1A.252/2004 du 25 février 2005 consid. 4.2). Savoir si un tel lien existe est une question de fait, généralement d'ordre médical, qui doit être résolue selon la règle du degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit en effet pas que l'existence d'un rapport de cause à effet soit simplement possible ou probable (ATF 139 V 176 consid. 8.4 p. 189 s.; 133 III 462 consid. 4.4.2 p. 470; 126 V 319 consid. 5a p. 322).
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Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, la partie recourante ne peut critiquer la constatation de faits que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte - en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 III 226 consid. 4.2 p. 234) - et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause. Si le recourant entend se prévaloir de constatations de faits différentes de celles de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 97 al. 1 LTF seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui retenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 139 II 404 consid. 10.1 p. 445; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356 et les arrêts cités).
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2.1.2. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend en particulier le droit pour le justiciable de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos.
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Dans le domaine de la LAVI, l'autorité établit les faits d'office (art. 16 al. 2 aOAVI; cf. également art. 29 al. 2 OAVI). Il ne peut être posé d'exigences plus strictes pour la motivation d'une demande d'indemnisation et de réparation au sens des art. 11 ss aOAVI (ATF 129 II 49 consid. 4.1 p. 52; arrêts 1C_165/2014 du 10 décembre 2014 consid. 4.4: 1C_32/2010 du 10 septembre 2010 consid. 3.4 et 3.6.2). Si des éléments du dommage sont insuffisamment motivés dans la demande, il y a lieu de donner à la victime l'occasion de compléter sa demande (arrêts 1C_165/2014 du 10 décembre 2014 consid. 4.4; 1C_32/2010 du 10 septembre 2010 consid. 3.4; 1A.93/2004 du 2 septembre 2004 consid. 5.4.3).
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Le requérant doit en revanche, dans la mesure de l'acceptable, fournir les informations permettant aux autorités d'établir les faits et la justification du droit à l'indemnité. Le devoir de l'autorité d'établir les faits d'office n'exclut pas une obligation de collaboration du requérant. Celui qui dépose une demande doit exposer les faits que lui seul connaît ou qu'il peut connaître sans trop d'efforts. En particulier, la victime doit énoncer les faits fondant son droit avec suffisamment de précision et livrer à l'autorité les informations qui lui permettront de poursuivre l'instruction. Il appartient ainsi à la victime de tenir de telles pièces à disposition de l'autorité ou, à tout le moins, d'indiquer où elles peuvent être obtenues (ATF 126 II 97 consid. 2e p. 101; arrêt 1A.170/2001 du 18 février 2002 consid. 3.3.1, in Pra 2002 n. 104 p. 596).
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2.2. La cour cantonale a retenu que la qualité de victime LAVI et le principe de la réparation avait été reconnus. Elle a toutefois constaté que le recourant présentait un handicap avant l'agression déjà, pour lequel il percevait une rente AI depuis 1999. Il était dès lors nécessaire de déterminer dans quelle mesure son état de santé était en rapport de causalité avec l'altercation de 2002. Selon les constatations des premiers juges, les seules informations figurant au dossier émanent d'un certificat médical succinct qui n'indique pas en quoi l'épilepsie post-traumatique dont souffre le recourant est en lien de causalité avec l'altercation du 28 août 2002. Le recourant connaissant déjà d'importants problèmes de santé avant cet événement vu qu'il bénéficiait alors d'une rente AI, un simple certificat médical n'est effectivement pas suffisant pour distinguer les atteintes corrélées à l'altercation d'autres atteintes à son intégrité. Le recourant se contente à cet égard d'affirmer que le certificat suffirait à démontrer l'existence du lien de causalité, ce qui n'est manifestement pas le cas. Il omet au surplus de discuter l'appréciation de la cour cantonale s'agissant de ses antécédents médicaux préexistant à l'altercation. En d'autres termes, sa critique n'est pas dirigée contre les considérants de l'arrêt attaqué et elle est appellatoire, de sorte que le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il entend déduire des informations au dossier son droit à une indemnité pour tort moral.
