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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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1B_359/2018
Arrêt du 14 août 2018
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Eusebio et Kneubühler.
Greffière : Mme Sidi-Ali.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Philippe Rossy, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
Objet
Détention provisoire,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 2 juillet 2018 (503 PE18.008499-CPB).
Faits :
A.
A.a. L'extrait du casier judiciaire suisse de A.________, ressortissant de Côte d'Ivoire, au bénéfice d'un permis C, fait état des condamnations suivantes:
- 18 novembre 2010: 10 jours-amende à 30 fr. et amende de 300 fr. pour recel et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants;
- 22 septembre 2011: 90 jours-amende à 30 fr. dont 45 jours avec sursis pendant 3 ans pour violation des règles de la circulation routière (conducteur se trouvant dans l'incapacité de conduire - taux d'alcoolémie qualifié -, conduite sans permis de conduire ou malgré un retrait) et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants;
- 10 janvier 2012: 30 jours-amende à 30 fr. pour circuler sans assurance responsabilité civile et usage abusif de permis et/ou de plaques de contrôle;
- 31 janvier 2013: 50 jours-amende à 30 fr. et 900 fr. d'amende pour conducteur se trouvant dans l'incapacité de conduire (alcool et autres raisons) et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants;
- 21 mai 2015: peine privative de liberté de neuf mois, 15 jours-amende à 20 fr. et 600 fr. d'amende pour violation simple et grave des règles de la circulation routière (conducteur se trouvant dans l'incapacité de conduire - taux d'alcoolémie qualifié -, conduite d'un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis), contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et opposition aux actes de l'autorité;
Le Ministère public a en outre engagé l'accusation devant le Tribunal correctionnel de Lausanne contre l'intéressé par actes d'accusation du 31 mai 2017 et du 27 février 2018, pour lésions corporelles graves (subsidiairement simples) par négligence, vol, dommages à la propriété, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, violation grave et violation grave qualifiée des règles de la circulation routière, conduite en présence d'un taux d'alcool qualifié dans le sang ou dans l'haleine et malgré l'incapacité de conduire, tentative de dérobade aux mesures visant à déterminer l'incapacité de conduire, conduite d'un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis, infraction et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur les étrangers pour des faits qui auraient été commis entre mai 2013 et décembre 2017.
A.b. Le 3 mai 2018, le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois a ouvert une instruction pénale contre A.________ pour mise en danger de la vie d'autrui, lésions corporelles simples, contrainte et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Il lui est en substance reproché d'avoir consommé un gramme de cocaïne le 2 mai 2018. Puis, le lendemain, vers 18h00, après avoir consommé de l'alcool toute la journée avec un ami et B.________, son ex-compagne avec laquelle il partageait encore un logement, il aurait à deux reprises saisi celle-ci à la gorge, d'une seule main, alors qu'elle se trouvait au sol, l'empêchant de respirer et lui causant des marques au cou. Il se serait également assis sur elle de telle sorte qu'elle se serait débattue. Il l'aurait ensuite encore empêchée de sortir du logement durant plusieurs minutes alors qu'elle avait manifesté sa volonté de le faire, en lui bloquant l'accès à la porte d'entrée, seule l'intervention de l'ami présent dans le logement ayant permis à celle-ci de sortir.
La police est intervenue sur les lieux et a appréhendé A.________, qui est détenu depuis lors.
B.
Le 4 mai 2018, le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois a adressé au Tribunal des mesures de contrainte une demande de mise en détention provisoire de A.________ pour une durée de trois mois en raison des faits exposés ci-dessus. Il faisait valoir un risque que le prévenu commette de nouvelles infractions.
Par ordonnance du 5 mai 2018, le Tribunal des mesures de contrainte a ordonné la détention provisoire du prévenu jusqu'au 5 juin 2018, soit une semaine après l'audience appointée devant le Tribunal correctionnel.
L'audience devant le Tribunal correctionnel ayant été annulée en raison de l'enquête ouverte après les événements des 2 et 3 mai 2018, le prévenu a formé une demande libération de sa détention provisoire le 7 mai 2018.
Le 22 mai suivant, alors qu'il avait déjà conclu au rejet de la demande de libération du prévenu, le Ministère public a requis la prolongation de la détention provisoire pour une durée de trois mois.
Par ordonnance du 28 mai 2018, le Tribunal des mesures de contrainte a rejeté la demande de libération de la détention provisoire du prévenu et a ordonné la prolongation de cette détention pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 5 août 2018.
Les 10 et 11 juin 2018, la défense a adressé au Tribunal des mesures de contrainte une demande de mise en liberté. Le Ministère public a conclu au rejet de la demande et précisé que l'audience devant le Tribunal correctionnel avait été fixée au 11 septembre 2018.
C.
Par ordonnance du 20 juin 2018, le Tribunal des mesures de contrainte a rejeté la demande de libération de la détention provisoire du prévenu.
Par arrêt du 2 juillet 2018, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit pénal, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que l'ordonnance du 20 juin 2018 du Tribunal des mesures de contrainte est annulée et sa libération est immédiatement ordonnée. Subsidiairement, le recourant conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi du dossier à l'autorité de première instance ou de seconde instance pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre les décisions relatives à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. Formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF), le recours en matière pénale est recevable.
2.
Le recourant conteste que les conditions de la détention provisoire, en particulier le risque de récidive, soient réalisées.
