Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
1C_579/2016
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Arrêt du 7 mars 2017
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Fonjallaz et Kneubühler.
Greffière : Mme Sidi-Ali.
Participants à la procédure
A.________, représentée par
Me Jacopo Rivara, avocat,
recourante,
contre
Service cantonal des véhicules de la République et canton de Genève, route de Veyrier 86, 1227 Carouge GE.
Objet
retrait du permis de conduire; respect du délai de recours,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 1er novembre 2016.
Faits :
A.
A.________, titulaire d'un permis de conduire suisse de catégorie B délivré en 1986, conduisait son véhicule automobile le 11 novembre 2014 lorsqu'un accident a eu lieu. Selon le rapport de police établi à cette occasion, la conductrice n'a pas respecté la signalisation lumineuse à la phase rouge et a de ce fait heurté un motocycliste qui a été légèrement blessé.
B.
Par décision du 11 décembre 2014, le service cantonal genevois des véhicules (SCV) a retiré le permis de conduire de l'intéressée pour une durée de trois mois. A.________ a écrit au SCV le 19 décembre 2014 par l'intermédiaire de son avocat. Son conseil indiquait : "j'ai un délai venant à échéance au plus tôt le lundi 12 janvier 2015 pour recourir contre la décision susmentionnée. Je souhaiterais me faire l'économie de cet exercice dans la mesure où vous pourriez soit retirer la décision de retrait du permis de conduire jusqu'à droit jugé au pénal, ou alors la suspendre, en me confirmant que le délai de recours serait également suspendu". Le 23 décembre 2014, le SCV a répondu ce qui suit à l'avocat: "après examen préliminaire de votre dossier nous avons décidé de suspendre la décision du 11 décembre 2014 ainsi que son émolument qui lui est rattaché et vous prions de nous informer des développements de cette affaire sur le plan pénal".
Le 19 janvier 2016, le SCV a confirmé la décision qu'il avait prise le 11 décembre 2014 et fixé les modalités du retrait de permis. Saisi d'un recours contre cette décision, le Tribunal administratif de première instance (TAPI) a confirmé cette décision.
Par arrêt du 1er novembre 2016, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours de l'intéressée contre le jugement du TAPI. Elle a en substance considéré que le recours devant le TAPI était irrecevable car tardif, le délai de recours n'ayant pas pu être suspendu.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et de renvoyer la cause à la Cour de justice pour qu'elle statue sur le fond de l'affaire.
La cour cantonale persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le SCV renonce à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss LTF, est ouverte contre une décision de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) au sujet d'une mesure administrative de retrait du permis de conduire (art. 82 let. a LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par la destinataire de l'arrêt attaqué qui a un intérêt digne de protection à l'annulation de celui-ci (art. 89 al. 1 LTF), le présent recours est recevable.
2.
La recourante se plaint d'une violation du principe de l'interdiction de l'arbitraire dans l'établissement des faits et l'application du droit cantonal. Elle n'expose toutefois pas quels faits retenus par la cour cantonale elle entend contester, son argumentation étant uniquement dirigée contre l'appréciation juridique des faits à laquelle se sont livrés les premiers juges.
2.1. Sous réserve des cas visés à l'art. 95 let. c à e LTF, la violation du droit cantonal ou communal ne constitue pas un motif de recours. Il est néanmoins possible de faire valoir que l'application des dispositions cantonales consacre une violation d'une norme de droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, telle que l'art. 9 Cst. garantissant la protection contre l'arbitraire (ATF 138 V 67 consid. 2.2 p. 69; 134 II 349 consid. 3 p. 351).
Appelé à revoir l'application faite d'une norme cantonale ou communale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 140 III 167 consid. 2.1 p. 168; 138 I 305 consid. 4.3 p. 319; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379).
Les griefs de violation du droit cantonal sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF).
2.2. En l'espèce, dans une argumentation peu étayée, la recourante reproche à la cour cantonale de ne pas avoir constaté l'usage genevois qui permettrait au SCV de "suspendre une décision". Elle se contente toutefois d'affirmer qu'un tel usage ressort du dossier sans en démontrer l'existence. Purement appellatoire, cet argument doit être écarté.
Toujours très succinctement, la recourante énumère différents points qu'elle estime que la cour cantonale aurait à tort négligé de prendre en considération. Selon elle, les juges cantonaux auraient dû analyser les effets de l'acte du 19 janvier 2016 sur celui du 11 décembre 2014, examiner si l'acte du 19 janvier 2016 était une nouvelle décision et déterminer si l'envoi de l'acte du 19 janvier 2016 équivalait à une nouvelle notification de la décision du 11 décembre 2014. La recourante n'expose toutefois pas en quoi le raisonnement de la cour cantonale serait entaché d'arbitraire. Elle se contente d'énumérer les points qu'elle aurait voulu voir examinés sans en indiquer les raisons. Elle ne fait au demeurant valoir aucune violation de son droit d'être entendue faute d'examen d'un ou plusieurs griefs. La motivation de ces allégations est par conséquent insuffisante.
La recourante se réfère enfin à la position des autorités administratives et judiciaire de première instance pour faire valoir que le délai de recours avait bien été tenu pour suspendu. Or, la seule opinion des instances précédentes ne saurait constituer un quelconque moyen de preuve, l'autorité de recours étant précisément amenée à en contrôler le bien-fondé en toute indépendance. On pourrait certes se demander si l'acceptation par actes concluants du SCV de surseoir à sa décision dans l'attente de la fin de la procédure pénale ne signifie pas une entrée en matière sur une demande de réexamen, à l'issue duquel une nouvelle décision, ouvrant une nouvelle voie de recours, serait rendue (cf. MOOR/POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3e éd. 2011, p. 403). La recourante ne le fait toutefois pas valoir (art. 106 al. 2 LTF). Comme on l'a indiqué ci-dessus, elle se contente d'alléguer en une phrase que "la Cour [cantonale] ne s'est pas posé la question de savoir si la décision du 19 janvier 2016 était une nouvelle décision au sens de l'art. 4 LPA". Dans ces conditions, la question de savoir si l'acte du 19 janvier 2016 était une nouvelle décision prise sur réexamen peut demeurer indécise.
3.
Dans un grief distinct, la recourante fait encore valoir une violation du principe de l'économie de procédure.
L'économie de procédure est une maxime dans la gestion de la justice, et non d'un impératif de l'ordre juridique (MOOR/POLTIER, op. cit., p. 265). Le juge dispose en effet d'une importante marge de manoeuvre quant à savoir ce que lui dicte l'économie de procédure (BÉAT BRÄNDLI, Eine Kurze Einführung in die Prozessökonomie, Revue suisse de droit de procédure civile et d'exécution forcée, 2013, p. 249).
Aussi, outre qu'il est manifeste qu'attendre de l'administré qu'il fasse usage d'une voie de droit afin de sauvegarder ses droits ne contrevient pas aux règles de l'économie de procédure, le grief apparaît insuffisamment motivé, la recourante n'exposant pas quelle règle de droit aurait selon elle été violée. Supposé recevable, ce qui est douteux, le grief devait quoi qu'il en soit être écarté.
4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, aux frais de son auteure, qui succombe.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service cantonal des véhicules de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative.
Lausanne, le 7 mars 2017
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
La Greffière : Sidi-Ali