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Pour le surplus, il y a lieu de confirmer que la cour cantonale a, dans les circonstances du cas d'espèce, mené l'instruction sans violation de la maxime inquisitoire. Comme on vient de le voir, un complément d'information était nécessaire. Il ressort toutefois de l'arrêt attaqué qu'en 2005, alors que le service cantonal compétent avait imparti un délai (prolongé deux fois) au recourant pour le renseigner, celui-ci n'y avait jamais donné suite. A la suite d'une annulation du classement prononcé par l'autorité administrative, un nouveau délai, à nouveau prolongé deux fois, avait vainement été imparti au recourant pour qu'il produise les pièces médicales établissant le lien de causalité entre son état de santé et l'agression. De même, le recourant n'avait pas donné suite la demande du service compétent de rendre vraisemblable que sa requête satisfaisait au principe de la subsidiarité, ce en dépit des quatre prolongations de délai qui lui avaient été accordées. Le recourant n'a ainsi jamais collaboré à l'instruction et à l'établissement des faits, alors même qu'il était en mesure de transmettre les dossiers médicaux le concernant - cas échéant faire transmettre si, comme il le prétend, il ne supportait pas de prendre connaissance de ces dossiers.
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Le recourant se plaint également d'une violation de son droit d'être entendu du fait que la cour cantonale aurait refusé de procéder à son audition. Or, l'entendre de vive voix n'aurait rien apporté. Cela aurait éventuellement permis à la cour de constater - autant que cela puisse être constaté par simple audition - son état de santé. Mais en aucun cas une telle audition aurait permis de lier les causes et effets de cet état de santé, ce qui est pourtant décisif en l'espèce.
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Ce grief doit par conséquent être écarté.
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3. Le lien de causalité entre l'altercation et les troubles du recourant n'ayant pas été établi, le refus d'accorder une indemnité LAVI est justifié. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner le second grief du recourant, qui reproche à la cour cantonale d'avoir violé le principe de la subsidiarité de la LAVI en retenant qu'il n'avait pas rendu vraisemblable qu'il ne pourrait pas obtenir réparation directement de l'agresseur. L'appréciation de la cour cantonale est certes particulièrement sévère lorsqu'elle considère que le fait que l'agresseur bénéficiait de l'assistance judiciaire dans la procédure pénale ne suffit pas à considérer qu'il n'était pas en mesure d'indemniser sa victime; il est en effet douteux que l'ouverture d'une action devant le juge civil soit indispensable si celle-ci est vouée à l'échec. Cela étant, la vraisemblance de l'insolvabilité de l'agresseur est sans pertinence en l'absence de lien de causalité entre l'état de santé du recourant et les événements du 28 août 2002.
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4. Le recourant se plaint encore du rejet de sa demande d'assistance judiciaire par la cour cantonale. La cour cantonale a retenu que le recourant n'avait pas déposé le formulaire d'assistance judiciaire ni les pièces justificatives dans le délai qui lui avait été imparti (et prolongé). Elle a précisé que le dossier ne comportait pas les éléments qui lui permettraient de statuer. Le recourant se contente d'affirmer qu'il a déposé toutes les pièces justificatives concernant sa situation financière. Il ne démontre pas les avoir adressées au Tribunal cantonal, ni même n'expose les circonstances dans lesquelles il l'aurait fait et les moyens de preuve dont il disposerait pour l'établir. Le recourant ne désigne pas ces pièces dans le dossier, ni n'indique de quelles pièces il s'agirait. Son argumentation est ainsi purement appellatoire et doit être rejetée.
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5. Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les conclusions du recours étant vouées à l'échec, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée sans qu'il soit nécessaire d'examiner la situation financière du recourant, qui n'en a au demeurant pas fait état (art. 64 al. 1 LTF). Le présent arrêt est néanmoins rendu sans frais (art. 30 LAVI; cf. arrêt 1C_845/2013 du 2 septembre 2014 consid. 6.1).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
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3. Le présent arrêt est rendu sans frais.
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4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Département de l'économie et de l'action sociale de la République et canton de Neuchâtel, au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Office fédéral de la justice.
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Lausanne, le 5 décembre 2016
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Fonjallaz
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La Greffière : Sidi-Ali
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