BGer 2C_101/2018 |
BGer 2C_101/2018 vom 26.03.2018 |
2C_101/2018 |
Arrêt du 26 mars 2018 |
IIe Cour de droit public |
Composition
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MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Président,
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Aubry Girardin et Stadelmann.
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Greffier : M. Dubey.
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Participants à la procédure
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X.________,
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représenté par Me Andrio Orler et Me Sarah Busca Bonvin, avocats,
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recourant,
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contre
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Administration fiscale cantonale du canton de Genève.
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Objet
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Impôts cantonal et communal et impôt fédéral direct de la période fiscale 2010, restitution du délai de recours,
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, du 12 décembre 2017 (ATA/1606/2017).
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Considérant en fait et en droit : |
1. Le 15 août 2016, X.________ et son épouse ont recouru contre les décisions de taxation d'office des 25 mars 2015 et 20 mai 2016 de l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève. Les décisions avaient été notifiées à la fiduciaire auprès de laquelle ils avaient fait élection de domicile. Cette dernière leur a transmis dites décisions dès réception en demandant aux contribuables s'ils souhaitaient recourir. Dans le mémoire adressé au tribunal administratif de première instance, ils ont conclu à la restitution du délai de recours, à l'annulation des décisions sur réclamation et au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour fixation du revenu et de la fortune imposables.
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Par jugement du 8 mai 2017, le Tribunal administratif de première instance a déclaré irrecevable le recours, pour cause de tardiveté. L'épouse du recourant aurait valablement pu recourir. Dès lors que ni celle-ci, ni la fiduciaire n'avaient été empêchées d'agir dans le délai de recours, il n'était pas nécessaire d'examiner si l'état de santé du contribuable l'avait empêché d'agir dans le délai légal. Partant, il n'y avait pas lieu de procéder à l'audition de celle-ci et de l'administrateur de la permanence médicale, ni d'ordonner une expertise portant sur l'état de santé du contribuable.
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Le 12 juin 2017, le contribuable a déposé un recours auprès de la Cour de justice du canton de Genève concluant à l'annulation du jugement du 8 mai 2017, au constat de nullité les décisions de taxation d'office des 25 mars 2015 et 20 mai 2016 et subsidiairement au renvoi de la cause devant le Tribunal administratif de première instance pour examen de la demande de restitution du délai. Ce dernier avait violé le droit fédéral en matière de représentation des époux en procédure fiscale et aurait dû instruire et statuer sur la demande de restitution du délai de recours.
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Par arrêt du 12 décembre 2017, la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours que les contribuables ont déposé contre le jugement du 8 mai 2017. Les décisions de taxation d'office n'étaient pas nulles. Laissant ouverte la question des effets des pouvoirs de représentation des époux en procédure de juridiction fiscale, elle a examiné si l'état de santé du contribuable justifiait une restitution, ce qu'elle a tranché par la négative après avoir affirmé que le contribuable ne se plaignait pas de ce que le Tribunal administratif de première instance n'avait pas donné suite à ses offres de preuve. Le certificat médical du 9 août 2016 attestait que le Dr Y.________, «médecin praticien», suivait le contribuable depuis plusieurs mois «pour un état de stress sévère ayant causé des complications médicales». Il n'indiquait cependant pas que l'état de santé du contribuable aurait entraîné une incapacité de celui-ci de s'occuper de ses affaires, en particulier d'instruire son mandataire de recourir contre la décision rendue sur réclamation ni ne précisait la période durant laquelle une telle incapacité aurait existé. Le diagnostic de stress sévère n'avait pas été posé par un médecin-psychiatre.
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2. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, le contribuable demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt rendu le 12 décembre 2017 par la Cour de justice du canton de Genève et de renvoyer la cause au Tribunal administratif de première instance pour qu'il se détermine sur les éléments de preuve requis devant ce dernier. Il se plaint de la constatation manifestement inexacte par l'instance précédente des griefs contenus dans le mémoire de recours qu'il avait déposé devant elle en tant qu'elle avait affirmé qu'il ne s'était pas "plaint de ce que le Tribunal administratif de première instance n'a pas donné suite à ses offres de preuves". Il invoque également une violation de son droit d'être entendu en ce que l'instance précédente n'aurait pas examiné ses offres de preuve.
