Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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6B_1171/2017
Arrêt du 12 avril 2018
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer.
Greffière : Mme Klinke.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Stéphane Riand, avocat,
recourant,
contre
1. Ministère public du canton du Valais,
2. A.________,
représenté par Me Stéphane Coudray, avocat,
intimés.
Objet
Lésions corporelles simples; arbitraire; légitime défense,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II, du 22 septembre 2017 (P1 16 15).
Faits :
A.
A la suite d'une altercation, X.________ a porté plainte pour lésions corporelles simples et/ou graves contre A.________, B.________ et C.________. A.________ a déposé plainte contre X.________ pour lésions corporelles simples et injure. Le 2 avril 2014, le Ministère public a classé les procédures pénales ouvertes contre C.________ et B.________. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.
B.
Par jugement du 25 janvier 2016, le juge III des districts d'Hérens et de Conthey a acquitté A.________ du chef de lésions corporelles simples. Il a reconnu X.________ coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP) et d'injure (art. 177 al. 1 CP) et l'a condamné à une peine pécuniaire de vingt jours-amende à 75 fr. l'unité, avec sursis, ainsi qu'à une amende additionnelle de 400 francs.
C.
Statuant sur appel de X.________, le Tribunal cantonal du Valais, Cour pénale II, l'a très partiellement admis, par jugement du 22 septembre 2017, et ramené la peine pécuniaire à seize jours-amende, à 10 fr. l'unité, avec sursis, et la peine additionnelle à 40 francs. Pour le surplus, elle a confirmé la décision de première instance.
La cour cantonale s'est en substance fondée sur les faits suivants.
Le 4 mai 2012, en fin de soirée, X.________ et A.________ ont eu une altercation violente dans un bar à D.________. Le premier nommé a proféré des insultes à l'endroit du second puis; invité à quitter l'établissement, il a refusé, manifestant sa volonté d'en découdre. A.________ l'a empoigné pour le faire sortir et l'altercation s'est poursuivie à l'extérieur de l'établissement public. Durant la bagarre, X.________ a mordu le doigt de A.________, lui causant une double plaie à l'articulation interphalangienne distale de l'annulaire droit.
Un certificat médical constate que cette blessure pouvait bien correspondre à une morsure et atteste une incapacité de travail au taux de 80% du 5 mai au 18 mai 2012.
D.
X.________ forme un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral contre la décision cantonale et conclut, avec suite de frais et dépens, à son acquittement du chef de lésions corporelles simples et au renvoi du dossier à la cour cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire.
Considérant en droit :
1.
Le recourant s'en prend exclusivement à sa condamnation du chef de lésions corporelles simples. Il ne forme aucun grief contre l'acquittement de l'intimé, ni contre sa condamnation du chef d'injure.
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits et dans l'appréciation des preuves.
1.1. Le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable, et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 142 II 369 consid. 4.3 p. 380; 141 IV 305 consid. 1.2 p. 308 s.). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références citées). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368 et les références citées).
1.2. Se fondant sur les déclarations concordantes de l'intimé et des autres personnes présentes dans le bar, en particulier le témoin E.________, la cour cantonale a retenu que la situation avait dégénéré en raison des insultes proférées par le recourant à l'endroit de l'intimé et de sa volonté de ne pas quitter l'établissement public mais, au contraire, d'en découdre. Le recourant avait d'ailleurs reconnu avoir traité l'intimé de " fils de pute ", en rétractant cet aveu dix-huit mois plus tard.
S'agissant du déroulement de l'altercation survenue à l'extérieur de l'établissement public, la cour cantonale a écarté la version du recourant, livrée pour la première fois en appel, selon laquelle l'intimé lui avait donné des coups de pied au niveau des genoux. Auditionné les 28 juin et 17 septembre 2012 et le 25 mars 2014, le recourant avait indiqué que seuls C.________ et B.________ lui avaient asséné des coups de pied aux genoux, alors que l'intimé se limitait à le tenir. Il avait confirmé ce récit des événements en première instance. Ce n'est qu'en appel qu'il avait changé de version. Dès lors que ces explications nouvelles apparaissaient dictées par les besoins de la cause, la cour cantonale ne les a pas retenues.