2.1. Une mesure de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH).
Selon l'art. 221 al. 1 let. c CPP, la détention provisoire peut être ordonnée lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu "compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre". Selon la jurisprudence, il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation du risque de récidive: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le pronostic est très défavorable et si les délits dont l'autorité redoute la réitération sont graves (ATF 137 IV 13 consid. 4.5 p. 21; 135 I 71 consid. 2.3 p. 73; 133 I 270 consid. 2.2 p. 276 et les arrêts cités).
Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3-4 p. 18 ss; cf. arrêt 1B_133/2011 du 12 avril 2011 consid. 4.7). Le risque de récidive peut également se fonder sur les infractions faisant l'objet de la procédure pénale en cours, si le prévenu est fortement soupçonné - avec une probabilité confinant à la certitude - de les avoir commises (ATF 137 IV 84 consid. 3.2 p. 86).
La gravité de l'infraction dépend, outre de la peine menace prévue par la loi, de la nature du bien juridique menacé et du contexte, notamment la dangerosité présentée concrètement par le prévenu, respectivement son potentiel de violence. La mise en danger sérieuse de la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves peut en principe concerner tous types de biens juridiquement protégés. Ce sont en premier lieu les délits contre l'intégrité corporelle et sexuelle qui sont visés (ATF 143 IV 9 consid. 2.7 p. 15).
Pour établir le pronostic de récidive, les critères déterminants sont la fréquence et l'intensité des infractions poursuivies. Cette évaluation doit prendre en compte une éventuelle tendance à l'aggravation telle qu'une intensification de l'activité délictuelle, une escalade de la violence ou une augmentation de la fréquence des agissements. Les caractéristiques personnelles du prévenu doivent en outre être évaluées (ATF 143 IV 9 consid. 3.2 p. 13; 137 IV 84 consid. 32 p. 86; arrêt 1B_455/2016 du 9 décembre 2016 consid. 3.1).
2.2. Il y a lieu de confirmer dans le cas présent l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle, au stade de l'examen de conditions à la détention provisoire, la version des faits de la victime doit être préférée à celle du recourant. Il apparaît ainsi que celui-ci a mis à terre son ex-compagne, à qui il avait serré la gorge à deux reprises. Comme l'a relevé la cour cantonale, que les déclarations de l'ami présent dans l'appartement ne permettent pas de confirmer ces faits n'y change rien, le témoin ayant précisé ne pas avoir assisté au début de l'altercation. Des marques de strangulation ont au demeurant été observées par la police lors de son intervention. Quant à l'appréciation de la gravité de ces actes, on ne saurait suivre le recourant qui allègue de façon purement appellatoire qu'il n'est pas notoire que le fait de serrer le coup de quelqu'un puisse avoir des conséquences létales.
Le fait que l'altercation soit intervenue dans un contexte de conflit relationnel et que les intéressés ne vivent désormais plus ensemble ne permet en outre pas de remettre en cause l'évaluation du risque de récidive opérée par les instances précédentes. En effet, quand bien même les très nombreuses condamnations antérieures ainsi que les faits que le recourant est soupçonné d'avoir commis dans le cadre des autres enquêtes pénales en cours sont liés à des infractions d'un autre genre, à savoir essentiellement des infractions en matière de stupéfiants et en matière de circulation routière, force est de constater qu'il y a eu gradation progressive dans la gravité de ces actes. En outre le comportement général du recourant - en particulier vu les faits supposés ressortant de l'acte d'accusation du 31 mai 2018 - dénote un mépris pour la vie ou à tout le moins l'intégrité corporelle d'autrui. En effet, entre autres, il aurait, pour échapper à un contrôle de police, conduit en ville a une vitesse estimée entre 80 et 150 km/h, course qui s'est terminée par un accident dans lequel les occupants du véhicule ont tous été blessés. Il aurait par ailleurs menacé à deux reprises un agent de police de le frapper et le tuer. A cela s'ajoutent des violences régulières supposées à l'égard de son ex-compagne que la cour cantonale a tenues pour vraisemblables et que le recourant ne conteste apparemment pas.
Pour s'écarter de la lettre de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, conformément à la jurisprudence citée ci-dessus, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble de circonstances. La gravité est un élément - retenue ici à l'aune du degré de vraisemblance requis pour le juge de la détention - auquel s'ajoutent d'autres, comme les particulièrement nombreux antécédents du recourant. Ceux-ci, s'ils ne concernent pas des infractions de même genre, concernent dans plusieurs cas une mise en danger, voire une atteinte aux mêmes biens juridiquement protégés que dans la présente procédure, savoir l'intégrité corporelle et la vie d'autrui. Enfin, les considérations plus générales de la cour cantonale s'agissant d'un pronostic défavorable à la lumière de la personnalité et du parcours du recourant doivent être confirmées: ainsi l'absence totale de volonté de se conformer à l'ordre juridique ou la dépendance à l'alcool et aux drogues sous l'emprise desquels la plupart des infractions en cause auraient été commises.
Compte tenu de ce qui précède, il a y lieu de confirmer l'appréciation des juges cantonaux, qui ont correctement appliqué l'art. 221 CPP, en jugeant le maintien du prévenu en détention provisoire bien-fondé.
3.
Le recours est dès lors rejeté et l'arrêt attaqué confirmé. Les conditions posées à l'art. 64 al. 1 LTF étant réunies, il convient de mettre le recourant au bénéfice de l'assistance judiciaire, de lui désigner Me Philippe Rossy comme avocat d'office et d'allouer à celui-ci une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du tribunal. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF)
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Philippe Rossy est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
Lausanne, le 14 août 2018
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
La Greffière : Sidi-Ali