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La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'Administration fiscale cantonale du canton de Genève conclut au rejet du recours.
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3. Le recourant a démontré conformément aux exigences de l'art. 97 al. 2 LTF que l'instance précédente avait manifestement constaté de manière erronée que le contribuable ne sollicitait plus d'acte d'instruction devant elle ni ne se plaignait de ce que le Tribunal administratif de première instance n'avait pas donné suite à ses offres de preuves. Il ressort en effet du mémoire de recours déposé devant l'instance précédente qu'il s'était plaint de ce que le Tribunal administratif de première instance aurait dû instruire sa demande de restitution du délai et statuer sur cette requête (cf. mémoire de recours, p. 11 et 12) et avait conclu, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause au Tribunal administratif de première instance pour examen de la demande de restitution du délai. Le grief de constatation inexacte des faits sur ce point est admis.
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4. Invoquant l'art. 29 al. 2 Cst., le recourant se plaint de la violation de son droit d'être entendu en particulier de son droit à la preuve.
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4.1. Garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 p. 226; 132 V 387 consid 5.1 p. 390). Il comprend notamment le droit pour l'intéressé d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270). Le droit de faire administrer des preuves suppose que le fait à prouver soit pertinent, que le moyen de preuve proposé soit nécessaire pour constater ce fait et que la demande soit présentée selon les formes et délais prescrits par le droit cantonal. Par ailleurs, la garantie constitutionnelle n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 142 II 218 consid. 2.3 p. 222 s.; 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299).
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4.2. En l'espèce, l'instance précédente ne pouvait pas trancher la cause en se fondant uniquement sur le certificat médical du 9 août 2016 auquel elle a reproché son caractère imprécis et non probant puisqu'il n'émanait pas d'un psychiatre. Elle devait prendre acte des offres de preuves dûment présentées par le recourant devant le Tribunal administratif de première instance et décider, par appréciation anticipée, de leur place dans la procédure et de leur effet sur la demande de restitution du délai, ce qu'elle n'a pas fait, malgré les conclusions et allégations des recourants en procédure de recours devant elle.
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4.3. En omettant fautivement (cf. consid. 3 ci-dessus) de se prononcer sur les offres de preuves et conclusions du recourant relatives à l'examen des causes de restitution du délai de recours, l'instance précédente a violé le droit d'être entendu de celui-ci.
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5. Le recourant conclut au renvoi de la cause devant le Tribunal administratif de première instance plutôt que devant la Cour de justice aux fins de sauvegarder son "droit à un double degré de juridiction". Il ne mentionne toutefois pas les fondements constitutionnel ou légal cantonal (cf. art. 145 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct [LIFD; RS 642.11]) de cette conclusion, que le Tribunal ne peut pas examiner d'office au vu de l'art. 106 al. 2 LTF. La cause est donc renvoyée à l'instance précédente.
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6. Les considérants qui précédent conduisent à l'admission du recours en application de la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. b LTF, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Cour de justice du canton de Genève. Succombant dans l'exercice de ses attributions officielles, le canton de Genève, dont l'intérêt patrimonial est en cause, doit supporter les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 et 4 LTF) et verser une indemnité de dépens au recourant qui obtient gain avec l'aide de mandataires professionnels (art. 68 al.1 et 2 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est admis, l'arrêt rendu le 12 décembre 2017 est annulé et la cause renvoyée à l'instance précédente.
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2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du canton de Genève.
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3. Le canton de Genève versera une indemnité de dépens de 2'000 fr. au recourant.
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4. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, à l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions.
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Lausanne, le 26 mars 2018
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Seiler
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Le Greffier : Dubey
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