S'agissant de la blessure de l'intimé, la cour cantonale a exclu la version du recourant, selon laquelle il avait serré les dents sur le doigt placé dans la bouche par l'intimé qui lui tenait la tête. En effet, eu égard à cette prise, il était peu probable que l'intimé eut mis son annulaire dans la mâchoire du recourant. Elle a retenu que, durant l'altercation, le recourant avait, avec conscience et volonté, saisi et serré avec les dents l'annulaire de l'intimé. Elle a exclu la volonté du recourant de se défendre d'une attaque par ce geste.
1.3. Il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur l'exposé des faits que présente librement le recourant en tête de son mémoire, en s'écartant de ceux retenus dans la décision entreprise et sans tenter de démontrer qu'ils auraient été établis de manière arbitraire (cf. art. 106 al. 2 LTF).
Le recourant est irrecevable à demander à la cour de céans, la production par le tribunal cantonal, de l'intégralité du dossier relatif à l'affaire " MP c/ X.________ ", sans aucune motivation (cf. art. 42 al. 2 LTF).
Se référant à un certificat médical attestant de lésions subies au genou, le recourant affirme que sa description des faits est la seule cohérente, contrairement à celles des prévenus ayant fait l'objet de décisions de classement et à celle de l'intimé. Ce faisant, il procède de manière purement appellatoire, partant irrecevable, et omet que la cour cantonale s'est essentiellement fondée sur les déclarations du témoin E.________ et non exclusivement sur celles de ses prétendus assaillants. En outre, il ne s'en prend nullement aux motifs justifiant que sa version des faits soit écartée (art. 42 al. 2 LTF). C'est à tort que le recourant affirme que, selon les faits retenus par la cour cantonale, il aurait volontairement et sans raison mordu l'intimé, alors même qu'il n'était ni
" assailli ", ni
" objet de la moindre altercation ", dès lors qu'il ressort expressément des faits établis que le recourant et l'intimé se sont livrés à une altercation. L'acquittement de l'intimé, lequel ne fait l'objet d'aucun grief du recourant, repose sur le fait qu'il n'a pas donné de coups au recourant ayant causé les lésions dont il se prévaut (entorse simple du genou droit) et sur le classement des procédures dirigées contre C.________ et B.________. Or l'acquittement n'exclut pas l'existence d'une altercation. Aussi, le recourant échoue à démontrer une contradiction arbitraire dans l'établissement des faits.
Ses griefs relatifs au déroulement des événements doivent être rejetés dans la mesure de leur recevabilité.
2.
Le recourant conteste la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction de lésions corporelles simples.
2.1. Selon l'art. 123 ch. 1 CP, celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
A teneur de l'art. 12 al. 2 CP, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait.
Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé, voulu ou accepté relève du contenu de sa pensée, à savoir de faits " internes ", partant, des constatations de fait (ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375 et les références citées).
2.2. En retenant que le recourant avait, avec conscience et volonté, saisi le doigt de l'intimé et l'avait mordu, la cour cantonale a considéré qu'il avait agi intentionnellement.
2.3. Pour dénier sa volonté de porter atteinte à l'intégrité physique de l'intimé, le recourant se fonde sur la prémisse erronée selon laquelle la cour cantonale aurait considéré qu'il n'avait pas agi intentionnellement mais par
" geste réflexe ". Or, si elle a effectivement retranscrit les déclarations du recourant relatives au geste, la cour cantonale ne les a pas tenues pour établies sous l'angle de la conscience et volonté, de sorte que le recourant ne saurait rien en déduire.
Pour le reste, il ne prétend ni n'établit que la cour cantonale aurait violé le droit fédéral en retenant qu'il avait consciemment et volontairement saisi et serré avec les dents, le doigt de l'intimé.
2.4. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir admis la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction de lésions corporelles simples tout en niant l'intention de se défendre, sous l'angle de la légitime défense (art. 15 CP) et dénonce un raisonnement contradictoire. Or l'intention de porter atteinte à l'intégrité physique d'autrui ne se confond pas avec la volonté et le dessein de se défendre d'une attaque au sens de l'art. 15 CP (cf. infra consid. 3.1). Ainsi, si la cour cantonale a considéré que le recourant n'avait pas mordu l'intimé dans le but de se défendre, le recourant ne saurait en déduire une absence d'intention de porter atteinte à l'intégrité physique de l'intimé.
Le recourant ne remet pas en cause les autres éléments de réalisation de l'infraction. Sur la base des faits retenus, dont l'arbitraire n'a pas été démontré, la cour cantonale pouvait, sans violer le droit fédéral, considérer que l'art. 123 ch. 1 CP était réalisé.
3.
On comprend du recours que le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas l'avoir mis au bénéfice du motif justificatif de la légitime défense.
3.1. A teneur de l'art. 15 CP, quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances; le même droit appartient aux tiers.
La légitime défense suppose une attaque, c'est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un bien juridiquement protégé, ou la menace d'une attaque, soit le risque que l'atteinte se réalise. Il doit s'agir d'une attaque actuelle ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l'atteinte soit effective ou qu'elle menace de se produire incessamment (arrêt 6B_600/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.1 non publié in ATF 141 IV 61; cf. également ATF 106 IV 12 consid. 2a p. 14). L'acte de celui qui est attaqué ou menacé de l'être doit tendre à la défense. Un comportement visant à se venger ou à punir ne relève pas de la légitime défense. Il en va de même du comportement qui tend à prévenir une attaque certes possible mais encore incertaine, c'est-à-dire à neutraliser l'adversaire selon le principe que la meilleure défense est l'attaque (ATF 93 IV 81 p. 83; plus récemment: arrêt 6B_130/2017 du 27 février 2018 consid. 3.1).
Peut se prévaloir de la légitime défense, l'auteur qui agit avec conscience et volonté dans le dessein de détourner une attaque (ATF 104 IV 1 consid. a p. 2).
3.2. Relevant que, lors de ses différents interrogatoires, le recourant n'avait pas prétendu qu'il entendait, par sa morsure, faire lâcher prise à l'intimé mais qu'il avait agi en réaction à la douleur, la cour cantonale a exclu le motif justificatif de la légitime défense. Le recourant n'était dès lors pas animé par l'intention de se défendre d'une attaque lorsqu'il a porté atteinte à l'intégrité physique de l'intimé. Dans une seconde motivation, la cour cantonale a estimé qu'à défaut d'excès de légitime défense (illégitime) de l'intimé, le recourant ne pouvait se prévaloir du motif justificatif, même s'il l'avait mordu dans l'intention de se défendre, par exemple pour faire lâcher prise à l'assaillant.
Dans un tel cas, lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, toutes suffisantes pour sceller le sort de la cause, la partie recourante doit, sous peine d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'elles est contraire au droit (cf. ATF 138 I 97 consid. 4.1.4 p. 100 et arrêts cités).
3.3. Faute pour le recourant de s'en prendre à la motivation subsidiaire, suffisante pour sceller le sort de la cause, en particulier pour exclure la légitime défense, son grief est irrecevable. En tout état, le recourant ne conteste pas avoir provoqué l'altercation et n'établit pas avoir fait l'objet d'une attaque actuelle ou imminente dont il entendait se défendre en mordant l'intimé. Il ne tente pas de démontrer en quoi son geste tendait à la défense, contrairement à ce qui a été retenu en instance cantonale. Cela étant, c'est sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a exclu la légitime défense.
4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recours était voué à l'échec, de sorte que l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires, dont la quotité tiendra compte de la situation financière du recourant, sont mis à la charge de ce dernier (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II.
Lausanne, le 12 avril 2018
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
La Greffière : Klinke